Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 07 03 43 Date : Le 1 er octobre 2007 Commissaire : M e Jean Chartier X Demandeur c. CAISSE POPULAIRE DESJARDINS DE L’ÉRABLE Entreprise DÉCISION OBJET DEMANDE D’EXAMEN DE MÉSENTENTE en vertu de l’article 42 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé 1 . [1] Le 1 er février 2007, le demandeur transmet à l’entreprise une demande formulée comme suit : « Considérant que je détiens une hypothèque légale de 7,946,088.17$ dollars résultant d’un jugement, plus intérêts, indemnité aditionnelle, dépens et frais d’experts; 1 L.R.Q., c. P-39.1, ci-après appelée « Loi sur le privé ».
07 03 43 Page : 2 Considérant que ladite hypothèque a pris acte en date du 24 janvier 2000; et que la date extrême d’effet est le 24 juillet 2010; Considérant que j’annexe à la présente la preuve de l’existence de ladite hypothèque et que l’original suivra par le courrier. En conséquence, je vous demande de me produire tous les relevés de Caisse rattachés à cette hypothèque et tous les dossiers et transactions s’y rattachants. » [sic]. [2] Le 2 février 2007, la directrice de l’entreprise transmet au demandeur une réponse dans laquelle elle mentionne qu’elle n’est pas autorisée à transmettre des renseignements ou fournir des documents sur un compte qui n’est pas détenu par le demandeur. [3] Le 2 février 2007, le demandeur transmet à la Commission d’accès à l’information (la Commission) une demande d’examen de mésentente. AUDIENCE [4] Le 13 septembre 2007, une audience a lieu en présence des parties. A) PREUVE [5] Le demandeur explique qu’il a agi à titre de représentant pour un groupe de producteurs acéricoles dans une demande de recours collectif à l’encontre d’un organisme désigné comme étant « Le Regroupement pour la commercialisation des produits d’érable du Québec inc. » [6] Après avoir obtenu un jugement en sa faveur au montant de 7 946 088,17 $ le demandeur a enregistré une hypothèque légale au même montant le 24 janvier 2000. [7] La créance garantie par l’hypothèque légale n’a pas été payée et le jugement de la Cour supérieure a été renversé par les tribunaux supérieurs. [8] L’hypothèque légale est demeurée enregistrée et n’a pas été radiée.
07 03 43 Page : 3 [9] Le demandeur considère qu’à titre de détenteur de cette hypothèque légale, il a le droit d’obtenir tous les relevés d’opération et de transaction du ou des comptes détenus par « Le Regroupement pour la commercialisation des produits d’érable du Québec inc. » auprès de l’entreprise, le cas échéant. [10] Le procureur de l’entreprise admet à l’audience que le « Regroupement » ci-haut mentionné est un client de la Caisse Desjardins de l’Érable. Il refuse toutefois de communiquer toute autre information. [11] Selon lui, ces informations ne sont accessibles qu’au titulaire du compte qui est le seul à y avoir droit. L’inscription d’une hypothèque légale sur les actifs d’une entreprise ou sur ses comptes bancaires ne donne pas aux créanciers le droit d’obtenir des informations relatives aux transactions effectuées dans ces comptes. [12] Il invoque à cet effet l’article 13 de la Loi sur le privé qui prévoit : 13. Nul ne peut communiquer à un tiers les renseignements personnels contenus dans un dossier qu'il détient sur autrui ni les utiliser à des fins non pertinentes à l'objet du dossier, à moins que la personne concernée n'y consente ou que la présente loi ne le prévoit. [13] En réplique à la position de l’entreprise, le demandeur déclare ne pas être un tiers au sens de la Loi sur le privé et il le répète dans une lettre transmise au soussigné le 14 septembre 2007, au lendemain de l’audience : « Suite à notre rencontre d’hier, j’avise la Commission d’accès à l’information, au nom des 5 443 producteurs acéricoles que je représente à titre (TITULAIRE), de ne pas me considérer comme un (tiers), comme le voudrait bien le procureur de la Caisse pop de l’Érable, Maître Levasseur. Cela constituant une insulte à mon endroit et à l’endroit de tous les producteurs acéricoles que je représente à titre de (TITULAIRE). » [14] Le demandeur prétend que les biens du « Regroupement pour la commercialisation des produits d’érable du Québec inc. » appartiennent aux producteurs acéricoles qu’il représente et que les informations réclamées concernent chacun des producteurs acéricoles. Le demandeur termine ses représentations en demandant au soussigné de reconnaître son droit à l’information qu’il réclame.
07 03 43 Page : 4 B) REPRÉSENTATIONS DE L’ENTREPRISE [15] Le procureur de l’entreprise soumet que le relevé des opérations du compte d’un des clients de l’entreprise est confidentiel. Il réitère que l’enregistrement d’une hypothèque légale sur les biens d’un débiteur ne donne pas le droit aux créanciers d’obtenir les informations relatives à la gestion des actifs de ce débiteur. Il invoque l’article 13 de la Loi sur le privé précité. DÉCISION [16] Parce qu’il est le créancier et le représentant de tous les producteurs acéricoles qui se sont joints à son recours collectif contre « Le Regroupement pour la commercialisation des produits d’érable du Québec inc. », le demandeur exige d’obtenir les informations relatives à toutes les transactions effectuées dans le compte du « Regroupement ». [17] Bien qu’aucune des parties n’ait soulevé cet aspect, le soussigné s’est interrogé quant à l’application de la Loi sur le privé à la présente affaire. [18] Les articles 1 et 2 de cette loi disposent : 1. La présente loi a pour objet d'établir, pour l'exercice des droits conférés par les articles 35 à 40 du Code civil du Québec en matière de protection des renseignements personnels, des règles particulières à l'égard des renseignements personnels sur autrui qu'une personne recueille, détient, utilise ou communique à des tiers à l'occasion de l'exploitation d'une entreprise au sens de l'article 1525 du Code civil du Québec. Elle s'applique à ces renseignements quelle que soit la nature de leur support et quelle que soit la forme sous laquelle ils sont accessibles : écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. La présente loi ne s'applique pas à la collecte, la détention, l'utilisation ou la communication de matériel journalistique, historique ou généalogique à une fin d'information légitime du public. 2. Est un renseignement personnel, tout renseignement qui concerne une personne physique et permet de l'identifier. (Les caractères gras sont du soussigné).
07 03 43 Page : 5 [19] Quant à l’article 13 de la Loi sur le privé, il indique qu’une entreprise ne peut communiquer à un tiers « les renseignements personnels contenus dans un dossier qu’elle détient ». [20] Or, la demande soumise le 1 er février 2007 stipule : « Considérant que je détiens une hypothèque légale de 7,946,088.17$ dollars résultant d’un jugement, plus intérêts, indemnité aditionnelle,dépens et frais d’experts; […] Considérant que j’annexe à la présente la preuve de l’existence de ladite hypothèque et que l’original suivra par le courrier. En conséquence, je vous demande de me produire tous les relevés de Caisse rattachés à cette hypothèque et tous les dossiers et transactions s’y rattachants. » [sic]. [21] Le demandeur joignait à sa demande une « réquisition d’inscription d’une hypothèque mobilière » à l’encontre du « Regroupement pour la commercialisation des produits d’érable du Québec inc. ». De toute évidence, la personne au sujet de laquelle on réclame les informations est une personne morale. En conséquence, les informations qui la concernent ne sont pas assujetties à la juridiction de la Commission. [22] En vertu de la Loi sur le privé, la juridiction de la Commission se limite aux renseignements personnels qu’une personne recueille, détient, utilise ou communique à des tiers à l’occasion de l’exploitation d’une entreprise. Tel que l’article 2 le prévoit, un renseignement personnel concerne une personne physique et permet de l’identifier. [23] Le Regroupement pour la commercialisation des produits d’érable du Québec inc. ne répond pas à cette condition d’ouverture. [24] Dans Lavoie c. Pinkerton du Québec ltée 2 , la commissaire Boissinot écrit : « Pour être qualifiés de « personnels », les renseignements doivent donc d’abord concerner une personne physique. Les clients de l’entreprise sont des personnes morales. Une personne morale n’étant pas, par 2 [1996] C.A.I. 67, 72.
07 03 43 Page : 6 définition, une personne physique, aucun des motifs exprimés par les clients de l’entreprise dans les lettres en litige ne constituent des renseignements personnels au sujet de ces clients – tiers au sens des articles 2 et 40 de la loi. Il n’est pas nécessaire, dans ce cas, d’aborder la question de savoir si les autres conditions d’application de l’article 40 s’appliquent à ces tiers puisque ces derniers ne sont pas des personnes physiques. » [25] Le demandeur ne réclame pas la communication de renseignements qui le concernent. Il ne réclame pas la communication de renseignements concernant d’autres personnes physiques. [26] Sa demande vise à obtenir le relevé des transactions faites dans un compte détenu auprès de l’entreprise par « Le Regroupement pour la commercialisation des produits d’érable du Québec inc. » qui est une personne morale. Les renseignements recherchés ne sont donc pas des renseignements personnels et la Commission n’a pas juridiction pour statuer sur ceux-ci. [27] L’article 52 de la Loi sur le privé prévoit : 52. La Commission peut refuser ou cesser d'examiner une affaire si elle a des motifs raisonnables de croire que la demande est frivole ou faite de mauvaise foi ou que son intervention n'est manifestement pas utile. [28] Considérant ce qui précède, l’intervention de la Commission n’est manifestement pas utile. [29] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [30] CESSE d’examiner cette affaire; [31] FERME le présent dossier. JEAN CHARTIER Commissaire M e Frédéric Levasseur Avocat de l’entreprise
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