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99 00 25 URA GREENBAUM Demandeur c. LE CURATEUR PUBLIC DU QUÉBEC Organisme public L'OBJET DU LITIGE Le 14 décembre 1998, le demandeur s'adresse à l'organisme pour « avoir une copie du rapport pour réviser l'organisation du travail des régimes privés remis en octobre 1997 tel qu'annoncé à la page 17 du dernier rapport annuel du Curateur public. ». Le 17 décembre 1998, l'organisme lui répond que le rapport ne peut lui être communiqué parce qu'il contient des analyses et des recommandations au sens de l'article 37 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (ci-après appelée « Loi sur l'accès » ou « la loi »). Le 8 janvier 1999, le demandeur présente à la Commission une requête pour que soit révisée cette décision de l'organisme et, le 7 février 2001, une audience se tient à Montréal. LA PREUVE M. Jean Nadeau, responsable du Service de traitement des demandes d'accès, remet à la Commission sous pli confidentiel le rapport en litige. Il mentionne que ce rapport a été réalisé par les employés de l'organisme 1 L.R.Q., c. A-2.1.
99 00 25 - 2 -qui avaient le mandat de réviser « l'organisation du travail pour le traitement des signalements des mandataires et la surveillance des tuteurs et curateurs privés ». Il fait la lecture de la table des matières du document qui compte 67 pages. Il attire l'attention sur les parties 6 et 7, intitulées respectivement « Les produits et services à livrer » et « La nouvelle organisation du travail ». Il affirme que ces dernières parties du rapport font état de divers scénarios, avantages et désavantages à retenir l'un ou l'autre de ceux-ci, donnent un profil des ressources humaines avec ses forces et ses faiblesses, élaborent les échéanciers et terminent par des recommandations. Il prétend que les parties 1 (Historique de l'organisation du travail en place), 2 (Le mandat), 3 (Les principes d'organisation du travail), 4 (L'environnement informatique en bref), 5 (L'évolution de la clientèle dans le temps) et 8 (Les honoraires) forment un tout avec les parties 6 et 7 parce qu'elles constituent la base de l'analyse. Il soutient que la communication des parties 1 à 5 et 8 révélerait les forces et les faiblesses de l'organisation, les conditions de réussite, le projet de révision des honoraires et la répartition de tâches prévues pour les employés. Interrogé par le demandeur, M. Nadeau relate que le rapport est un document administratif qui contient des informations d'ordre général au sujet des administrés. LES ARGUMENTS La procureure de l'organisme invoque l'article 37 de la loi : 37. Un organisme public peut refuser de communiquer un avis ou une recommandation faits depuis moins de dix ans, par un de ses membres, un membre de son personnel, un membre d'un autre organisme public ou un membre du personnel de cet autre organisme, dans l'exercice de leurs fonctions. Il peut également refuser de communiquer un avis ou une recommandation qui lui ont été faits, à sa demande, depuis moins de dix ans, par un consultant ou par un conseiller sur une matière de sa compétence.
99 00 25 - 3 La procureure fait valoir que le rapport a été réalisé depuis moins de dix ans et qu'il est le fruit du travail de dix personnes. Elle estime que le document forme un tout et répond aux critères de l'article 37 de la loi, spécifiquement aux analyses et recommandations que l'on retrouve aux parties 6 et 7. Elle demande à ce que l'organisme soit autorisé à exiger les frais de reproduction au demandeur si la Commission décide de donner accès à une partie du rapport. Le demandeur prétend que le document est un rapport d'un organisme public et qu'à ce titre, il a le droit de l'obtenir. APPRÉCIATION Pour que l'article 37 de la loi puisse s'appliquer, il doit y avoir un avis ou une recommandation faite par un membre du personnel de l'organisme depuis moins de dix ans. La Cour du Québec, dans l'affaire Deslauriers c. Sous-ministre de la Santé et des Services sociaux 2 , a déjà statué que : « [...] pour déterminer si un organisme peut refuser de communiquer un document ou partie d'icelui au motif qu'il contient un avis ou une recommandation, le Tribunal doit en venir à la conclusion, à l'examen du document en litige, que celui-ci comporte une évaluation ou un jugement de valeur portant sur les informations qui peuvent faire l'objet d'une décision, évaluation ou jugement de valeur formulés de nature à mettre l'organisme dans une position de choix: agir ou non [...] Dans ce contexte, les mots «avis» et «recommandation» expriment à des degrés divers une même chose, c'est-à-dire l'énoncé d'un jugement de valeur conditionnant l'exercice d'un choix entre diverses alternatives. » J'ai examiné le rapport en litige. Je suis d'avis que les pages 30 à 59 et 66 et 67 de celui-ci répondent à la définition donnée dans l'affaire Deslauriers 3 parce qu'elles placent l'organisme devant le choix entre diverses alternatives pour 2 [1991] C.A.I. 311, 325 (C.Q.).
99 00 25 - 4 -agir ou non. Les renseignements qui sont contenus dans ces pages forment un tout cohérent auquel on ne peut appliquer le test de l'article 14 de la loi sans en altérer le sens : 14. Un organisme public ne peut refuser l'accès à un document pour le seul motif que ce document comporte certains renseignements qu'il doit ou peut refuser de communiquer en vertu de la présente loi. Si une demande porte sur un document comportant de tels renseignements, l'organisme public peut en refuser l'accès si ces renseignements en forment la substance. Dans les autres cas, l'organisme public doit donner accès au document demandé après en avoir extrait uniquement les renseignements auxquels l'accès n'est pas autorisé. La page 29 du rapport bénéficie pour sa part de la restriction de l'article 53 de la loi parce qu'elle établit, de façon détaillée, la répartition des tâches aux employés avec diverses informations chiffrées qui ne sont pas des renseignements prévus aux 1 er et 2 e alinéas de l'article 57 de la loi : 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1 o leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2 o ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. 57. Les renseignements suivants ont un caractère public: 1 o le nom, le titre, la fonction, la classification, le traitement, l'adresse et le numéro de téléphone du lieu de travail d'un membre d'un organisme public, de son conseil d'administration ou de son personnel de direction et, dans le cas d'un ministère, d'un sous-ministre, de ses adjoints et de son personnel d'encadrement; 2 o le nom, le titre, la fonction, l'adresse et le numéro de téléphone du lieu de travail et la classification, y compris l'échelle de traitement rattachée à cette classification, d'un membre du personnel d'un organisme public; (…) En ce qui concerne les autres pages du rapport, il s'agit soit de relevés informatifs ou statistiques, de renseignements factuels, de principes formulés en 3 Id.
99 00 25 - 5 -termes généraux, de constats ou d'une revue sur les auteurs ayant traité de l'organisation du travail. J'en arrive donc à la conclusion que les renseignements contenus aux pages 1 à 28 et 60 à 65 ne répondent pas aux critères de l'article 37 de la loi et peuvent être communiqués au demandeur. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : ACCUEILLE en partie la demande de révision; et ORDONNE à l'organisme de transmettre au demandeur copie du rapport en litige, à l'exception des pages 29 à 59, 66 et 67. MICHEL LAPORTE Commissaire Montréal, le 22 mars 2001 M e Birgitta Storjohann Procureure de l'organisme
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