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99 19 07 BOURBEAU, Diane ANGERS, Gilles

ci-après appelés «les demandeurs» c. VILLE DE VAL-BÉLAIR

ci-après appelée «l'organisme»

Les demandeurs sont membres du conseil de l'organisme; ils se sont adressés à la responsable de l'accès aux documents de celui-ci, le 10 septembre 1999, afin d'obtenir copie des documents suivants :

«avis juridique en lien avec la résolution No 99-0474 : ouverture des soumissions sur invitation et octroi du contrat - amorce rue Guillebert et avenue du Golf (cf procès verbal de l'assemblée extraordinaire du 2 septembre 1999). Cet avis avait été demandé avant l'assemblée ordinaire du 7 juin 1999. Monsieur Claude Beaudoin a confirmé avoir reçu cet avis lorsqu'interrogé à ce sujet à la séance extraordinaire du 2 septembre dernier.

la 2ième partie du rapport de la firme d'experts conseil Mallette Maheu concernant l'optimisation des ressources de la ville de Val Bélair. Comme vous le savez sans doute, un rapport d'étape a été produit le 26 août 1998. Nous savons qu'un deuxième rapport a été reçu par la ville. D'ailleurs, dans la liste de trésorerie, un chèque (#49258) a été fait à la firme Mallette Maheu en date du 2 mars 1999 au montant de 4485.98$. On y fait référence à la résolution No 98-0126 par laquelle le Conseil de ville a mandaté cette firme pour produire l'étude concernant l'optimisation des ressources.

Nous savons par ailleurs qu'en tant que membres du Conseil de ville, nous pouvons avoir accès à ces documents même s'ils n'ont pas été rendus publics...».

La responsable a refusé d'acquiescer à leur demande. Elle a expliqué que l'avis juridique avait été remis au maire de l'organisme à titre confidentiel et qu'il n'avait pas été déposé publiquement lors d'une assemblée du conseil; elle a ajouté que les avis juridiques ne sont pas accessibles puisqu'ils sont protégés par le secret professionnel ainsi que par les articles 31, 35 et 37 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.

La responsable a indiqué, en ce qui concerne le rapport en litige, que ce document n'avait pas été déposé publiquement et que les articles 32, 34 et 37 de la même loi recevaient application.

La révision de ce refus, daté du 30 septembre 1999, est requise auprès de la Commission, les demandeurs prétendant que les documents en litige sont nécessaires à l'exercice de leurs fonctions de membres du conseil de l'organisme.

Les parties sont entendues le 15 mai 2000. Les documents en litige me sont alors remis par la procureure de l'organisme.

PREUVE et ARGUMENTATION : La procureure de l'organisme soumet préliminairement que si la Commission devait conclure que la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels n'est pas opposable aux élus, elle devrait également conclure qu'elle n'a pas compétence pour entendre la requête des demandeurs; la procureure réserve conséquemment son objection quant à la compétence de la Commission.

Elle soumet également qu'une erreur cléricale s'est glissée dans la décision de la responsable et que cette erreur peut être rectifiée(1).

Elle fait entendre madame Louisette Dompierre qui témoigne sous serment. Madame Dompierre affirme être directrice du service des communications de l'organisme depuis 10 ans et responsable de l'accès depuis 1 an et demi; elle ajoute occuper le poste de greffier-adjoint.

Elle mentionne avoir traité la demande d'accès comme suit : après en avoir accusé réception auprès des demandeurs, elle a, le 28 septembre 1999, demandé à la greffière de l'organisme, madame Suzanne Pâquet, de lui transmettre copie de l'avis juridique en litige (O-1); le 30 septembre 1999, madame Pâquet lui a indiqué qu'après vérification, cet avis juridique n'avait pas été déposé au service du greffe et qu'il y aurait lieu de s'informer directement auprès du Cabinet du maire (O-2); les recherches qu'elle a fait effectuer indiquent que cet avis juridique n'était pas, non plus, conservé aux archives de l'organisme.

Madame Dompierre explique qu'elle a aussi requis, auprès des procureurs de l'organisme, une opinion concernant les règles régissant l'accès aux 2 documents en litige. Cette opinion (O-3), déposée sous pli confidentiel et datée du 29 septembre 1999, indique que les articles 31, 34 et 37 de la Loi sur l'accès peuvent être invoqués au soutien du refus de communiquer l'avis juridique en litige; elle souligne avoir, par erreur et au lieu de l'article 34 de la même loi, invoqué l'article 35, qui concerne le refus de communiquer des mémoires de délibérations, avec les articles 31 et 37. Elle affirme que l'inscription, dans sa réponse aux demandeurs, de l'article 35 au lieu de l'article 34 de la Loi sur l'accès, constitue une erreur cléricale.

Madame Dompierre explique par ailleurs avoir refusé de communiquer le rapport en litige en vertu des articles 32, 34 et 37 de la Loi sur l'accès alors que l'opinion des procureurs de l'organisme indiquait que ce document pouvait être refusé en vertu des articles 32, 34, 37 et 39 de cette loi; elle a, ajoute-t-elle, «involontairement oublié» d'invoquer l'article 39.

Elle attribue son erreur ainsi que son oubli à l'effervescence qui caractérisait la période à l'intérieur de laquelle ses décisions ont été prises, effervescence due aux nombreuses demandes d'accès qui lui étaient adressées, par le comité de citoyens notamment, ainsi qu'aux recours intentés contre le maire de l'organisme.

Elle mentionne enfin que le rapport en litige, qu'elle n'avait pas en sa possession, n'était pas détenu au service du greffe de l'organisme; elle précise que ses vérifications effectuées auprès du Cabinet du maire ont indiqué que ce document n'avait pas été déposé.

La procureure de l'organisme fait entendre le maire de l'organisme, monsieur Claude Beaudoin, qui témoigne sous serment.

Monsieur Beaudoin affirme être maire de l'organisme depuis novembre 1982. Il mentionne que le conseil de l'organisme est, depuis l'élection de l'automne 1998, formé de 6 conseillers et du maire qui appartiennent à Progrès de Val-Bélair ainsi que des demandeurs qui font partie de Vision Val-Bélair.

Il explique comme suit les circonstances qui ont conduit à la préparation de l'avis juridique en litige : il a appris que les travaux concernant la rue Guillebert et l'avenue du Golf, qui avaient été autorisés par décision du conseil et qui avaient fait l'objet d'un appel d'offres en mai 1999 (O-4), avaient débuté à son insu, avant qu'un contrat ne soit adjugé à un soumissionnaire; il était absent lors de l'assemblée du conseil du 7 juin 1999, assemblée au cours de laquelle une note écrite concernant le début de ces travaux a été présentée aux membres par la greffière de l'organisme (O-5); il a pris connaissance de cette note à son retour et a demandé des explications au responsable du dossier qui a justifié sa décision par l'urgence de la situation et par le fait que le plus bas soumissionnaire était déjà sur place avec son équipement; il a alors décidé de demander l'avis juridique en litige afin que soit déterminée la marche à suivre.

Il spécifie avoir demandé cet avis juridique à Me Roger Pothier, de la société d'avocats Pothier Delisle, qui le lui a expédié à titre confidentiel, en sa qualité de maire de l'organisme, avec les détails et un projet de résolution conforme requis par lui concernant la ratification des travaux. Il dépose une copie certifiée conforme de la résolution No 99-0474 concernant l'ouverture des soumissions sur invitation et l'octroi du contrat - amorce rue Guillebert et avenue du Golf, résolution du 2 septembre 1999 ratifiant les actes de la direction des services techniques et ceux du consultant et octroyant le contrat au plus bas soumissionnaire conforme (O-6).

Monsieur Beaudoin souligne que l'avis juridique en litige est demeuré confidentiel; il réitère que le projet de résolution a été préparé par Me Roger Pothier, selon la recommandation de son avis juridique. Il spécifie avoir indiqué, lors d'un caucus auquel les demandeurs participaient, que le projet de résolution précité était conforme avec les conclusions de l'avis juridique demandé et obtenu. Il ne se rappelle pas avoir eu, avant la tenue de l'assemblée du conseil, des questions ou une demande d'accès de la part des demandeurs concernant l'avis juridique en litige; il se rappelle cependant avoir indiqué que le projet de résolution était appuyé par cet avis juridique. Il indique que madame Bourbeau a pour la première fois demandé accès à l'avis juridique en litige lors de l'assemblée du 2 septembre 1999. Il mentionne que les avis juridiques qui lui sont adressés personnellement et confidentiellement ne sont pas, de façon générale, remis à quiconque.

Monsieur Beaudoin explique, en ce qui concerne le rapport en litige, que le conseil de l'organisme a, par résolution No 98-0126 adoptée le 16 mars 1998 (O-7), mandaté le Groupe Mallette Maheu afin qu'il produise une étude sur les structures de l'administration municipale dans le but d'optimiser les ressources. Il mentionne que cette société de services-conseils a proposé une méthode de travail voulant qu'un comité directeur, dont il a fait partie avec 2 autres membres du conseil, soit mis sur pied, de même qu'une équipe composée de cadres et d'autres employés de tous les services de l'organisme, exception faite du service de sécurité publique, équipe appelée à collaborer avec la société de services-conseils. Il indique qu'un rapport d'étape (O-8), inventoriant les procédés utilisés au sein de l'organisme pour la gestion de ses ressources et constatant de sérieux problèmes dans l'administration générale, a été présenté au comité directeur précité (O-8) et déposé au conseil lors d'une séance tenue les 8 septembre et 17 septembre 1998 (résolution no 98-0459, O-8). Il souligne que la décision de mandater le Groupe Mallette Maheu ainsi que le rapport d'étape susmentionné, «qui a fait beaucoup de bruit», ont précédé la campagne électorale de l'automne 1998, laquelle a été précédée d'une pré-campagne électorale au cours de l'été ; il spécifie que les problèmes identifiés dans ce rapport étaient rendus publics alors que l'organisme se trouvait déjà dans une période «très trouble». Il ajoute que le Groupe Mallette Maheu a produit le rapport en litige le 28 janvier 1999, ce document n'ayant été remis à personne d'autre qu'à lui; il précise à cet égard que l'un des conseillers membre du comité directeur de l'optimisation des ressources n'a pas été réélu lors de l'élection de novembre 1998 et qu'il n'a pas jugé opportun, alors et jusqu'à maintenant, pour des raisons de gestion

relevant de la situation problématique qui a été vécue et qui commence à se régler, de constituer un nouveau comité directeur et de présenter le rapport au conseil de l'organisme. À son avis, la nomination d'un nouveau directeur général est nécessaire pour discuter des recommandations proposées dans ce rapport, les évaluer et déterminer les mesures de gestion des ressources qui devront être prises par le conseil. Il rappelle que son habilité à siéger ainsi que celle d'autres conseillers de l'organisme a été attaquée par voie judiciaire et que les procédures ont occupé une importante partie de leur temps. Il souligne que le rapport en litige n'a conséquemment fait l'objet d'aucune décision et qu'il n'a pas, non plus, été discuté. Il rappelle que le rapport d'étape a été présenté au conseil et rendu accessible à tous (O-8) contrairement au rapport en litige qui n'a pas encore été reçu ni par le comité directeur de l'optimisation des ressources, ni par le conseil de l'organisme.

Contre-interrogé par l'un des demandeurs, monsieur Beaudoin confirme que tant le rapport d'étape que le rapport en litige ont été demandés par le conseil de l'organisme au Groupe Mallette Maheu. Il réitère que les recommandations formulées dans le rapport en litige n'ont pas encore été étudiées et qu'elles ne sont pas en application.

Les demandeurs, sous serment, expliquent avoir demandé accès à l'avis juridique en litige parce qu'un problème avait été souligné; ils déposent copie des documents suivants et les commentent ainsi:

ordre du jour de la séance ordinaire du 7 juin 1999 tenue en l'absence du maire et présidée par le maire suppléant (D-1) : le dossier 11.06 «Ouverture des soumissions sur invitation et octroi du contrat - amorce rue Guillebert et avenue du Golf», documenté par une note de la greffière au conseil (D-2, O-5), a été retiré de l'ordre du jour tel que l'indique un extrait du procès-verbal de cette séance (D-3); les membres du conseil ont décidé de ce retrait quelques minutes avant l'assemblée, après consultation auprès de la greffière qui avait communiqué avec les procureurs de l'organisme, la société d'avocats Pothier Delisle;

ordre du jour du comité plénier du 28 juin 1999 (D-4) : le dossier précité est remis à l'ordre du jour de ce comité avec la mention «(en attente d'une opinion juridique)»; ce dossier est documenté par une note de la greffière au conseil (D-5), note identique à celle qu'elle avait précédemment rédigée (D-2, O-5);

lettre du Groupe Conseil Gesco Inc. au directeur des services techniques de l'organisme, datée du 27 juillet 1999, concernant l'inspection des travaux, faite le 16 juillet 1999, dans le dossier «Rue Guillebert et avenue du Golf», constatant la réalisation de ces travaux selon les exigences du contrat et les ententes avec le propriétaire et recommandant leur acceptation de même que le paiement du montant forfaitaire total (D-6); les demandeurs soulignent que les travaux étaient donc terminés le 16 juillet 1999, ce, en l'absence d'une décision émanant du conseil ou d'un délégataire habilité par règlement concernant l'octroi du contrat à un soumissionnaire;

extrait du procès-verbal de la séance du conseil tenue le 2 août 1999 (D-7) : ce document fait état de l'intervention de la demanderesse Bourbeau s'enquérant du suivi du dossier précité au sujet duquel aucun contrat n'avait encore été octroyé par le conseil, intervention à laquelle le maire de l'organisme a rappelé qu'une opinion juridique avait été demandée «à nos procureurs concernant ce dossier...et qu'en temps opportun la situation sera régularisée définitivement à la suite de cette opinion juridique.»;

ordre du jour de la réunion du comité plénier tenue le 30 août 1999 (D-8) : ce document indique que le dossier précité est «(en attente d'une opinion juridique)»; il est produit avec la note de la greffière (D-9) préparée à l'intention du conseil dans ce dossier et déjà produite (D-2, O-5, D-5);

ordre du jour de la séance extraordinaire du conseil tenue le 2 septembre 1999 : le dossier «Ouverture des soumissions sur invitation et octroi du contrat - amorce rue Guillebert et

avenue du Golf» y est inscrit (D-10); les demandeurs mentionnent qu'avis de l'ordre du jour des séances extraordinaires est donné 24 heures avant la tenue de l'assemblée, ce court délai expliquant l'absence fréquente de documents explicatifs; dans le cas de ce dossier, ajoutent-ils, aucun document n'a été produit exception faite d'un projet de résolution (D-11) préparé par les procureurs de l'organisme, Pothier Delisle, et remis quelques minutes avant la tenue de l'assemblée, projet de résolution proposant, notamment, la ratification des actes de la direction des services techniques et ceux du consultant Gesco Inc. ainsi que l'octroi du contrat à Métro Excavation Inc., plus bas soumissionnaire conforme;

extrait du procès-verbal de la séance du conseil tenue le 2 septembre 1999 (D-12) : ce document indique que la demanderesse Bourbeau a, avant que le conseil ne procède au vote sur la proposition précitée (D-11), rappelé que le maire avait confirmé avoir demandé une opinion juridique dans ce dossier, intervention à la suite de laquelle monsieur Beaudoin a répondu que cette opinion avait été reçue et que la demanderesse n'en avait pas eu copie parce que c'est lui qui avait demandé l'opinion.

Les demandeurs prétendent que leur qualité d'élu municipal (D-13) leur confère un droit d'accès à l'avis juridique en litige parce que ce document était nécessaire à l'exercice de leurs fonctions d'élu dans le dossier précité lors de l'assemblée du 2 septembre 1999 et parce qu'ils étaient, en vertu de l'article 328 de la Loi sur les cités et villes, tenus de voter (D-14). Ils soulignent que le maire de la ville de même que toute personne qui préside une séance du conseil ne sont pas tenus de voter en vertu de la loi; à leur avis, le maire Beaudoin, qui, selon ce qu'ils affirment, ne vote habituellement pas, devait fournir copie de l'avis juridique en litige aux conseillers tenus de voter afin que ceux-ci prennent une décision éclairée.

Les demandeurs déposent un extrait du procès-verbal de la séance ordinaire du conseil tenue le 11 janvier 1999 (D-15) : ce document indique que le conseil a, par résolution, nommé la société d'avocats Pothier Delisle procureur de l'organisme, cette résolution ayant pris effet le jour même pour toutes les instances judiciaires, quasi judiciaires et administratives. Les demandeurs soulignent que cette société d'avocats a été nommée par le conseil, non pas par le maire, et que les mandats confiés à cette société le sont par le conseil de l'organisme qui doit voter dans le meilleur intérêt des citoyens.

Les demandeurs expriment l'opinion que le conseil ne pouvait, lors de l'assemblée du 2 septembre 1999, ratifier un contrat nul de nullité absolue parce que contraire aux dispositions impératives de la loi (2) (D-16); ils en concluent que l'accès à l'avis juridique en litige était nécessaire à l'exercice de leurs fonctions.

Ils soulignent par ailleurs que les membres de l'organisme ont déjà, après en avoir fait la demande, eu accès à des avis juridiques concernant d'autres dossiers, à savoir :

un avis juridique émanant des procureurs de l'organisme (D-17, déposé confidentiellement devant la Commission); cet avis a été communiqué aux membres, avec le projet de résolution en découlant lors de l'assemblée du 5 juillet 1999, afin qu'ils puissent voter de façon éclairée dans le dossier concerné; certains éléments du cas particulier traité dans cet avis présentaient, selon les demandeurs, des similitudes avec le dossier sur lequel porte l'avis juridique en litige d'où le fait qu'ils étaient «mal à l'aise de voter dans un dossier qui nous paraissait similaire ..sans avoir vu l'avis juridique qui concernait ce dossier; c'est pour cela qu'avant de prendre le vote à cette assemblée, on a demandé l'avis juridique (en litige); Donc, si on n'a pas fait de demande pour avoir accès à l'avis juridique (en litige), c'est parce que l'autre fois avant, quelques minutes avant l'assemblée, il nous avait été remis et on pensait que la même chose

aurait possiblement pu se reproduire.»; un avis juridique émanant des procureurs de l'organisme (D-18 déposé confidentiellement devant la Commission); l'existence de cet avis juridique a été connue des demandeurs 10 mois après sa transmission à l'organisme, d'où la demande d'accès formulée par la demanderesse Bourbeau le 13 mars 2000 (D-19) et la copie obtenue le jour même en vue de l'assemblée extraordinaire tenue à cette date.

Les demandeurs déposent une copie de leur demande d'accès datée du 10 septembre 1999 de même que copie de la décision de la responsable et copie de leur demande de révision (D-20, en liasse); ils soulignent avoir verbalement exprimé une demande d'accès à l'avis juridique en litige avant la prise de décision comme le démontrent les extraits des procès verbaux du 2 août 1999 (D-7) et du 2 septembre 1999 (D-10).

Les demandeurs déposent copie d'un article écrit par Me André Comeau concernant le droit d'accès privilégié de l'élu municipal(3) (D-21); à leur avis, leur qualité de membre de l'organisme leur confère un droit d'accès privilégié aux documents émanant de la municipalité qu'ils représentent(4) parce qu'ils ont des décisions à prendre à ce titre et parce qu'ils ont l'obligation de voter pour administrer l'organisme.

Les demandeurs expliquent, en ce qui a trait au rapport en litige, que la société de services-conseils Groupe Mallette Maheu a été mandatée, par résolution du conseil de l'organisme adoptée le 16 mars 1998, pour produire une étude sur les structures de l'administration municipale dans le but d'optimiser les ressources (D-22, O-7); ils déposent copie du rapport d'étape produit par cette société et intégralement déposé à l'assemblée du conseil tenue le 17 septembre 1998 (D-23), ce rapport d'étape identifiant certaines lacunes, à la direction de l'informatique et à celle des ressources humaines notamment.

Ils ajoutent avoir réalisé que le rapport en litige avait été transmis à l'organisme en consultant la liste des chèques émis par l'organisme le 2 mars 1999 (D-24) et en constatant qu'un chèque avait été émis à l'ordre de cette société de services-conseils.

Ils déposent enfin copie de l'ordre du jour de la séance du conseil tenue le 1er novembre 1999 (D-25) et au cours de laquelle le conseil a été appelé à prendre des décisions dans des dossiers concernant la direction de l'informatique ainsi que celle des ressources humaines, directions présentant des lacunes identifiées dans le rapport d'étape; ils ajoutent que pareils dossiers sont soumis au conseil de façon récurrente; à leur avis, le rapport en litige, qui propose des pistes de solutions, constitue un outil essentiel à la prise de décisions dans des dossiers concernant les directions au sujet desquelles des lacunes ont déjà été identifiées dans le rapport d'étape.

Les demandeurs soumettent particulièrement que le rapport en litige a été demandé par le conseil de l'organisme dont ils sont membres afin d'éclairer la prise de décisions par celui-ci et que le Groupe Mallette Maheu, mandaté par le conseil, a été payé avec les fonds publics.

Ils soumettent aussi que les restrictions qui ont été invoquées par l'organisme ne leur sont pas opposables en raison de leur qualité de membres du conseil de l'organisme et de «parties prenantes du processus décisionnel à l'intérieur de l'organisateur...tenues à la confidentialité en regard de tout document qui n'a pas été déposé publiquement à la table du conseil.».

Contre-interrogatoire des demandeurs : En ce qui a trait à l'un des avis juridiques déjà obtenus par les demandeurs et daté du 6 mai 1999 (D-18), la demanderesse Bourbeau affirme avoir clairement posé des questions sur la légalité du projet de protocole alors concerné au cours de l'assemblée publique du 3 mai 1999 seulement, non pas en comité plénier; elle ajoute ne pas avoir, avant cette assemblée publique, abordé la question de la légalité du projet avec le maire de l'organisme ou avec d'autres conseillers, exception faite du demandeur Gilles Angers. Elle réitère avoir demandé accès à cet avis par lettre adressée au maire le 13 mars 2000 (D-19) et en avoir reçu copie, à l'instar des autres membres, avant l'assemblée du conseil tenue le même jour.

La demanderesse Bourbeau affirme, en ce qui a trait à l'autre avis juridique dont copie a déjà été obtenue (D-17), que ce document a été transmis, par le service du greffe, aux membres du conseil avec le projet de résolution afférent et autres pièces au dossier. Elle souligne que cet avis lui a été fourni sans qu'elle ait à le demander.

L'application de la Loi sur l'accès aux élus municipaux : La procureure de l'organisme soumet que la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels s'applique aux membres du conseil de l'organisme. Elle explique à cet égard que l'article 9 de cette loi, qui se lit comme suit, confère un droit d'accès à toute personne :

9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public.

Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature.

Elle souligne que le mot «personne», qui n'y est pas défini, doit recevoir un sens général et très large qui inclut les élus municipaux et qui n'est pas restreint ni par le champ d'application de la loi ni par quelque disposition que ce soit. Les élus municipaux ne sont pas des tiers au sens de la Loi sur l'accès, ajoute-t-elle.

Elle explique aussi que la loi précitée s'applique à tous les documents détenus par un organisme public dans l'exercice de ses fonctions :

1. La présente loi s'applique aux documents détenus par un organisme public dans l'exercice de ses fonctions, que leur conservation soit assurée par l'organisme public ou par un tiers.

Elle s'applique quelle que soit la forme de ces documents: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre.

À son avis, les conseillers municipaux n'ont pas, en vertu de la loi, de statut particulier en matière d'accès, aucune disposition législative ne le prévoyant. Elle reconnaît que le conseil de l'organisme le représente et administre ses affaires en vertu de l'article 47 de la Loi sur les cités et villes (L.R.Q., c. C-19) :

47. La municipalité est représentée et ses affaires sont administrées par son conseil.

Elle rappelle que le conseil municipal est formé des conseillers et du maire qui agissent ensemble, en assemblée délibérante; elle souligne qu'un conseiller n'a, individuellement, aucun pouvoir, ce, contrairement au maire à qui la Loi sur les cités et villes attribue des pouvoirs spéciaux en vertu de l'article 52 de cette loi, notamment :

52. Le maire exerce le droit de surveillance, d'investigation et de contrôle sur tous les départements, les fonctionnaires ou employés de la municipalité, et voit spécialement à ce que les revenus de la municipalité soient perçus et dépensés suivant la loi, et à ce que les dispositions de la loi, les règlements et ordonnances du conseil soient fidèlement et impartialement mis à exécution. Il soumet au conseil tout projet qu'il croit nécessaire ou utile, et lui communique toutes informations et suggestions relatives à l'amélioration des finances, de la police, de la santé, de la sûreté, de la propreté, au bien-être et au progrès de la municipalité.

Dans l'exercice de ses fonctions comme chef exécutif de l'administration municipale, le maire a droit, en tout temps, de suspendre un fonctionnaire ou employé de la municipalité, mais il doit faire rapport au conseil, à la séance qui suit cette suspension, et exposer ses motifs par écrit ; le fonctionnaire ou employé suspendu ne doit recevoir aucun traitement pour la période pendant laquelle il est suspendu, à moins que le conseil n'en décide autrement sur cette suspension et celle-ci n'est valide que jusqu'à cette séance.

Elle signale que le maire est donc habilité à demander des avis juridiques dans l'exercice des pouvoirs qui lui sont spécifiquement attribués.

Elle réitère que le conseiller municipal n'a, en matière d'accès, aucun statut particulier, parce qu'aucun pouvoir individuel ne lui est attribué en cette qualité de conseiller par la Loi sur les cités et villes. Elle soutient que le conseiller municipal est, au sens de l'article 9 de la Loi sur l'accès, et tel que l'a antérieurement décidé la Commission(5), une simple personne et qu'il jouit du même droit d'accès que toute autre personne.

Elle signale que la Loi sur l'accès, qui constitue l'outil auquel il faut d'abord référer, s'applique aux

élus municipaux et suffit pour conclure que ceux-ci sont des personnes au sens de l'article 9 précité. Elle soumet que la Commission ne peut s'écarter des dispositions de la Loi sur l'accès et accorder l'accès à un document en s'appuyant sur un principe de common law qui reconnaît à des élus municipaux le droit de prendre connaissance de documents qui les éclairent dans leurs décisions, ce principe de common law étant extrinsèque à la Loi sur l'accès. Elle ajoute que la Commission doit se demander si l'expression «toute personne», prévue par l'article 9, comprend le conseiller municipal et si les autres dispositions de cette loi prévoient une «porte de sortie» permettant de conclure qu'un conseiller municipal n'est pas visé par le mot «personne». À son avis, la Loi sur l'accès ne permet pas d'en arriver à cette conclusion; au contraire, soumet-elle, un examen poussé de cette loi démontre que les conseillers municipaux sont des personnes au sens de l'article 9. À son avis également, la Commission n'a pas, contrairement aux tribunaux de droit commun, juridiction pour évaluer et reconnaître un droit d'accès qui soit attribué à des conseillers municipaux en vertu d'un principe de common law .

La procureure de l'organisme rappelle que la Cour supérieure a déjà, dans un obiter dictum, souligné, en ce qui concerne une demande d'accès formulée par un membre d'un organisme municipal, que ce membre n'était pas un tiers vis-à-vis cet organisme et que la Loi sur l'accès «ne pourrait être pertinente que si elle faisait interdiction à un organisme public de communiquer des renseignements à un membre de son conseil dans l'exercice de ses fonctions. La Loi sur l'accès s'applique aux organismes publics qui forcément agissent par l'intermédiaire de leurs dirigeants, fonctionnaires et employés. Les restrictions qu'elles comportent s'adressent aux tiers, à qui l'organisme public peut refuser certaines informations. Cette loi préserve aussi la confidentialité de certains documents ministériels et de documents conservés dans le bureau de certains membres d'organisme à moins que l'auteur le destinataire n'en décide autrement.(6) La procureure ajoute que la Cour du Québec a exprimé son accord avec cette affirmation et souligné que les restrictions prévues dans la Loi sur l'accès ne s'appliquent pas aux membres du conseil chargé de la décision ultime(7).

Elle conclut, en ce qui concerne l'application de la Loi sur l'accès, que cette loi s'applique au conseiller municipal qui est une personne par rapport à l'organisme municipal dont il est membre. Elle réitère qu'individuellement, le conseiller municipal n'a pas de pouvoir et qu'en conséquence, il ne lui est attribué aucun droit d'accès particulier.

Les restrictions invoquées par la responsable de l'accès : A) Le refus de communiquer l'avis juridique : La procureure de l'organisme rappelle que l'article 31 de la Loi sur l'accès, qui se lit comme suit, autorise un organisme public à refuser de communiquer une opinion juridique portant sur l'application du droit à un cas particulier :

31. Un organisme public peut refuser de communiquer une opinion juridique portant sur l'application du droit à un cas particulier ou sur la constitutionnalité ou la validité d'un texte législatif ou réglementaire, d'une version préliminaire ou d'un projet de texte législatif ou réglementaire.

Elle soumet que l'avis juridique en litige, produit par la société d'avocats Pothier Delisle, porte sur le cas particulier de travaux effectués avant l'adjudication préalable d'un contrat par le conseil de

l'organisme et sur la légalité de la ratification, par ce conseil, des actes posés au nom de l'organisme, ce, afin que paiement puisse être fait en contrepartie de l'exécution de ces travaux. Elle souligne que le conseil a, après la production de cet avis, adopté une résolution ayant pour effet de ratifier les actes de la direction des services techniques ainsi que ceux du consultant de l'organisme et d'octroyer le contrat au plus bas soumissionnaire conforme (O-6).

Elle soumet que cet avis juridique n'a jamais été divulgué à quiconque et qu'il n'a été détenu qu'au cabinet du maire.

Elle soumet que cet avis n'a jamais fait l'objet, de la part du confident Paul Walsh, du service des travaux publics de l'organisme, qui a communiqué avec la société d'avocats Pothier Delisle, d'une renonciation à sa confidentialité. Elle rappelle que la Cour du Québec a déjà décidé «qu'il existe une autre restriction impérative au droit d'accès découlant du droit au secret professionnel garanti par l'article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne. C'est le caractère prépondérant de la Charte sur toute autre loi qui rend cette restriction impérative et permet qu'elle soit soulevée à tout moment, même par le Tribunal...Même la prépondérance de la Loi sur l'accès...ne justifie pas d'enfreindre le secret professionnel. Quant à la renonciation au droit au secret professionnel, elle est permise en autant que cette renonciation provienne de celui qui a fait les confidences ou d'une disposition expresse de la loi.(8) ». La procureure souligne, en ce qui concerne l'avis juridique en litige, qu'aucune renonciation au droit au secret professionnel n'a été autorisée par le confident ou par l'effet d'une disposition expresse de la loi.

Elle soumet que l'avis juridique en litige, qui porte sur l'application du droit au cas particulier précité, a été préparé par une société d'avocats; selon elle, l'application de l'article 31 de la Loi sur l'accès, invoqué au soutien du refus de la responsable, est démontrée(9) :

31. Un organisme public peut refuser de communiquer une opinion juridique portant sur l'application du droit à un cas particulier ou sur la constitutionnalité ou la validité d'un texte législatif ou réglementaire, d'une version préliminaire ou d'un projet de texte législatif ou réglementaire.

Elle soumet particulièrement que la Cour d'appel a unanimement reconnu et décidé que «À moins que la loi n'en dispose autrement, lorsque et dans la mesure l'exercice légitime d'un droit porterait atteinte au droit d'un autre à la confidentialité de ses communications avec son avocat, le conflit qui en résulte doit être résolu en faveur de la protection de la confidentialité; lorsque la loi confère à quelqu'un le pouvoir de faire quelque chose qui, eu égard aux circonstances propres à l'espèce, pourrait avoir pour effet de porter atteinte à cette confidentialité, la décision de le faire et le choix des modalités d'exercice de ce pouvoir doivent être déterminés en regard d'un souci de n'y porter atteinte que dans la mesure absolument nécessaire à la réalisation des fins recherchées par la loi habilitante...Ce n'est certainement pas le fait que des représentants de la Municipalité aient été autorisés à rencontrer les avocats de la Municipalité qui permet de conclure à une renonciation implicite. On sait que les municipalités parlent par voie de résolution et que ses avocats doivent recevoir mandat par une résolution également. Une municipalité ne peut perdre le bénéfice du secret professionnel en adoptant une résolution qui mandate ses avocats. Il faut se rappeler qu'il s'agit d'un droit garanti à l'article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne et je suis d'avis que les

faits en l'espèce ne démontrent pas une renonciation tacite, telle renonciation devant être claire avant de conclure qu'il soit nécessaire de porter atteinte à la confidentialité des communications entre clients et avocats... »(10).

La procureure réitère qu'aucune preuve ne démontre qu'il y ait eu renonciation au bénéfice du secret professionnel; elle soumet que le mandat nécessairement confié par le conseil de l'organisme à la société d'avocats Pothier Delisle ne constitue pas une renonciation à la confidentialité des documents produits par cette société d'avocats et ne confère pas de droit d'accès à ces documents.

Elle soumet conséquemment que l'article 9 de la Charte, qui se lit comme suit et qui prévaut sur la Loi sur l'accès, notamment sur son article 31, est opposable aux élus :

9. Chacun a droit au respect du secret professionnel. Toute personne tenue par la loi au secret professionnel et tout prêtre ou autre ministre du culte ne peuvent, même en justice, divulguer les renseignements confidentiels qui leur ont été révélés en raison de leur état ou profession, à moins qu'ils n'y soient autorisés par celui qui leur a fait ces confidences ou par une disposition expresse de la loi.

Le tribunal doit d'office, assurer le respect du secret professionnel.

Elle soumet qu'il n'est que normal que le maire de l'organisme ait, de façon isolée, accès à l'avis juridique en litige, vu les pouvoirs qui lui sont attribués en vertu de l'article 52 de la Loi sur les cités et villes, précité. Elle rappelle, à ce sujet, que le maire est le chef exécutif de l'organisme, qu'il doit s'assurer de la légalité des actes faits au nom de celui-ci, qu'il doit en informer son conseil de façon générale mais qu'il n'est pas tenu de produire cet avis juridique.

Elle soumet enfin que l'avis juridique a été adressé au maire, non pas au conseil de l'organisme. Selon elle, la responsable pouvait invoquer l'article 31 de la Loi sur l'accès au soutien de son refus.

B) Le refus de communiquer le rapport du Groupe Mallette Maheu : La procureure de l'organisme soumet que la preuve démontre que les procureurs de l'organisme ont indiqué à la responsable que l'article 39 pouvait être invoqué au soutien de son refus et que ce motif de refus a été involontairement omis en raison des faits qui ont caractérisé la période en cause et au sujet desquels la responsable a témoigné.

Elle soumet par ailleurs que la preuve démontre que la société de services-conseils Groupe Mallette Maheu a été mandatée pour produire une étude sur l'administration municipale dans le but d'optimiser les ressources (O-7), que le rapport d'étape produit par cette société et daté du 26 août 1998 a été déposé au conseil ainsi qu'aux archives de l'organisme (O-8) et que le rapport en litige, qui recommande des solutions aux problèmes identifiés dans le rapport d'étape, est détenu par le maire qui n'a pas encore amorcé le processus décisionnel. Elle soumet que la preuve démontre sur ce sujet que le maire estime qu'il y a d'abord lieu de procéder à la nomination d'un nouveau directeur général de l'organisme et à la constitution d'un nouveau comité directeur qui se consacrera à l'étude du rapport en litige avant de saisir le conseil de l'organisme des recommandations retenues par ce comité. Elle

rappelle que le maire a témoigné que le rapport en litige sera remis aux membres du conseil lorsque ce dernier sera appelé à décider des mesures administratives à prendre.

La procureure soumet que les articles 37 et 39 de la Loi sur l'accès, qui se lisent comme suit, s'appliquent :

37. Un organisme public peut refuser de communiquer un avis ou une recommandation faits depuis moins de dix ans, par un de ses membres, un membre de son personnel, un membre d'un autre organisme public ou un membre du personnel de cet autre organisme, dans l'exercice de leurs fonctions.

Il peut également refuser de communiquer un avis ou une recommandation qui lui ont été faits, à sa demande, depuis moins de dix ans, par un consultant ou par un conseiller sur une matière de sa compétence.

39. Un organisme public peut refuser de communiquer une analyse produite à l'occasion d'une recommandation faite dans le cadre d'un processus décisionnel en cours, jusqu'à ce que la recommandation ait fait l'objet d'une décision ou, en l'absence de décision, qu'une période de cinq ans se soit écoulée depuis la date l'analyse a été faite.

Elle rappelle que la Cour du Québec a déterminé le test à suivre dans l'exercice visant à déterminer si un document constitue un avis au sens de l'article 37 précité, ce test consistant à se demander si les informations contenues dans ce document peuvent avoir des incidences sur une décision administrative ou politique : «C'est dans ce contexte d'un processus décisionnel à protéger qu'il faut lire les dispositions des articles 30 à 40 de la loi regroupés à la sous-section 5 de la Loi sur l'accès. Cette lecture nous apprend tout de suite que ce n'est pas l'ensemble des opérations nécessaires à la production d'une décision que la loi permet de tenir secrètes, mais seulement ce qui se rapporte immédiatement à l'action de décider. C'est ainsi que les informations recueillies afin d'identifier l'objet de la décision à prendre ne peuvent être tenues secrètes; mais dès que commence le processus d'évaluation de cette information, afin de décider s'il y a lieu d'agir ou non, ou de choisir parmi diverses lignes de conduite possibles, la loi permet à l'organisme de protéger ses délibérations, évaluations, avis, recommandations Ce sont donc les opérations propres à la production de la décision elle-même qui sont protégées, c'est-à-dire les activités entourant de façon immédiate la formulation et l'énoncé de ce qui doit être fait. C'est pourquoi on protège d'abord les délibérations de l'organisme et les outils de celles-ci, parmi lesquels on retrouve les avis et les recommandations À partir du moment l'organisme, ou quelqu'un pour lui, procède à une évaluation des faits, ou porte sur ceux-ci un jugement de valeur, en fonction de ce qui devrait être fait par le décideur, la loi permet à l'organisme de garder le secret. Dès lors, pour déterminer si un organisme peut refuser de communiquer un document ou partie d'icelui, au motif qu'il contient un avis ou une recommandation, le Tribunal doit en venir à la conclusion, à l'examen du document en litige, que celui-ci comporte une évaluation ou un jugement de valeur portant sur les informations qui peuvent faire l'objet d'une

décision, évaluation ou jugement de valeur formulés de nature à mettre l'organisme dans une position de choix : agir ou non. Ce n'est donc pas parce qu'un document comporte une classification de l'information ou une analyse de celle-ci qu'il peut être tenu secret. Il faut plutôt s'en remettre au processus décisionnel de l'organisme et distinguer ce qui est préparatoire sans incidence de ce qui se rapporte à l'exercice d'un choix; ce sont ces derniers éléments et ceux-là seuls que le législateur a permis de protéger. Or ces éléments comportent toujours une évaluation des faits et des alternatives, jugements de valeur émis dans le but d'édicter ce qui devra être fait, un choix ou une incitation à agir. Dans ce contexte, les mots «avis» et «recommandation» expriment, à des degrés divers une même chose, c'est-à-dire l'énoncé d'un jugement de valeur conditionnant l'exercice d'un choix entre diverses alternatives(11).».

Elle soumet que le rapport en litige qualifie, essentiellement dans chacune de ses pages, par des avis et des recommandations, les faits et situations qui seront soumis à la décision du conseil de l'organisme.

Elle souligne que la Cour du Québec a aussi décidé que pour qu'il y ait analyse, il faut un document qui comporte du texte de la nature d'une étude ou d'un rapport d'analyse et que l'on y retrouve réunis des faits bruts, des analyses de ces faits et des recommandations découlant de ces analyses(12).

Elle souligne que la qualité de consultant, au sens de l'article 37 précité, de la société de services-conseils Mallette Maheu a par ailleurs été reconnue par la Commission siégeant en révision d'une décision du responsable de Ville de Cap-Rouge ayant refusé l'accès à un rapport sur l'optimisation des ressources de cette ville(13).

La procureure de l'organisme soumet enfin que le rapport en litige est également constitué de renseignements nominatifs en vertu de l'article 54 de la Loi sur l'accès, renseignements concernant la personne qui occupait le poste de directeur général de l'organisme et elle rappelle à cet égard que les renseignements nominatifs sont confidentiels :

53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants:

1o leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale;

2o ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion.

54. Dans un document, sont nominatifs les renseignements qui concernent une personne physique et permettent de l'identifier.

La juridiction de la Commission : La procureure de l'organisme soumet que si la Commission devait décider que la Loi sur l'accès ne s'applique pas aux élus municipaux, elle perdrait nécessairement juridiction et ne pourrait conséquemment ordonner la communication des documents en litige aux demandeurs.

Elle soumet particulièrement que la Commission n'a pas le pouvoir de rendre les documents en litige accessibles en vertu du principe de common law voulant que les membres d'un organisme aient le droit d'avoir accès aux documents qui leur permettent de décider de façon éclairée. Elle souligne que la juridiction de la Commission est limitée par la Loi sur l'accès :

122. La Commission a pour fonction d'entendre, à l'exclusion de tout autre tribunal, les demandes de révision faites en vertu de la présente loi.

La Commission exerce également les fonctions qui lui sont attribuées par la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Elle soumet sur ce sujet que si la Commission décide qu'elle a juridiction pour entendre la présente demande de révision, elle doit analyser les articles invoqués au soutien du refus de communiquer les documents en litige; elle réitère que si la Commission décide que la Loi sur l'accès n'est pas opposable aux demandeurs, la Commission perd juridiction parce qu'elle ne serait pas appelée à trancher la demande en fonction de cette loi. Elle rappelle à cet effet que la Cour du Québec a déjà décidé que «un tribunal administratif ne dispose d'aucun pouvoir inhérent, à moins que la loi ne le prévoie. En l'espèce, la Commission d'accès à l'information est un tribunal administratif institué en vertu de l'article 103 de la Loi sur l'accès. Les pouvoirs et fonctions de la Commission font l'objet d'une énumération détaillée à la section II du chapitre IV de la Loi sur l'accès...En effet, à ce jour, la Commission a toujours soutenu, avec raison selon nous, que le droit d'accès conféré par l'article 9 de la Loi sur l'accès était le même pour tous et qu'il ne saurait être question de s'enquérir de la qualité du demandeur ou des motifs qui l'ont amené à adresser une demande d'accès. Dans Miquelon, Reynolds & Cléroux c. Commission scolaire des Mille-Iles (1984-86) 1 C.A.I. 38, 39, la Commission a élaboré cette règle de la façon suivante :«La loi ne fait aucune obligation au demandeur d'un document de justifier les motifs de sa demande et inversement elle n'accorde aucun privilège particulier à ceux qui démontrent qu'ils ont davantage besoin que d'autres de tel ou tel type de documents. L'économie générale de la Loi indique au contraire que ce droit d'accès est le même pour toute personne, peu importe son occupation, son intérêt, son statut ou même sa citoyenneté. Il suffit de lire le premier alinéa de l'article 9 de la Loi sur l'accès pour s'en convaincre...Il ressort donc clairement de la décision contestée que le commissaire n'a pas traité la demande de révision de l'intimé en vertu du régime de la Loi sur l'accès mais bien en fonction de son statut de membre de la corporation et des droits qui lui sont conférés à ce titre en vertu de la Loi sur les compagnies. Reste à déterminer si la Commission avait compétence pour se prononcer sur les droits que l'intimé pourrait détenir à titre de membre de la corporation. Pour déterminer si la Commission avait la compétence nécessaire, il faut rechercher un texte clair, soit dans la Loi sur l'accès...soit dans la Loi sur les compagnies...Après analyse de la Loi sur les compagnies, nous n'avons trouvé aucune disposition particulière conférant quelque pouvoir que ce soit à la Commission d'accès à l'information. Pour justifier sa compétence, la Commission se base sur l'article 171 de la Loi sur l'accès...De par son

libellé, l'article 171 de la Loi sur l'accès ne vise aucunement à conférer une compétence additionnelle à la Commission d'accès à l'information...La Loi sur les compagnies reconnaît aux actionnaires et aux membres d'une corporation sans but lucratif certains droits, notamment, en matière de divulgation de renseignements. En décidant de s'adresser à la Commission d'accès à l'information, l'intimé a décidé de se prévaloir du régime général d'accès aux documents détenus par les organismes publics et non du régime particulier découlant de la Loi sur les compagnies. Seule la Cour supérieure a compétence à l'égard des litiges découlant de l'application de cette dernière loi. En appliquant le régime de la Loi sur les compagnies, la Commission s'arroge une compétence que ni cette loi, ni la Loi sur l'accès ne lui confère. La Commission aurait mettre de côté les dispositions de la Loi sur les compagnies ainsi que le statut de membre de la corporation de l'intimé et trancher la demande de révision sur la base des seules dispositions de la Loi sur l'accès(14). ». La procureure souligne à cet égard que les demandeurs se sont soumis aux dispositions de la Loi sur l'accès qui, conséquemment, doivent régir leur demande d'accès, demande traitée en vertu de cette loi par la responsable de l'organisme. Elle réitère que si les restrictions prévues par cette loi ne sont pas opposables aux demandeurs, l'accès aux documents en litige ne peut, non plus, leur être attribué en vertu de cette loi mais bien en vertu d'un principe de common law reconnaissant aux élus un droit d'accès aux renseignements qui les éclairent aux fins de la prise de décisions, principe dont l'application doit être déterminée par la Cour supérieure. Elle précise à nouveau que si la Loi sur l'accès s'applique aux demandeurs, elle s'applique avec ses restrictions.

Elle soumet que si la Commission devait reconnaître que l'article 31 de la Loi sur l'accès est inopposable aux demandeurs en leur qualité d'élu, elle devrait cependant, d'office, assurer le respect du secret professionnel en vertu de l'article 9 de la Charte, précité, puisque la preuve établit qu'il n'y a pas eu renonciation à la confidentialité de ce document. Elle demande conséquemment à la Commission, si la communication de cet avis aux demandeurs devait être ordonnée, de rendre une ordonnance de confidentialité en raison du caractère confidentiel de l'avis juridique en litige puisque le secret professionnel appartient à l'organisme, non pas aux demandeurs, et que seul le conseil réuni en assemblée délibérante peut décider de le rendre public.

Elle soumet enfin que le rapport en litige ne se situe pas encore, tel que le démontre la preuve, à l'intérieur d'un processus décisionnel. Elle demande que la Commission rende une ordonnance de confidentialité concernant ce document si la Commission devait ordonner sa communication aux demandeurs; à son avis, seul le conseil de l'organisme est habilité à décider de rendre ce document public.

Les demandeurs prétendent sur ce sujet que l'octroi de contrats à des consultants, avocats ou autres professionnels est décidé par le conseil de l'organisme, non pas par le maire de celui-ci. À leur avis, leur qualité de membres du conseil de l'organisme, «élus démocratiquement pour représenter nos citoyens» les oblige à voter de façon éclairée afin de bien représenter «les intérêts des contribuables». Ils ajoutent que l'accès aux documents en litige, en leur qualité de membres de l'organisme, ne signifie pas qu'ils les communiqueront à l'extérieur de l'organisme et n'a pas pour effet d'annuler le caractère confidentiel de ces documents à l'intérieur de celui-ci. Les demandeurs affirment qu'ils sont en mesure de maintenir le caractère confidentiel de ces documents destinés au conseil exclusivement.

Les demandeurs soumettent qu'ils ne peuvent systématiquement s'astreindre à voter contre des propositions lorsque les avis juridiques afférents ne leur sont pas fournis et ainsi risquer de se prononcer à l'encontre des intérêts des contribuables qui les ont élus pour administrer l'organisme avec prudence et souci d'éviter les situations tant litigieuses que coûteuses, notamment.

Ils soumettent que l'accès au rapport en litige, qu'ils entendent utiliser de façon confidentielle, leur

permettra de voter de façon éclairée concernant l'engagement et la promotion de personnel ainsi que l'achat d'équipement.

À leur avis, il n'y a pas que le maire de l'organisme qui soit en mesure de respecter la confidentialité des documents en litige, l'expérience ayant démontré que les membres du conseil ont »la même conscience professionnelle» et la capacité de demeurer discrets.

La procureure de l'organisme réitère que la preuve (O-6) établit que les demandeurs ont bel et bien voté, ce, sans avoir eu accès à l'avis juridique en litige, contre la proposition relative à la ratification des actes posés et à l'octroi du contrat au plus bas soumissionnaire conforme dans le dossier de l'amorce rue Guillebert et avenue du Golf. Elle réitère également que les demandeurs sont des personnes au sens de l'article 9 de la Loi sur l'accès et qu'ils n'ont aucun statut particulier en leur qualité de membres du conseil d'un organisme public.

DÉCISION : J'ai pris connaissance des deux documents en litige. A) L'avis juridique : Le premier document est, à n'en pas douter, un avis juridique. Préparé par la société d'avocats Pothier Delisle et daté du 26 juillet 1999, ce document est adressé au maire de l'organisme et il concerne, comme l'indique la résolution adoptée par le conseil le 2 septembre 1999 (O-6), les travaux de voirie exécutés pour la rue Guillebert et l'avenue du Golf. Cet avis juridique est essentiellement constitué de deux types de renseignements : les renseignements concernant les faits, tels qu'ils ont été confiés à cette société de professionnels par des personnes ayant administrativement agi pour l'organisme relativement à l'exécution de ces travaux, ainsi que les renseignements concernant l'application du droit à ce cas particulier.

La preuve, de part et d'autre présentée à la Commission relativement à ce document, est substantiellement la suivante :

le document n'a été déposé ni au service du greffe, ni aux archives de l'organisme; le document a été requis par le maire de l'organisme, agissant en cette qualité, en vertu de l'article 52 de la Loi sur les cités et villes, afin que soient précisés les droits et obligations de l'organisme dans le cas particulier susmentionné, document qui lui a été adressé à titre confidentiel et qu'il a conservé de façon confidentielle;

l'accès au document a été verbalement requis par la demanderesse Bourbeau lors de l'assemblée du conseil du 2 septembre 1999, avant que les membres ne procèdent au vote sur la proposition fondée sur les conclusions de ce document; le maire a refusé d'acquiescer à cette demande verbale et le document n'a pas été déposé au conseil; le maire a cependant avisé les membres du conseil de la conformité du projet de résolution, également préparé par la société d'avocats Pothier Delisle, avec les conclusions de cet avis juridique, ce, avant que les membres du conseil ne procèdent, le 2 septembre 1999, au vote ayant pour effet de ratifier les actes de la direction des services techniques ainsi que ceux du consultant et d'octroyer le contrat au plus bas soumissionnaire conforme (O-6);

la demande d'accès écrite des demandeurs (D-20) est postérieure à l'assemblée au cours de laquelle la résolution (O-6), fondée sur les conclusions de l'avis juridique en litige, a été adoptée par le conseil.

La Commission rappelle que la Loi sur l'accès ne permet l'exercice du recours en révision qu'en ce qui a trait aux demandes d'accès écrites :

135. Une personne dont la demande écrite a été refusée en tout ou en partie par le responsable de l'accès aux documents ou de la protection des renseignements personnels peut demander à la Commission de réviser cette décision.

Une personne qui a fait une demande en vertu de la présente loi peut demander à la Commission de réviser toute décision du responsable sur le délai de traitement de la demande, sur le mode d'accès à un document ou à un renseignement, sur l'application de l'article 9 ou sur les frais exigibles.

Ces demandes doivent être faites dans les trente jours qui suivent la date de la décision ou de l'expiration du délai accordé par la présente loi au responsable pour répondre à une demande. La Commission peut toutefois, pour un motif raisonnable, relever le requérant du défaut de respecter ce délai.

La Commission constate que la demande d'accès écrite des demandeurs est postérieure à la date à laquelle le conseil de l'organisme a finalement exercé ses fonctions en ce qui concerne le cas particulier visé par l'avis juridique en litige. La prétention des demandeurs voulant que ce document soit nécessaire à l'exercice de leurs fonctions ne peut conséquemment être retenue.

L'article 34 de la Loi sur l'accès : L'article 34 de la Loi sur l'accès, qui se lit comme suit, est l'une des restrictions entre autres invoquées par la responsable au soutien de son refus de communiquer l'avis juridique en litige :

34. Un document du bureau d'un membre de l'Assemblée nationale ou un document produit pour le compte de ce membre par les services de l'Assemblée n'est pas accessible à moins que le membre ne le juge opportun.

Il en est de même d'un document du cabinet du président de l'Assemblée, d'un membre de celle-ci visé dans le premier alinéa de l'article 124.1 de la Loi sur l'Assemblée nationale (chapitre A-23.1) ou d'un ministre visé dans l'article 11.5 de la Loi sur l'exécutif (chapitre E-18), ainsi que d'un document du cabinet ou du bureau d'un membre d'un organisme municipal ou scolaire.

Le 2ième alinéa de cet article prévoit qu'un document du cabinet ou du bureau d'un membre d'un organisme municipal n'est pas accessible à moins que le membre ne le juge opportun; ce principe de confidentialité s'applique à tout document du cabinet ou du bureau d'un membre d'un organisme municipal et le pouvoir de consentir à la communication d'un pareil document est exclusivement attribué au maire ou au conseiller concerné.

Le 2ième alinéa de l'article 34 intègre la distinction qui existe entre le membre du conseil d'un organisme municipal et le conseil de l'organisme municipal; en outre, il tient compte des pouvoirs et fonctions exclusivement dévolus au maire d'un organisme municipal, notamment en vertu de l'article 52 précité, pouvoirs et fonctions dont l'exercice donne nécessairement lieu à la détention exclusive de documents; il prévoit, en tenant compte de ces distinctions, une restriction impérative à l'accès sauf consentement du membre concerné.

Le 2ième alinéa de l'article 34 régit le droit d'accès de toute personne à un document du cabinet ou du bureau d'un membre d'un organisme municipal; il régit notamment le droit d'accès d'un membre d'un organisme municipal à un document du cabinet ou du bureau d'un autre membre du même organisme municipal. Cette disposition confirme l'application de la Loi sur l'accès aux demandes d'accès formulées entre membres d'un même organisme municipal, et, conséquemment, à celle des demandeurs.

Dans un jugement(15) rendu le 31 mai 2000 concernant le caractère de confidentialité, en vertu de l'article 34 précité, des états des dépenses encourues annuellement par chaque député, à même un budget annuel, pour l'engagement de personnel et pour le paiement de services professionnels, la Cour d'appel réaffirmait l'importance de la Loi sur l'accès, son statut de loi quasi constitutionnelle ainsi que son caractère législatif fondamental. Concernant particulièrement l'article 34, la Cour soulignait qu'avant «de rechercher l'intention du législateur à la seule lumière des principes qui sous-tendent la Loi, il faut s'arrêter au texte puisque c'est par celui-ci que le législateur s'exprime.»; la Cour précisait que l'article 34 ne fait aucune distinction entre les diverses fonctions et activités d'un élu et, partant, aucune distinction, selon leur nature (politique, administrative ou autre) entre les documents qui s'y rapportent. Aux fins du cas qui nous occupe, l'article 34 prévoit, on ne peut plus simplement et clairement, qu'un document du cabinet ou du bureau d'un membre d'un organisme municipal n'est pas accessible à moins que ce membre ne le juge opportun; cette disposition doit recevoir application lorsque la preuve démontre que le document en litige en est un du cabinet ou du bureau d'un membre d'un organisme municipal et que ce membre, qui a discrétion absolue pour le faire, n'a pas jugé opportun de le rendre accessible.

Je suis d'avis que la preuve présentée à la Commission démontre de façon convaincante que : l'avis juridique en litige est un document du cabinet du maire de l'organisme, document demandé et obtenu par celui-ci dans l'exercice des pouvoirs qui lui sont attribués en cette qualité en vertu de l'article 52 de la Loi sur les cités et villes qui prévoit notamment que le maire voit spécialement à ce que les revenus de la municipalité soient dépensés suivant la loi et à ce que les dispositions de la loi ainsi que les règlements soient fidèlement et impartialement mis à exécution;

le maire de l'organisme, qui, en vertu de la loi, a discrétion absolue pour décider de la communication de ce document, n'a pas jugé opportun de le rendre accessible et il le conserve confidentiellement;

le maire a préalablement informé le conseil de l'organisme de la conformité, avec les conclusions de l'avis juridique en litige, de la proposition sur laquelle le conseil était appelé à se

prononcer dans l'exercice de ses fonctions et sur laquelle il s'est prononcé, de façon finale, avant la demande d'accès écrite des demandeurs.

La décision de la responsable, refusant l'accès à l'avis juridique en litige en vertu de l'article 34 de la Loi sur l'accès, est fondée en droit et n'a pas à être révisée. Il n'est pas utile que la Commission se prononce sur l'application des autres restrictions invoquées par la responsable au soutien de son refus de donner accès à cet avis dont le caractère de confidentialité est démontré.

B) Le rapport du Groupe Mallette Maheu : Le 2ième document en litige, à savoir le rapport final sur l'optimisation des ressources de l'organisme, est essentiellement constitué d'avis et de recommandations (pistes d'intervention ou de solutions proposées) présentés par le consultant Groupe Mallette Maheu concernant les situations qui ont été décrites dans le rapport d'étape déjà déposé au conseil (D-23).

La preuve, de part et d'autre présentée à la Commission concernant le rapport en litige, est substantiellement la suivante :

le document a été produit par un consultant mandaté par le conseil de l'organisme; le document, daté du 28 janvier 1999, a été exclusivement remis au maire, chef exécutif de l'administration de l'organisme, alors qu'un nouveau comité directeur chargé de l'analyser afin de faire des recommandations au conseil ne pouvait être constitué depuis l'élection de novembre 1998 en raison d'une situation administrative particulièrement problématique qui s'est prolongée et «qui commence à se régler»;

le document a été et demeurera détenu par le maire tant et aussi longtemps qu'il n'aura pas été discuté avec la personne qui occupera le poste de directeur général de l'organisme avant d'être présenté au conseil;

le document n'a pas, non plus, été soumis au comité directeur de l'optimisation des ressources, précité, de sorte que le processus décisionnel y relatif n'est pas amorcé;

le document n'a pas été étudié et il n'est pas, totalement ou partiellement, appliqué; le document n'a été déposé ni au service du greffe, ni aux archives, ni au conseil.

La preuve me convainc que le rapport en litige est un document du cabinet du maire de l'organisme et qu'il demeurera visé par l'article 34 de la Loi sur l'accès tant et aussi longtemps que le maire, chef exécutif de l'administration de l'organisme, ne jugera pas nécessaire ou utile de soumettre au conseil, en vertu de l'article 52 précité et après la réalisation de certaines étapes consultatives impliquant le nouveau directeur général et le comité directeur susmentionné, un projet d'optimisation des ressources.

L'article 52 de la Loi sur les cités et villes permet, à la lumière des pouvoirs et fonctions exclusifs attribués au maire d'un organisme municipal régi par cette loi, de cerner ce qu'est un document du cabinet d'un maire.

Cet article met également en évidence des obligations qui incombent exclusivement au maire et dont l'exécution profite au conseil qui, en vertu de la loi, est tenu d'administrer les affaires de l'organisme; notons à cet égard l'obligation voulant que le maire communique au conseil, et non pas à l'un ou à

l'autre des conseillers individuellement, «toutes informations et suggestions relatives à l'amélioration des finances, au bien-être et au progrès de la municipalité». La Commission comprend que le droit d'accès à ces renseignements et suggestions, exclusivement attribué par l'article 52 de la Loi sur les cités et villes au conseil, ne peut, en vertu du 1er paragraphe de l'article 171 de la Loi sur l'accès, être restreint par une disposition de cette dernière loi:

171. Malgré les articles 168 et 169, la présente loi n'a pas pour effet de restreindre:

1o l'exercice du droit d'accès d'une personne à un document résultant de l'application d'une autre loi ou d'une pratique établie avant le ler octobre 1982, à moins que l'exercice de ce droit ne porte atteinte à la protection des renseignements personnels;

La preuve me convainc que le rapport en litige est un document du cabinet du maire visé par l'article 34 de la Loi sur l'accès, document confidentiel à moins que le maire ne juge opportun de le rendre accessible, document qui cessera d'être un document du cabinet du maire et auquel le conseil aura un droit d'accès lorsque le maire jugera, en vertu de l'article 52 de la Loi sur les cités et villes, opportun de lui soumettre un projet d'optimisation des ressources et qu'il devra communiquer au conseil qui y aura alors droit toutes informations et suggestions relatives à l'amélioration des finances, au bien-être et au progrès de l'organisme.

La décision de la responsable, refusant l'accès au rapport en litige en vertu de l'article 34 de la Loi sur l'accès, est fondée en droit; elle n'a pas à être révisée.

La Commission reconnaît le bien fondé, en droit, de la décision de la responsable concernant les 2 documents en litige, vu la preuve et le contenu des documents en litige qui lui démontrent que ces documents sont visés par l'article 34 de la Loi sur l'accès parce qu'ils sont directement liés à l'exercice, par le maire de l'organisme, des pouvoirs qui lui sont exclusivement conférés par le 1er alinéa de l'article 52 de la Loi sur les cités et villes.

La compétence de la Commission en ce qui a trait à la présente demande est claire; cette compétence est notamment illustrée par l'article 34 de la Loi sur l'accès qui régit spécifiquement les demandes d'accès à des documents du cabinet ou du bureau d'un membre d'un organisme municipal. L'article 34 s'applique à tout demandeur, incluant un membre d'un conseil municipal; il n'établit le caractère de confidentialité que des seuls documents qui, en vertu de la preuve, y sont visés.

Le 1er paragraphe de l'article 171, précité, oblige le responsable de l'accès aux documents d'un organisme municipal ainsi que la Commission, dans l'exercice de sa compétence, à appliquer la règle voulant que la Loi sur l'accès n'ait pas pour effet de restreindre l'exercice du droit d'accès attribué au conseil en ce qui a trait aux renseignements visés par l'article 52 de la Loi sur les cités et villes .

POUR TOUS CES MOTIFS, la Commission rejette la demande de révision.

HÉLÈNE GRENIER Commissaire

Québec, le 16 janvier 2001. Procureure de l'organisme : Me Sandra Bilodeau 1. Ascot c. Ministère des Affaires municipales (1997) C.A.I. 124. 2. Olivier c. Village de Wottonville (1943) R.C.S. 118. 3. URBA, octobre 1999, page 58. L'Ancienne-Lorette c. C.U.Q. (1996) R.J.Q. 1345 C.S.; Légaré c. Conseil scolaire de l'Ile de 4. Montréal (1997) C.A.I. 410; Jobin c. Commission scolaire Jeune-Lorette (1997) C.A.I. 450. Séguin c. Ville de Dollard-Des-Ormeaux (1990) C.A.I. 213; Dumoulin c. Ville de 5. Vaudreuil-Dorion (1998) C.A.I.367; Charlebois c. Ville de Lachute, dossier C.A.I. 98 04 03, Me Michel Laporte, 1er février 1999. 6. Ville de l'Ancienne-Lorette c. Communauté Urbaine de Québec (1996) R.J.Q. 1345 (C.S.) 1349. 7. Jobin c. Commission scolaire de la Jeune-Lorette (1997) (C.Q.) 450, 453. 8. Ministère de la Justice c. Bouchard (1998) C.A.I. 488, 493-494 9. Gaboriault c. Société québécoise de développement de la main d'oeuvre (1995) 200. 10. Municipalité de St-Alban c. Récupération Portneuf Inc. (1995) R.J.Q. 1712 (C.A.). Deslauriers c. Québec (Sous-ministre de la santé et des services sociaux) (1991) C.A.I. 311, 11. 321 (C.Q.). 12. Ville de St-Constant c. Filiatrault (1999) C.A.I. 523, 525 (C.Q.). 13. Denis Fortin c. Ville de Cap-Rouge (1997) C.A.I. 312. 14. École Peter Hall Inc. c. Rossignol (1995) C.A.I. 454, 457-461. Procureur général du Québec et Assemblée nationale c. Mac Donell , Cour d'appel 15. 500-09003567-963.

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