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00 11 33 ALBERT A. DUTERVILLE Demandeur c. MINISTÈRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE Organisme public OBJET DU LITIGE Les 15, 16 et 17 mars 2000, le demandeur s'adresse à l'organisme pour obtenir tous les documents relatifs aux plaintes qu'il a déposées pour voies de fait et tentative de meurtre. Il précise vouloir recevoir notamment la correspondance adressée au capitaine Guimond, les déclarations données au policier André Voyer les 31 mai et 4 octobre 1999, les rapports rédigés par les policiers, les enregistrements de conversations téléphoniques qu'il a eues les 30 mai, 15 juillet, 7 et 14 septembre et 18 novembre 1999 au Quartier général de la Sûreté du Québec à Baie-Comeau et à Sept-Îles. Le 10 avril 2000, l'organisme accuse réception des demandes. Le 19 avril suivant, il requiert un délai supplémentaire pour les traiter et réclame des précisions au demandeur au sujet des conversations téléphoniques. Le 4 mai, l'organisme reçoit les précisions du demandeur. Le 19 mai 2000, l'organisme avise le demandeur qu'aucun enregistrement de conversation téléphonique n'a été retrouvé. Il invoque les articles 28, 53, 57 et 88 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements
00 11 33 - 2 -personnels 1 (ci-après appelée « Loi sur l'accès » ou « la loi ») pour lui refuser l'accès au dossier n o 013-991201-001 relatif à la correspondance au capitaine Guimond ainsi qu'aux dossiers n os 245-990601-002, 245-991004-004 et 180-990824-001 se rapportant aux autres événements. Le 2 juin 2000, le demandeur sollicite l'intervention de la Commission pour qu'elle révise cette décision de l'organisme et le 4 décembre, une audience a lieu à Montréal. Le demandeur est autorisé à assister à l'audience par lien téléphonique. PREUVE M e Monique Gauthier, responsable de l'accès, affirme que l'organisme ne détient pas les enregistrements de conversations que le demandeur a réclamés. Elle confirme au demandeur que les conversations au Quartier général sont habituellement enregistrées, mais qu'il s'agit probablement, dans ce cas-ci, d'appels logés au Quartier général qui ont été transférés vers un autre lieu et poste téléphonique, à laquelle situation il n'y a pas d'enregistrement des conversations. M me Josée Gagné, répondante à l'accès à la Sûreté du Québec, affirme que les recherches qu'elle a effectuées pour retrouver les enregistrements des conversations téléphoniques provenant de Baie-Comeau ou de Sept-Îles ont été infructueuses. Le demandeur signale qu'il demande les enregistrements des conversations téléphoniques au motif qu'on ne le croit pas parce qu'il est un détenu. M e Gauthier explique que les autres dossiers sont des enquêtes menées par la Sûreté du Québec à la suite des plaintes du demandeur qui touchent les agents du Service correctionnel. Elle fait valoir que les dossiers traitent également de policiers de la Sûreté du Québec dont le demandeur s'est aussi plaint. Elle atteste que les enquêtes sont terminées et que l'organisme va transmettre au demandeur la majeure partie des documents contenus aux 1 L.R.Q., c. 2.1.
00 11 33 - 3 dossiers, à l'exception des renseignements recueillis à l'établissement de détention qui permettraient d'identifier les témoins, des renseignements nominatifs et ceux qui sont de nature confidentielle. M e Gauthier remet à la Commission les documents en litige et une preuve ex parte est présentée par l'organisme en vertu de l'article 20 des règles de preuve de la Commission : 20. La Commission peut prendre connaissance, en l'absence du requérant et à huis clos, d'un document que l'organisme public ou le tiers prétend devoir être soustrait à l'accès en vertu d'une restriction prévue à la section II de la Loi 2 . Le demandeur prétend qu'il a été l'objet d'une injustice flagrante et qu'il a « été jugé sur des mauvaises choses ». Il avance que les policiers ne révèlent pas certains faits dans les rapports, qu'ils se sont parjurés, que « les rapports sont tous des faux » et que des détenus ont été écartés pour qu'ils ne puissent témoigner en sa faveur. ARGUMENTS La procureure de l'organisme soumet que les dossiers en litige concernent une enquête réalisée à la suite de plaintes déposées par le demandeur et qu'il ne s'agit pas de dossiers concernant le demandeur. Elle argue que les dossiers renferment des sources confidentielles d'informations 3 , des notes sur la façon dont a été menée l'enquête 4 , des noms de suspects et que ces renseignements s'en trouvent protégés par le 3 e paragraphe de l'article 28 de la loi et l'article 53 : 28. Un organisme public doit refuser de confirmer l'existence ou de donner communication d'un renseignement obtenu par une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, lorsque sa divulgation serait susceptible: (…) 2 Règles de preuve et de procédure de la Commission d'accès à l'information, décret 2058-84. 3 Sirois-Hallé c. Bélair compagnie d'assurances générales, C.S. Québec, n o 200-05-002123-953, 17 septembre 1999, j. Dufour; Procureur général du Québec c. Dorion, [1993] R.D.J. 88. 4 Ministère de la sécurité publique c. Joncas, C.Q. Québec, n o 200-02-020553-980, 11 juin 1999, j. Villeneuve.
00 11 33 - 4 -3° de révéler une méthode d'enquête, une source confidentielle d'information, un programme ou un plan d'action destiné à prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois; (…) 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1° leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2° ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. APPRÉCIATION M mes Gauthier et Gagné ont déclaré que l'organisme ne détenait pas les enregistrements des conversations téléphoniques qui auraient été effectuées par le demandeur entre les mois de mai et novembre 1999. Cette preuve me convainc de l'inexistence de ces documents. J'ai examiné les documents en litige et en disposerai de la façon ci-dessous exposée. L'organisme a d'ailleurs identifié, lors de la preuve ex parte, lesdits documents et a annoncé qu'il consentait à remettre au demandeur, pour chacun des quatre dossiers, plusieurs documents : PREMIER DOCUMENT : DOSSIER N O 245-990601-002, 26 PAGES Documents accessibles : Les pages 2, 7 et 10 à 25; et Les pages 1 et 9, à l'exception des renseignements nominatifs apparaissant au 2 e paragraphe de la page 1 et à la section B de la page 9. Documents en litige : La partie masquée des pages 1 et 9 est refusée parce qu'elle permettrait vraisemblablement de révéler un renseignement concernant une autre personne physique aux termes de l'article 88 de la loi;
00 11 33 - 5 - Les pages 3, 4, 5, 6 et 26 sont refusées parce qu'elles révéleraient une source confidentielle d'informations ou une méthode d'enquête selon le 3 e paragraphe de l'article 28 de la loi; et La page 8 est refusée en vertu du 2 e alinéa de l'article 9 de la loi. La preuve démontre que l'enquête menée par la Sûreté du Québec fait suite aux plaintes portées par le demandeur qui s'est dit victime d'agression et vise des agents du Service correctionnel. Même si le demandeur a un intérêt à suivre ses plaintes, le dossier constitué par l'organisme n'est pas celui du demandeur, mais celui des personnes visées par les plaintes. Je crois que l'organisme était justifié de refuser l'accès au demandeur à la partie masquée des pages 1 et 9 et aux pages 3, 4, 5, 6, 8, et 26 de ce document en litige. DEUXIÈME DOCUMENT : DOSSIER N O 180-990824-001, 6 PAGES Documents accessibles : Les pages 1, 3, 5 et 6; et La page 2, à l'exception des 4 e et 6 e paragraphes. Documents en litige : Les 4 e et 6 e paragraphes de la page 2 sont refusés parce qu'il s'agit d'un renseignement nominatif; et La page 4 est refusée parce que sa communication révélerait une méthode d'enquête. Pour les mêmes motifs qu'évoqués pour le précédent document, le demandeur ne pourra recevoir le 6 e paragraphe de la page 2 ainsi que la page 4 des documents en litige. Le 4 e paragraphe de la page 2 lui est accessible parce que cela ne lui apprendrait rien qu'il ne sache déjà. TROISIÈME DOCUMENT : DOSSIER N O 245-991004-004, 88 PAGES Documents accessibles : La correspondance du demandeur aux pages 1 à 74 ainsi que les déclarations de ce dernier aux pages 75 et 77 à 83.
00 11 33 - 6 Documents en litige : Les pages 76 et 84 à 88 sont refusées parce qu'elles renferment des déclarations de tiers ou des renseignements recueillis par l'enquêteur qui permettraient d'identifier une autre personne physique. La vérification des pages en litige me confirme que la communication de celles-ci dévoilerait soit des renseignements nominatifs ou des renseignements protégés par l'article 28 de la loi. QUATRIÈME DOCUMENT : DOSSIER N O 013-991201-001, 30 PAGES Documents accessibles : Les pages 1, 4, 6, 7, 10 et 12 à 22; et Les pages 2, 3, 5, 8, 9, 11 et 21, à l'exception des renseignements nominatifs. Documents en litige : Les parties masquées aux pages 2, 3, 5, 8, 9,11, 21 et 23 à 30 sont refusées parce qu'elles contiennent des renseignements sur les suspects à la suite de la plainte du demandeur, des notes de policiers ou des renseignements au sujet de tiers. Les parties du document qui ont été masquées aux pages 2, 3, 5, 8, 9 et 11 sont des noms de personnes ou les dates de naissance de celles-ci et sont des renseignements protégés par l'article 88 de la loi. La partie retranchée au bas de la page 21 est une note manuscrite qui, pour les mêmes motifs que le premier document en litige, n'est pas accessible au demandeur. Le demandeur ne pourra également obtenir les autres pages parce que celles-ci bénéficient des restrictions prévues à larticle 88 et au 3 e paragraphe de l'article 28 de la loi. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : ORDONNE à l'organisme de transmettre au demandeur copie des documents suivants :
00 11 33 - 7 Premier document : dossier n o 245-990601-002 Les pages 2, 7 et 10 à 25; et Les pages 1 et 9, masquées du nom d'autres personnes physiques que le demandeur. Deuxième document : dossier n o 180-990824-001 Les pages 1, 3, 5 et 6; et La page 2, à l'exception du 6 e paragraphe. Troisième document : dossier n o 245-991004-004 Les pages 1 à 75 et 77 à 83. Quatrième document : dossier n o 013-991201-001 Les pages 1, 4, 6, 7, 10 et 12 à 22; Les pages 2, 3, 5, 8, 9 et 11, masquées des noms et dates de naissance d'autres personnes physiques que le demandeur; et La page 21, masquée de la note manuscrite en bas de page. MICHEL LAPORTE Commissaire Montréal, le 16 février 2001 Pour l'organisme : Me Lysanne Demers
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