Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 06 02 73 Date : Le 18 juillet 2007 Commissaire : M e Jean Chartier X Demandeur c. CENTRE JEUNESSE DU SAGUENAY-LAC-SAINT-JEAN Organisme DÉCISION L’OBJET DEMANDE DE RÉVISION en vertu de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 . [1] Le 15 décembre 2005, le demandeur transmet à l’organisme une demande d’accès dans laquelle il écrit : « Je vous écrit dû au fait que j’aimerais recevoir une copie complète de mon dossier personnel de chez vous (DPJ). Et encore, en même occasion, j’aimerais aussi recevoir le dossier complet de ma fille I… T… » 1 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée « Loi sur l’accès ».
06 02 73 Page : 2 [2] Le 17 janvier 2006, l’archiviste de l’organisme, responsable de l’accès aux documents, informe le demandeur que l’organisme ne détient aucun dossier ouvert à son nom et refuse de communiquer le dossier de sa fille. [3] Dans sa réponse à la demande d’accès, l’archiviste de l’organisme refusait au demandeur de lui communiquer le dossier de sa fille en appuyant sa décision sur l’article 21 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux 2 qui stipule : 21. Le titulaire de l'autorité parentale a droit d'accès au dossier d'un usager mineur. Toutefois, un établissement doit refuser au titulaire de l'autorité parentale l'accès au dossier d'un usager mineur dans les cas suivants: 1° l'usager est âgé de moins de 14 ans et il a fait l'objet d'une intervention au sens de l'article 2.3 de la Loi sur la protection de la jeunesse (chapitre P-34.1) ou il est visé par une décision prise en vertu de cette loi et l'établissement, après avoir consulté le directeur de la protection de la jeunesse, détermine que la communication du dossier de l'usager au titulaire de l'autorité parentale cause ou pourrait causer un préjudice à la santé de cet usager; 2° l'usager est âgé de 14 ans et plus et, après avoir été consulté par l'établissement, refuse que le titulaire de l'autorité parentale reçoive communication de son dossier et l'établissement détermine que la communication du dossier de l'usager au titulaire de l'autorité parentale cause ou pourrait causer un préjudice à la santé de cet usager. [4] Le 10 février 2006, le demandeur transmet à la Commission d’accès à l’information (la Commission) une demande de révision de la décision de l’organisme. [5] Une audience a lieu à Chicoutimi le 1 er novembre 2006, en présence des parties. [6] Lors de l’audience du 1 er novembre 2006, le procureur de l’organisme a fait part au soussigné que son client acceptait dorénavant de communiquer au demandeur le dossier de sa fille dans les limites imposées par l’article 18 de la LSSSS et par l’article 88 de la Loi sur l’accès qui prévoient : 2 L.R.Q., c. S-4.2, ci-après appelée la « LSSSS ».
06 02 73 Page : 3 18. Un usager n'a pas le droit d'être informé de l'existence ni de recevoir communication d'un renseignement le concernant et contenu dans son dossier qui a été fourni à son sujet par un tiers et dont l'information de l'existence ou la communication permettrait d'identifier le tiers, à moins que ce dernier n'ait consenti par écrit à ce que ce renseignement et sa provenance soient révélés à l'usager. Le premier alinéa ne s'applique pas lorsque le renseignement a été fourni par un professionnel de la santé ou des services sociaux ou par un employé d'un établissement dans l'exercice de leurs fonctions. Aux fins du présent alinéa, un stagiaire, y compris un résident en médecine, est assimilé à un professionnel de la santé ou des services sociaux. 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 4 o de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement nominatif concernant une autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement, à moins que cette dernière n'y consente par écrit. [7] Le 22 novembre 2006, le soussigné rendait une décision dans la présente affaire, dans laquelle il entérinait une entente intervenue le 1 er novembre 2006 afin qu’une rencontre ait lieu entre les parties pour que le dossier de la fille du demandeur lui soit communiqué. [8] En vertu de la décision précitée, l’organisme devait communiquer au demandeur le dossier de sa fille après en avoir extrait les renseignements qui doivent l’être en vertu des dispositions de la Loi sur l’accès et de la LSSSS, et ce, au plus tard le 11 décembre 2006. [9] Dans cette décision, le soussigné réservait les recours du demandeur jusqu’au 11 janvier 2007, dans le but de lui permettre de contester le retrait de certains renseignements qui auraient été masqués par l’organisme. [10] En décembre 2006, le demandeur a transmis une lettre au soussigné l’avisant qu’il n’était pas satisfait des documents qui lui avaient été remis, et qu’il demandait à la Commission de statuer dans cette affaire.
06 02 73 Page : 4 [11] Lors d’une conférence téléphonique tenue entre le soussigné et les parties, il a été convenu que l’organisme transmettrait au soussigné la totalité du dossier de la fille du demandeur, détenu par l’organisme. [12] Le 5 février 2007, l’organisme transmettait au soussigné deux copies du dossier réclamé. La première copie correspond à l’original du dossier détenu par l’organisme. Le deuxième exemplaire du dossier est une copie des documents remis au demandeur avec mention des documents retirés et/ou masqués par l’organisme. La preuve de l’organisme [13] Le caviardage des documents transmis a été fait par M. Yves Légaré, archiviste à l’emploi de l’organisme et exerçant sa profession au 520, rue Jacques-Cartier Est, à Chicoutimi. Au soutien de la documentation transmise, l’archiviste déclare dans un affidavit : « Je certifie que les trois (3) chemises contenues dans le présent envoi constituent une copie complète et non expurgée de tous les dossiers détenus par le Centre jeunesse du Saguenay-Lac-Saint-Jean sur la fille de J … T …. » [14] Cet affidavit porte la date du 5 février 2007. [15] Le soussigné a pris connaissance de la documentation transmise et a communiqué avec le procureur de l’organisme dans le but d’obtenir des explications relatives à certains extraits de la documentation qui n’avaient pas été remis au demandeur. Le 16 avril 2007, le soussigné transmettait une liste de neuf documents au procureur de l’organisme en lui demandant de justifier le refus de ces documents. Le 16 mai 2007, le procureur de l’organisme apportait une justification au refus des extraits énumérés. [16] Le 22 mai 2007, la Commission a transmis au demandeur la lettre de l’organisme contenant l’explication des refus de communication dans le but d’obtenir ses commentaires.
06 02 73 Page : 5 [17] Le 27 mai 2007, le demandeur indiquait son désaccord avec la position tenue par l’organisme et réitérait sa demande afin d’obtenir la « totalité » du dossier de sa fille. [18] La fille du demandeur était âgée de moins de 14 ans à la date de la demande d’accès. [19] L’organisme a déposé devant la Commission un jugement de l’honorable Paul Casgrain, juge de la Cour du Québec (Chambre de la jeunesse) en date du 18 septembre 2003, dans lequel ce dernier écrit : « Enfin, la collaboration qu’a toujours fournie le père aux personnes qui oeuvrent auprès de sa fille s’oppose au démembrement de l’autorité parentale en faveur des parents substituts. » Décision [20] Le soussigné a analysé la version originale du rapport de l’organisme ainsi que la version caviardée transmises par le procureur de l’organisme. [21] Le caviardage effectué par l’archiviste de l’organisme a été adéquatement fait de façon à extraire les renseignements portant sur les tiers et qui pourraient permettre de les identifier. Ces restrictions ne visent toutefois pas les employés de l’organisme. [22] Ainsi, tous les renseignements relatifs aux membres de la famille du demandeur, de même que tous les renseignements relatifs à la famille d’accueil de l’enfant, ont été caviardés. [23] En ce qui concerne les neuf documents qui n’ont pas été remis au demandeur, le procureur de l’organisme nous a transmis, le 16 mai 2007, un tableau contenant les justifications que nous reproduisons ci-après.
06 02 73 Page : 6 « LISTE DES DOCUMENTS 1 p.1 à 4 Services externes – aide éducative – rapport synthèse de France Simard Refusé – Concerne pour l’essentiel la famille d’accueil – Tiers – LSSS, art. 18 2 p.71 à 78 Évaluation psychologique de Denis Tremblay Accordé, moins informations sur les tiers (caviardage) 3 p. 75 à 77 Rapport du 5 juin 2003 de Marie-Josée Castonguay Refusé – Provient de l’école – Tiers – LSSS, art. 18 4 p.91 à 98 Rapport d’appréciation du développement global de l’enfant du 6 octobre 1999, de Mariette Gaudreault Accordé, pages 91 à 97; refusé p. 98, résultats bruts de test psychologique – Code de déontologie membres de l’Ordre des conseillers et conseillères d’orientation et des psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec, art. 25 5 p.99 à 100 Rapport d’observation de la Maison des familles de Chicoutimi Refusé – Concerne pour l’essentiel les grands-parents maternels – Tiers – LSSS, art. 18 6 p.137 à 139 Évaluation pédopsychiatrique de 29 mars 2001, faite en présence du père Refusé – Rapport produit par L’Institut Roland-Saucier et lui appartenant C’est cet établissement qui peut y donner accès. 7 p.176 à 183 Rapport évolutif présenté à la Chambre de la jeunesse de Chicoutimi le 20 mai 2003 par Mona Simard Accordé, moins informations sur les tiers (caviardage) 8 p.339 – 347 Documents émanant de la Clinique de pédiatrie de Chicoutimi Refusé, documents qui appartiennent à la Clinique. C’est elle qui peut y donner accès 9 p.280 à 327 Divers résultats à des tests psychologiques administrés par Marielle Gaudreault, suivi de notes manuscrites (pages 319 à 327) p.280 à 382, 292 à 302 refusé : données brutes de tests (voir 4) – p. 326-327 refusé : concerne les grands-parents (tiers) – p.284 à 291, 303 à 327 : accordé » [24] On constate, à la lecture de ce tableau, que l’organisme accepte de communiquer en tout ou en partie les documents décrits aux n os 2, 4, 7 et 9.
06 02 73 Page : 7 [25] Le demandeur est le titulaire de l’autorité parentale et conformément au premier alinéa de l’article 21 de la LSSSS (précité), il a droit d’accès au dossier de sa fille. Le droit d’accès ne peut toutefois s’exercer qu’en assurant la protection des renseignements concernant les tiers conformément aux articles 18 de la LSSSS et 88 de la Loi sur l’accès. [26] L’archiviste de l’organisme a effectué cet exercice et a communiqué au demandeur les extraits du dossier détenu par l’organisme après en avoir masqué les passages auxquels le demandeur n’a pas accès. [27] Après un examen plus attentif demandé par le soussigné, l’organisme a convenu de communiquer certains documents ou certains extraits de documents mentionnés aux numéros 2, 4, 7 et 9 du tableau apparaissant au paragraphe 23 des présentes. [28] Ces documents supplémentaires, une fois communiqués, répondent aux exigences de la loi et aux obligations de l’organisme en semblable matière. [29] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [30] ACCUEILLE partiellement la demande de révision du demandeur; [31] ORDONNE à l’organisme de communiquer au demandeur, dans les trente (30) jours de la date de la réception de la présente décision, les documents suivants : - Évaluation psychologique de Denis Tremblay : après avoir été caviardée des informations concernant les tiers; - Rapport d’appréciation du développement global de l’enfant du 6 octobre 1999, de Mariette Gaudreault : les pages 91 à 97;
06 02 73 Page : 8 - Rapport évolutif présenté à la Chambre de la jeunesse de Chicoutimi le 20 mai 2003 par Mona Simard : après avoir été caviardé des informations concernant les tiers; - Divers résultats à des tests psychologiques administrés par Mariette Gaudreault : les pages 284 à 291 et 303 à 327; [32] REJETTE, pour le reste, la demande de révision du demandeur. JEAN CHARTIER Commissaire
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