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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 06 16 42 et 06 16 89 Date : Le 18 décembre 2007 Commissaire : M e Jean Chartier X et Y Demandeurs c. CONSEIL DU TRÉSOR Organisme DÉCISION OBJET DEMANDES DE RÉVISION en vertu de larticle 135 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 . 1 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée « Loi sur laccès ».
06 16 42 et 06 16 89 Page : 2 [1] Le 21 juillet 2006, les demandeurs transmettent au responsable de laccès de lorganisme, M. Robert Cavanagh, une demande identique rédigée comme suit : « Dans le cadre de la Loi sur laccès aux documents, je demande à recevoir tout document, courriel, texte présent ou passé dans tout ordinateur du Secrétariat du Conseil du Trésor ou du ministère du Développement durable, de lEnvironnement et des Parcs, entités qui étaient en relation et discussion dans le cadre de lintégration des ingénieurs du MDDEP, ainsi que dans tout back-up du SCT et du MDDEP effectué depuis janvier 2001 qui donneraient les informations suivantes : a) Les explications requises relatives aux sous-facteurs énumérés au premier tableau Évaluation par points et facteurs des emplois dingénieurs. En fait, à quoi fait référence chacun de ces sous-facteurs; b) Le maximum possible pour chaque sous-facteur; c) Les pointages minimums requis pour accéder aux niveaux demplois 2, 3 et 4 et comment ceux-ci ont été établis; d) La justification du pointage que jai reçu pour chaque sous-facteur évalué; e) Comment ces sous-facteurs ont été regroupés selon les 4 facteurs présentés dans le second tableau intitulé Évaluation Emploi de la classe 2 dingénieurs Chargé de projet MENV ; f) La pondération de chacun des sous-facteurs et des facteurs dans le calcul du résultat final; g) Mon résultat final et toutes les informations et explications qui auraient accompagner mon avis dintégration, le tout conformément à la lettre dentente numéro 8; h) La valeur relative de mon emploi par rapport à lensemble des postes évalués au gouvernement et à ceux du ministère du Développement durable, de lEnvironnement et des Parcs (MDDEP); i) La courbe de distribution des résultats pour lensemble des postes dingénieurs évalués et pour ceux du MDDEP; j) Le nombre dingénieurs sétant vu octroyé les niveaux 1, 2, 3 et 4 globalement et par ministère et pour le MDDEP globalement et par service et direction au terme de chacune des trois étapes du processus de
06 16 42 et 06 16 89 Page : 3 classification soit, à la classification initiale, après lappel ministériel, au terme de lentente finale signée au début de la présente année ainsi que suite à tout entente ultérieure. » [2] Le 25 juillet 2006, le responsable de laccès de lorganisme avise chacun des demandeurs de la réception de leur demande et leur indique que le nécessaire sera fait dans le but de donner suite à leur demande dans les délais prévus par la Loi sur laccès. [3] Le 11 août 2006, le responsable de laccès de lorganisme transmet une lettre aux demandeurs les avisant quun délai additionnel de dix jours sera nécessaire pour traiter leur demande, conformément à larticle 47 de la Loi sur laccès. [4] Le 24 août 2006, le responsable de laccès de lorganisme transmet une réponse aux demandeurs. [5] Dans cette réponse, lorganisme fourni des explications aux demandeurs sur chacun des paragraphes a) à j) de leur demande respective. Lorganisme refuse toutefois de communiquer aux demandeurs les documents qui appuient les réponses fournies puisque ces documents risqueraient vraisemblablement davoir un effet sur une procédure judiciaire au sens de larticle 32 de la Loi sur laccès. [6] Le 15 septembre 2006, le demandeur [Y] transmet à la Commission daccès à linformation (la Commission) une demande de révision de la décision de lorganisme. [7] Le 18 septembre 2006, le demandeur [X] en transmet une demande de révision à la Commission. [8] Laudition de cette affaire a eu lieu les 20 mars, 31 mai et 9 octobre 2007, à Québec, en présence des parties. AUDIENCE DU 20 MARS 2007 A) PREUVE i) De lorganisme
06 16 42 et 06 16 89 Page : 4 [9] Madame Céline Charest, conseillère du responsable de laccès de lorganisme, depuis avril 2003, est assermentée. Elle indique quelle a traité les demandes daccès. [10] Elle a transmis les demandes daccès à M. Jacques Fréchette. Elle souligne que les deux demandes ont été reçues le 24 juillet 2006 au cours de la période des vacances estivales. À cette date, M. Jacques Fréchette était en vacances. Il a fallu faire des recherches pour obtenir lensemble des informations réclamées par les demandeurs et un délai additionnel de dix jours a été nécessaire. [11] Malgré tous les efforts quelle dit avoir déployés pour donner suite aux demandes dans le délai prévu par la loi, ce nest que le 24 août 2006, soit une journée après lexpiration du délai de trente jours prévu par la loi, que la réponse a été transmise aux demandeurs. [12] Elle dépose à laudience, tant pour les demandeurs que pour le soussigné, une copie des documents suivants : la description demploi du poste occupé par chacun des demandeurs; le rapport du « comité ad hoc » ayant procédé à lévaluation de lemploi de chacun des demandeurs et qui a conclu à un classement de niveau 2; une lettre du 6 janvier 2006 transmise par lAssociation provinciale des ingénieurs du gouvernement du Québec aux demandeurs les avisant que leur association avait décidé de ne plus contester la classification qui avait été attribuée à leur emploi; une lettre du 7 février 2006 de lAssociation professionnelle des ingénieurs du gouvernement du Québec adressée aux demandeurs les avisant quaprès un examen additionnel de leur dossier respectif, lAssociation ne poursuivait pas la contestation de leur classification; une brochure intitulée « Système dévaluation des emplois pour les évaluatrices et les évaluateurs » portant la date du 28 octobre 2002; un document de deux pages intitulé « Plan A, scénario 1 » comportant une énumération de chiffres utilisés pour la méthode dévaluation « par points et facteurs. »
06 16 42 et 06 16 89 Page : 5 [13] Madame Charest dépose, sous le sceau de la confidentialité, deux enveloppes contenant le résultat de lévaluation de lemploi de chacun des demandeurs qui demeurent les seuls documents dont la communication est refusée aux demandeurs. [14] Elle dépose en liasse la « pièce O-1 » contenant 3 griefs pour chaque demandeur portant la date du 19 mai 2006. Ces griefs visent à contester la classification attribuée à chacun de leur emploi. Pour le témoin, ces griefs constituent la base du refus de lorganisme, et ce, en conformité avec larticle 32 de la Loi sur laccès. [15] Contre interrogée par les demandeurs, elle confirme quune recherche a été faite dans le but de vérifier sil existait des documents ou des courriels dans tout ordinateur de lorganisme qui étaient en relation avec le processus de lintégration des ingénieurs. Le témoin affirme quaucun document de cette nature na été identifié. De même, le ministère employeur des demandeurs « le ministère du Développement durable, de lEnvironnement et des Parcs » na transmis à lorganisme aucun document concernant les demandeurs. [16] Interrogée sur lexpiration du délai de trente jours prévu par la Loi sur laccès, elle réitère quil sagissait dune période de vacances estivales et que durant cette période, les ressources humaines étaient insuffisantes pour donner suite à la demande. [17] Monsieur Jacques Fréchette, coordonnateur des activités de rémunération du personnel syndiqué dans la fonction publique, témoigne pour lorganisme. [18] Dans le cours normal de ses fonctions, il explique quil a œuvré au cœur du processus ayant entraîné en 2001 la nouvelle classification des emplois dingénieur du gouvernement du Québec en collaboration avec lorganisme. [19] Cette nouvelle classification prévoit 4 niveaux de rémunération selon la complexité de chacun des emplois occupés. Il explique que lorganisme a demandé que chaque ingénieur produise une description demploi propre aux fonctions quil effectuait. Chacun des ministères procédait ensuite à lévaluation des emplois en collaboration avec lorganisme. [20] Une fois ce processus terminé, lingénieur était avisé du classement attribué à son emploi et avait lopportunité de contester et de demander une réévaluation de son classement.
06 16 42 et 06 16 89 Page : 6 [21] Les deux demandeurs ont contesté leur classement de niveau 2 devant un comité formé à cet effet. [22] Les personnes chargées de lévaluation des emplois ont utilisé pour ce faire deux méthodes. La méthode « dappariement » et la méthode par « points et facteurs ». AUDIENCE DU 31 MAI 2007 A) SUITE DE LA PREUVE i) De lorganisme [23] Le témoin Jacques Fréchette poursuit son témoignage. Il explique le contenu de la lettre du 24 août 2006 qui donne les réponses à la plupart des demandes dinformation des demandeurs. [24] Il est ensuite entendu à huis clos tel que le permettent les Règles de preuve et de procédure de la Commission daccès à linformation 2 qui prévoient : 20. La Commission peut prendre connaissance, en l'absence du requérant et à huis clos, d'un document que l'organisme public ou le tiers prétend devoir être soustrait à l'accès en vertu d'une restriction prévue à la section II de la Loi. [25] Le témoin explique le processus suivi par lorganisme pour procéder à lévaluation de chacun des emplois. Comme résultat de ce processus, il dépose également, sous le sceau de la confidentialité, les fiches dévaluation relatives aux emplois des demandeurs. [26] Selon lui, ces documents doivent demeurer confidentiels puisque lévaluation qui a été faite sera débattue devant larbitre qui entendra les griefs déposés par chacun des demandeurs. [27] Il affirme que lorganisme ne dévoile jamais le contenu des documents remis sous pli confidentiel. 2 L.R.Q., c. A-2.1, r. 2.
06 16 42 et 06 16 89 Page : 7 [28] Après le témoignage de M. Fréchette, les demandeurs ont déposé deux lettres de lAssociation professionnelle des ingénieurs du gouvernement du Québec qui entend se désister des griefs déposés en mai 2006 pour contester le classement qui leur a été attribué. Puisquil est acquis que la Commission doit statuer sur la situation de fait qui existait entre les parties à la date de la demande daccès, en juillet 2006, le retrait des griefs ne devrait pas changer la situation juridique soumise à la Commission. [29] Devant cette situation, lorganisme a demandé de réévaluer sa position afin de tenir compte de labandon des griefs des demandeurs. Une nouvelle date daudience a alors été fixée et il a été convenu que lorganisme pourrait, le cas échéant, transmettre aux demandeurs une nouvelle réponse. [30] Le 6 septembre 2007, la procureure de lorganisme a transmis aux demandeurs une lettre dans laquelle elle tient compte de labandon des procédures judiciaires entre les parties. Elle avise les demandeurs que lorganisme refuse de communiquer les documents conformément à larticle 37 de la Loi sur laccès. AUDIENCE DU 9 OCTOBRE 2007 A) PREUVE ii) Des demandeurs [31] Les demandeurs ont déclaré au début de laudience quils désiraient maintenir leur demande daccès du 21 juillet 2006, en considérant la situation factuelle existant à cette date. Les parties consentent donc à retirer du dossier la réponse transmise par lorganisme le 6 septembre 2007. [32] Les demandeurs ont ensuite déposé les documents suivants : a) une lettre de la directrice des ressources humaines du ministère du Développement durable, de lEnvironnement et des Parcs, en date du 26 mars 2004, avisant les demandeurs du résultat de lévaluation de leur emploi « pièce D-4 »; b) deux lettres de lAssociation professionnelle des ingénieurs avisant les demandeurs du désistement de lappel du classement de leur emploi en février 2006 « pièce D-5 »;
06 16 42 et 06 16 89 Page : 8 c) la liste des ingénieurs à lemploi du ministère du Développement durable, de lEnvironnement et des Parcs indiquant le classement attribué à chacun des individus en fonction de lemploi occupé « pièce D-6 ». B) REPRÉSENTATIONS DES PARTIES i) De lorganisme [33] La procureure de lorganisme explique que la transmission de la réponse le trente et unième jour après la réception de la demande est imputable à la période de vacances de lété 2006. De plus, elle invoque le fait que lorganisme a accepté dinclure à sa réponse certains tableaux quil a confectionnés pour fournir aux demandeurs les explications réclamées dans leur demande. [34] Les documents qui restent en litige sont ceux qui ont été déposés sous le sceau de la confidentialité et qui concernent les sous-paragraphes d), e) et f) de la demande daccès. [35] La procureure soutient que la réponse du 24 août 2006 est toujours valable et que les documents soumis, sous le sceau de la confidentialité, contiennent une analyse dont la divulgation risquerait davoir un effet sur une procédure judiciaire 3 . [36] Enfin, elle rappelle que lorganisme a déclaré ne détenir aucun autre document « mémo, courriel, texte présent ou passé contenu dans un ordinateur ». ii) Des demandeurs [37] Les demandeurs rappellent que lorganisme a répondu après lexpiration du délai de 30 jours, que ce retard est injustifié et que, de toute façon, la réponse du 24 août 2006 nest pas satisfaisante. [38] Selon les demandeurs, les réponses apportées par lorganisme aux sous-paragraphes a), b), e) et f) ne sont supportées par aucun document. [39] Quant au pointage minimum requis pour accéder aux niveaux demploi 1, 2, 3 et 4, il na pas été justifié bien quil ait été communiqué. 3 o Drouin c. Conseil du trésor, C.A.I. Québec, n 04 10 83, 3 juin 2005, c. Grenier.
06 16 42 et 06 16 89 Page : 9 [40] Les demandeurs prétendent que lorganisme ne pouvait invoquer larticle 37 ou larticle 32 au regard de la situation puisquil sagit ici de renseignements personnels qui les concernent. En conséquence, larticle 87 sapplique à la présente affaire. [41] De plus, lorganisme devait démontrer à la Commission que les documents en litige constituent une analyse qui risque vraisemblablement davoir un effet sur une procédure judiciaire en cours. DÉCISION [42] La Loi sur laccès accorde à lorganisme un délai de vingt jours « auquel peut être ajouté un délai de dix jours additionnels » pour donner une réponse à une demande : 47. Le responsable doit, avec diligence et au plus tard dans les vingt jours qui suivent la date de la réception d'une demande : 1° donner accès au document, lequel peut alors être accompagné d'informations sur les circonstances dans lesquelles il a été produit; 1.1° donner accès au document par des mesures daccommodement raisonnables lorsque le requérant est une personne handicapée; 2° informer le requérant des conditions particulières auxquelles l'accès est soumis, le cas échéant; 3° informer le requérant que l'organisme ne détient pas le document demandé ou que l'accès ne peut lui y être donné en tout ou en partie; 4° informer le requérant que sa demande relève davantage de la compétence d'un autre organisme ou est relative à un document produit par un autre organisme ou pour son compte; 5° informer le requérant que l'existence des renseignements demandés ne peut être confirmée; 6° informer le requérant qu'il s'agit d'un document auquel le chapitre II de la présente loi ne s'applique pas en vertu du deuxième alinéa de l'article 9; 7° informer le requérant que le tiers concerné par la demande ne peut être avisé par courrier et quil le sera par avis public;
06 16 42 et 06 16 89 Page : 10 8° informer le requérant que lorganisme demande à la Commission de ne pas tenir compte de sa demande conformément à larticle 137.1. Si le traitement de la demande dans le délai prévu par le premier alinéa ne lui paraît pas possible sans nuire au déroulement normal des activités de l'organisme public, le responsable peut, avant l'expiration de ce délai, le prolonger d'une période n'excédant pas dix jours. Il doit alors en donner avis au requérant par courrier dans le délai prévu par le premier alinéa. [43] Dans cette réponse, le responsable de laccès doit motiver le refus de donner communication dun renseignement : 50. Le responsable doit motiver tout refus de donner communication d'un renseignement et indiquer la disposition de la loi sur laquelle ce refus s'appuie. [44] Lorganisme a transmis la réponse un jour après lexpiration du délai de trente jours qui lui était accordé. Les demandeurs nous ont soumis une décision de la commissaire Boissinot dans laquelle un organisme na pas été autorisé à invoquer des motifs de refus au-delà du délai de trente jours. La commissaire écrit 4 : « Permettre à lorganisme de soulever tardivement des motifs facultatifs de refus, quil était possible de soulever lors de la préparation de la réponse sous révision, ouvre finalement la porte à linvocation par lorganisme public, en tout temps, même durant laudience, dun nombre supplémentaire significatif de ces restrictions à laccès, modifiant par le fait même la décision sous révision. […] En effet, lobjectif premier et essentiel de ce chapitre II ne vise pas le respect du droit dun organisme public à invoquer les exceptions à ce principe hors du délai statutaire et obligatoire. Étirer le délai statutaire ou en faire fi produirait leffet contraire visé par cet énoncé : le droit daccès risquerait plutôt de disparaître. » 4 Simard c. Sécurité publique, [2005] C.A.I. 306, 315. Requête pour permission dappeler accueillie par la Cour du Québec.
06 16 42 et 06 16 89 Page : 11 [45] En tout respect, le soussigné ne croit pas devoir suivre cette position pour les motifs suivants. Dabord, il importe de le rappeler, le retard imputé à lorganisme nest que dune journée. De plus, la preuve a démontré que la responsable de laccès a agi avec célérité en transmettant la demande pour traitement. Cette demande a été reçue durant la période de vacances estivales et compte tenu de la particularité des informations demandées, il importait quelle soit traitée par les personnes qui ont agi au dossier. [46] Il nest pas question de permettre à lorganisme de soulever des motifs de refus en tout temps. Telle nest pas la situation de la présente affaire. Le soussigné considère que les demandeurs ont toujours été valablement informés du motif invoqué par lorganisme et ils nont pas été pris par surprise. [47] La jurisprudence a beaucoup évolué au cours des dernières années relativement à cette question. Ainsi, dans laffaire « Schulze 5 », la juge Charron de la Cour du Québec écrit : « Cette attitude constitue de fait un refus dexercer la discrétion que lui donne le législateur et, à tout le moins, un aveuglement qui na plus sa place de nos jours devant les tribunaux et encore moins devant un organisme comme la Commission. La procédure ne sert quà faire apparaître le droit et non à locculter. Lappréciation de la preuve en lespèce doit permettre de démontrer, dune part, sil y a quelque préjudice que ce soit pour la partie intimée ou requérante devant la Commission au fait que lon nait pas soulevé en temps opportun les bons arguments pour justifier le refus de communiquer les documents. » [48] Auparavant, la juge Villeneuve avait rendu une décision semblable 6 : « Aucune disposition de la Loi sur laccès ne permet à la Commission de déclarer un organisme forclos de soulever un article de loi. Aucune forclusion nayant été créée par le législateur, lorganisme peut soulever la restriction prévue par la loi en tout temps. » 5 Ministère de la Justice c. Schulze, [2000] C.A.I. 413. 6 o Ministère de la Sécurité publique c. Joncas, C.Q., n 200-02-020553-980, 11 juin 1999, j. Villeneuve.
06 16 42 et 06 16 89 Page : 12 [49] Enfin, les demandeurs nont, en tout état de cause, subi aucun préjudice et cest le devoir de la Commission de permettre aux parties de faire valoir leurs droits respectifs 7 : « Un tribunal qui a le pouvoir de le faire a le devoir de sauvegarder les droits des parties et de donner la possibilité à la partie déchéante de remédier au défaut si cela ne cause pas une injustice à la partie adverse. » [50] Le soussigné autorise lorganisme à soulever le motif de refus facultatif fondé sur larticle 32 de la Loi sur laccès. C) LES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS [51] Les demandeurs soumettent quils ont un droit daccès aux documents demandés en vertu de larticle 83 de la Loi sur laccès qui prévoit : 83. Toute personne a le droit d'être informée de l'existence, dans un fichier de renseignements personnels, d'un renseignement personnel la concernant. Elle a le droit de recevoir communication de tout renseignement personnel la concernant. Toutefois, un mineur de moins de quatorze ans n'a pas le droit d'être informé de l'existence ni de recevoir communication d'un renseignement personnel de nature médicale ou sociale le concernant, contenu dans le dossier constitué par l'établissement de santé ou de services sociaux visé au deuxième alinéa de l'article 7. [52] Cette disposition vise à permettre laccès dune personne aux renseignements personnels qui la concernent. Sans révéler le contenu des documents déposés, sous le sceau de la confidentialité, il apparaît clairement quils portent sur un « emploi » et non sur un individu. En effet, ces documents traitent des diverses attributions et responsabilités des postes détenus par les demandeurs au moment de leur demande daccès. [53] Lexercice de lorganisme, au moment de lévaluation des postes dingénieur, consistait à faire une évaluation des postes et non des individus qui les occupaient. Aussi nest-il pas surprenant de ne retrouver à aucun endroit la désignation personnelle du titulaire du poste évalué. Qui plus est, la preuve a 7 o Service anti-crime des assureurs c. Ménard, C.Q., n 500-80-001893-032, 20 septembre 2004, j. Charrette.
06 16 42 et 06 16 89 Page : 13 démontré que le demandeur [Y] est aujourdhui retraité. Ainsi, le poste quil a laissé est probablement occupé aujourdhui par une autre personne. [54] En conséquence, le soussigné considère que les documents recherchés par les demandeurs ne contiennent pas de renseignements personnels les concernant. E) LAPPLICATION DE LARTICLE 32 DE LA LOI SUR LACCÈS [55] Dans sa réponse du 24 août 2006, le responsable de laccès de lorganisme invoque larticle 32 de la Loi sur laccès pour soutenir le refus de communiquer les documents qui contiennent lévaluation du poste des demandeurs : 32. Un organisme public peut refuser de communiquer une analyse lorsque sa divulgation risquerait vraisemblablement d'avoir un effet sur une procédure judiciaire. [56] Lorganisme devait faire la preuve de trois éléments pour que la restriction constatée à cette disposition trouve application : 1) le document en litige doit répondre à la définition danalyse, 2) il doit établir quil existe une procédure judiciaire en cours, 3) et il doit faire la preuve que la divulgation de lanalyse risque davoir un effet sur une procédure judiciaire ou quasi judiciaire. 1) Les documents réclamés contiennent-ils une analyse ? : [57] Deux documents ont été déposés sous le sceau de la confidentialité. La « fiche dévaluation validée » est le résultat de lévaluation « par points et facteurs ». Lautre est intitulée « fiche de consignation de lanalyse de lemploi pour la détermination du niveau de mobilité ». Ce document représente le résultat de lanalyse de lemploi faite en vertu de « la méthode dappariement ». Laccès à chacun de ces documents est refusé par lorganisme. [58] Ce nest pas parce que lun porte en son titre le mot « évaluation » et lautre le mot « analyse » quil faille nécessairement en conclure que leur contenu correspond à chacune de ces notions. [59] Dans la « fiche dévaluation validée », les évaluateurs ont accordé une cote pour chacun des 17 sous-facteurs décrits dans le document « système dévaluation des emplois ». Lattribution dune cote pour chacun des sous-facteurs est justifiée sur ce document et cette justification est propre et pertinente à lemploi
06 16 42 et 06 16 89 Page : 14 examiné. Pour y arriver, on procède à une analyse des principales tâches et responsabilités contenues dans la description demploi. [60] Il apparaît au soussigné que cette section du document qui comporte les « justifications » correspond à la définition de lexpression « analyse des emplois » contenue au Dictionnaire canadien dont la définition est la suivante : « Technique de détermination par lobservation et létude des éléments qui composent un poste ainsi que des connaissances, de la qualification et des aptitudes exigées du titulaire. Lanalyse est la première étape pour en arriver à la spécification et à la description dun poste. » [61] Ce même document comporte en plus une cote pour chaque sous-facteur. Cette cote est numérique et ne comporte aucune analyse. Elle représente le « résultat » de lanalyse et permet, par le calcul du pointage, de donner une classification à lemploi. [62] En ce qui concerne le deuxième document, « la fiche de consignation de lanalyse de lemploi », il contient une description des différentes responsabilités de lemploi ainsi quun pourcentage correspondant à la proportion occupée par chacune de ces responsabilités dans lensemble des attributions de lemploi. Finalement, une classification de niveau 1, 2, 3 ou 4 est donnée à chaque tâche. [63] La description des différentes responsabilités reliées à lemploi constitue une analyse. Par contre, la répartition par pourcentage de chacune delles représente « une évaluation des renseignements qui décrivent lemploi ». 2) Une procédure judiciaire doit être en cours : [64] Lexistence de procédures judiciaires au moment de la demande daccès en juillet 2006 ne fait aucun doute. En effet, la preuve a démontré que le 19 mai 2006, les demandeurs avaient déposé chacun trois griefs devant le tribunal darbitrage de la fonction publique. Le grief principal se lit comme suit : « Je conteste la décision arbitraire et non équitable de lemployeur, dont jai été saisi le 7 février 2006 de refuser mon intégration à la classe 3 de mon corps demploi (118), le tout en particulier en contravention à la lettre dentente numéro 8 de ma convention collective.
06 16 42 et 06 16 89 Page : 15 Je demande dêtre intégré au niveau 3 de mon corps demploi, le tout, notamment, dans le respect des articles 6-6.05 et 7-1.05. » [65] Le processus darbitrage prévu à la convention collective des ingénieurs à lemploi du gouvernement du Québec a déjà fait lobjet dune décision de cette Commission et la commissaire Hélène Grenier écrit 8 : « La Commission conclut que le processus darbitrage prévu par la convention collective de travail des ingénieurs (O-1) est de nature essentiellement judiciaire. La Commission comprend également que la demanderesse a elle-même entrepris de contester la classe demploi qui lui a été attribuée et quà moins dun règlement, cette contestation amorcée avant la demande daccès sera tranchée par larbitre, comme le veut la convention collective applicable. » Le soussigné na reçu, dans la présente affaire, aucune preuve lui permettant de conclure autrement. 3) Le risque dun effet sur une procédure judiciaire : [66] Les demandeurs soutiennent dans leur argumentation quaucune preuve na été faite par lorganisme pour démontrer que la divulgation des documents recherchés risquerait vraisemblablement davoir un effet sur une procédure judiciaire. [67] Dans son témoignage rendu à huis clos, M. Jacques Fréchette, représentant de lorganisme, a discuté de ce risque éventuel. Il rappelle que les deux demandeurs ont déposé des griefs pour contester le classement qui a été attribué à leur emploi et quen conséquence, la preuve qui sera faite par lorganisme lors de laudience sur ces griefs sera concentrée sur le contenu de ces documents et le processus qui a mené à leur élaboration. [68] La question en litige portera sur la qualité et la pertinence de lévaluation qui a été faite et sans présumer des moyens quil utilisera pour ce faire, lorganisme aura à justifier et expliquer les conclusions auxquels il en est venu. 8 Précitée, note 3.
06 16 42 et 06 16 89 Page : 16 [69] Le soussigné considère donc que la communication des documents déposés, sous le sceau de la confidentialité, risquerait vraisemblablement davoir un effet sur la procédure judiciaire enclenchée suite au dépôt des griefs. [70] En ce qui concerne les autres documents requis dans les demandes daccès, la preuve a démontré que les documents ont été remis ou quils nexistent pas et les demandeurs nont, en contrepartie, apporté aucune preuve de leur existence. [71] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [72] ACCUEILLE en partie la demande de révision; [73] ORDONNE à lorganisme de communiquer dans les trente jours de la date de la réception de la présente décision, à chacun des demandeurs, les documents suivants : la fiche dévaluation validée, révisée le 7 novembre 2003, pour ce qui concerne les informations contenues aux deux colonnes de gauche comportant la désignation du sous-facteur et la cote; la fiche de consignation de lanalyse de lemploi, révisée le 5 mars 2004, pour les quatre premières sections comportant les pourcentages et les commentaires de la présence dattributions caractéristiques des niveaux 1 à 4; [74] REJETTE les demandes daccès pour le reste. JEAN CHARTIER Commissaire M e Isabelle Gagné Avocate de lorganisme
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