Commission d’accès à l’information du Québec Dossiers : 04 12 32 et 05 13 79 Date : Le 18 décembre 2007 Commissaire : M e Jean Chartier DÉCISION OBJET DEMANDES DE RÉVISION en vertu de l’article 135 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 . 1 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée « Loi sur l’accès ».MUNICIPALITÉ DE SAINT-NAZAIRE Demanderesse c. MINISTÈRE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE, DE L’ENVIRONNEMENT ET DES PARCS Organisme et GRANILAC INC. (FILIALE DE POLYCOR INC.) Tierce partie
04 12 32 et 05 13 79 Page : 2 [1] Le 18 mai 2004, les procureurs de la demanderesse transmettent à l’organisme une demande d’accès rédigée comme suit : « Notre cliente, la Municipalité de St-Nazaire désire obtenir copie des certificats d’autorisation détenus par Granilac afin d’opérer leur carrière sur les lots 11, 12, 13 et 14 du Rang 1, Canton Taché, et d’autre part, savoir si au cours des années d’opération, des lettres d’infraction et/ou des constats d’infraction leur ont été expédiés et avoir copie de ces documents. » [2] Le 1 er juin 2004, le responsable de l’accès aux documents de l’organisme transmet au procureur de la demanderesse une réponse à laquelle sont joints les certificats d’autorisation et une modification. [3] Le 14 juin 2004, les procureurs de la demanderesse écrivent de nouveau à l’organisme dans le but de réclamer des documents à l’appui des certificats d’autorisation, soit une étude d’impact et des plans. [4] Le 16 juin 2004, l’organisme avise les procureurs de la demanderesse que certains documents réclamés contiennent des informations fournies par un tiers, soit la tierce partie. En conséquence, un délai est requis pour aviser la tierce partie. [5] Le 8 juillet 2004, la responsable de l’accès de l’organisme avise la demanderesse du refus du tiers de communiquer cinq documents. L’organisme considère que le refus de la tierce partie répond aux exigences des articles 23 et 24 de la Loi sur l’accès. [6] Le 30 juillet 2004, les procureurs de la demanderesse transmettent à la Commission d’accès à l’information, « la Commission », une demande de révision de la décision de l’organisme. [7] Le dossier portant le numéro 04 12 32 est alors ouvert par la Commission. [8] Le 6 juin 2005, les procureurs de la demanderesse transmettent à l’organisme une nouvelle demande d’accès rédigée comme suit : « Notre cliente, la municipalité de Saint-Nazaire, désire obtenir copie des certificats d’autorisation et des documents qui en font partie intégrante détenus par Granilac inc. afin d’opérer leur carrière sur les lots 11, 12, 13 et 14 du Rang 1, Canton Taché, et d’autre part, savoir si au cours des années d’opération, des lettres d’infraction
04 12 32 et 05 13 79 Page : 3 et/ou des constats d’infraction leur ont été expédiés et avoir copie de ces documents. Considérant que notre cliente est une municipalité et qu’elle joue un rôle particulier dans le cadre de la Loi sur la qualité de l’environnement, nous prétendons avoir le droit d’obtenir les documents ci-dessus nommés, conformément à la décision rendue dans « Municipalité de Chertsey c. Ministère de l’Environnement, 500-80-002212-034, 18 juin 2004. » Une copie de cette décision est jointe à la présente. » [9] Le 9 juin 2005, l’organisme transmet à la demanderesse un certificat d’autorisation, une lettre de reconnaissance de droits acquis et un avis d’infraction. [10] Le 29 juin 2005, la responsable de l’accès de l’organisme avise les procureurs de la demanderesse que la tierce partie refuse la communication des autres documents demandés. [11] Le 28 juillet 2005, les procureurs de la demanderesse transmettent à la Commission d’accès à l’information une demande de révision de la décision de l’organisme. La Commission procède alors à l’ouverture du dossier portant le numéro 05 13 79. AUDIENCE [12] Une audience est tenue à Saguenay le 11 octobre 2007 en présence des parties. [13] À l’ouverture de l’audience, les représentants des trois parties ont exprimé leur consentement à ce qu’une enquête commune soit faite dans les deux dossiers et qu’une seule décision dispose des deux demandes de révision. A) PREUVE i) De l’organisme [14] La procureure de l’organisme indique que les documents qui font l’objet de contestation sont énumérés dans la lettre du 8 juillet 2004 relative au « dossier 04 12 32 » transmise par l’organisme.
04 12 32 et 05 13 79 Page : 4 [15] Il convient d’en faire l’énumération : 1. Plan no 1 montrant les courbes de niveau du bail minier 705 sur le lot 11, Luc Tremblay, arpenteur-géomètre, Girard Tremblay et Ass. (19-11-99); 2. Plan no 2 montrant le bail minier 705 sur le lot 11, Luc Tremblay, arpenteur-géomètre, Girard Tremblay et Ass. (19-11-99); 3. Demande d’autorisation pour l’exploitation d’une carrière, Armand Gaudreault (21 septembre 1983) 11 pages; 4. Lettre datée du 18 novembre 1999 transmise par M. Normand Girard adressée à M. Richard Bonneau du ministère de l’Environnement, comprenant les annexes 1 à 6, 16 pages; 5. Étude d’impact de bruit de Yockell, Boilard et Associés de novembre 1999, 16 pages. [16] La procureure de l’organisme ajoute que les parties en sont venues à une entente et que la preuve ne portera dorénavant que sur les documents suivants dont la communication demeure en litige : 1. Plan no 1; 2. Plan no 2; 3. Demande d’autorisation du 21 septembre 1983, les 3 dernières pages; 4. Annexes accompagnant la lettre du 18 novembre 1999 : annexe « 2 », annexe « 3 », annexe « 5A » « sauf pour l’avis du géologue qui est accessible »; 5. Étude d’impact de bruit de Yockell, Boilard et Associés de novembre 1999, pages 1 à 4 caviardées partiellement. [17] En ce qui concerne la demande de révision dans le dossier 05 13 79, la procureure de l’organisme explique que cette deuxième demande d’accès visait les documents accompagnant la demande de certificat d’autorisation faite en 2005. [18] Les parties ont également conclu une entente et seuls les documents suivants demeurent en litige : Demande du 21 avril 2005 : 1. page 3, sections 2.3, 2.4, 2.5, 2.6, 2.7, 2.9 a, 2.9 b; 2. page 6; 3. page 7, le haut de la page jusqu’à la section 6 intitulée : Garantie;
04 12 32 et 05 13 79 Page : 5 4. page 9 et 10, sections 8, 8.1, 8.2, 8.3, 8.4 et 8.5; 5. annexe « B, D et E », annexe « F » et « G » (sauf pour les conclusions des études d’impact sur le bruit); 6. annexe « I », tableau 1 « équipements utilisés ». [19] La procureure de l’organisme indique que tous ces documents sont la propriété de la tierce partie qui les a fournis à l’organisme dans le but d’obtenir les autorisations nécessaires pour l’exploitation de son entreprise. Elle explique qu’une preuve sera faite à huis clos afin de permettre à la Commission d’évaluer le bien fondé du refus de la tierce partie. [20] Maître André Scott, vice-président exécutif au sein de l’entreprise Granilac inc., témoigne à huis clos, tel que le permet l’article 20 des Règles de preuve et de procédure de la Commission d’accès à l’information 2 qui prévoit : 20. La Commission peut prendre connaissance, en l'absence du requérant et à huis clos, d'un document que l'organisme public ou le tiers prétend devoir être soustrait à l'accès en vertu d'une restriction prévue à la section II de la Loi. [21] Sans révéler la teneur du témoignage de M e Scott, il ressort que la tierce partie exploite depuis 1999 une carrière de granite sur les lots 11, 12, 13 et 14 du Rang 1, Canton Taché, sur le territoire de la demanderesse. [22] Le témoin explique qu’il existe une vive compétition entre les divers exploitants de carrières de granite. Il expose les différentes raisons pour lesquelles la tierce partie s’est objectée à la communication de la documentation réclamée. [23] Plusieurs informations contenues dans la documentation concernent la nature, la localisation et l’étendue du gisement exploité par l’entreprise. Toutes ces informations sont de nature confidentielle et sont traitées de façon confidentielle par la tierce partie. [24] Il explique notamment la façon hautement sécuritaire dont sont conservés les documents que l’entreprise refuse de communiquer de façon à en assurer le caractère confidentiel. 2 L.R.Q., c. A-2.1, r. 2.
04 12 32 et 05 13 79 Page : 6 [25] Il souligne que la tierce partie s’objecte à la divulgation des deux certificats d’autorisation. Selon lui, ces documents démontrent l’évolution de l’exploitation de l’entreprise à travers le temps et leur divulgation risquerait d’affecter la compétitivité de la tierce partie en procurant à ses compétiteurs un avantage appréciable. [26] Le témoin explique que la tierce partie a consenti à communiquer à l’organisme cette catégorie de renseignements de façon à assurer la conformité de son exploitation avec les dispositions de la Loi sur la qualité de l’environnement 3 mais il rappelle que ces informations sont confidentielles. [27] Il ajoute que la tierce partie a trié l’ensemble des informations contenues au dossier de l’organisme et elle en a remis plusieurs à la demanderesse à l’audience. Elle n’a refusé l’accès qu’aux informations à caractère confidentiel qui pourraient avoir un impact sur sa compétitivité. ii) De la demanderesse [28] La demanderesse n’a présenté aucune preuve et a déclaré maintenir ses deux demandes d’accès pour l’ensemble des documents. B) REPRÉSENTATIONS i) De l’organisme et de la tierce partie [29] Pour la procureure de l’organisme, les documents dont la communication est refusée contiennent : 1) des renseignements industriels, 2) fournis à l’organisme par un tiers, 3) traités par le tiers de façon confidentielle, 4) dont la divulgation risquerait de nuire de façon substantielle à sa compétitivité. Ce faisant, la procureure de l’organisme maintient que les conditions d’application des articles 23 et 24 de la Loi sur l’accès ont été établies et que l’organisme ne peut communiquer ces documents. [30] Commentant la décision rendue par l’honorable Simon Brossard de la Cour du Québec dans l’affaire « Municipalité de Chertsey c. Ministère de l’Environnement 4 », sur laquelle s’appuie la demanderesse, la procureure de l’organisme mentionne qu’il s’agit d’une décision isolée qui va à l’encontre de la jurisprudence majoritaire en cette matière. 3 L.R.Q., c. Q-2. 4 o C.Q. Montréal, (Chambre civile), n 500-80-002212-034, 18 juin 2004, j. Brossard.
04 12 32 et 05 13 79 Page : 7 [31] Dans cette décision, faut-il le rappeler, le juge Brossard a considéré que tous les documents accompagnant une demande de certificat d’autorisation « font partie intégrante du certificat d’autorisation ». [32] À l’appui de sa prétention, la procureure de l’organisme dépose une décision rendue en 2005, par la commissaire Diane Boissinot, qui maintient la position traditionnelle de la Commission 5 . [33] Elle réfute également l’application des articles 41.1 et 41.2 de la Loi sur l’accès qui rendent inapplicables les restrictions prévues aux articles 23 et 24 lorsqu’il s’agit d’informations concernant la présence d’un contaminant dans l’environnement (41.1) ou lorsqu’il s’agit d’informations communiquées à un organisme pour procéder à l’application d’une loi tel l’article (41.2). [34] Pour que ces dispositions puissent trouver application, la demanderesse aurait dû faire la preuve préalable de l’existence d’un « quelconque préjudice environnemental ». ii) De la demanderesse [35] La procureure de la demanderesse réclame les certificats d’autorisation ainsi que l’ensemble des documents et des annexes qui y étaient joints. [36] Elle prend appui sur la décision précitée du juge Brossard. La demanderesse est une municipalité qui doit assumer des responsabilités. Elle fait valoir que le bruit est un « contaminant » au sens de la Loi sur la qualité de l’environnement et qu’en vertu de cette loi, la demanderesse dispose de certains pouvoirs afin de faire cesser des contraventions à cette loi. [37] Elle réfère la Commission aux articles 1, 19.2, 19.3 et 29 de la Loi sur la qualité de l’environnement qui prévoient 6 : 1. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, les mots et expressions qui suivent signifient ou désignent : […]; 5 Rancourt c. Ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs et Giroux et Lessard Ltée, [2006] C.A.I. 50. 6 Précitée, note 3.
04 12 32 et 05 13 79 Page : 8 5° « contaminant » : une matière solide, liquide ou gazeuse, un micro-organisme, un son, une vibration, un rayonnement, une chaleur, une odeur, une radiation ou toute combinaison de l'un ou l'autre susceptible d'altérer de quelque manière la qualité de l'environnement; […]. 19.2. Un juge de la Cour supérieure peut accorder une injonction pour empêcher tout acte ou toute opération qui porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte à l'exercice d'un droit conféré par l'article 19.1. 19.3. La demande d'injonction visée dans l'article 19.2 peut être faite par toute personne physique domiciliée au Québec qui fréquente un lieu à l'égard duquel une contravention à la présente loi ou aux règlements est alléguée ou le voisinage immédiat de ce lieu. Elle peut être faite également par le procureur général et par toute municipalité sur le territoire de laquelle se produit ou est sur le point de se produire la contravention. 29. Le ministre peut, après enquête, ordonner à une municipalité d'exercer les pouvoirs relatifs à la qualité de l'environnement que confère à cette municipalité la présente loi ou toute autre loi générale ou spéciale. [38] Pour exercer ces pouvoirs, la municipalité doit obtenir l’ensemble des documents joints au certificat d’autorisation. [39] Elle ajoute que les restrictions prévues aux articles 23 et 24 de la Loi sur l’accès ne sont pas applicables à la présente affaire par l’effet des articles 41.1 et 41.2 introduits dans la Loi sur l’accès en 2006. [40] Elle fait valoir que l’article 118.4 de la Loi sur la qualité de l’environnement s’applique malgré la Loi sur l’accès, conformément au paragraphe 1 de l’article 171 de la Loi sur l’accès. [41] Ces deux dispositions législatives prévoient : 118.4 Toute personne a droit d'obtenir du ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs copie de tout renseignement disponible concernant la quantité, la qualité ou la concentration des contaminants
04 12 32 et 05 13 79 Page : 9 émis, dégagés, rejetés ou déposés par une source de contamination ou, concernant la présence d'un contaminant dans l'environnement. Le présent article s'applique sous réserve des restrictions aux droits d'accès prévues à l'article 28 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (chapitre. A-2.1). 171. Malgré les articles 168 et 169, la présente loi n'a pas pour effet de restreindre : 1° l'exercice du droit d'accès d'une personne à un document résultant de l'application d'une autre loi ou d'une pratique établie avant le l er octobre 1982, à moins que l'exercice de ce droit ne porte atteinte à la protection des renseignements personnels; 2° la protection des renseignements personnels ni l'exercice du droit d'accès d'une personne à un renseignement nominatif la concernant, résultant de l'application d'une autre loi ou d'une pratique établie avant le ler octobre 1982; 2.1° la protection d'un renseignement contenu dans un dossier fiscal prévue à la section VIII du chapitre III de la Loi sur le ministère du Revenu (chapitre M-31) à l'égard d'une personne visée par cette section; 3° la communication de documents ou de renseignements exigés par le Protecteur du citoyen ou par assignation, mandat ou ordonnance d'une personne ou d'un organisme ayant le pouvoir de contraindre à leur communication. (Tel qu’il se lisait au moment de la demande d’accès.) [42] Pour appuyer ses prétentions, elle dépose des décisions rendues par la Commission 7 . DÉCISION [43] L’organisme a refusé la communication des documents qui demeurent en litige et a invoqué les articles 23 et 24 de la Loi sur l’accès qui prévoient : 7 Savard c. Ministère de l’Environnement, [2003] C.A.I. 67; Regroupement des citoyens contre la pollution c. Ministère de l’Environnement, [2004] C.A.I. 171.
04 12 32 et 05 13 79 Page : 10 23. Un organisme public ne peut communiquer le secret industriel d'un tiers ou un renseignement industriel, financier, commercial, scientifique, technique ou syndical de nature confidentielle fourni par un tiers et habituellement traité par un tiers de façon confidentielle, sans son consentement. 24. Un organisme public ne peut communiquer un renseignement fourni par un tiers lorsque sa divulgation risquerait vraisemblablement d'entraver une négociation en vue de la conclusion d'un contrat, de causer une perte à ce tiers, de procurer un avantage appréciable à une autre personne ou de nuire de façon substantielle à la compétitivité de ce tiers, sans son consentement. [44] La preuve faite à l’audience par le représentant de la tierce partie a convaincu le soussigné que certaines informations doivent être protégées parce que si elles devaient être communiquées, elles pourraient avoir un impact sur la rentabilité de la tierce partie et pourraient nuire de façon substantielle à sa compétitivité dans le marché de l’extraction et de la vente de granite. [45] La preuve faite sous le sceau de la confidentialité a démontré notamment que les informations relatives à la situation géographique de la carrière, à la méthode d’exploitation qui y est utilisée, à la localisation du gisement qui est exploité, sont autant d’informations contenues dans la documentation qui peuvent avoir un tel impact. [46] La preuve a également été faite du caractère hautement confidentiel de la plupart de ces documents et des mesures de sécurité mises en place par la tierce partie pour en assurer le caractère confidentiel. [47] Ces documents ne contiennent aucune information relative à la quantité, la qualité ou la concentration d’un contaminant émis, dégagé, rejeté ou déposé dans l’environnement. L’accès à ces documents pourrait donc valablement être refusé si le soussigné conclut que la municipalité demanderesse ne bénéficie pas d’un droit d’accès privilégié à tous les documents tel que le juge Brossard l’a décidé dans l’affaire « Chertsey » précitée. [48] À l’instar du juge Brossard, le soussigné admet que les dispositions de la Loi sur la qualité de l’environnement sont des indices clairs du législateur de l’importance accordée au respect de la qualité de l’environnement et du rôle de premier plan que le législateur québécois entend faire jouer aux municipalités dans le cadre de l’application de cette loi.
04 12 32 et 05 13 79 Page : 11 [49] Toutefois, en tout respect, le soussigné considère que les articles 23 et 24 de la Loi sur l’accès constituent également l’expression de l’intention du législateur et qu’en l’absence de conflit entre les deux législations, la Commission doit favoriser le respect de chacune d’entre elles. [50] Procédant à l’examen attentif de la documentation déposée sous le sceau de la confidentialité, il est apparu au soussigné que les documents suivants n’étaient aucunement visés par l’application de la Loi sur la qualité de l’environnement et qu’ils pouvaient faire l’objet d’un refus. [51] En ce qui concerne le dossier 04 12 32 : 1. Demande d’autorisation du 21 septembre 1983, les 3 dernières pages; 2. Plan numéro 1; 3. Plan numéro 2; 4. Document numéro 4 : les annexes 2 et 3 comportant chacune deux plans et relevés géographiques de l’arpenteur-géomètre; 5. Document numéro 4 : annexe « 5A » (sauf pour la section de l’avis du géologue); 6. Document numéro 5 : étude d’impact de bruit (pour les renseignements qui ont été caviardés). [52] En ce qui concerne le dossier 05 13 79 : 1. Demande de certificat d’autorisation du 21 avril 2005; 2. Les sections 2.3 à 2.7, 2.9 a et b qui contiennent des renseignements de nature industrielle et technique relatifs à l’exploitation de la tierce partie; 3. La page 6 ainsi que le haut de la page 7 jusqu’à la section 6 intitulé : Garantie; 4. Les sections 8.1 à 8.5 qui contiennent des renseignements dont la communication pourrait nuire à la compétitivité de la tierce partie; 5. Annexe B : identique à l’annexe « 5A » du dossier précédent et refusée sauf pour l’avis du géologue; 6. Les annexes D et E qui contiennent des renseignements relatifs à l’exploitation de la tierce partie et au bail minier qui lui a été consenti par le ministre des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs. La tierce partie consent toutefois à produire un résumé du bail minier à la demanderesse; 7. L’annexe F qui contient un plan topographique de l’aire d’exploitation.
04 12 32 et 05 13 79 Page : 12 [53] Le soussigné fait siens les propos de la Cour du Québec dans l’affaire « Cogénération Kingsey c. Burcombe 8 » où le juge Brossard écrit : « Finalement, la preuve fait voir que la divulgation des renseignements pourrait également procurer des avantages à des tiers. C’est la conception, l’aménagement général et le contexte dans lequel il est situé qui influence le rendement global de cette usine. Les informations recherchées représentent un intérêt important pour d’autres compétiteurs et, en ce sens, elles constituent des secrets industriels, consignés dans les documents en litige, que l’appelante a besoin de protéger. » [54] En somme, la Commission reconnaît que l’organisme public et la tierce partie ont rempli leur fardeau de preuve et ont démontré l’application des articles 23 et 24 de la Loi sur l’accès sur la plupart des documents qui ont été déposés sous le sceau de la confidentialité. [55] Malgré ce qui précède, la demanderesse considère que la preuve faite sous les articles 23 et 24 de la Loi sur l’accès est irrecevable depuis la décision rendue dans l’affaire « Chertsey 9 ». Cette affaire comporte des similitudes avec la présente. La demande d’accès visait à obtenir « les documents faisant partie intégrante du certificat d’autorisation émis par le ministre de l’Environnement à la mise en cause Baumir inc. ». Après avoir rappelé le texte de l’article 118.5 de la Loi sur la qualité de l’environnement : 118.5 Le ministère tient un registre de : a) toutes les demandes de certificat d'autorisation, de certificat, d'autorisation ou de permis soumises en vertu des articles 22, 31.1, 31.6, 32, 32.1, 32.2, 48, 55, 70.10, 70.14, 160 et 196; b) tous les certificats d'autorisation, les certificats, les autorisations et les permis délivrés en vertu desdits articles; […] Les renseignements contenus dans ce registre ont un caractère public. 8 [1996] C.A.I. 413. 9 Précitée, note 4.
04 12 32 et 05 13 79 Page : 13 (Les caractères gras sont du soussigné.) [56] Le juge Brossard tire la conclusion suivante 10 : « Le certificat est donc constitué de l’ensemble de ses éléments constituants, c’est-à-dire le document intitulé certificat ainsi que l’ensemble des documents en faisant partie intégrante. Ce sont d’ailleurs les documents qui en font partie intégrante qui constituent la substance réelle de l’autorisation donnée en vertu de l’article 22 de la Loi sur la qualité de l’environnement puisque la grande majorité des informations nécessaires à la conformité du projet s’y retrouvent. » [57] Il a ainsi considéré que l’article 118.5 de la Loi sur la qualité de l’environnement donnait un caractère public à tous les documents accompagnant une demande de certificat d’autorisation. De plus, ce droit d’accès ne saurait être restreint par l’une ou l’autre des dispositions de la Loi sur l’accès et ce, en vertu de l’article 171 de cette loi qui prévoit : 171. Malgré les articles 168 et 169, la présente loi n'a pas pour effet de restreindre : 1° l'exercice du droit d'accès d'une personne à un document résultant de l'application d'une autre loi ou d'une pratique établie avant le l er octobre 1982, à moins que l'exercice de ce droit ne porte atteinte à la protection des renseignements personnels; [58] En tout respect pour l’opinion du juge Brossard, la Commission considère que les articles 23 et 24 de la Loi sur l’accès et l’article 118.5 de la Loi sur la qualité de l’environnement peuvent coexister et produire leur plein effet. [59] Bien que le dernier alinéa de l’article 118.5 de la Loi sur la qualité de l’environnement prévoit que les renseignements contenus dans le registre ont un caractère public, le soussigné considère que le législateur n’a pas voulu viser les documents auxquels le registre permet de référer. [60] Dans l’affaire « Cogénération Kingsey 11 », le juge Brossard avait décidé en ce sens : « Le tribunal s’est déjà exprimé sur l’interprétation de l’article 118.5 et les honorables juges Gagnon, Boucher et 10 Précitée, note 4. 11 Précitée, note 8.
04 12 32 et 05 13 79 Page : 14 Verge, unanimes sur cette question, décidaient « qu’il y a une distinction entre le registre et un document auquel ce registre permet de référer ». [61] Ainsi, seuls les renseignements contenus dans le registre tenu par le ministre ont un caractère public. Le certificat d’autorisation lui-même et les documents annexés à la demande de certificat d’autorisation ne font pas partie du registre du ministre et leur accessibilité doit être décidée au regard de la preuve faite pour chacun de ces documents. [62] La procureure de la demanderesse a également invoqué à l’appui de sa demande les articles 41.1 et 41.2 de la Loi sur l’accès. Ces dispositions ne peuvent s’appliquer en l’instance puisqu’elles ont été adoptées en juin 2006 12 alors que les demandes d’accès ont été respectivement faites le 18 mai 2004 et le 6 juin 2005 13 . « Parce que l’instance judiciaire est généralement déclarative de droit, elle n’est pas en principe touchée par un changement dans les règles substantielles que le juge doit appliquer. Son rôle consiste en effet à déclarer si et dans quelle mesure des faits accomplis avant l’introduction de l’action ont ou non entraîné la naissance ou l’extinction d’une situation juridique. Il consiste aussi à déterminer si certaines situations juridiques ont ou non, dans le passé, produit certains effets juridiques. Parce que le regard du juge est généralement tourné vers le passé et parce que la loi nouvelle, en règle générale, n’a pas d’effet rétroactif, l’instance en cours n’est en principe pas touchée par la loi nouvelle de nature substantielle. » [63] La réponse de l’organisme est formulée en fonction de la situation factuelle et juridique qui existait au moment de la demande d’accès. Cette situation juridique est d’ailleurs consolidée dans la réponse de l’organisme tel que le prévoit l’article 50 de la Loi sur l’accès : 50. Le responsable doit motiver tout refus de donner communication d'un renseignement et indiquer la disposition de la loi sur laquelle ce refus s'appuie. 12 Projet de loi 86, Loi modifiant la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels et d’autres dispositions législatives, article 22. 13 Pierre-André CÔTÉ, Interprétation des lois, Montréal, Édition Thémis, 1999, p. 249-250.
04 12 32 et 05 13 79 Page : 15 [64] En dernier lieu, le soussigné croit nécessaire de préciser que la Commission reconnait le droit d’accès constaté à l’article 118.4 de la Loi sur la qualité de l’environnement. [65] Toutefois, seule l’étude de bruit effectuée pour le compte de la demanderesse contenait des renseignements visés par cette disposition. [66] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [67] ACCUEILLE partiellement les demandes de révision dans les présentes affaires; ORDONNE à l’organisme de communiquer à la demanderesse dans les trente jours de la date de réception de la présente décision les documents suivants : l’annexe G de la demande de certificat d’autorisation du 21 avril 2005 contenant 16 pages, constituée d’une étude d’impact de bruit de la firme Yockell Boilard et associés incluant une note de Michel Labbé, directeur des opérations en date du 1 er avril 2005 (excluant une carte géographique jointe à cette étude de bruit); L’annexe « i » de la demande de certificat d’autorisation du 21 avril 2005, intitulée « Plan de restauration, avril 2005 ». [68] REJETTE pour le reste les demandes de révision. JEAN CHARTIER Commissaire M e Martine Tremblay Avocate de la demanderesse M e Isabelle Demers Avocate de l’organisme
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