Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 06 20 79 Date : Le 20 décembre 2007 Commissaire : M e Jean Chartier DÉCISION OBJET DEMANDE DE RÉVISION en vertu de l’article 135 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 . 1 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée « Loi sur l’accès ».X Demanderesse c. VILLE DE QUÉBEC Organisme et CLUB AQUATIQUE DE CHARLESBOURG INC. et CLUB DE NATATION EXCEL Tierces parties
06 20 79 Page : 2 [1] Le 30 octobre 2006, la demanderesse transmet à l’organisme une demande d’accès rédigée comme suit : « Par la présente, je demande accès à l’état financier de la natation à Charlesbourg sous forme d’état financier ville, de la société Club Aquatique de Charlesbourg inc. et de la société Club de natation Excel inc. pour les années 2002, 2003, 2004 et 2005 démontrant tous les revenus et les dépenses de la natation à Charlesbourg. » [2] Le 3 novembre 2006, la responsable de l’accès de l’organisme, M e Line Trudel, accuse réception de la demande d’accès auprès de la demanderesse. [3] Le 16 novembre 2006, la responsable de l’accès de l’organisme transmet une lettre à la demanderesse dans le but d’aviser cette dernière qu’elle prolongera de dix jours le délai à l’intérieur duquel elle doit traiter la demande d’accès. [4] Le 29 novembre 2006, la responsable de l’accès de l’organisme répond à la demanderesse que le Club aquatique de Charlesbourg inc. et le Club de natation Excel ne sont pas des entités juridiques reliées à l’organisme. [5] Le 4 décembre 2006, la demanderesse demande à la Commission d’accès à l’information (la Commission) de procéder à la révision de la décision de l’organisme. AUDIENCE [6] Une audience a lieu à Québec le 12 octobre 2007 en présence des parties. A) PREUVE ET REPRÉSENTATIONS i) De l’organisme [7] La procureure de l’organisme dépose à l’audience la correspondance entre la demanderesse et l’organisme à la suite de la transmission de la demande d’accès. [8] Elle indique que la demanderesse a déjà fait des demandes d’accès semblables pour des organismes de loisirs différents et que la réponse de l’organisme a toujours été la même.
06 20 79 Page : 3 [9] Elle affirme que la municipalité ne détient pas « les états financiers de la natation à Charlesbourg sous forme d’état financier ville », pas plus que les états financiers du Club aquatique de Charlesbourg inc. et du Club de natation excel. [10] Elle ajoute que l’organisme n’a pas l’obligation de constituer des documents pour donner suite à la demande d’accès. Le Club aquatique de Charlesbourg inc. et le Club de natation excel sont des corporations constituées en vertu de la partie III de la Loi sur les compagnies 2 et elles n’ont aucun lien avec l’organisme. Cela apparaît des lettres patentes de chacune des deux corporations précitées « P-01 et P-02 ». [11] Elle soutient que les deux clubs de natation ne sont pas assujettis à la loi et ne répondent pas aux conditions établies à l’article 5 de la Loi sur l’accès pour être considérés comme un « organisme municipal ». ii) De la demanderesse [12] La demanderesse répète qu’elle veut obtenir de l’organisme les états financiers du Club aquatique de Charlesbourg inc. et du Club de natation Excel. Tout ce qu’elle a pu obtenir de l’organisme est un document intitulé « Journal des caisses-recettes » qu’elle dépose sous la cote D-14, document que lui a transmis l’organisme pour les années 2002, 2003 et 2004. [13] Elle n’est pas satisfaite des informations qui apparaissent sur ces documents puisqu’ils ne révèlent que les montants encaissés par l’organisme dans les piscines qu’il exploite. Ce document n’indique aucunement la façon dont les sommes recueillies par la municipalité ont été dépensées, distribuées ou autrement utilisées. [14] Monsieur Denis Servais, directeur des loisirs de l’arrondissement de Charlesbourg, est appelé à témoigner dans cette affaire. [15] Il explique que l’organisme offre dans sa « programmation de loisirs » différentes activités aquatiques pour les enfants, les adultes et les aînés. Ces cours visent l’initiation à la natation pour les petits, la mise en forme pour les personnes âgées en passant par l’acquisition de divers grades de compétence en matière de sécurité aquatique. [16] Les citoyens peuvent s’inscrire à ces activités moyennant le paiement d’un montant fixé pour une série de cours. Ces montants sont payés directement à l’organisme. 2 L.R.Q., c. C-38.
06 20 79 Page : 4 [17] L’organisme ne dispose pas d’états financiers pour ces activités. Elles font l’objet d’une compilation globale pour l’ensemble des activités de loisirs de l’organisme et la demanderesse a déjà obtenu les informations disponibles à ce titre. [18] Il explique que les deux clubs de natation visés par la demande d’accès sont des clubs privés qui visent à développer des aptitudes de compétition et qui ne sont aucunement reliés à l’organisme. Ces clubs sont toutefois reconnus par l’organisme en vertu de sa « Politique de reconnaissance des organismes partenaires » (déposée par la demanderesse) sous la cote P-06. [19] La programmation des activités, la gestion de celles-ci, l’encaissement des frais d’inscription et de compétition est fait par chacun des clubs respectifs. [20] Par ailleurs, chacun de ces clubs de natation a accès à des locaux et aux piscines moyennant une rétribution versée à l’organisme. iii) Des tierces parties [21] Monsieur Martin Hodgson représente les deux tierces parties. Il explique avoir été le président du Club de natation Excel dont la fiche d’enregistrement du Registraire des entreprises du Québec a été déposée sous la cote P-02. Il explique que ce club de natation était un regroupement des adeptes de cette discipline provenant des arrondissements de Lorretteville et de Charlesbourg. Cette Corporation a été créé en mars 1995 et a été dissoute le 10 janvier 2006. À sa connaissance, le Club de natation excel n’a jamais fait d’états financiers. [22] Par la suite, il explique que le Club aquatique de Charlesbourg inc. est toujours en activité et qu’il est le seul club de natation reconnu en vertu de la « Politique de reconnaissance », pièce P-06, pour l’arrondissement de Charlesbourg. [23] Les états financiers du club aquatique ont été produits à tous les ans à l’organisme. [24] Il est le président du club depuis neuf ou dix ans. Il admet avoir été consulté par l’organisme pour savoir s’il consentait à ce que l’organisme remette les états financiers de 2002 à 2005 à la demanderesse.
06 20 79 Page : 5 [25] Il a refusé que l’organisme remette à la demanderesse ces documents, et ce, pour les motifs suivants : - les états financiers sont des documents qui font l’objet d’une diffusion publique une seule fois par année, lors des assemblées générales annuelles du club; - les assemblées annuelles accueillent entre 20 et 30 membres du club à chaque année; - les états financiers sont alors distribués à toutes les personnes qui sont présentes, ils y sont débattus et sont transmis par la suite à l’organisme; - il n’a jamais refusé de remettre une copie des états financiers aux personnes qui sont présentes lors des assemblées annuelles; - le club dont il est président n’est pas subventionné par l’organisme; - les états financiers font état de toutes les sources de revenu du Club et ces sources de revenus peuvent être diverses. La divulgation de ces sources de revenus, si les états financiers devaient être rendus publics, pourrait avoir un impact sur les revenus ultérieurs du Club aquatique puisqu’il y aurait alors possibilité qu’une certaine concurrence s’installe entre les organismes reconnus en vertu de la « Politique de reconnaissance » de la Ville. DÉCISION [26] La demanderesse veut avoir accès aux états financiers de l’organisme, du Club aquatique de Charlesbourg inc. et du Club de natation Excel pour les années 2002, 2003, 2004 et 2005 démontrant tous les revenus et les dépenses relatifs à la natation dans l’arrondissement de Charlesbourg. [27] La preuve a démontré que l’organisme ne collige pas les informations relatives aux activités qu’elle organise sous la forme « d’états financiers ». Les informations relatives aux recettes des activités dont elle assume la responsabilité ont déjà été fournies à la demanderesse. La demande de révision n’est pas fondée sous ce volet. [28] Le 29 novembre 2006, la responsable de l’accès écrit à la demanderesse : « … en ce qui concerne les états financiers de la société Club aquatique de Charlesbourg inc. et de la société Club de natation Excel inc. en vertu des articles 23 et 24 de la
06 20 79 Page : 6 Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels dont nous vous joignons copie desdits articles pour votre information, nous vous invitons à prendre contact directement avec ces organismes puisqu’ils ne sont pas des entités de la Ville de Québec. » [29] À la lecture de cette réponse, la demanderesse ne pouvait savoir si l’organisme détenait de tels documents et quelle était sa position. Elle n’avait pas l’obligation de faire des démarches auprès des tierces parties. [30] Monsieur Martin Hogdson, représentant des tierces parties, était présent à l’audience. Il a exposé les motifs pour lesquels il refusait de donner suite à la demande d’accès. [31] Ce faisant, il a démontré que le Club de natation Excel n’a jamais déposé d’états financiers auprès de l’organisme et n’existe plus depuis janvier 2006. [32] En conséquence, l’organisme ne détient aucun état financier du Club de natation Excel et la demande de révision doit être rejetée sous ce volet. [33] Il a toutefois déclaré que le Club aquatique de Charlesbourg inc. a déposé au cours des cinq dernières années des états financiers afin de s’acquitter de ses obligations prévues en vertu de la « Politique de reconnaissance ». Cette politique prévoit qu’un état des revenus et dépenses ou un état financier vérifié doit être déposé par les organismes reconnus par la Ville, selon le montant de leur budget annuel (article 7.3.1 de la Politique de reconnaissance des organismes partenaires). [34] Ces états financiers sont détenus par l’organisme public dans l’exercice de ses fonctions, conformément à l’article 1 de la Loi sur l’accès qui prévoit : 1. La présente loi s'applique aux documents détenus par un organisme public dans l'exercice de ses fonctions, que leur conservation soit assurée par l'organisme public ou par un tiers. Elle s'applique quelle que soit la forme de ces documents: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre.
06 20 79 Page : 7 [35] La Loi sur l’accès n’exige pas que les documents détenus par l’organisme public originent eux-mêmes d’un organisme public, tel que la procureure de l’organisme l’a prétendu 3 : « La jurisprudence de cette Commission, confirmée par la Cour du Québec, en Cour supérieure et en Cour d’appel, a été constante et univoque à ce propos. La détention de facto de documents constitue un facteur d’assujettissement suffisant au sens de l’article 1 de la Loi sur l’accès. » [36] Par ailleurs, la preuve du Club aquatique de Charlesbourg inc. n’est pas suffisante pour lui permettre de refuser la communication des documents réclamés puisque le caractère confidentiel des états financiers n’a aucunement été démontré par le témoignage du président. Ces documents font l’objet d’une diffusion publique à tous ceux qui sont présents à l’assemblée annuelle avant d’être remis à l’organisme. [37] De plus, selon la déclaration du président du Club aquatique, tout membre du public peut assister à cette assemblée annuelle et requérir une copie des états financiers. [38] Tel que la Commission l’indiquait dans une décision récente 4 : « Il est vrai que la Commission a affirmé à de nombreuses reprises que les états financiers d’une corporation devaient être considérés comme des documents confidentiels. Toutefois, une lecture attentive de ces décisions démontre qu’une telle conclusion devrait être supportée par un minimum de preuve. » [39] En conséquence, les états financiers du Club aquatique de Charlesbourg inc. devront être communiqués. 3 Tudor c. Municipalité de Pontiac, [1993] C.A.I. 93, 98. 4 o C.O.R.P.I.Q. c. S.H.Q., Québec, C.A.I. n 05 17 64, 14 février 2007, c. Chartier.
06 20 79 Page : 8 [40] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [41] ACCUEILLE partiellement la demande de révision de la demanderesse; [42] ORDONNE à l’organisme de communiquer dans les trente jours de la date de la réception de la présente décision, les états financiers du Club aquatique de Charlesbourg inc. pour les années 2002, 2003, 2004 et 2005; [43] REJETTE pour le reste la demande de révision. JEAN CHARTIER Commissaire M e Line Trudel Avocate de l’organisme
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