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99 23 12 PATENAUDE, Paul ci-après appelé le « demandeur » c. LE PROTECTEUR DU CITOYEN ci-après appelé « l'organisme » OBJET DU LITIGE Le 26 novembre 1999, le demandeur s'adresse au responsable de l'accès de l'organisme, par l'entremise de son procureur, afin d'obtenir copie complète de son dossier. Le responsable reçoit cette demande le 29 novembre qui suit. Le 14 décembre suivant, le responsable énumère les 45 groupes de documents qui se trouvent au dossier visé par la demande, parmi lesquels il identifie ceux qu'il rend accessibles et ceux qu'il considère inaccessibles, dont entre autres, une partie du document suivant qu'il retient pour les motifs exprimés en ces termes : [...] Copie de six pages (1 à 3, et 9 à 11) d'un rapport d'enquête en contenant onze pages, portant la mention « Annexe 3 », concernant votre client, signé « Pierre Ménard », de la Sûreté du Québec, daté du 20 janvier 1997. Ces six pages proviennent de votre client et sont donc déjà en sa possession, aussi je ne vous en donne pas copie. Par ailleurs, le dossier 98-60388 contient cinq autres pages de ce rapport (pages 4 à 8 du rapport) qui ont été extraites par le responsable de l'accès aux documents qui a traité la demande d'accès à ce rapport présentée antérieurement par votre client. Ces cinq pages extraites n'ont pas été communiquées à votre client lors de sa demande d'accès. À l'égard de ces cinq pages, votre demande relève davantage, au sens des articles 47 et 48 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels[ (1) ], du ministère de la Sécurité publique. Ces cinq pages sont en outre non accessibles par application de l'article 24 de la Loi sur le Protecteur du citoyen[ (2) ], qui décrète que les interventions et enquêtes de ce dernier sont de nature privée. Aussi, je ne vous donne pas copie de ces cinq pages qui n'ont pas été communiquées à votre client. (sic) (les mentions entre crochets sont de la soussignée)
Le demandeur se prévaut de son droit de révision de cette décision et une audience se tient, le 17 août 2000, aux bureaux de la Commission sis en la Ville de Montréal. L'AUDIENCE La procureure de l'organisme témoigne sous son serment d'office. Elle remet à la Commission, sous pli confidentiel, les cinq pages manquantes ( 4, 5, 6, 7 et 8) du rapport de l'agent Pierre Ménard. Elle déclare qu'elle connaît bien le dossier du demandeur chez l'organisme puisque c'est elle qui a mené l'enquête résultant de la plainte. Devant les questionnements du demandeur au sujet de la page 9 du rapport (qui suit la page 8 en litige) et qu'il a reçu, elle affirme que les documents transmis au demandeur sont des copies exactes de ce qui se trouvait au dossier visé par la demande d'accès. La page 9 dudit rapport qui, aux yeux du demandeur, paraît avoir été élaguée, est la copie conforme de la page 9 qui se trouve au dossier de l'organisme. Les parties déclarent que le refus d'accès aux pages 4 à 8 de ce rapport constitue le litige devant la Commission. Cette partie du rapport contient les déclarations recueillies de plusieurs personnes physiques par l'enquêteur Ménard. La procureure de l'organisme plaide que le contenu des déclarations en litige constituent des renseignements nominatifs concernant les personnes déclarantes et même si leurs nom, prénom, adresse et numéro de téléphone étaient masqués, le demandeur pourrait identifier ces personnes en raison du contenu des déclarations, c'est-à-dire des opinions, faits et circonstances y relatés. Elle soutient qu'en vertu des articles 24 et 34 de la LPC, les enquêtes de l'organisme sont privées et les documents obtenus dans l'exercice de ce pouvoir d'enquête sont confidentiels : 24. L'intervention du Protecteur du citoyen est conduite privément. Elle peut comporter une enquête s'il le juge à propos. 34. Malgré toute loi au contraire, nul ne peut être contraint de faire une déposition portant sur un renseignement qu'il a obtenu dans l'exercice de la fonction de Protecteur du citoyen ou d'adjoint, de fonctionnaire ou d'employé de ce dernier, ni de produire un document contenant un tel renseignement. Malgré l'article 9 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (chapitre A-2.1), nul n'a droit d'accès à un tel document. En réponse à une question de la soussignée, elle représente que l'article 28 de la Loi n'est pas applicable en l'espèce puisque la personne qui a signé le rapport d'enquête, bien que membre du corps de police de la Sûreté du Québec, n'agissait pas en qualité de personne chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime lorsqu'il a cueilli les renseignements en litige.
DÉCISION La demande d'accès en cause est régie par les articles 83 et suivants de la Loi. Les dispositions pertinentes à la solution du présent litige sont les articles 83, 88, 53, paragraphe 1°, 54 et 14: 83. Toute personne a le droit d'être informée de l'existence, dans un fichier de renseignements personnels, d'un renseignement nominatif la concernant. Elle a le droit de recevoir communication de tout renseignement nominatif la concernant. Toutefois, un mineur de moins de quatorze ans n'a pas le droit d'être informé de l'existence ni de recevoir communication d'un renseignement nominatif de nature médicale ou sociale le concernant, contenu dans le dossier constitué par l'établissement de santé ou de services sociaux visé au deuxième alinéa de l'article 7. 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 4 o de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement nominatif concernant une autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement, à moins que cette dernière n'y consente par écrit. 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1 o leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2° [...] 54. Dans un document, sont nominatifs les renseignements qui concernent une personne physique et permettent de l'identifier. 14. Un organisme public ne peut refuser l'accès à un document pour le seul motif que ce document comporte certains renseignements qu'il doit ou peut refuser de communiquer en vertu de la présente loi. Si une demande porte sur un document comportant de tels renseignements, l'organisme public peut en refuser l'accès si ces renseignements en forment la substance. Dans les autres cas, l'organisme public doit donner accès
au document demandé après en avoir extrait uniquement les renseignements auxquels l'accès n'est pas autorisé. J'ai pris connaissance du document en litige. Il contient des renseignements personnels concernant le demandeur. Ces renseignements sont contenus dans des déclarations de personnes physiques rapportées par l'enquêteur. Apparaissent les nom, prénom, adresse et numéro de téléphone des déclarants, suivis de leur déclaration. Je suis d'avis que le masquage des renseignements d'identité seulement ne suffirait pas à cacher au demandeur l'identité des déclarants en raison des faits, circonstances et opinions que révèle le texte des déclarations. Je ne peux voir comment l'organisme pourrait, sans le rendre totalement inintelligible, élaguer du texte des déclarations les faits, circonstances et opinions révélateurs. Le simple fait d'être identifié comme déclarant dans un contexte d'enquête sur le caractère d'une personne est en lui-même un renseignement nominatif sur le déclarant et l'organisme doit en refuser l'accès au demandeur en application de l'article 88 de la Loi. Vu la conclusion à laquelle j'arrive, il n'est pas nécessaire que la Commission d'accès à l'information se prononce sur l'application des autres dispositions législatives soulevées par l'organisme. POUR TOUS CES MOTIFS, la Commission REJETTE la demande de révision. Québec, le 4 décembre 2000 DIANE BOISSINOT Commissaire Procureure de l'organisme : M e Micheline McNicoll 1. L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée « Loi sur l'accès » ou « la Loi ». 2. L.R.Q., c. P-32, ci-après appelée la « LPC ».
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