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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 06 16 25 Date : Le 20 août 2007 Commissaire : M e Jean Chartier S T Demanderesse c. RETIREMENT RESIDENCES OPERATIONS (REIT) Entreprise DÉCISION OBJET DEMANDE DEXAMEN DE MÉSENTENTE en vertu de larticle 42 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé 1 . [1] Le 6 septembre 2006, la demanderesse, employée de lentreprise, transmet à cette dernière la demande suivante : « Par la présente, je vous avise pour une deuxième fois que je désire recevoir une copie du rapport du Dr Jobidon avec qui vous maviez pris rendez-vous pour une expertise 1 L.R.Q., c. P-39.1, ci-après appelée « Loi sur le privé ».
06 16 25 Page : 2 le 1[ er ] juin dernier. Je vous ai déjà mentionné que je désire recevoir une copie de toute la correspondance entre vous (lentreprise, incluant les questions que vous lui aviez fournies) et le Dr Jobidon. Je demande aussi une copie de son rapport final. […] ». [2] Le 10 septembre 2006, la demanderesse réclame de nouveau par écrit la transmission de lexpertise du docteur Jobidon en joignant une demande écrite faite par son médecin. [3] Le 13 septembre 2006, Line Ménard, directrice des opérations auprès de lentreprise, accuse réception de la demande mais refuse de communiquer les documents demandés en sappuyant sur larticle 39 de la Loi sur le privé et en expliquant à la demanderesse que la divulgation des renseignements demandés « risquerait vraisemblablement davoir un effet sur une procédure judiciaire dans laquelle lune ou lautre des parties a un intérêt. » [4] Le 22 septembre 2006, la demanderesse transmet à la Commission daccès à linformation (la Commission) une demande dexamen de mésentente dans le but dobtenir la révision de la décision de lentreprise. AUDIENCE [5] Une audience a eu lieu dans cette affaire le 10 juillet 2007 en présence des parties; lentreprise étant présente par voie de conférence téléphonique suite à une demande préalablement accueillie à cet effet. [6] En accord avec la demanderesse, la procureure de lentreprise a dabord dressé un bref portrait de la situation existant entre les parties. [7] Depuis lété 2000, la demanderesse est directrice des soins infirmiers dans une résidence pour personnes âgées, propriété de lentreprise et portant le nom de « La Roseraie ». La demanderesse est absente de son travail pour cause de maladie depuis lautomne 2005. En octobre 2005, elle a déposé une plainte « pour harcèlement psychologique au travail » à lencontre de lentreprise. [8] Laudition relative à cette plainte na pas encore eu lieu et le dossier a été référé à la Commission des relations du travail. [9] Le 12 avril 2006, la demanderesse a fait une demande à la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) qui sera entendue en septembre 2007.
06 16 25 Page : 3 [10] En mai 2006, lentreprise a requis de la demanderesse quelle se présente à une expertise médicale le 1 er juin 2006 auprès du docteur Denis Jobidon, à Québec. [11] Préalablement à cette rencontre, lentreprise avait transmis au docteur Jobidon une lettre dans laquelle elle lui donne le mandat de procéder à lexpertise de la demanderesse. [12] Un rapport dexpertise a par la suite été communiqué à lentreprise par le docteur Jobidon en juin 2006. Deux autres lettres ont été échangées entre lentreprise et le docteur Jobidon au sujet de lexpertise de la demanderesse. [13] Dans les semaines précédant laudition de la présente affaire, lentreprise a accepté de remettre à la demanderesse le rapport dexpertise du docteur Jobidon portant la date du 1 er juin 2006 ainsi quun complément au rapport dexpertise du 1 er août 2006. [14] Les documents qui demeurent en litige sont les lettres transmises au docteur Jobidon par lentreprise. A) PREUVE i) De la demanderesse [15] La demanderesse admet la description des faits mais désire documenter sa demande dexamen de mésentente en déposant devant la Commission les documents suivants : Le rapport dexpertise du psychiatre Denis Jobidon, effectué à la demande de lentreprise, en date du 1 er juin 2006 « pièce P-1 »; Une lettre du docteur Jobidon ayant pour objet « Complément de rapport dexpertise médico-psychiatrique » destiné à lentreprise, en date du 1 er août 2006 « pièce P-2 »; Une description de tâche du poste de « directrice des soins infirmiers » portant le nom de la demanderesse préparée par lentreprise « pièce P-3 »; Une copie de la lettre transmise à lentreprise par la demanderesse le 10 septembre 2006 à laquelle est jointe une demande du médecin de la demanderesse en vue dobtenir lexpertise du docteur Jobidon « pièce P-4 »;
06 16 25 Page : 4 Une convocation adressée à la demanderesse le 24 mai 2006, en vue de lui demander de se présenter à une expertise médicale auprès du docteur Jobidon le 1 er juin 2006, déposée par la demanderesse après laudience du 10 juillet 2007 « pièce P-5 ». B) REPRÉSENTATIONS i) De lentreprise [16] La procureure de lentreprise rappelle que la preuve a démontré que la demanderesse a déposé une plainte pour harcèlement psychologique dont laudition a été référée à la Commission des relations du travail. Aucune date daudition na été fixée à ce jour. De plus, suite à une demande dindemnisation de la demanderesse, une audition doit avoir lieu devant la CSST en septembre 2007. Ces deux dossiers opposeront la demanderesse à lentreprise devant les instances appropriées. [17] La procureure soutient que dans lun et lautre cas, il sagit de procédures judiciaires dans laquelle lune ou lautre des parties a un intérêt et elle prétend que la divulgation des renseignements contenus dans les documents recherchés par la demanderesse risquerait vraisemblablement davoir un effet sur lune ou lautre de ces procédures au sens du paragraphe 2 de larticle 39 de la Loi sur le privé qui stipule : 39. Une personne qui exploite une entreprise peut refuser de communiquer à une personne un renseignement personnel la concernant lorsque la divulgation du renseignement risquerait vraisemblablement : 1° de nuire à une enquête menée par son service de sécurité interne ayant pour objet de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions à la loi ou, pour son compte, par un service externe ayant le même objet ou une agence d'investigation ou de sécurité conformément à la Loi sur les agences d'investigation ou de sécurité (chapitre A-8); 2° d'avoir un effet sur une procédure judiciaire dans laquelle l'une ou l'autre de ces personnes a un intérêt. [18] La procureure de lentreprise explique que dans les correspondances transmises au docteur Jobidon, lentreprise, en sa qualité demployeur de la demanderesse, donne sa version des faits et expose les moyens de défense sur lesquels elle entend sappuyer.
06 16 25 Page : 5 [19] La communication des renseignements demandés aurait donc un effet sur les procédures judiciaires engagées entre les parties. Elle ajoute que tant devant la Commission des relations du travail que devant la CSST, la divulgation préalable de la preuve des parties nest pas exigée avant laudition. [20] En conséquence, elle soutient que cest à bon droit que lemployeur retient ces renseignements. Elle dépose plusieurs décisions de la Commission à lappui de ses prétentions 2 . [21] La procureure a également abordé lapplication de larticle 37 de la Loi sur le privé. Selon elle, cette disposition ne sapplique pas à la présente affaire puisque lentreprise noffre pas de services professionnels dans le domaine de la santé et ne détient pas de tels renseignements relatifs à la demanderesse, conformément à larticle 37 de la Loi sur le privé. [22] En conséquence, lentreprise était bien fondée à refuser la divulgation des lettres transmises au médecin. [23] La procureure de lentreprise a remis au soussigné, sous le sceau de la confidentialité, une copie des documents dont la communication est refusée à la demanderesse. Le dépôt de ces documents est permis par larticle 20 des Règles de preuve et de procédure de la Commission daccès à linformation 3 qui stipule : 20. La Commission peut prendre connaissance, en l'absence du requérant et à huis clos, d'un document que l'organisme public ou le tiers prétend devoir être soustrait à l'accès en vertu d'une restriction prévue à la section II de la Loi. ii) De la demanderesse [24] La demanderesse réclame la version intégrale des deux lettres transmises au docteur Jobidon dont les services ont été retenus par lentreprise. Elle relate que pendant lentrevue de lexpertise, le médecin lui aurait fait la lecture de certains passages de la lettre de lentreprise et quen conséquence, elle devrait en avoir copie. 2 Hermann-Busson c. Service anti-crime des assureurs, [1999] C.A.I. 287; X c. Agence universitaire de la Francophonie, C.A.I. Montréal, n o 06 04 67, 21 février 2007, c. Chartier; Rioux c. Recyclage Kebec inc., [2000] C.A.I. 117; X c. Imperial Tobacco Canada Limited, [2005] C.A.I. 333; Bérubé c. Caisse populaire Desjardins de Baie-Comeau, [1994] C.A.I. 298; Geary c. Axa Boréal assurances inc., [1998] C.A.I. 312. 3 L.R.Q., c. A-2.1, r. 2.
06 16 25 Page : 6 [25] La demanderesse veut obtenir lexposé qui a été fait par lentreprise et qui a, selon elle, influencé le résultat de lexpertise. Elle sappuie sur les articles 2 et 27 de la Loi sur le privé ainsi que sur certaines décisions de la Commission pour réclamer les documents détenus par lentreprise 4 . [26] Les articles 2 et 27 de la Loi sur le privé stipulent : 2. Est un renseignement personnel, tout renseignement qui concerne une personne physique et permet de l'identifier. 27. Toute personne qui exploite une entreprise et détient un dossier sur autrui doit, à la demande de la personne concernée, lui en confirmer l'existence et lui donner communication des renseignements personnels la concernant. [27] Finalement, la demanderesse prétend que lentreprise ne peut invoquer larticle 39 au soutien de sa position puisque cette disposition na pas été invoquée dans la lettre transmise à la demanderesse par la procureure de lentreprise le 20 avril 2007. Cette lettre avait pour objet la transmission du rapport médical et se lisait comme suit : « Nous sommes les procureurs du CP Lodges qui nous mandate de vous transmettre les présents documents. Sans admission de quelque obligation que ce soit, lemployeur accepte de vous remettre le rapport dexpertise médical[e] du docteur Denis Jobidon. En contrepartie, vous devez vous désiste[r] de votre réclamation à la Commission daccès à linformation. » [28] Cette lettre a été transmise dans le contexte de la médiation qui était alors menée par la Commission. Cette démarche, à laquelle na pas pris part le soussigné a amené lentreprise à remettre à la demanderesse le rapport médical du docteur Denis Jobidon. La demanderesse reproche à lentreprise de ne pas avoir mentionné larticle 39 de la Loi sur le privé dans cette lettre et elle prétend quelle ne peut plus invoquer cette disposition. 4 Chaîné c. Paul Revere, compagnie dassurance-vie, [1998] C.A.I. 139 (C.Q.); X c. Carrefour Providence, [2006] C.A.I. 300 (C.Q.); Stébenne c. Assurance-vie Desjardins, [1995] C.A.I. 14 (C.Q.), (C.S.); X c. Personnelle Vie, [1996] C.A.I. 13 (C.Q.), (C.S.).
06 16 25 Page : 7 DÉCISION [29] Il nest pas contesté par les parties que lentreprise est assujettie aux dispositions de la Loi sur le privé. [30] La preuve a démontré que lentreprise refuse de communiquer deux lettres transmises au médecin expert dont les services ont été retenus par lentreprise. Elle a invoqué le paragraphe 2 de larticle 39 de la Loi sur le privé pour appuyer son refus. A-t-elle rencontré les conditions douverture à lapplication de cette restriction ? [31] Dans laffaire Personnelle Vie Corporation dassurances c. Cour du Québec 5 , les quatre conditions dapplication de cette restriction sont ainsi énumérées : a) Il doit sagir dun renseignement personnel concernant la personne qui fait la demande de communication. [32] Sans révéler le contenu des deux correspondances en cause, la Commission a pu constater que ces documents contiennent des renseignements personnels concernant la demanderesse. b) Le refus doit être en relation avec des procédures judiciaires. [33] La preuve a démontré que la demanderesse a déposé, en octobre 2005, une plainte pour harcèlement psychologique devant la Commission des relations du travail. Lentreprise est la défenderesse dans cette affaire qui na pas été entendue. [34] La preuve a également démontré que la demanderesse a fait une réclamation dindemnisation en avril 2006 à la CSST. Laudition doit avoir lieu en septembre 2007 et lentreprise sera convoquée à titre demployeur et de partie intéressée. Du reste, la demanderesse a admis à laudience lexistence de ces recours engagés à sa demande. [35] Lentreprise a invoqué larticle 39 de la Loi sur le privé dans sa lettre du 13 septembre 2006. À cette date, les demandes devant la Commission des relations du travail et la demande dindemnisation à la CSST étaient déposées. 5 [1997] C.A.I. 470.
06 16 25 Page : 8 [36] À quelques reprises, la Commission a considéré que le dépôt de plaintes devant les tribunaux administratifs constituait des « procédures judiciaires ». Dans une affaire semblable à la présente, une salariée avait déposé une plainte pour harcèlement à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Son employeur, refusant de lui communiquer son dossier médical, sappuyait sur larticle 39 de la Loi sur le privé. Le commissaire Iuticone écrit 6 : « La preuve démontre que, au moment de la demande daccès et de la réponse de lentreprise, la Commission des droits de la personne et de la jeunesse avait déjà avisé lentreprise que les allégations de la plainte avaient été jugées suffisantes pour y donner suite Le fait que la plainte soit reçue par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse expose lentreprise à être traduite devant le Tribunal de la personne. Il nest pas juste de soutenir quil sagit dune enquête et non pas dune procédure judiciaire. » c) Il faut que la divulgation du renseignement risque vraisemblablement davoir un effet sur une procédure judiciaire. [37] Le commissaire Michel Laporte décrit ainsi cette condition que doit rencontrer lentreprise 7 : « Le 2 e alinéa de larticle 39 de la Loi offre à lEntreprise le choix de refuser laccès aux documents dont la divulgation risquerait vraisemblablement davoir un effet sur une procédure judiciaire. Il doit sagir de renseignements personnels ayant un lien avec une procédure judiciaire. La Commission doit donc apprécier les faits et le contexte prévalant lors de la demande daccès. » [38] Il ne fait aucun doute que les deux documents dont laccès est refusé ont un « lien » avec les procédures engagées par la demanderesse avant sa demande. La Commission doit également vérifier si la divulgation risque vraisemblablement davoir un « effet » sur la procédure 8 : 6 Vasili Papaeconomou c. Pratt et Whiney Canada, [2000], C.A.I. 41; voir au même effet Rioux c. Recyclage Québec, [2000], C.A.I. 117, il sagissait dune plainte pour congédiement en vertu de la Loi sur les normes du travail et Dupont c. École nationale de ballet contemporain, [2004], C.A.I. 489. 7 X c. Imperial Tobacco Canada Limited, [2005] C.A.I. 333. 8 Hermann-Busson c. Service anti-crime des assureurs, [1999] C.A.I. 287.
06 16 25 Page : 9 « […]. Un effet quelconque suffit. « il nest pas nécessaire, disent les auteurs Dussault et Borgeat, comme la déjà fait remarquer la Commission, quil soit déterminant, de façon favorable ou défavorable, sur lissue de la procédure ». Un lien doit cependant exister entre les renseignements recherchés et la procédure en question. […]. Enfin, le risque que la divulgation à la demanderesse ne cause un tel effet doit être vraisemblable et non pas certain. Il ne doit pas, non plus, tenir de la pure conjecture. […]. » [39] Or, la divulgation des renseignements contenus dans les documents dont laccès est refusé à la demanderesse risque davoir un effet sur lune ou lautre des procédures judiciaires engagées entre les parties. Comme nous lavons déjà mentionné, ces documents contiennent la version et la position adoptée par lentreprise dans le litige qui loppose à la demanderesse. d) Le risque de procédures judiciaires et leffet de la divulgation doivent être évalués au moment de la décision de lorganisme de refuser laccès au renseignement demandé. [40] À la date du refus de lentreprise le 13 septembre 2006, la demanderesse avait déposé une plainte à la Commission des relations du travail en octobre 2005 et une demande dindemnisation à la CSST le 12 avril 2006. [41] Les conditions de larticle 39 étant satisfaites, lentreprise pouvait refuser de communiquer les documents réclamés. [42] Toutefois, la demanderesse a reproché à lentreprise ne pas avoir invoqué larticle 39 dans la correspondance transmise le 20 avril 2007. On se souviendra que par cette correspondance, la procureure de lentreprise transmettait, suite à la médiation intervenue entre les parties, une copie des deux rapports dexpertise médicale rédigés par le docteur Denis Jobidon. Selon la demanderesse, lors de cette transmission de documents, lentreprise aurait réitérer son objection à communiquer les autres documents conformément au paragraphe 2 de larticle 39. [43] Cet argument ne résiste pas à lanalyse. Dabord, parce que la réponse fournie par lentreprise était, dès le 13 septembre 2006, explicite quant au moyen de défense invoqué par lentreprise et respectait les prescriptions de larticle 34 de la Loi sur le privé qui stipule :
06 16 25 Page : 10 34. La personne qui refuse d'acquiescer à la demande d'accès ou de rectification d'une personne concernée doit lui notifier par écrit son refus en le motivant et l'informer de ses recours. [44] De plus, la Loi sur le privé ne fait aucune obligation à lentreprise de répéter, tout au long du cheminement du dossier, ses arguments relatifs à la position quelle adopte. Enfin, la médiation qui a donné lieu à la transmission des documents na pas entraîné le désistement de lentreprise. [45] La transmission de la lettre du 20 avril 2007 a permis à la demanderesse dobtenir des documents refusés lors de sa demande initiale mais ne modifie pas la situation juridique créée par la réponse de lentreprise le 13 septembre 2006. [46] La demanderesse nous a remis, à lappui de ses prétentions, certaines décisions rendues par la Commission. En tout respect pour lopinion contraire, après avoir considéré ces décisions, le soussigné en vient à la conclusion que les affaires X c. Carrefour Providence 9 , Chaîné c. Revere, compagnie dassurance-vie 10 et Stébenne c. Assurance-vie Desjardins 11 ne sont pas pertinentes puisquelles ne soulèvent pas les mêmes questions que la présente affaire. [47] La demanderesse a également prétendu que lentreprise aurait invoquer larticle 37 de la Loi sur le privé et quà défaut de lavoir fait, elle ne peut invoquer aucune autre restriction, ni même la restriction fondée sur larticle 39. [48] Elle sappuie sur la décision rendue par la Commission dans laffaire X c. Personnelle Vie. Dans cette affaire, le demandeur voulait obtenir laccès à une expertise médicale à laquelle il sétait soumis. Lemployeur appuya son refus sur lexistence de procédures judiciaires entre les parties et sur le paragraphe 2 de larticle 39 de la Loi sur le privé. Après avoir considéré les arguments, le commissaire Laporte écrit 12 : « Je suis davis, avec toute déférence pour lopinion contraire, que le seul article qui sapplique est celui qui traite spécifiquement de la restriction à laccès dans le domaine de la santé, soit larticle 37 de la loi. Les quatre autres articles compris dans la section des restrictions à laccès dans la loi ne sont pas spécifiques au domaine de la santé. 9 X c. Carrefour Providence, [2006] C.A.I. 300 (C.Q.). 10 Chaîné c. Paul Revere, compagnie dassurance-vie, [1998] C.A.I. 139 (C.Q.). 11 Stébenne c. Assurance-vie Desjardins, [1995] C.A.I. 14 (C.Q.), (C.S.). 12 X c. Personnelle Vie, [1996] C.A.I. 13 (C.Q.), (C.S.).
06 16 25 Page : 11 À défaut par lentreprise de soulever cette restriction à laccès, la personne concernée peut avoir accès à son dossier en vertu de larticle 27 de la loi. » [49] Précisons dabord que cette décision du commissaire Laporte a pour objet une expertise médicale dont la communication est recherchée, ce qui nest pas le cas en lespèce. Larticle 37 de la Loi sur le privé stipule : 37. Une personne qui exploite une entreprise de services professionnels dans le domaine de la santé peut refuser momentanément à une personne concernée la consultation du dossier qu'elle a constitué sur elle si, de l'avis d'un professionnel de la santé, il en résulterait un préjudice grave pour sa santé. La personne qui exploite un autre type d'entreprise et détient de tels renseignements peut en refuser la consultation à une personne concernée à la condition d'offrir à celle-ci de désigner un professionnel du domaine de la santé de son choix pour recevoir communication de tels renseignements et de les communiquer à ce dernier. Le professionnel du domaine de la santé détermine le moment la consultation pourra être faite et en avise la personne concernée. [50] Dans la présente affaire, lentreprise noffre pas de services professionnels dans le domaine de la santé, ce qui exclut lapplication du premier alinéa de cet article. Par contre, le second alinéa de larticle 37 vise tout autre type dentreprise qui détient « des renseignements dans le domaine de la santé et qui constitue, au sujet dune personne, un dossier contenant cette catégorie de renseignements. » [51] Pour conclure à lapplication de cet alinéa à la situation présente, il faudrait que lentreprise ait constitué un dossier contenant des renseignements dans le domaine de la santé, au sujet de la demanderesse. [52] Lentreprise affirme quelle détient uniquement un dossier demployé à lintérieur duquel se retrouvent les expertises médicales du docteur Denis Jobidon ainsi que les correspondances transmises au médecin expert. [53] Sil est possible de prétendre que les deux expertises médicales contenaient des « renseignements dans le domaine de la santé » concernant la demanderesse, les deux correspondances faisant lobjet de la présente demande ne comportent pas de tels renseignements et se limitent à la description du
06 16 25 Page : 12 mandat donné par lentreprise au médecin dont il retient les services. Bien que la Cour Suprême 13 ait déjà déterminé : « Quun patient a un droit vital sur linformation contenue dans ses dossiers médicaux. » [54] Le soussigné considère que lentreprise a respecté la position adoptée par le plus haut tribunal du pays en transmettant à la demanderesse les deux expertises médicales. [55] La correspondance entre lentreprise et un médecin dans le contexte dun litige entre les parties nest pas visée par le deuxième alinéa de larticle 37 et pouvait faire lobjet dun refus en vertu du paragraphe 2 de larticle 39 de la Loi sur le privé. [56] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [57] REJETTE la demande dexamen de mésentente de la demanderesse. JEAN CHARTIER Commissaire M e Isabelle Carpentier-Cayen Saucier Carpentier-Cayen Procureure de lentreprise 13 McInerney c. McDonald, [1992] 2 R.C.S. 138; Hermann-Busson c. Service anti-crime des assureurs, [1999] C.A.I. 287.
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