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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 04 07 34 Date : Le 5 novembre 2007 Commissaire : M e Guylaine Henri X Demanderesse c. MUNICIPALITÉ DE RAWDON Organisme DÉCISION OBJET DEMANDE DE RÉVISION en matière daccès en vertu de larticle 135 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 [1] Le 11 mars 2004, la demanderesse requiert de lorganisme copie des études et rapports auxquels il a été fait référence lors dune assemblée du conseil de lorganisme, la veille. [2] Le 12 mars 2004, lorganisme accuse réception de la demande daccès. 1 L.R.Q., c. A-2.1, la Loi sur laccès.
04 07 34 Page : 2 [3] Le 1 er avril 2004, lorganisme informe la demanderesse quil se prévaut du délai additionnel de 10 jours prévu à larticle 47 de la Loi sur laccès. [4] Le 10 avril 2004, lorganisme répond ainsi à la demande daccès en litige : Pour faire suite à la demande que vous formuliez relativement à la production de différentes études en rapport au projet de la futur[e] place publique, nous avons le regret dinvoquer la protection de larticle 32 de la Loi sur laccès à linformation, compte tenu que la divulgation de cette information risquerait davoir un effet sur une procédure judiciaire imminente ou prévisible ou encore éventuelle et probable en matière dexpropriation. Cependant, quant aux renseignements que nous avons obtenus dun organisme tiers, soit le ministère de la Culture et des Communications, nous vous invitons à communiquer avec cet organisme au (418) 380-2300 qui vous fournira, le cas échéant, linformation qui nous fût antérieurement transmise concernant labsence de caractère patrimonial dun bâtiment situé en façade de lhôtel de ville de Rawdon. [5] Le 26 avril 2004, la demanderesse formule une demande de révision à la Commission daccès à linformation (la Commission). AUDIENCE [6] Une audience est fixée au 29 mars 2006, mais est reportée à la demande de lorganisme. Laudience est finalement tenue le 20 juin 2007, à Joliette. PREUVE DE LORGANISME [7] M e Jean Lacroix, directeur général, secrétaire-trésorier et responsable de laccès de lorganisme, témoigne pour ce dernier. [8] Au moment de la demande daccès et de la réponse en litige, lorganisme avait entrepris une procédure dexpropriation de limmeuble visé par la demande daccès.
04 07 34 Page : 3 [9] La procédure dexpropriation sest, depuis, terminée par une entente intervenue le 11 juin 2004 et entérinée par lorganisme le 28 juin suivant, tel quil appert dun extrait du procès-verbal de la séance du conseil de lorganisme du 28 juin 2004 et de la transaction, déposés par lorganisme (O-2 en liasse). [10] Le témoin sengage à faire parvenir à la Commission et à la demanderesse, copie des résolutions mandatant la firme davocats Dunton Rainville ainsi que la firme dévaluateurs agréés Picard Crevier Guertin et Associés inc. pour agir dans le cadre du recours en expropriation de limmeuble visé par la demande daccès. [11] Le témoin dépose, sous pli confidentiel, comme le permettent les Règles de preuve et de procédure de la Commission daccès à linformation 2 , le dossier transmis, à sa demande, par la firme dévaluateurs agréés Picard Crevier Guertin et Associés inc. après réception de la demande daccès en litige. Larticle 20 de ces règles prévoit : 20. La Commission peut prendre connaissance, en labsence du requérant et à huis clos, dun document que lorganisme public ou le tiers prétend devoir être soustrait à laccès en vertu dune restriction prévue à la section II de la Loi. [12] À lexception des procédures dexpropriation, le témoin na retrouvé aux archives de lorganisme aucun autre document concernant cet immeuble. Il a fait des recherches sous le numéro matricule de limmeuble et il a communiqué avec le cabinet de la mairie qui lui a confirmé quil ne détient aucun document se rapportant à limmeuble visé par la demande daccès. Lorganisme ne détient pas dautres documents concernant des études ou rapports relatifs à limmeuble visé par la demande daccès. [13] Lorganisme sengage à communiquer à la Commission copie de la procédure introductive dinstance dexpropriation de limmeuble visé par la demande daccès. [14] Les documents en litige, déposés sous pli confidentiel, sont constitués des documents détenus par la firme dévaluateurs agréés dans le cadre du mandat donné par lorganisme. [15] Dans sa réponse du 10 avril 2004, le témoin a refusé de communiquer à la demanderesse copie des documents détenus par la firme dévaluateurs-2 o L.R.Q., c. A-2.1, r.2, Décret n 2058-84.
04 07 34 Page : 4 conseils parce quil sagit, à son avis, dune analyse au sens de larticle 32 de la Loi sur laccès. [16] Le mandat donné à la firme dévaluateurs agréés consistait à procéder aux évaluations suivantes : Déterminer si le terrain de limmeuble envisagé était propice à accueillir une place publique; Évaluer la valeur de limmeuble selon les règles de lart en matière dévaluation. [17] La technique dévaluation dun immeuble visé par une procédure dexpropriation est fondée sur trois techniques dévaluation, soit : la technique de lévaluation du coût, à savoir lévaluation des sommes requises pour démolir limmeuble et le reconstruire; la technique de lévaluation des revenus que rapporte limmeuble comparativement aux immeubles environnants et la technique de lévaluation de la parité soit la valeur marchande de limmeuble comparativement à celle dimmeubles similaires. [18] Ces trois techniques sont utilisées pour évaluer la valeur de limmeuble et le préjudice subi par le propriétaire à la suite dune procédure dexpropriation. [19] Parallèlement au mandat donné à la firme dévaluateurs agréés, lorganisme a également mandaté la firme davocats Dunton Rainville pour entreprendre des procédures dexpropriation visant cet immeuble, ce qui a été fait le 3 mars 2004, devant le Tribunal administratif du Québec 3 . [20] Dans la réponse à la demande daccès 4 , le témoin a invité la demanderesse à communiquer avec le ministère de la Culture et des Communications concernant « […] labsence de caractère patrimonial du bâtiment […] » visé par la demande daccès. [21] Le témoin explique que la demanderesse lavait informé quelle sinterrogeait sur la valeur patrimoniale de limmeuble. Or, il na rien retrouvé dans les documents détenus par lorganisme concernant ce sujet. Cependant, lors de lassemblée du 10 mars 2004, la mairesse de lorganisme avait fait état de communications quelle avait eues avec des représentants du ministère de la 3 o Dossier n SAI-M-90706-0402. 4 Par. 4 de la présente décision.
04 07 34 Page : 5 Culture et des Communications sur cette question. Le témoin a donc jugé utile de référer la demanderesse à ce ministère dans sa réponse du 10 avril 2004. DE LA DEMANDERESSE [22] La demanderesse témoigne que, lors de lassemblée du conseil de lorganisme tenue le 10 mars 2004, plusieurs personnes ont exprimé leur opposition au projet de lorganisme dexproprier un immeuble pour y créer une place publique et un parc. Ce projet impliquait la démolition de limmeuble situé sur le terrain visé par le projet de lorganisme. De lavis de la demanderesse et dautres personnes au sein de la municipalité, cet immeuble avait une valeur patrimoniale. [23] La demanderesse est membre de la Société historique de Rawdon et, selon ses consultations avec divers entrepreneurs en construction, limmeuble situé sur le terrain aurait pu être remis en état. [24] Comme on a refusé à la Société historique de Rawdon laccès à cet immeuble, celle-ci na pu procéder à une évaluation du caractère patrimonial et de la valeur de cet immeuble quà partir dobservations extérieures. [25] Lors de lassemblée du conseil de lorganisme du 10 mars 2004, la mairesse a fait état détudes et de rapports dexpert concernant le bâtiment en question. La demanderesse a donc formulé une demande daccès à ces études et rapports auxquels la mairesse faisait référence lors de cette assemblée. [26] La demanderesse précise quelle désire obtenir les études et les rapports existant au 10 mars 2004, concernant létat de limmeuble. PREUVE EX PARTE [27] La Commission, appliquant larticle 20 des Règles de preuve et de procédure, a entendu une partie du témoignage de M. Lacroix en labsence de la demanderesse. Lors de ce témoignage ex parte, M. Lacroix a présenté les documents litigieux déposés sous pli confidentiel. DOCUMENTS TRANSMIS APRÈS LAUDIENCE [28] Par une lettre du 29 juin 2007, reçue à la Commission le 4 juillet suivant, lorganisme transmet à la demanderesse ainsi quà la Commission copie des documents suivants :
04 07 34 Page : 6 Un état certifié dinscription de lavis dexpropriation de lorganisme au Registre foncier du Québec, le 10 mars 2004; Lavis dexpropriation déposé au Tribunal administratif du Québec, n o SAI-M-90706-0402, signifié le 3 mars 2004; Le Règlement 006 de lorganisme décrétant lacquisition des immeubles nécessaires à limplantation dune place publique au centre-ville de lorganisme et autorisant à cette fin une dépense et un emprunt de 258 000 $, adopté le 9 décembre 2003 par le conseil de lorganisme; Un extrait du procès-verbal de la séance du conseil de lorganisme du 9 décembre 2003, concernant la résolution qui mandate la firme davocats Dunton Rainville « […] de prendre, dans les meilleurs délais, les dispositions légales utiles pour procéder dans le cadre dune procédure dexpropriation décrétée par le règlement 006 de la Municipalité de Rawdon. »; Un extrait du procès-verbal de la séance du conseil de lorganisme du 9 décembre 2003, concernant la résolution qui mandate la firme dévaluateurs agréés Picard Crevier Guertin et Associés inc. pour « […] agir à titre dévaluateur-conseil et de témoin expert dans le cadre dune procédure dexpropriation décrétée par le règlement 006 de la Municipalité de Rawdon […]. » Loffre de service de la firme Picard Crevier Guertin et Associés inc. est jointe à cet extrait DÉCISION [29] La demanderesse a formulé une demande daccès aux documents détenus par un organisme public en vertu de larticle 9 de la Loi sur laccès : 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. [30] Lorganisme a refusé de communiquer les documents en litige en sappuyant sur larticle 32 de la Loi sur laccès qui prévoit ce qui suit :
04 07 34 Page : 7 32. Un organisme public peut refuser de communiquer une analyse lorsque sa divulgation risquerait vraisemblablement d'avoir un effet sur une procédure judiciaire. [31] La preuve non contredite démontre que lorganisme ne détient aucun autre document que ceux produits sous pli confidentiel. [32] La seule question en litige est donc celle de déterminer si les documents déposés sous pli confidentiel constituent une analyse qui risque davoir les effets énoncés à larticle 32 de la Loi sur laccès. [33] Comme la déjà décidé la Commission, pour que larticle 32 de la Loi sur laccès sapplique, la preuve doit démontrer lexistence de trois éléments, soit : a) que le document en litige réponde à la définition d'une analyse […] ; b) il doit y avoir une procédure judiciaire en cours ou à tout le moins de sérieux éléments de preuve de l'imminence d'une procédure judiciaire; c) la divulgation de cette analyse risquerait vraisemblablement d'avoir un effet sur cette procédure judiciaire. 5 [34] La preuve non contredite démontre que la seconde condition dapplication de larticle 32 de la Loi sur laccès est satisfaite. En effet, au moment de la demande daccès en litige, une procédure dexpropriation de limmeuble visé par la demande daccès, ainsi que du terrain sur lequel il est situé, avait été entreprise par lorganisme devant le Tribunal administratif du Québec, tel quil appert de lavis dexpropriation signifié le 3 mars 2004. [35] Même si ces procédures étaient terminées au moment de laudience, la Commission doit décider de la demande de révision en litige à la lumière des faits qui existaient au moment de la demande daccès 6 ou de la réponse de lorganisme 7 . 5 Flamand c. Québec (Ministère de la Justice), [1998] C.A.I. 185. 6 Lacoste c. Coopérative du Coin de la rue, [2001] C.A.I. 371 et Tremblay c. Promutuel La portneuviènne (La) Société mutuelle dassurances générales, [1998] C.A.I. 305. 7 Voir notamment X. c. Québec (Ministère des Relations avec les citoyens et de lImmigration), o C.A.I., n 02-17-76, 8 décembre 2003, c. Boissinot.
04 07 34 Page : 8 [36] Quant aux deux autres conditions de larticle 32 de la Loi sur laccès, jai examiné les documents en litige. [37] Je dois dabord préciser que certains documents contenus au dossier remis sous pli confidentiel sont postérieurs à la demande daccès et à la réponse en litige. Ces documents ne sont pas en litige. En effet, dune part, la demande daccès ne visait pas ces documents puisque, comme la précisé la demanderesse à laudience, sa demande daccès visait les rapports et études auxquels il avait été fait référence lors de lassemblée du conseil de lorganisme tenue le10 mars 2004, donc existants à cette date. [38] Dautre part, les documents postérieurs à la demande et à la réponse de lorganisme ne sont pas en litige puisque, contrairement aux prescriptions de larticle 1 de la Loi sur laccès, lorganisme ne les détenait pas à cette époque 1. La présente loi s'applique aux documents détenus par un organisme public dans l'exercice de ses fonctions, que leur conservation soit assurée par l'organisme public ou par un tiers. Elle s'applique quelle que soit la forme de ces documents : écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. [39] Je dois également préciser que le dossier remis sous pli confidentiel contient plusieurs documents qui ne sont pas visés par la demande daccès puisquil ne sagit pas « détude » ou de « rapports ». Il sagit de documents qui contiennent des renseignements factuels qui ne peuvent aucunement être qualifiés détudes ou de rapports. Je ne traiterai donc pas de leur accessibilité puisquils ne sont pas visés par la demande daccès en litige. [40] Le dossier remis sous pli confidentiel contient cependant, des « études » ou des « rapports » qui sont effectivement des analyses faites par la firme dévaluateurs agréés retenue par lorganisme. Sans en divulguer le contenu, ces « études et rapports » sont constitués de documents dans lesquels la firme dévaluateurs agréés examine et compare plusieurs informations afin de déterminer la valeur de limmeuble visé par la procédure dexpropriation conformément aux diverses techniques dévaluation utilisées en semblable matière. [41] La divulgation de ces documents à lépoque de la demande daccès et de la réponse de lorganisme aurait eu un effet certain sur les procédures dexpropriation et leur issue puisquils concernent lévaluation, faite par les évaluateurs agréés retenus par lorganisme à titre dexperts, de la propriété
04 07 34 Page : 9 visée par lavis dexpropriation. Cette question est au cœur de la procédure dexpropriation entreprise par lorganisme. [42] Les trois conditions de larticle 32 de la Loi sur laccès étant satisfaites, les rapports et études contenus aux documents en litige sont inaccessibles à la demanderesse. La décision de lorganisme na donc pas à être révisée. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [43] REJETTE la demande de révision de la demanderesse. GUYLAINE HENRI Commissaire
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