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00 00 74 PROVOST, Gaétan ci-après appelé «le demandeur» c. VILLAGE DE SENNEVILLE ci-après appelé «l'organisme» Le 3 novembre 1999, le demandeur sadresse à lorganisme afin dobtenir copie de 4 rapports quil identifie avec précision. Insatisfait de la décision rendue par la responsable de laccès le 23 novembre 1999 quant à 3 des rapports visés par sa demande daccès, il en requiert la révision le 17 décembre suivant. Les parties sont entendues le 9 mars 2001, à Montréal. Les documents en litige me sont alors remis par la procureure de lorganisme. PREUVE : La procureure de lorganisme sengage à remettre au demandeur une copie complète du rapport préparé par Aqua Data sur le réseau daqueduc et sur le réseau de bornes-fontaines, document que la responsable de laccès avait refusé de communiquer en vertu des articles 37 et 39 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Demeurent conséquemment en litige :
00 00 74 2 le rapport fait par monsieur Earl Graham sur lévaluation du service des incendies de lorganisme et auquel laccès a été refusé parce quil «na pas fait lobjet de discussion, de délibérations ou de décision de la part du conseil»; le rapport fait en juin 1994 par le Groupement technique des assureurs inc. sur lévaluation et le classement général du service des incendies de lorganisme et auquel laccès a été refusé en vertu de larticle 37 de la Loi sur laccès. La procureure de lorganisme fait entendre monsieur Bryan Badger, directeur général de lorganisme depuis 1997, qui témoigne sous serment. Monsieur Badger affirme quen juin 1999, alors que lorganisme sinterrogeait sur le sort de sa brigade de pompiers, la municipalité de Ste-Anne-de-Bellevue a offert au comité de sécurité de lorganisme ses services de protection contre lincendie, offre que lorganisme a fait analyser par un tiers afin dobtenir un relevé de la situation, des commentaires objectifs ainsi que des recommandations. Il ajoute que cette offre de services comprenait la prise en charge des équipements de lorganisme ainsi que dun certain nombre de ses pompiers volontaires. Il précise que le rapport de monsieur Graham a été déposé au comité de sécurité de lorganisme en novembre 1999 et que loffre de services de la municipalité de Ste-Anne-de-Bellevue a fait lobjet dune résolution du conseil de lorganisme en mars 2000. Il précise également que monsieur Graham a été pompier à la Ville de Westmount et quil était un tiers tant à légard de lorganisme que de la municipalité de Ste-Anne-de-Bellevue.
00 00 74 3 Monsieur Badger affirme que le document «Évaluation de la protection du public contre lincendie», daté de juin 1994, a pour sa part été préparé par le Groupement technique des assureurs inc. parce que lorganisme voulait obtenir une nouvelle évaluation de sa cote en matière dassurance après avoir acquis de nouveaux équipements destinés à la protection contre lincendie. Il précise que lévaluation ainsi effectuée a permis lobtention dune meilleure cote. La procureure de lorganisme fait également entendre madame Suzanne Lalande, greffière de lorganisme depuis 1995 et directrice générale adjointe de celui-ci depuis 1999, qui témoigne sous serment. Madame Lalande affirme quelle exerçait la fonction de responsable de laccès en 1999 et quelle a traité la demande daccès en cette qualité. Elle explique avoir refusé laccès au rapport fait par monsieur Earl Graham afin de protéger le processus décisionnel du conseil de lorganisme; elle ajoute que le mandat de monsieur Graham lui a été confié en octobre 1999 et que la décision du conseil de lorganisme relative à loffre de services de Ste-Anne-de-Bellevue na été prise quen 2000. Elle spécifie avoir refusé laccès à ce rapport parce quil navait pas encore été discuté par le conseil lors de la demande, d lapplication des restrictions prévues aux articles 37 et 39 de la Loi sur laccès. Madame Lalande explique que le document du Groupement technique des assureurs inc., daté de juin 1994, a été préparé en vue de faire évaluer la cote de lorganisme en ce qui concerne la protection du public contre lincendie. Elle ajoute avoir refusé laccès à une
00 00 74 4 partie de ce document, à savoir les avis ainsi que les recommandations faits au conseil de lorganisme, en vertu de larticle 37 de la Loi sur laccès. Le demandeur témoigne sous serment. Il mentionne avoir formulé sa demande daccès pendant la période électorale municipale de 1999. À son avis, les rapports qui demeurent en litige ont été commandés à la suite de discussions concernant le fonctionnement déficient du service de protection contre lincendie de lorganisme, documents dont lui et un collègue pompier, tous deux candidats à lélection, auraient voulu faire usage à des fins électorales. Il ajoute, en ce qui concerne le rapport préparé par monsieur Earl Graham, que la crédibilité de ce dernier aurait pu être mise en doute puisquil navait pas de qualification particulière pour être consulté si ce nest quil avait déjà été pompier. À son avis, loffre de service de Ste-Anne-de-Bellevue naurait pas été acceptée si la brigade des pompiers ne sétait pas syndiquée. À son avis enfin, laccès aux rapports lui a été refusé en raison de leur contenu négatif à lendroit des administrateurs de lorganisme. Contre-interrogé par la procureure de lorganisme, monsieur Provost indique avoir été défait à lélection de 1999, avoir pris connaissance dune partie du rapport préparé par Aqua Data ainsi que de documents autres que ceux qui lui ont été rendus accessibles parce quune personne lui en a partiellement facilité laccès. Il mentionne ne pas avoir été consulté par monsieur Earl Graham alors quil préparait son rapport et ne pas avoir siégé
00 00 74 5 au comité de sécurité de lorganisme. Il dit «partiellement ou plus ou moins» connaître les démarches entreprises par lorganisme en ce qui a trait à son réseau dapprovisionnement en eau et il reconnaît que le projet relatif à ce réseau est à létude depuis de nombreuses années. De nouveau interrogé par la procureure de lorganisme, monsieur Badger affirme que des études concernant le réseau dapprovisionnement en eau, entreprises en 1992, sont toujours en cours; il précise que toutes les décisions nont pas été prises et que certains sujets, tels que le branchement de «lignes daqueduc» et la rentabilité du réseau, font encore lobjet de discussions. ARGUMENTATION : La procureure de lorganisme rappelle que les restrictions au droit daccès sur lesquelles la responsable a appuyé son refus sappliquent à des renseignements ayant des incidences sur les décisions administratives ou politiques. Elle soumet à cet égard que ces restrictions sont facultatives et que lorganisme peut y recourir en toute légalité en vue de protéger son processus décisionnel. La preuve, ajoute-t-elle, démontre, en ce qui concerne le rapport préparé par monsieur Earl Graham, que : ce document a fait lobjet dune décision de lorganisme en 2000, postérieurement à la date de la demande daccès; laccès à la partie analytique de ce rapport, bien que remise au demandeur séance tenante, pouvait, le 23 novembre 1999, être refusé en vertu de larticle 39 de la Loi sur laccès;
00 00 74 6 laccès aux avis et recommandations 1 contenus dans ce rapport pouvait et peut encore être refusé en vertu de larticle 37 de la même loi; le fait de ne pas avoir identifié comme tels les articles de la loi sur lesquels le refus de la responsable sappuyait ne change rien au contexte dans lequel la décision de la responsable a été prise 2 et qui a été mis en preuve. Elle ajoute que 4 pages préparées par monsieur Graham en complément de son rapport principal ont aussi totalement été refusées en vertu de larticle 37. Elle soumet, en ce qui concerne le rapport préparé par le Groupement technique des assureurs inc. concernant lévaluation de la protection du public contre lincendie, daté de juin 1994, que : laccès à ce document a été partiellement refusé en vertu de larticle 37; les renseignements en litige sont des avis et des recommandations, cest-à-dire une évaluation ou un jugement de valeur portant sur des informations qui peuvent faire lobjet dune décision, évaluation ou jugement de valeur formulés de nature à mettre lorganisme dans une position de choix, les mots avis et recommandation exprimant à des degrés divers une même chose, cest-à-dire lénoncé dun jugement de valeur conditionnant lexercice dun choix entre diverses alternatives 3 ; la restriction prévue par larticle 37 peut être invoquée même si la décision de lorganisme concernant son service de protection contre lincendie a été rendue 4 . 1 Deslauriers c. Québec (sous-ministre de la santé et des services sociaux) (1991) C.A.I. 311, 321 (C.Q.). 2 Ministère de la Justice c. Me David Schulze, Cour du Québec No 500-02-065681-988, 28 avril 2000. 3 Deslauriers c. Québec (sous-ministre de la santé et des services sociaux) (1991) C.A.I. 311, 321 (C.Q.). 4 Ascot c. Ministère des Affaires municipales (1997) C.A.I. 124.
00 00 74 7 Le demandeur soumet essentiellement que les documents qui demeurent en litige devraient lui être communiqués puisque lorganisme a aboli sa brigade de pompiers volontaires et quil sera fusionné avec la Ville de Montréal. DÉCISION : Le demandeur requiert la révision de la décision prise par la responsable de laccès aux documents de lorganisme le 23 novembre 1999. La Commission doit donc se prononcer sur la légalité de cette décision au moment elle a été prise et en tenant compte de la preuve admissible concernant les seuls documents qui demeurent en litige. Rapport préparé par M. Earl Graham (Graham Consulting): Jai pris connaissance de ce document, à mon avis constitué dun relevé de situation, de quelques avis et recommandations. Je ny ai pas trouvé danalyse; les propos suivants (auxquels accès a été donné) de monsieur Graham, inscrits à la 2 ième page du «Summary», confirment linexistence dune analyse I have accumulated as much information concerning the Fire Department and its functioning that was available in order to obtain a big picture. I have inspected the equipment with recommendations in several areas. I have used NFPA standards to apply these recommendations…». Je comprends que léquipement concerné par ces propos a été examiné par le conseiller; je constate cependant que le résultat de cet examen est directement traduit dans les avis et les recommandations, sans plus. Le relevé de situation, partie essentiellement factuelle du rapport et comprenant des statistiques, aurait être communiqué au demandeur à la suite de sa demande du 3 novembre 1999; je constate que cette partie lui a finalement été communiquée lors de laudition.
00 00 74 8 Restent les avis et recommandations, réparties sur les 2 pages du «Summary» et constituant la substance des 4 dernières pages du rapport; la preuve démontre à ce sujet que le rapport a été fait, à la demande de lorganisme, en octobre 1999, par un conseiller externe sur une matière de sa compétence 5 . Le 2 ième alinéa de larticle 37 de la Loi sur laccès, qui se lit comme suit, habilite lorganisme à refuser de communiquer un avis ou une recommandation faits, à sa demande, depuis moins de dix ans par un conseiller sur une matière de sa compétence : 37. Un organisme public peut refuser de communiquer un avis ou une recommandation faits depuis moins de dix ans, par un de ses membres, un membre de son personnel, un membre d'un autre organisme public ou un membre du personnel de cet autre organisme, dans l'exercice de leurs fonctions. Il peut également refuser de communiquer un avis ou une recommandation qui lui ont été faits, à sa demande, depuis moins de dix ans, par un consultant ou par un conseiller sur une matière de sa compétence. La décision de la responsable relative à ces avis et recommandations est fondée en droit et na pas à être révisée. Le rapport de monsieur Graham est complété par un rapport additionnel de 4 pages préparé à la suite dune rencontre tenue le 2 novembre 1999, à la demande du conseil de lorganisme. Ce document est substantiellement constitué de renseignements nominatifs, dune part et davis, dautre part; les renseignements nominatifs sont confidentiels en vertu de larticle 53 de la Loi sur laccès; les conditions relatives à lapplication du 2 ième alinéa de larticle 37, précité, relatif aux avis, sont par ailleurs réunies : 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1 o leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 5 Beausoleil c. Ministère de la santé et des services sociaux (1987) C.A.I. 433.
00 00 74 9 2 o ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. Le refus de la responsable concernant ce rapport complémentaire est maintenu. Rapport du Groupement technique des assureurs inc. : La preuve présentée concernant ce rapport me convainc quil a été fait, en 1994, à la demande de lorganisme, par un consultant, sur une matière de sa compétence. Jai pris connaissance du rapport et, spécifiquement, des renseignements auxquels laccès a été refusé, à savoir : la brève énumération des sujets qui font lobjet des recommandations ainsi que le titre des 6 annexes auxquelles réfèrent ces recommandations, inscrits dans la 2 ième page de la table des matières : ces renseignements ne constituent aucunement un avis ou une recommandation et ils doivent conséquemment être communiqués au demandeur; les renseignements des pages 3 et 4 : ces renseignements constituent des avis qui pouvaient être soustraits à laccès en vertu de larticle 37; la décision de la responsable est fondée à cet égard; les renseignements inscrits en caractère gras, en page 16 : ces renseignements constituent des avis et recommandations qui pouvaient être soustraits à laccès en vertu de larticle 37 précité; les autres renseignements doivent être communiqués au demandeur;
00 00 74 10 les pages 17 et 18 : les renseignements qui y sont inscrits constituent substantiellement des avis et des recommandations qui pouvaient être soustraits à laccès en vertu de larticle 37 précité; les renseignements inscrits en caractère gras de la page 19 : ces renseignements constituent des recommandations qui pouvaient être soustraites à laccès en vertu de larticle 37 précité; les autres renseignements doivent être communiqués au demandeur; les pages 20, 21 et 22 : substantiellement constituées de recommandations, ces pages pouvaient être soustraites à laccès en vertu de larticle 37 précité; les 6 annexes, soit : des résultats factuels dessais (1), un guide général (2), des normes préétablies et dapplication générale (3), un tableau dapplication générale (4), un éventail des divers éléments constituant la formation requise dans un domaine déterminé (5) ainsi que des modalités de vérification (6) ne sont que des références que complète, in fine, un lexique; ces annexes ainsi que le lexique, qui ne sont pas des avis ou des recommandations qui ont été faites à lorganisme doivent être communiquées au demandeur. POUR CES MOTIFS, la Commission ACCUEILLE partiellement la demande de révision; ORDONNE conséquemment à lorganisme de communiquer au demandeur copie des renseignements accessibles déterminés plus haut et faisant partie de lévaluation faite par le Groupement technique des assureurs inc.;
00 00 74 11 PREND ACTE de la remise, au demandeur et durant laudition, de copie de la partie factuelle accessible du rapport préparé par monsieur Earl Graham; PREND ACTE de lengagement de lorganisme à fournir au demandeur copie intégrale du rapport préparé par Aqua Data et visé par sa demande daccès; REJETTE la demande quant aux avis et recommandations en litige. HÉLÈNE GRENIER Commissaire Québec, le 15 mars 2001. Procureure de lorganisme : M e Sylvie Devito
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