Section juridictionnelle

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 06 15 50 Date : Le 2 août 2007 Commissaire : M e Christiane Constant X Demanderesse c. SOCIÉTÉ DE LASSURANCE AUTOMOBILE DU QUÉBEC Organisme DÉCISION LE LITIGE [1] DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE DACCÈS À DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS, selon les termes de larticle 135 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 [2] Le 18 juillet 2006, par lintermédiaire de M e Yvon Aubé, la demanderesse requiert de M e Claude Gélinas, responsable de laccès aux documents et de la protection des renseignements personnels au sein de la Société de lassurance automobile du Québec (lOrganisme), une copie de tous les rapports médicaux ou 1 L.R.Q., c. A-2.1, la Loi sur laccès.
06 15 50 Page : 2 toute autre source dinformation ayant amené le Service de lévaluation médicale à demander à sa cliente de subir un examen pratique de conduite. [3] Le 19 juillet 2006, M e Gélinas transmet à M e Aubé un accusé de réception et le 27 juillet suivant, il lui refuse laccès aux documents recherchés pour la demanderesse, invoquant à cet effet les articles 53 et 88 de la Loi sur laccès. [4] Insatisfait, M e Aubé sadresse, le 5 septembre 2006, au nom de la demanderesse à la Commission d'accès à l'information (la Commission), afin que soit révisée la décision de lOrganisme. LAUDIENCE [4] Laudience de la présente cause se tient le 1 er juin 2007 à Montréal, en présence de M e Aubé et de M e Annie Rousseau, procureure de lOrganisme, qui dépose sous le sceau de la confidentialité le document en litige; la demanderesse était absente. Contexte [5] M e Aubé résume le contexte dans lequel sa cliente sest adressée à lOrganisme. Sur requête présentée par le fils de la demanderesse, une instance judiciaire a ordonné à celle-ci, en son absence, de subir un examen psychiatrique. Cette ordonnance a été émise le 10 avril 2006 et fut exécutée par deux policières. [6] Une dénonciation émanant dun tiers qui a communiqué avec lOrganisme informe celui-ci de létat de santé de la demanderesse. Celle-ci a donc été avisée par cet organisme du non renouvellement de son permis de conduire. Or, elle en a besoin pour travailler. Elle a subir une autre évaluation psychiatrique, suivie dun rapport qui fut transmis à lOrganisme. Par la production de ce document, le permis de conduire de la demanderesse a été renouvelé le 20 juin 2006; celui-ci na jamais fait lobjet de suspension par lOrganisme. [7] Il indique par ailleurs que les deux policières ayant exécuté lOrdonnance judiciaire ont déjà eu affaire avec la demanderesse qui, à la suite dun incident, a porté plainte contre elles auprès du Commissaire à la déontologie policière. Un blâme verbal sen est suivi à lencontre de ces policières. [8] M e Aubé signale que lOrganisme lui a remis un document élagué, produit par M e Rousseau à laudience (pièce O-1). Cependant, la demanderesse désire savoir si son fils ou les policières sont le ou les auteurs de la dénonciation la
06 15 50 Page : 3 concernant. La divulgation de ces renseignements permettrait à la demanderesse dentreprendre un recours judiciaire contre leur auteur. LES ARGUMENTS DE LORGANISME [9] Demblée, M e Rousseau plaide que les renseignements personnels contenus dans le document en litige recherchés par la demanderesse sont protégés par les articles 53 et 88 de la Loi sur laccès. [10] Elle argue quen labsence de consentement écrit en vertu de larticle 88 de la Loi sur laccès, lOrganisme est en droit de refuser de faire parvenir à la demanderesse les renseignements personnels visés par la demande, conformément à laffaire Nadeau-Boyle c. Société de lassurance automobile du Québec 2 , lorsque la Commission indique notamment : […] la Commission est convaincue que ce responsable ne devrait jamais confirmer, dans sa réponse, lexactitude ou linexactitude du résultat de ces déductions ou de ces recoupements. Dans le langage courant, le résultat dune déduction ne peut constituer quune hypothèse, jamais un fait. [11] Elle fait remarquer que, malgré lempathie que peut avoir lOrganisme à légard de la demanderesse, cela ne constitue pas un critère attributif dun droit daccès, conformément à laffaire Laporte c. Société de lassurance automobile du Québec 3 . […] Les motifs pour lesquels le demandeur entend avoir accès aux renseignements en litige ne constituent pas, en vertu de la loi, un critère attributif dun droit daccès. […] La décision du responsable est fondée; celui-ci devait, en vertu de larticle 88 précité, refuser de communiquer au demandeur les renseignements nominatifs auxquels il a effectivement refusé de donner accès et qui sont visés par la demande de révision. 2 [2002] C.A.I. 268, 272. 3 C.A.I. Québec, n o 02 19 10, 29 avril 2003, c. Grenier.
06 15 50 Page : 4 […] [12] M e Rousseau fait par ailleurs une analogie entre larticle 40 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé 4 et larticle 88 de la Loi sur laccès. Dans les deux cas, le législateur prévoit quune entreprise ou un organisme doit refuser de communiquer à une personne un renseignement personnel la concernant, lorsque sa divulgation risquerait de révéler un renseignement personnel sur une autre personne physique et que cette divulgation serait susceptible de nuire sérieusement à cette autre personne. [13] Elle commente à cet effet la décision X c. Groupe CFC 5 , dont la demande dexamen de mésentente visait des documents recherchés par un demandeur eu égard à une plainte de harcèlement sexuel portée contre celui-ci. Dans cette affaire, la Commission indique notamment : De plus, la lecture de ces documents démontre que la divulgation de ces renseignements serait susceptible de nuire aux tiers. Le procureur de lentreprise a argumenté, entre autres, que la divulgation des documents provoquerait une détérioration potentielle des relations personnelles et professionnelles entre le demandeur et M me Giroux. La preuve a révélé quil y a 30 employés à lÎle-des-Sœurs. La majorité des gens ont donné leur opinion sur les gestes reprochés et la divulgation des documents nencourage pas des relations de travail cordiales. DE LA DEMANDERESSE [14] M e Aubé plaide que la personne ayant subi un préjudice nest pas le dénonciateur qui a porté plainte contre la demanderesse auprès de lOrganisme. Cette dernière a plutôt subi un préjudice, en ce que lavis de non renouvellement de son permis de conduire lui a causé un certain stress. [15] Il réitère linformation voulant que la divulgation des renseignements personnels contenus dans le document en litige permettrait à la demanderesse dentreprendre un recours judiciaire contre lauteur de la dénonciation qui a fourni à lOrganisme de faux renseignements concernant sa cliente. Il signale que laccès intégral au document devrait être accordé à la demanderesse en vertu du 9 e paragraphe du 1 er alinéa de larticle 59 de la Loi sur laccès. 4 L.R.Q., c. P-39.1. 5 [2001] C.A.I. 146, 148.
06 15 50 Page : 5 Réplique de lOrganisme [16] M e Rousseau réplique que le 9 e paragraphe du 1 er alinéa de larticle 59 de la Loi sur laccès ne sapplique pas à la demanderesse. La dénonciation dont il est question dans cet article vise un rapport dévènement. Or, ce nest pas le cas dans la présente cause. DÉCISION [17] Le document contenant des renseignements personnels concernant la demanderesse est visé par larticle 83 de la Loi sur laccès depuis lentrée en vigueur, le 14 juin 2006, du Projet de loi 86 : 83. Toute personne a le droit d'être informée de l'existence, dans un fichier de renseignements personnels, d'un renseignement nominatif la concernant. Elle a le droit de recevoir communication de tout renseignement nominatif la concernant. Toutefois, un mineur de moins de quatorze ans n'a pas le droit d'être informé de l'existence ni de recevoir communication d'un renseignement nominatif de nature médicale ou sociale le concernant, contenu dans le dossier constitué par l'établissement de santé ou de services sociaux visé au deuxième alinéa de l'article 7. [18] Le responsable de laccès de lOrganisme refuse de communiquer à la demanderesse les renseignements personnels, puisque ceux-ci concernent également une personne physique au sens des articles 53 et 88 de la Loi sur laccès : 53. Les renseignements personnels sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1° la personne concernée par ces renseignements consent à leur divulgation; si cette personne est mineure, le consentement peut également être donné par le titulaire de l'autorité parentale; 2° ils portent sur un renseignement obtenu par un organisme public dans lexercice dune fonction juridictionelle; ils demeurent cependant confidentiels si
06 15 50 Page : 6 l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 4° de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement personnel la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement personnel concernant une autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement et que cette divulgation serait susceptible de nuire sérieusement à cette autre personne, à moins que cette dernière n'y consente par écrit. [19] À laudience, les procureurs nont pas soumis de preuve à la Commission. Ils ont cependant présenté les arguments de leurs clients respectifs. [20] Les renseignements concernant la demanderesse inscrits dans le document en litige émanent dune autre personne physique. On y trouve en outre ladresse du dénonciateur et son numéro de téléphone qui sont en fait des renseignements confidentiels par rapport à cette personne. [21] Par ailleurs, pour donner à la demanderesse accès à ces renseignements, lOrganisme devait obtenir le consentement écrit de leur auteur. Or, cette preuve na pas été fournie à laudience. La demanderesse ne peut y avoir accès, en raison des dispositions législatives de larticle 88 de la Loi sur laccès précité. [22] La Commission considère néanmoins que le responsable de laccès au sein de lOrganisme a appliqué adéquatement les articles 53 et 88 de la Loi sur laccès, en refusant de communiquer à la demanderesse les renseignements contenus dans le document en litige. Ils sont impératifs et lOrganisme ne peut donc y déroger. [23] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : PREND ACTE que lOrganisme a transmis à la demanderesse une copie élaguée du document en litige;
06 15 50 Page : 7 DÉCLARE que le responsable de laccès aux documents au sein de lOrganisme était fondé de refuser de communiquer à la demanderesse les renseignements contenus dans le document en litige; REJETTE, quant au reste, la demande de révision de la demanderesse contre lOrganisme; FERME le dossier. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire Gélinas & Associés (M e Annie Rousseau) Procureurs de lOrganisme M e Yvon Aubé Procureur de la demanderesse
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.