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Commission daccès à linformation du Québec Dossiers : 05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Date : Le 20 novembre 2007 Commissaire : M e Christiane Constant X Demandeur c. MINISTÈRE DU DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE, DE LINNOVATION ET DE LEXPORTATION et MINISTÈRE DES FINANCES DU QUÉBEC et INVESTISSEMENT-QUÉBEC INC. Organismes BOMBARDIER INC. et FONDS DE SOLIDARITÉ DES TRAVAILLEURS DU QUÉBEC et GROUPE AXOR INC. Tierces parties DÉCISION INTERLOCUTOIRE
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 2 LE LITIGE DEMANDES DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS À DES RENSEIGNEMENTS, selon les termes de larticle 135 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 Dossiers n os 05 03 97, 05 07 89 et 05 07 90 [1] Le 2 mars 2005, le demandeur requiert de M. Georges Boulet, responsable de laccès aux documents pour le ministère du Développement économique, de lInnovation et de lExportation (MDEIE), de M me Lucie Lépine, responsable de laccès aux documents au sein du ministère des Finances du Québec (le ministère des Finances) et de M e Pierre B. Lafrenière, responsable de laccès aux documents au sein dInvestissement-Québec inc. (Investissement-Québec), une copie des documents quil décrit en ces termes : […] Tout document relatif à la nature et létendue de laide financière ou autre offerte le ou vers le 15 décembre 2004 par le gouvernement du Québec à Bombardier ou à ses filiales; Tout document relatif à la nature et à létendue de laide financière ou autre offerte le ou vers le 15 décembre 2004 par le gouvernement du Québec pour la construction à Mirabel dune usine dassemblage davions pour le compte de Bombardier; Tout document relatif à la nature et à létendue de laide offerte le ou vers le 15 décembre 2004 par le gouvernement du Québec concernant le financement des coûts de recherche et de développement des avions de Série C que Bombardier ou ses filiales proposent de fabriquer; Tout document utilisé, consulté, étudié ou échangé dans le cadre de la préparation et de lélaboration de laide offerte le ou vers le 15 décembre 2004 par le gouvernement du Québec à Bombardier; 1 L.R.Q., c. A-2.1, la Loi sur laccès.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 3 Tout document rédigé, préparé et échangé entre le Ministère des Finances et Bombardier relativement à toute aide offerte le ou vers le 15 décembre 2004 par le gouvernement du Québec et ce, jusquà ce jour; Tout document rédigé, préparé et échangé entre Investissement-Québec et Bombardier relativement à toute aide offerte le ou vers le 15 décembre 2004 par le gouvernement du Québec et ce, jusquà ce jour; Tout document se rapportant aux demandes de précisions de Bombardier sur toute forme daide offerte par le gouvernement du Québec ainsi que les précisions apportées notamment par Investissement-Québec; Tout document se rapportant aux demandes de précisions de Bombardier sur toute forme daide offerte par le gouvernement du Québec ainsi que les précisions apportées notamment par le Ministère des Finances; Tout document se rapportant aux demandes de précisions de Bombardier sur toute forme daide offerte par le gouvernement du Québec ainsi que les précisions apportées notamment par le ministre Michel Audet. Dossier n o 05 03 97 [2] Le 3 mars 2005, M e Lafrenière invite le demandeur à sadresser au MDEIE, en lui fournissant le nom et les coordonnées de M. Boulet, responsable de laccès. [3] Le 9 mars 2005, le demandeur sollicite lintervention de la Commission daccès à linformation (la Commission) afin que soit révisée la décision dInvestissement-Québec. Dossier n o 05 07 89 [4] Le 21 mars 2005, M me Lépine refuse de transmettre au demandeur les documents recherchés : « […] parce quils contiennent des renseignements ayant des incidences sur les relations intergouvernementales, léconomie, les décisions administratives ou politiques ou sont en fait des ébauches ou des documents de même nature. » À lappui des motifs de refus, elle invoque les articles 9, 19, 21, 22, 23, 24, 34, 37, 38 et 39 de la Loi sur laccès.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 4 [5] Le 4 avril 2005, le demandeur sollicite lintervention de la Commission daccès à linformation (la Commission) afin que soit révisée la décision du ministère des Finances. Dossier n o 05 07 90 [6] Le 1 er avril 2005, M. Boulet refuse de transmettre au demandeur une copie des documents recherchés. Ceux-ci contiendraient notamment des secrets ou renseignements industriels, commerciaux et syndicaux. Leur communication risquerait, entre autres, dentraver une négociation en vue de la conclusion dun contrat. Il invoque, à cet effet, les articles 22, 23 et 24 de la Loi sur laccès, ajoutant que la plupart des documents recherchés ont été produits dans le cadre : […] dun processus décisionnel qui se poursuit dans la perspective de la conclusion dune entente dont lobjet est le soutien financier de Bombardier Aéronautique pour son projet davion de série C. Nous retenons ces documents en nous référant à larticle 39 de la Loi sur laccès. [7] M. Boulet ajoute que les motifs de refus sont en outre basés sur les articles 9, 14, 18, 19, 30, 31, 33, 34 et 37 de la Loi sur laccès. [8] Le 6 avril 2005, le demandeur soumet à la Commission une demande de révision. CONTEXTE [9] Le 15 juin 2006, la Commission tient une conférence préparatoire dans les dossiers impliquant initialement : Le demandeur, le ministère des Finances du Québec et Bombardier inc. (Bombardier) (n o 05 07 89); Le demandeur, le ministère du Conseil du Trésor et Bombardier (n o 05 05 18); Le demandeur, le ministère du Conseil exécutif et Bombardier (n o 05 09 40); Le demandeur, le MDEEIE et Bombardier (n o 05 07 90); Le demandeur, Investissement-Québec, Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (FSTQ), Groupe Axor inc. et Bombardier (n o 05 03 97).
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 5 [10] M e Jean Bazin du cabinet davocats Fraser Milner Casgrain, procureurs du demandeur, informe la Commission que celui-ci se désiste de ses demandes à légard du ministère du Conseil du Trésor et de Bombardier (n o 05 05 18) et du ministère du Conseil exécutif et de Bombardier (n o 05 09 40). [11] M e Bertrand Roy, pour le ministère des Finances et le MDEIE, informe la Commission de son intention de soumettre conjointement avec M e Dominique Legault, du cabinet davocats Bernard Roy (Justice Québec) pour le MDEIE, une preuve commune lors de laudience sur le fond du litige dans les trois dossiers devant se tenir à une date ultérieure. Cette preuve commune se veut nécessaire afin dexpliquer le contexte dans lequel le gouvernement du Québec a fait lannonce de la construction par Bombardier aéronautique inc. des avions « série C ». [12] Cependant, une preuve distincte concernant chaque partie sera soumise à la Commission au moment opportun. [13] Par lentremise de leur procureur respectif, les tierces parties et le demandeur ne sopposent pas à la suggestion de M e Roy. Ces tierces parties sont représentées par : - M e Isabelle Dionne et M e Jean Lozeau alors du cabinet davocats Lozeau LAfricain pour Investissement-Québec; - M e Marie-Julie Croteau du cabinet davocats Desjardins Ducharme pour le Groupe Axor inc.; - M e Véronique Landry du cabinet davocats Themens Landry pour le FSTQ; - M e François Fontaine et M e Amélie Dussault du cabinet davocats Ogilvy Renaud pour Bombardier aéronautique inc. [14] Par ailleurs, à la suite dune audience tenue dans les dossiers n o 05 07 90 (le MDEIE) et n o 05 03 97 (Investissement-Québec), les parties ont été autorisées par la Commission à invoquer tardivement les articles 9 (2 e alinéa), 14 (2 e alinéa), 21, 22, 23, 24, 27, 37, 38 et 39 de la Loi sur laccès, tel quil appert dune décision interlocutoire datée du 11 janvier 2007. [15] Il est opportun de souligner que le ministère des Finances, le FSTQ et le Groupe Axor inc. nétaient pas concernés par cette décision interlocutoire.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 6 LAUDIENCE DU 11 JUIN 2007 [16] Laudience sur le fond du litige est tenue les 11, 12 et 13 juin 2007, à Montréal, dans le dossier impliquant le demandeur, le MDEIE et la tierce partie Bombardier inc. Sont présents : - M e Bertrand Roy pour le ministère des Finances et le MDEIE, - M e Dominique Legault pour le MDEIE, - M e Isabelle Dionne et M. Shawn Jacobaccio, stagiaire en droit, pour Investissement-Québec, - M e Olivier Truesdell-Ménard et M e Marie-Julie Croteau pour le Groupe Axor inc., - M e Véronique Landry pour le FSTQ, - M e François Fontaine et M e Amélie Dussault pour Bombardier. LA PREUVE DU MDEIE Témoignage de M. Georges Boulet [17] Interrogé par M e Roy, M. Boulet affirme quil est secrétaire général et responsable de laccès à linformation au sein du MDEIE, tel quil appert dun organigramme de ce ministère approuvé le 6 avril 2004 et mis à jour le 7 février 2005 (O-1). Dans le cadre de ses fonctions, il soccupe du cheminement des processus décisionnels et de tous les documents requérant des décisions devant être prises par le ministre du MDEIE. [18] M. Boulet décrit notamment la mission du MDEIE, selon les termes de la Loi sur le ministère du Développement économique, de lInnovation et de lExportation 2 . Il décrit de plus les fonctions occupées par le ministre dans le cadre de sa compétence (art. 3), dont le rôle vise à créer et à susciter le développement de lindustrie. Il supporte toutes les autres missions dont le gouvernement a la responsabilité. Dans ce contexte, il a traité la demande daccès formulée par le 2 L.R.Q., c. M-30.01.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 7 demandeur (O-2), le 2 mars 2005, concernant laide financière relative à la construction dune usine dassemblage davions de « série C » à Mirabel « et à lassemblage même de ces avions » offerte par le gouvernement du Québec à Bombardier. Le lendemain, il transmet un accusé de réception au demandeur (O -3). [19] Il fait parvenir également au demandeur une lettre datée du 22 mars 2005 lavisant quun délai additionnel de dix jours est nécessaire pour le traitement de sa demande daccès (O-4). Il lui transmet finalement, à la même date, la décision du MDEIE refusant laccès aux documents recherchés (O-5) en raison des articles qui y sont mentionnés. [20] M. Boulet na pas avisé les tierces parties de la demande daccès aux documents les concernant selon les termes de larticle 23 de la Loi sur laccès, puisque le MDEIE navait pas lintention de transmettre au demandeur les documents quil souhaitait obtenir. Dans le cas de Bombardier, plus particulièrement, lune des tierces parties dans la présente instance, le MDEIE détient des documents confidentiels qui lui ont été remis par celle-ci. Il a alors pris pour acquis que Bombardier ne consentirait pas à leur divulgation. [21] M. Boulet indique quune personne lassiste dans le cadre de ses fonctions et cette dernière a transmis une note adressée à la Direction générale du MDEIE concernant le dossier Bombardier. [22] Se référant à lorganigramme (O-1), M. Boulet signale quau sein du MDEIE, la Direction des équipements de transport relevant de la Direction générale de lindustrie et du Commerce au sein du MDEIE est dirigée par M. Charles Dieudé, responsable du dossier concernant Bombardier. [23] M e Roy dépose, sous le sceau de la confidentialité, 27 documents appartenant au MDEIE et détenus par celui-ci ou par dautres organismes. Il spécifie que certains documents peuvent être accessibles au demandeur. M e Roy dépose également, sous le sceau de la confidentialité, 19 documents qui proviendraient de Bombardier et il remet à M e Bazin, procureur du demandeur, des extraits de renseignements qui lui sont accessibles. [24] À la demande de M e Bazin, M e Roy souligne que les documents en litige sont composés de notes ministérielles et sous-ministérielles, lesquelles ont été préparées pour le ministre du MDEIE, des lettres provenant de celui-ci, de la correspondance, des notes et comptes-rendus de rencontres. On y trouve également une note et un mémoire adressés au Conseil des ministres et des décisions des instances décisionnelles, etc. Il réitère que les motifs de refus à la
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 8 divulgation des documents portent sur les articles 9, 14, 18, 19, 21, 22, 23, 24, 30, 33, 34 et 37 de la Loi sur laccès. Poursuite du témoignage de M. Boulet [25] M. Boulet signale que la demande daccès du demandeur a été formulée dans le cadre dun projet présenté par Bombardier, lors du Salon aéronautique de Farmborough en Angleterre, consistant à lassemblage dun nouvel avion comportant 100 à 130 places. Bombardier a alors lancé un appel doffres international afin dinviter les gouvernements intéressés « à postuler pour recevoir le site dassemblage de ces avions » sur leur territoire. En fait, lappel doffres visait à savoir si les gouvernements intéressés étaient prêts à construire une usine destinée à faire lassemblage final des avions. [26] Le témoin ajoute que les salons aéronautiques se tiennent au Bourget à Paris en France ou à Farmborough en Angleterre. Le Québec y participe depuis plusieurs années. M. Dieudé, pour sa part, participe à ces salons de laéronautique depuis 1983. [27] M. Boulet prétend que le MDEIE a été appelé à répondre au projet de Bombardier puisquil est chargé de repérer toutes les occasions daffaires et tous les projets dinvestissement ayant trait à la création demplois. Le gouvernement du Québec cherche à intéresser une entreprise à venir sinstaller au Québec. Par exemple, le projet de « série C » de Bombardier est important pour le MDEIE compte tenu de la possibilité de création demplois et de richesse dans le domaine de laéronautique. Les retombées économiques peuvent susciter la création de près de 6 500 emplois au Québec. Le MDEIE était intéressé à ce projet afin de coordonner les discussions et les offres qui seraient soumises à Bombardier. Plusieurs gouvernements à travers le monde sy intéressaient également. [28] Selon M. Boulet, la Direction des équipements de transport a communiqué avec les représentants de Bombardier concernant ce projet. Le MDEIE joue un rôle important dans ce dossier. Il appartient donc à celui-ci den faire létude, démettre des avis, de formuler des recommandations au Conseil exécutif qui regroupe le conseil des ministres. [29] Outre le MDEIE, quatre autres organismes étaient impliqués dans ce dossier. Le ministère des Finances intervient en raison de son rôle en matière de politique budgétaire. Le Conseil du Trésor est responsable du respect des enveloppes budgétaires et sassure que les sommes sont dépensées en respect des normes et barèmes établis à cet effet. Investissement-Québec est également impliqué dans ce dossier, puisquil représente un élément essentiel du
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 9 gouvernement pour tout ce qui concerne le secteur industriel. Finalement, le ministère du Conseil exécutif regroupant, entre autres, le Conseil des ministres et les comités ministériels y est aussi impliqué. [30] M. Boulet ajoute notamment que M. Gilles Demers, sous-ministre adjoint à lindustrie et au Commerce au sein du MDEIE, jouait un rôle important dans le dossier de Bombardier et était appuyé par la Direction des équipements de transport dirigée par M. Dieudé. [31] Le témoin ajoute que 60% de toute lactivité aéronautique au Canada se passe au Québec, ce qui représente un chiffre de ventes de 11,4 milliards de dollars. De plus, 80% de la production dans ce secteur est destinée à lexportation, le Québec occupant la 6 e place sur le plan mondial. Il signale que 238 entreprises oeuvrant dans ce domaine se trouvent au Québec et près de 40 400 Québécois y occupent un emploi direct. [32] M. Boulet indique que la divulgation des documents en litige serait dommageable pour le gouvernement. Elle aurait pour effet de révéler des secrets industriels concernant Bombardier et donnerait un avantage appréciable à ses concurrents. Les relations daffaires entre le gouvernement du Québec et Bombardier souffriraient de conséquences non souhaitées puisque, à son avis, les discussions daffaires revêtent un caractère confidentiel. [33] M. Boulet précise que dautres partenaires sont également impliqués dans le projet de construction des avions « série C » de Bombardier. Il sagit des autres tierces parties, à savoir le FSTQ et le Groupe Axor inc. [34] Il souligne que le gouvernement est en compétition, notamment avec des États américains, des pays de lEurope, la Chine, le Brésil, lIrlande et la Grande-Bretagne. Ceux-ci souhaitent également recevoir Bombardier sur leur territoire en raison des retombées économiques que ce projet peut engendrer. Ce projet vise la construction de diverses parties des avions au Québec tandis que dautres peuvent être construites ailleurs. Lassemblage final se ferait au Québec. Il précise que M. Dieudé fournira plus dinformations au cours de son témoignage. Témoignage de M. Charles Dieudé [35] Interrogé par M e Roy, M. Dieudé déclare quil a commencé à travailler au sein du MDEIE, en 1984, à titre de conseiller en aéronautique. Il mentionne quil a obtenu son diplôme, en 1967, en France, après avoir suivi une formation dingénieur généraliste, spécialisé en turbomachine, dont les moteurs davion.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 10 [36] Dès 1970, il commence à travailler dans ce domaine au sein de lentreprise « Aérospatial », devenue par la suite « la Société EADS », lentreprise numéro 1 européenne et le numéro 2 mondial dans le secteur de laéronautique et du spatial. Cette entreprise construit tout ce qui a trait aux avions, aux hélicoptères, etc. Il produit en preuve ses notes biographiques décrivant ses expériences académiques et professionnelles et les diverses fonctions quil a occupées dans ce domaine. Il était, en outre, « chef de service de coordination aux partenaires européens », cest-à-dire responsable des avions construits dans une chaîne dassemblage à un endroit précis (O-6). [37] En 1984, il agit à titre daviseur, de conseiller en aéronautique au sein du MDEIE dans le dossier de limplantation de Bell Helicopter à Québec et à Mirabel. Son rôle est détablir des liens étroits avec lindustrie locale québécoise, canadienne et internationale. Il agit à titre dexpert dans ce domaine et, dans le cadre de son travail, il est en communication, notamment, avec le président de Bombardier et dautres intervenants. [38] Il confirme essentiellement le témoignage de M. Boulet visant, entre autres, le nombre demplois directs visés par le secteur de laéronautique au Québec, ajoutant que cette industrie représente 7% de toute la production du Québec. [39] Il affirme quil est au courant de la demande daccès formulée par le demandeur. En 2004, Bombardier avait comme projet de construire des avions régionaux pouvant transporter 100 personnes. Cette annonce sest faite au cours du Salon de Farmborough, vers le 19 juillet 2004. Lentreprise Embraer était un autre compétiteur dans la construction davions régionaux. INTERVENTION [40] Par ailleurs, pour faire suite à la demande de M e Bazin concernant, notamment, les titres des 27 documents en litige, M e Legault remet à celui-ci une liste des documents provenant du MDEIE (O-7). DES 12 ET 13 JUIN 2007 : PREUVE EX PARTE [41] Les 12 et 13 juin 2007, MM. Boulet et Dieudé poursuivent leurs interrogatoires lors de la preuve ex parte, à lexclusion du demandeur et des autres parties, conformément à larticle 20 des Règles de preuve et de procédure de la Commission daccès à linformation 3 : 3 R.R.Q., c. A-2.1, r.2, D-2058-84, les Règles de preuve et de procédure.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 11 20. La Commission peut prendre connaissance, en labsence du requérant et à huis clos, dun document que lorganisme public ou le tiers prétend devoir être soustrait à laccès en vertu dune restriction prévue à la section II de la Loi. CONTEXTE [42] Le 31 août 2007, M e Roy me transmet une lettre dans laquelle il indique : Tel que mentionné à loccasion de la présentation de la preuve du 13 juin 2007, je vous informe quà la reprise des audiences publiques, le 11 septembre prochain, jai lintention de vous demander de reconnaître à monsieur Charles Dieudé le statut dexpert dans le domaine de laéronautique. Quelques questions additionnelles pourront lui être posées par la suite. Afin de justifier cette demande, outre les représentations que je ferai le 11 septembre prochain, je me permets de vous référer au témoignage fait publiquement par monsieur Charles Dieudé, le 11 juin 2007, à loccasion de présentation de la preuve commune dans les dossiers mentionnés en titre, en ce qui regarde ses connaissances et son expérience professionnelle. DU 11 SEPTEMBRE 2007 [43] À la reprise de laudience du 11 septembre 2007, M e Roy réitère la demande quil a formulée dans sa lettre datée du 31 août précédent. [44] En réponse à cette demande, le demandeur indique quil a préalablement avisé M e Roy quil sy opposait considérant sa tardiveté. Il ajoute quen labsence de M e Bazin, il est prêt à débuter le contre-interrogatoire des témoins du MDEIE, à savoir MM. Boulet et Dieudé. Le demandeur précise que M e Bazin fera les représentations nécessaires quant à la demande du MDEIE de reconnaître M. Dieudé à titre de témoin expert dans le domaine de laéronautique, lorsquil se présentera à laudience.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 12 INTERVENTIONS DES TIERCES PARTIES [45] M e Fontaine sinterroge sur lintervention du demandeur qui souhaite contre-interroger les témoins du MDEIE puisque, depuis le début de laudience, il est représenté par un avocat devant la Commission. Il appartient à son avocat de le faire. [46] M e Fontaine ajoute néanmoins que si le demandeur nétait pas représenté par un avocat, il aurait pu procéder au contre-interrogatoire des témoins du MDEIE. Or, ce nest pas le cas. Il soppose à ce que le demandeur agisse à titre davocat dans les trois dossiers, et ce, pour les motifs déjà mentionnés. [47] M e Lozeau pour Investissement-Québec et M e Truesdell-Ménard pour le Groupe Axor inc. abondent dans le même sens que le procureur de Bombardier. [48] M e Roy pour le MDEIE et le ministère des Finances et M e Legault pour le MDEIE sont également en accord avec les commentaires émis par M e Fontaine relatifs à linformation soumise par le demandeur. [49] En réponse aux représentations des procureurs des parties, le demandeur fait remarquer quil agit « à titre de mandataire […] oui, on ma donné le chapeau de demandeur; jai signé la lettre de la Commission, ensuite jai fait ma demande de révision […] ». [50] Le demandeur ajoute cependant que les procureurs du MDEIE le considèrent possiblement et implicitement comme procureur dans ce dossier, puisquen vertu du Code de déontologie des avocats 4 , un avocat ne peut pas communiquer avec une partie lorsquil sait que cette dernière est représentée par avocat. Il fournit en exemple que ces procureurs communiquent avec lui par téléphone ou par écrit. Ils le considèrent « comme étant le représentant dun demandeur qui nous a demandé, FMC, Fraser Milner Casgrain, de faire la demande. […] ». [51] M e Roy réplique que ses lettres étaient toujours adressées à la fois au demandeur et à son procureur, M e Bazin. Il précise cependant que le demandeur « agit dans le dossier à la fois comme demandeur et comme procureur, et comme il nous écrit, je verrais mal quon ne lui réponde pas. » 4 L.R.Q., c. B-1, a. 15.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 13 [52] M e Fontaine est en désaccord avec linterprétation de M e Roy ajoutant que le demandeur devrait décider à quel titre il agit devant la Commission. Cependant, dans la situation actuelle, il serait prêt à retirer son objection si le demandeur dévoile le nom du mandant auprès des autorités gouvernementales. [53] M e Lozeau, pour sa part, insiste sur le fait que le demandeur dévoile lidentité du mandant considérant son affirmation voulant quil agisse pour quelquun dautre. [54] Le demandeur signale, quen matière daccès à linformation, la qualité du demandeur nest pas pertinente. Il refuse pour linstant de modifier linformation quil a préalablement indiquée en début daudience voulant quil soit un mandataire. [55] M e Fontaine signale, après avoir discuté avec les procureurs des autres parties, quil considère que laveu du demandeur est sérieux et que la demande de révision de celui-ci est viciée à sa base. Cette demande est donc nulle et la Commission nen est pas légalement saisie. [56] Il reconnaît quun demandeur nest jamais obligé de justifier sa demande, dautant plus que selon les termes de larticle 9 de la Loi sur laccès, toute personne a droit daccès aux documents détenus par un organisme public. Dans le cadre dune demande de révision formulée devant la Commission, un demandeur doit exister en vertu des articles 135 et suivants de la Loi sur laccès. Celui-ci na pas besoin de témoigner dans sa cause. [57] M e Fontaine indique cependant que, dans le cadre de la preuve quil a à soumettre au nom de Bombardier relativement aux articles 23 et 24 de la Loi sur laccès, lidentité du demandeur est pertinente. [58] M e Roy pour le MDEIE et le ministère des Finances fait remarquer quil existe un principe fondamental selon lequel le demandeur doit sidentifier dans le cadre dun débat judiciaire. En matière daccès, il doit également le faire. Or, le demandeur a mentionné quil est un prête-nom. M e Roy ajoute : « Alors, il me semble quil y a effectivement matière grave et questionnement important. » [59] M e Landry pour le FSTQ abonde dans le même sens que M e Roy, mais ajoute que lidentité du véritable demandeur a une incidence pour son client puisque lors de la présentation de sa preuve, elle devrait être en mesure de démontrer quen vertu des articles 23 et 24 de la Loi sur laccès, la divulgation des renseignements recherchés peut nuire de façon substantielle à sa compétitivité. Elle a un « droit minimum de savoir qui est le demandeur. »
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 14 REPRÉSENTATIONS DE M E BAZIN [60] M e Fontaine réitère lessentiel des représentations quil a déjà faites, de manière à ce que M e Bazin puisse intervenir. Il sinterroge sur la compétence de la Commission à entendre les causes impliquant le demandeur en raison de linformation soumise préalablement par celui-ci en présence des autres procureurs. [61] M e Bazin fait une mise en garde relativement au questionnement du procureur de Bombardier et à « lobligation pour un avocat de dévoiler ou non le nom de ses clients, le mandat quil a ou quil na pas; et enfin, M e Fontaine soulève, plusieurs questions assez fondamentales, et […] il en fait une question dappel à la juridiction de la Commission. » DISCUSSION [62] Pour bien circonscrire le débat lors de la prochaine audience et après discussion avec les procureurs, il est décidé que ceux-ci feront parvenir à la Commission leur plan dargumentation eu égard à la déclaration du demandeur du 11 septembre 2007. LES ARGUMENTS RECUEILLIS À LAUDIENCE TENUE LE 10 OCTOBRE 2007 DU DEMANDEUR 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. 168. Les dispositions de la présente loi prévalent sur celles d'une loi générale ou spéciale postérieure qui leur seraient contraires, à moins que cette dernière loi n'énonce expressément s'appliquer malgré la présente loi. 169. Sous réserve de l'article 170, toute disposition d'une loi générale ou spéciale qui est inconciliable avec celles du chapitre II relatives à l'accès aux documents des organismes publics ou celles du chapitre III relatives à la protection des renseignements personnels cesse d'avoir effet le 31 décembre 1987.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 15 [63] M e Bazin plaide quil existe un principe fondamental voulant que toute personne a droit daccès à un document. Ce principe est renforcé par les dispositions de la présente loi qui prévalent sur celles dune loi générale ou spéciale qui serait contraire aux dispositions de la loi prévoyant laccès aux documents des organismes publics ou celles relatives à la protection des renseignements personnels; cette loi cesse davoir effet le 31 décembre 1987. [64] M e Bazin argue de plus que la Loi sur laccès est renforcée par larticle 44 de la Charte des droits et libertés de la personne 5 . À son avis, larticle 44 de la Charte inclut larticle 9 de la Loi sur laccès : 44. Toute personne a droit à l'information, dans la mesure prévue par la loi. [65] Il fait remarquer quune demande daccès a été formulée le 2 mars 2005, notamment auprès du ministère des Finances, par le cabinet davocats Fraser Milner Casgrain et quelle porte la signature du demandeur, agissant pour le compte de ce cabinet davocats pour lequel il travaille. Il réfère à la réponse de la responsable daccès aux documents de ce ministère adressée à son client, lui refusant laccès aux documents et à son invitation à formuler sa demande auprès des ministères et organismes mentionnés dans la présente cause. Le demandeur sollicite par la suite lintervention de la Commission afin de réviser cette décision du ministère des Finances. [66] Il réfère aux demandes daccès formulées également le 2 mars 2005 par le même cabinet davocats, signées par le demandeur, auprès du MDEIE et dInvestissement Québec recherchant laccès aux mêmes documents. Les décisions des responsables daccès de ces organismes ont été adressées au demandeur et celui-ci sest adressé à la Commission afin de réviser ces décisions. [67] Il souligne quil sagit de la même personne ayant formulé les trois demandes daccès et les trois demandes de révision. À cet effet, il commente la jurisprudence soumise par Bombardier qui, à son avis, est inapplicable dans les cas sous étude. Il sagit, entre autres, de laffaire Larivière c. Office de la protection du consommateur 6 et de Green c. Ministère de lEnvironnement 7 . Dans ce dernier cas, les demandes daccès et de révision ont été formulées par la Société pour vaincre la pollution, laquelle a fait faillite, alors que la requête pour permission dappeler à la Cour du Québec, quant à elle, a été faite par M. Green 8 . 5 L.R.Q., c. C-12. la Charte. 6 [1987] C.A.I., 2880. 7 [2002] C.A.I., 392. 8 (500-02-098394-013).
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 16 [68] Il rappelle que lors de la conférence préparatoire et des interventions dans les présentes causes, il na jamais été question de douter de lidentité du demandeur. Il réfère notamment à la correspondance adressée à celui-ci et aux avis de convocation de la Commission. Les parties savaient quelles sadressaient à un avocat travaillant dans un cabinet davocats qui représente des clients. Il ne sagit donc pas de « finalité cléricale » et cela naffecte pas la compétence de la Commission à entendre les présentes causes. [69] Il signale que, si tel est le cas, larticle 141 de la Loi sur laccès accorde à la Commission tous les pouvoirs pour préserver les droits des parties. [70] M e Bazin prétend quaucune procédure ne doit être considérée nulle ou rejetée pour vice de forme (art. 3 des Règles de preuve et de procédure). Il énumère les renseignements que peut contenir une demande formulée par un requérant ou par son représentant (art. 10 de ces mêmes règles). Ces règles prévoient également les pouvoirs de la Commission avant de procéder à une audition (art. 14) : 3. Aucune procédure faite en vertu du présent règlement ne doit être considérée comme nulle ou rejetée pour vice de forme. 10. Cette demande contient également: 1°la mention et la date de l'événement lui donnant lieu; 2°la signature du requérant ou de son représentant; 3°les nom et adresse du requérant et, le cas échéant, de son représentant. 14. Avant de procéder à une audition, la Commission peut requérir la comparution des parties ou de leur représentant à une rencontre préliminaire afin de conférer sur les moyens propres à simplifier ou à abréger l'audition, définir les points en litige et admettre quelque fait ou document. LARTICLE 130.1 DE LA LOI SUR LACCÈS [71] Quant à la demande de Bombardier auprès de la Commission de rejeter les demandes de révision du demandeur sous langle de larticle 130.1 de la Loi sur laccès, en vigueur au moment de ces demandes et avant ladoption du Projet de loi 86 au mois de juin 2006, M e Bazin précise quil ny a pas lieu dy réponde positivement.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 17 [72] M e Bazin énumère à cet effet toutes les demandes de révision formulées par son client auprès de la Commission, pour un total de huit, dont trois font lobjet de débats dans la présente audience. Son client sest désisté des demandes de révision visant le ministère du Conseil exécutif et Bombardier (dossier C.A.I. 05 09 40) et le ministère du Conseil du Trésor et Bombardier (dossier C.A.I. 05 05 18). TARDIVITÉ DE LA REQUÊTE DE BOMBARDIER [73] La requête de Bombardier cherchant le rejet des demandes du demandeur est non fondée, puisque celui-ci a été impliqué dans un échange de correspondance, notamment avec les procureurs du MDEIE et la Commission. Dailleurs, la Commission a rendu plusieurs décisions 9 visant des cabinets davocats qui se sont identifiés comme demandeurs dans les demandes de révision qui lui étaient adressées. Tous ces cabinets davocats représentaient des clients devant la Commission et nétaient pas tenus de dévoiler lidentité de ceux-ci. [74] M e Bazin réitère que le droit dune personne davoir accès aux documents des organismes publics au sens de larticle 9 de la Loi sur laccès est inclus à larticle 44 de la Charte voulant que « toute personne a droit à linformation, dans la mesure prévue par la loi M e Bazin argue de plus que la qualité, lintérêt, le statut ou les intentions du demandeur nont pas à être dévoilés par celui-ci afin davoir accès aux documents en litige, conformément, entre autres, à laffaire Boudrias, Fréchette, Gélinas & associés précitée. Ces derniers avaient été représentés par un cabinet davocats. La Loi sur le Barreau serait inapplicable dans la présente instance. [75] Conséquemment, M e Bazin invite la Commission à rendre sa décision selon la Loi sur laccès et non en vertu de la Loi sur le Barreau. [76] Il soumet et commente laffaire Joli-Cœur, Lacasse, Lemieux, Simard, St-Pierre c. Québec (Ministère du Revenu) précitée, qui, à son avis, ressemble aux questions soulevées dans la présente instance. Dans cette affaire, le demandeur a précisé à la Commission quil agit au nom dun fournisseur ayant présenté une proposition à la suite dun appel doffres lancé par le ministère du Revenu. 9 Stikeman Elliott c. Québec (Ministère de lEnvironnement et de la Faune), [2004] C.A.I. 40; Boudrias, Fréchette, Gélinas & associés c. Régie de lélectricité et du gaz, [1984-86] C.A.I. 331; Joli-Cœur, Lacasse, Lemieux, Simard, St-Pierre c. Québec (Ministère du Revenu), [1998] C.A.I. 34; Martineau, Walker c. Québec (Ministère du Revenu), [1998] C.A.I. 117.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 18 LE SECRET PROFESSIONNEL DE LAVOCAT [77] M e Bazin plaide que le demandeur nest pas obligé de dévoiler lidentité de son client, tel quil en est ressorti dans laffaire Belley c. La Cité de Québec 10 la Cour du banc du roi mentionnait notamment : […] Rendant témoignage en faveur de sa réclamation, lappelant a refusé de dévoiler, en transquestion, le nom dune personne qui lui aurait versé par anticipation et pour ses services, une somme de $2500; il prétend se justifier en disant que cette personne est un client et que cest avec entente expresse que la chose serait traitée confidentiellement, que son nom ne serait pas dévoilé, que cette personne a donné la somme en question; il ajoute quil devra compte à cette personne de la dite somme, quand il aura été payé de lintimée. [78] Commentant laffaire Procureur général du Québec c. Landreville 11 , M e Bazin fait remarquer également que lidentité du client ne devrait pas être dévoilée par son avocat, sauf si celui-ci est relevé du secret professionnel. Dans cette affaire, la Cour supérieure a décidé que : […] Toutes ces considérations mènent à la conclusion quil pourrait y avoir des circonstances, tel le cas présent, le fait de la communication, y compris le nom de la personne qui a communiqué avec lavocat, même si seulement pour prendre rendez-vous, est protégé par le privilège. Dans tel cas le nom de la personne ne peut être divulgué, daprès la Cour, sauf et en autant que lavocat est relevé expressément ou implicitement par la personne qui lui a fait cette confidence. [79] Par analogie entre la cause Landreville précitée et celles visées par la présente instance, M e Bazin argue que la Commission ne peut exiger du demandeur de dévoiler lidentité de son client. 10 (1927), 42 B.R. 263, p. 264. 11 J.E. 86-849, p. 8.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 19 [80] Finalement, M e Bazin précise que la Commission doit décider si : Une demande daccès a été formulée par une personne auprès dun organisme public? Cette demande a fait lobjet dune demande de révision auprès de la Commission et sil existe un manque de clarté eu égard à cette demande? Si tel est le cas, larticle 141 de la Loi sur laccès accorde à la Commission tous les pouvoirs à lexercice de sa compétence. RÉPLIQUE DE BOMBARDIER [81] M e Fontaine, pour Bombardier, réplique en faisant remarquer que les parties savaient jusquau 11 septembre 2007 qui était le demandeur dans les dossiers, mais, depuis cette date, le demandeur ayant avoué quil nest pas le véritable demandeur quil prétendait être, lorsquil indique notamment : « […] on ma donné le chapeau de demandeur, […] », mais depuis cette date, les parties ne savent plus à qui ils ont affaire. [82] M e Fontaine invite la Commission à distinguer laveu du demandeur dans la présente instance de celui relaté dans laffaire Joli-Cœur, Lacasse, Lemieux Simard, St-Pierre précitée, en ce que, dans ce dernier cas, la Commission na pas été appelée à statuer sur laveu de lavocat. Il précise de plus que dans ce dossier, cet avocat a dévoilé lidentité du client pour lequel il agissait à titre de demandeur. [83] M e Fontaine signale que rien nempêche un cabinet davocats dagir pour son compte ou que lun de ses procureurs se porte demandeur dans une cause devant la Commission. La distinction dans la présente affaire, cest que le demandeur a avoué quil nest pas celui quil prétend être. [84] M e Fontaine indique que les dispositions législatives contenues à larticle 9 de la Loi sur laccès sont claires, à savoir que toute personne a le droit davoir accès à un document. Cela ne signifie pas que cette dernière doit agir comme « prête-nom » dans une affaire. Il précise que lidentité du vrai demandeur dans une cause doit être connue des parties, conformément à laffaire Green c. Québec (Ministère de lEnvironnement) précitée, la Cour supérieure du Québec a accordé aux parties une requête en irrecevabilité, puisque M. Green nétait pas celui ayant formulé les demandes daccès et de révision.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 20 [85] M e Fontaine souligne que le secret professionnel sapplique dans la mesure un client qui consulte un avocat na pas intenté de procédure judiciaire ou quasi judiciaire contre une autre partie. Cependant, lorsquil intente un recours judiciaire par lintermédiaire dun avocat, il renonce alors à la confidentialité et son identité doit être dévoilée. [86] M e Fontaine commente notamment les décisions produites par le procureur du demandeur à légard desquelles le secret professionnel est inapplicable : dans Belley précitée, lavocat nagit pas comme demandeur, mais plutôt comme témoin. Celui-ci refuse de répondre aux questions concernant son client. Dans laffaire Landreville précitée, il sagit dune perquisition dans un cabinet davocats. Dans la cause Legault 12 , le client a consulté son avocat qui a été accusé en vertu du Code pénal et acquitté par la Cour dappel du Québec. [87] M e Fontaine reconnaît par ailleurs que les relations professionnelles entre un client et son avocat sont protégées par le secret professionnel en vertu notamment de la Loi sur le Barreau et larticle 9 de la Charte. Il cite laffaire Pearl c. Bissegger, [1985], C.A. 695: […] Il est essentiel que les relations confidentielles entre un avocat et son client soient protégés par les lois; dautre part, il est dans lintérêt de la justice quon ne se serve pas indûment du manteau du secret pour entraver la marche normale des procédures judiciaires. […] Dans la cause Constantine c. La Commission des valeurs mobilières du Québec (R.L. 1975 P. 396 et suivantes) trois juges de la Cour provinciale décidaient que : « le secret professionnel est un tout et ne peut se diviser en partie. Lidentité du client fait partie du secret professionnel de la même façon que la consultation ou les documents que peut préparer un avocat. » [88] M e Fontaine fait remarquer de plus que, dans laffaire Ménard 13 , il en est ressorti que celui-ci avait mandaté son procureur, M e Gauthier, pour formuler une demande daccès auprès de lorganisme en question, mais il a formulé sa propre demande de révision auprès de la Commission. 12 J.E. 89-197 (C.A.). 13 Ménard c. Régie de lassurance-dépôt du Québec, [1997] C.A.I. 155.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 21 [89] Dans la cause X c. Centre jeunesse de Montréal 14 , bien quil sagisse du vrai demandeur, la demande de révision de celui-ci portait la signature de son représentant syndical. Elle ne comprenait pas la signature du demandeur. La Commission a alors statué que le représentant syndical « nest pas une personne intéressée pour exercer, au nom du demandeur, le recours en révision que prévoit la Loi sur laccès […]. » Nayant pas été faite conformément à la Loi sur laccès, la demande de révision a été rejetée par la Commission selon les termes de larticle 130.1 de la Loi sur laccès alors en vigueur avant ladoption du Projet de loi 86 au mois de juin 2006. [90] Par ailleurs, en ce qui a trait à la plaidoirie du procureur du demandeur voulant que linformation soumise par celui-ci serait « une erreur cléricale », M e Fontaine nest pas de cet avis. Il sagit plutôt dun vice important aux dossiers, la Commission ne peut pas lignorer et nest donc pas valablement saisie des demandes de révision qui lui sont adressées dans les dossiers en titre. [91] M. Shawn Jacobaccio, stagiaire en droit, au cabinet davocats dalors Lozeau LAfricain (pour Investissement-Québec), souscrit aux arguments de M e Fontaine pour Bombardier. [92] M e Landry (pour le FSTQ) appuie les arguments de M e Fontaine, ajoutant que la preuve quelle doit soumettre aurait été différente si elle avait connu lidentité du vrai demandeur. [93] M e Truesdell-Ménard, maintenant du cabinet davocats Donati Maisonneuve (pour le Groupe Axor inc.), souscrit également aux arguments de M e Fontaine et ajoute que la preuve à soumettre, selon les termes des articles 23 et suivants de la Loi sur laccès, dépendrait en partie de lidentité réelle du demandeur dans le dossier qui le concerne. [94] M e Legault (pour le MDEIE) et M e Roy (pour le MDEIE et le ministère des Finances) signalent quils nont pas de représentations à soumettre à la Commission. DÉCISION RELATIVE AUX TROIS DOSSIERS [95] Sur demande des parties, la Commission a recueilli une preuve commune relativement au contexte selon lequel le gouvernement du Québec a fait lannonce de la construction par Bombardier des avions « Série C ». 14 o C.A.I. Québec, n 03 12 30, 27 juillet 2005, c. Grenier.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 22 [96] La présente décision vise donc les trois dossiers dont les parties sont ci-avant mentionnées. De plus, la Commission doit déterminer si le demandeur, qui est avocat, a lobligation de dévoiler ou non lidentité de la ou des personnes à légard desquelles il a indiqué être le mandataire. [97] La Commission doit aussi déterminer si elle est valablement saisie des trois demandes de révision. LARTICLE 9 DE LA LOI SUR LACCÈS [98] Afin de pouvoir y répondre, il est opportun de se rappeler des dispositions législatives de larticle 9 de la Loi sur laccès, tel quil se lisait au moment de la demande : 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. (Soulignements ajoutés) [99] Le 1 er alinéa de cet article sadresse à toute personne qui en fait la demande. Le législateur a décidé de ne pas émettre de catégorie de personne. Nimporte qui peut en faire partie. [100] À cet effet, le dictionnaire Le Petit Larousse Illustré 15 définit « tout, toute » notamment comme suit : 1. […] tout le monde, lensemble des hommes, nimporte qui. […] 2. exprime la totalité, lintégralité; entier. […] 3. tout qui : quiconque […] en tout : tout compris. [101] Le mot « personne » est défini dans le dictionnaire Le Petit Larousse Illustré précité, en ces termes notamment, page 769 : 1. Être humain, individu. […] 2. Quelquun, quiconque. 15 Édition 2002, p. 1021.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 23 [102] Le Petit Larousse Illustré précité définit également en ces termes ce quest une personne morale, page 769 : […] 3. […] Groupement dindividus auquel la loi reconnaît une personnalité juridique distincte de celle de ces membres (par oppos. à personne à personne physique, lindividu). [103] Dans les cas sous étude et malgré la position des parties en regard de laveu fait par le demandeur lors de laudience tenue le 11 septembre 2007, force est de constater que larticle 9 de la Loi sur laccès, tel que libellé, vise toute personne quelle quelle soit 16 , tel quil appert de quelques exemples de jurisprudence. [104] De plus, le droit daccès consacré par larticle 9 de la Loi sur laccès est inconditionnel, conformément à laffaire Sirois c. Ville de Montréal 17 . [105] Il nexiste donc pas de disposition législative à la Loi sur laccès pour exiger du demandeur quil dévoile lidentité du ou de ses mandants. De plus, même si lidentité de ces derniers était dévoilée, cette information ne pourrait avoir dimpact dans la prise de décision de la Commission eu égard à laccessibilité dun document. [106] À cet égard, il sagira pour la Commission de déterminer, au moment opportun et à partir de la preuve sur le fond du litige qui lui sera soumise, si le demandeur peut avoir accès aux documents quil tente dobtenir en vertu des articles de la Loi sur laccès déjà mentionnés. [107] De plus, en lien avec larticle 9 de la Loi sur laccès et faisant référence à une personne, larticle 135 de cette loi stipule : 135. Une personne dont la demande écrite a été refusée en tout ou en partie par le responsable de l'accès aux documents ou de la protection des renseignements personnels peut demander à la Commission de réviser cette décision. 16 La Presse ltée c. Centre hospitalier Pierre-Boucher, [1996] C.A.I. 109 à 111, Roberge c. Bolduc (1991) 1 R.C.S. 374, Sept-Iles (Ville de) c. Commission municipale du Québec, C.S. Mingan (Sept-Iles) 650-05-000151-945, le 29 mars 995, Clément Roy c. Jean Bisson [2006] C.A.I. 78 à 80 et Association pour la protection de lenvironnement de Lévis c. Hydro Québec et al [2006] C.A.I. 267 à 277. 17 (1984-86) 1 CAI 228.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 24 Une personne qui a fait une demande en vertu de la présente loi peut demander à la Commission de réviser toute décision du responsable sur le délai de traitement de la demande, sur le mode d'accès à un document ou à un renseignement, sur l'application de l'article 9 ou sur les frais exigibles. […] [108] Le fait pour le demandeur dindiquer quil agit à titre de mandataire dans les présentes causes nest pas pertinent pour régler le litige lopposant aux autres parties. Tel que mentionné dans laffaire Morin c. Ministère de lEnvironnement 18 à la page 9 : Le demandeur explique les raisons qui le poussent à demander accès aux renseignements en litige et quil est, en sa qualité dingénieur, lui aussi tenu au secret professionnel. Ses questions au témoin Laberge font lobjet dopposition de la part des avocats des autres parties et la Commission les maintient. La Commission rappelle que les motifs du demandeur ne sont pas pertinents au litige. Le droit daccès existe ou nexiste pas en lui-même, de sorte que si les renseignements lui étaient accessibles ils le seraient pour toute personne qui veut les obtenir, les compétiteurs du tiers compris. (soulignements ajoutés) [109] À la lumière de ce qui précède, la Commission considère quelle est valablement saisie des trois causes et possède la compétence nécessaire pour trancher le litige opposant le demandeur aux autres parties. [110] Il faut par ailleurs spécifier quétant représenté par avocat, le demandeur ne peut ni intervenir à laudience ni procéder au contre-interrogatoire des témoins. Il appartient donc à son avocat de le faire. LARTICLE 130.1 DE LA LOI SUR LACCÈS [111] Les tierces parties requièrent que la Commission cesse dexaminer les présentes causes, aux motifs notamment que son intervention nest manifestement pas utile au sens de larticle 130.1 de la Loi sur laccès : 18 C.A.I. 99 16 86, le 11 juillet 2002, c. D. Boissinot.
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 25 130.1 La Commission peut refuser ou cesser d'examiner une affaire si elle a des motifs raisonnables de croire que la demande est frivole ou faite de mauvaise foi ou que son intervention n'est manifestement pas utile. [112] La Commission refuse de cesser dexaminer les présentes causes puisque les critères dapplication de cet article ne sont pas satisfaits et que la preuve ne permet pas de conclure en ce sens. [113] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION DÉCLARE quelle est valablement saisie des trois causes impliquant les parties dans les dossiers portant les numéros 05 03 97, 05 07 89 et 05 07 90; ORDONNE la poursuite de laudience dans les trois dossiers ci-dessus mentionnés aux dates préalablement retenues par la Commission, à savoir les 5, 6, et 7 décembre 2007, en collaboration avec tous les procureurs des parties. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire Fraser Milner Casgrain (M e Jean Bazin) Procureurs du demandeur Joli-Cœur, Lcasse, Geoffrion, Jetté, St-Pierre (M e Isabelle Dionne et M e Jean Lozeau) et M. Shawn Jacobaccio, stagiaire en droit Procureurs dInvestissement-Québec inc. Bernard, Roy (Justice-Québec) (M e Dominique Legault) Procureurs du ministère du Développement économique, de lInnovation et de lExportation
05 03 97, 05 07 89, 05 07 90 Page : 26 Ministère de la Justice du Québec (M e Bertrand Roy) Procureurs du ministère des Finances et du ministère du Développement économique, de lInnovation et de lExportation Themens Landry (M e Véronique Landry et M e Sébastien Ghantous) Procureurs de Fonds de solidarité FTQ Donati Maisonneuve (M e Olivier Truesdell-Ménard) Procureurs de Groupe Axor inc. Ogilvy Renault (M e François Fontaine et M e Amélie Dussault) Procureurs de Bombardier aéronautique inc.
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