Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 07 09 51 Date : Le 1 er octobre 2007 Commissaire : M e Jean Chartier X Demandeur c. MUNICIPALITÉ DE BERRY Organisme DÉCISION OBJET DEMANDE DE RÉVISION en vertu de l’article 135 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 . [1] Le 19 mars 2007, le demandeur transmet à l’organisme la demande suivante : « Moi, X, conseiller municipal de Trécesson suis allé à votre municipalité le 19 février 2007 et a rencontré votre directrice générale Carole Tessier et lui ai demandé une 1 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée « Loi sur l’accès ».
07 09 51 Page : 2 copie conforme de la plainte que votre maire Grondin a rédigé au maire Trudel me concernant. Je vous demande une copie conforme selon la Loi de l’accès à l’information article 43 domaine municipal. La lettre date du 21 février 2007 avec en-tête de la municipalité de Berry. » [sic]. [2] Le 4 avril 2007, Caroline Tessier, responsable de l’accès aux documents de l’organisme, répond au demandeur et l’avise du refus de l’organisme. Elle invoque les articles 34 et 86.1 de la Loi sur l’accès, de même que l’article 209 du Code municipal du Québec 2 . [3] Le 13 avril 2007, le demandeur transmet une demande de révision à la Commission d’accès à l’information (ci-après, la Commission). AUDIENCE [4] L’audience a eu lieu à Amos, le 12 septembre 2007, en présence des parties. A) PREUVE i) De l’organisme [5] Caroline Tessier, directrice générale et secrétaire trésorière de la municipalité, témoigne devant la Commission. Elle est la responsable de l’accès aux documents de l’organisme. Elle explique que la municipalité de Berry compte 525 habitants et dispose d’un bureau municipal avec quatre employés dont trois sont engagés à temps partiel. [6] Font partie de ses fonctions l’ouverture du courrier, la dactylographie et l’envoi de la correspondance. Elle s’occupe également de classer l’ensemble des documents de la municipalité. Elle doit distinguer les documents qui font partie des archives de ceux qui n’en font pas partie. Les documents qui font partie des archives de la municipalité sont publics et accessibles à toute personne qui en fait la demande alors que les autres documents ne le sont pas. 2 L.R.Q., c. C-27.1.
07 09 51 Page : 3 [7] Elle reconnaît le document qui fait l’objet du présent litige et explique qu’il s’agit d’une lettre qu’elle a transmise, à la demande de M. Jules Grondin, maire de l’organisme, à M. Jacques Trudel, maire de la municipalité voisine de Trécesson. Cette lettre a été préparée par le maire. Elle s’est chargée d’en faire la mise en page et d’en effectuer l’envoi. Cette lettre a été classée par la suite dans un dossier dans lequel elle conserve la correspondance privée du maire. Elle précise que cette lettre n’a pas été déposée au conseil de l’organisme, n’a connu aucune diffusion et personne n’a pu y avoir accès. [8] Suite à la demande formulée par le demandeur, le maire de l’organisme, signataire de la lettre, a été consulté et a refusé d’en donner communication. [9] Une courte preuve a été faite par la procureure de l’organisme, en l’absence du demandeur. Cette preuve faite à huis clos est permise par l’article 20 des Règles de preuve et de procédure de la Commission d’accès à l’information 3 qui prévoit : 20. La Commission peut prendre connaissance, en l'absence du requérant et à huis clos, d'un document que l'organisme public ou le tiers prétend devoir être soustrait à l'accès en vertu d'une restriction prévue à la section II de la Loi. [10] Au cours de cette preuve, la lettre dont la communication est demandée a été déposée à la Commission. Sans dévoiler la preuve faite sous le sceau de la confidentialité, précisons qu’elle avait pour but d’expliquer les circonstances qui ont mené à la rédaction de cette lettre tout en protégeant les renseignements personnels concernant les personnes impliquées. [11] Le demandeur, de retour à l’audience, a interrogé le témoin de l’organisme. Madame Tessier a réaffirmé que la lettre n’a pas été distribuée aux membres du conseil de l’organisme. Les membres du conseil ont été avisés de son envoi mais n’en ont pas obtenu copie. Il s’agit d’une lettre transmise par le maire dans le cadre de ses fonctions mais elle demeure un document à caractère privé. ii) Du demandeur [12] Le demandeur est conseiller au sein de la municipalité voisine de Trécesson. Il explique les circonstances qui ont amené l’envoi de la lettre dont il veut obtenir copie. 3 L.R.Q., c. A-2.1, r. 2.
07 09 51 Page : 4 [13] Le 19 février 2007, il s’est rendu au bureau de l’organisme en compagnie de la directrice générale de sa municipalité. Ils voulaient rencontrer madame Tessier pour discuter d’un dossier concernant les deux municipalités. Devant l’absence de cette dernière, ils ont rencontré M. Grondin, maire de l’organisme. C’est à la suite de cette rencontre qu’une lettre aurait été transmise au maire de la municipalité de Trécesson. Le 22 février 2007, lors d’une séance de travail au sein de son conseil municipal, le demandeur a été avisé de l’envoi de cette lettre mais il n’en a pas obtenu copie. Il en réclame la communication devant la Commission. B) REPRÉSENTATIONS DE L’ORGANISME [14] La procureure de l’organisme avise la Commission qu’elle n’entend plus faire valoir l’argument fondé sur l’article 86.1 de la Loi sur l’accès. Elle réitère qu’il s’agit d’une lettre transmise par le maire d’une municipalité à un autre maire. Aucune diffusion ni aucune distribution n’a été faite de ce document. Cette lettre ne fait pas partie des archives municipales, n’y a pas été classée et est conservée dans un dossier réservé à l’usage personnel du maire de l’organisme. [15] Tout en prenant soin de rappeler la dimension de la municipalité de Berry, la procureure soutient que, même à cette échelle réduite, le document doit être considéré comme « un document du cabinet ou du bureau d’un membre d’un organisme municipal » au sens de l’article 34 de la Loi sur l’accès qui prévoit : 34. Un document du bureau d'un membre de l'Assemblée nationale ou un document produit pour le compte de ce membre par les services de l'Assemblée n'est pas accessible à moins que le membre ne le juge opportun. Il en est de même d'un document du cabinet du président de l'Assemblée, d'un membre de celle-ci visé dans le premier alinéa de l'article 124.1 de la Loi sur l'Assemblée nationale (chapitre A-23.1) ou d'un ministre visé dans l'article 11.5 de la Loi sur l'exécutif (chapitre E-18), ainsi que d'un document du cabinet ou du bureau d'un membre d'un organisme municipal ou scolaire. [16] Elle soumet, à l’appui de sa position, deux décisions de la Cour du Québec qui ont conclu au caractère non accessible de cette catégorie de documents. Subsidiairement, si le document devait être communiqué au demandeur, la procureure demande à la Commission d’assurer la protection des renseignements personnels qui y sont contenus.
07 09 51 Page : 5 DÉCISION [17] Selon l’article 34 de la Loi sur l’accès, un document du cabinet ou du bureau d’un membre d’un organisme municipal n’est pas accessible à moins que le membre ne le juge opportun. [18] La preuve a démontré que la lettre en litige a été préparée par le maire de l’organisme avant d’être transcrite, mise en page et transmise. Elle n’a pas été distribuée ni diffusée à qui que ce soit. Elle constitue une communication d’ordre privé provenant du bureau d’un membre d’un organisme municipal destinée à un autre membre d’un organisme municipal. Informé de la demande faite par le demandeur, le maire de l’organisme a refusé d’en donner communication. [19] Les auteurs Doray et Charette 4 décrivent ainsi l’objet de l’article 34 de la Loi sur l’accès : « À titre d’élus, les ministres et les députés détiennent des documents très divers tels que correspondance, notes d’évaluation politique, avis du personnel politique, notes de recherche, stratégies politiques, qu’il est assez difficile de répartir en catégories aux fins de leur accessibilité. Le législateur a donc choisi de les soustraire en bloc au régime d’accès imposé par l’article 9 de la loi et de laisser à chacun des membres de l’Assemblée nationale la discrétion de les rendre ou non accessibles. […] Enfin, une protection analogue a été accordée aux documents du cabinet ou du bureau d’un membre d’un organisme municipal ou scolaire. » (Les soulignés sont du soussigné.) [20] En ce qui concerne la discrétion accordée au détenteur du document, le juge Cloutier de la Cour du Québec écrit 5 : « Tant que le document visé en est un du cabinet ou du bureau de l’une des personnes nommées à l’article, seule cette personne a discrétion pour le rendre accessible ou non. 4 Raymond DORAY et François CHARETTE, Accès à l’information : loi annotée, jurisprudence, analyse et commentaires, Cowansville, Éditions Y. Blais, 2001, vol 1, p. II/34-1, 34-2. 5 Procureur général du Québec c. Bayle, [1991] C.A.I. 306; C.E.C.M. c. Ouimet, [1997] IIJCAN 6823 (C.Q.).
07 09 51 Page : 6 […] Mais si le document a été préparé à la demande ou qu’il a été produit par ou pour une des personnes visées à l‘article 34, il appartient à cette seule personne de le rendre accessible et/ou de le diffuser. » [21] La lettre faisant l’objet de la demande a été transmise par le maire de l’organisme. On ne peut nier qu’il ait alors agi en sa qualité d’élu. Le contenu du document est d’ailleurs explicite à cet effet. Considérant que la preuve a démontré que l’auteur de la lettre ne consent pas à la rendre accessible, il n’y a pas lieu de modifier la position adoptée par l’organisme dans la réponse du 4 avril 2007. [22] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [23] REJETTE la demande de révision. JEAN CHARTIER Commissaire M e Isabelle Breton Avocate de l’organisme
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