Commission d’accès à l’information du Québec Dossiers : 03 22 42 05 01 77 Date : Le 14 juin 2007 Commissaire : M e Jacques Saint-Laurent X Demandeur c. COMMISSAIRE À LA DÉONTOLOGIE POLICIÈRE Organisme DÉCISION OBJET DEMANDE DE RÉVISION conformément à la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 . [1] Le 13 février 2007, le soussigné rendait une décision interlocutoire précisant les questions à considérer sur le fond, relativement aux demandes de révision dans les dossiers 03 22 42 et 05 01 77. 1 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée la « Loi sur l'accès ».
03 22 42 et 05 01 77 Page : 2 [2] Les questions sont les suivantes : - Le demandeur peut-il être exempté du paiement des frais demandés par le Commissaire à la déontologie policière pour la photocopie des pages constituant le dossier d’enquête de la Commission de police du Québec ? - Les ordonnances de huis clos qui ont été prononcées par la Commission de police du Québec peuvent-elles être modifiées par la Commission d’accès à l’information ? AUDIENCE [3] Le 11 mai 2007, les parties ont été entendues sur le fond, plus spécialement en fonction des questions mentionnées précédemment. [4] Sous réserves de ce qui suit, les parties se sont appuyées sur la preuve déjà produite aux dossiers. [5] En outre, au cours de l’audience du 11 mai 2007, le demandeur a produit certains documents relatifs au montant des frais de photocopies qui lui furent réclamés par l’organisme. [6] Ainsi, le demandeur produit une lettre du 10 février 2003 par laquelle il s’adresse au Commissaire à la déontologie policière pour obtenir : « … des copies de page au rapport de la Commission de Police. Dossier numéro P-83-2799. Les numéros de page sont 70-75-76-77-79-111-112-113-114-115-126 et les autres pages au dossier s’il y en a. Aussi j’inclus à cette requête une photocopie de la page 23 du dossier. J’aimerais obtenir une copie des témoignages de Me Michel Salvail Roger Dion André Castonguay Jean-Guy Dussault Mario Bélair Richard Fontaine et Me Marc-André Martin. Témoignage que les enquêteurs de la Commission ont obtenu, (D-2). [sic] » [7] Le 13 février 2003, la responsable de l’accès de l’organisme informe le demandeur qu’une copie intégrale du rapport d’enquête P-83-2799 est à sa disposition, il est invité à venir en prendre possession au bureau de l’organisme. Par contre, concernant la transcription des témoignages, la responsable explique qu’il faudra du temps pour essayer de les retrouver dans les archives conservées à l’extérieur du bureau et que le demandeur devra assumer les frais qui pourraient être de plus de 100 $ (D-1).
03 22 42 et 05 01 77 Page : 3 [8] Le 14 février 2003, le demandeur répond à l’organisme en soulignant notamment : « … je vous confirme que je désire obtenir le dossier de l’enquête de la Commission et que je vais en assumé les coûts qui sont environ 100 $, (D-3). [sic] » A) ARGUMENTS i) De l’organisme [9] Me Isabelle St-Jean expose les arguments de l’organisme concernant les deux questions autorisées par la Commission dans la décision interlocutoire du 13 février 2007. [10] Concernant les frais réclamés, la procureure rappelle les principes énoncés à l’article 11 de la Loi sur l’accès ainsi qu’au Règlement sur les frais exigibles pour la transcription, la reproduction et la transmission de documents et de renseignements personnels 2 . 11. L'accès à un document est gratuit. Toutefois, des frais n'excédant pas le coût de sa transcription, de sa reproduction ou de sa transmission peuvent être exigés du requérant. Le montant et les modalités de paiement de ces frais sont prescrits par règlement du gouvernement; ce règlement peut prévoir les cas où une personne est exemptée du paiement. L'organisme public qui entend exiger des frais en vertu du présent article doit informer le requérant du montant approximatif qui lui sera chargé, avant de procéder à la transcription, la reproduction ou la transmission du document. (Tel qu’il se lisait au moment de la demande d’accès.) [11] La procureure de l’organisme soumet à la Commission que le demandeur n’est pas dans une des situations d’exception qui aurait pour effet de l’exempter du paiement des frais. [12] Elle souligne que l’organisme bénéficie d’un pouvoir discrétionnaire, selon la décision Thériault c. Ville de Terrebonne 3 . 2 L.R.Q., c. A-2.1, r.1.1, (ci-après appelé le Règlement). 3 [1993] C.A.I. 51.
03 22 42 et 05 01 77 Page : 4 [13] De plus, la procureure rappelle que, le 24 octobre 2003, le demandeur a été informé par l’organisme du montant approximatif des frais qu’il aurait à payer. Cette information lui a été transmise conformément à la décision Légaré c. Conseil scolaire de l’Île de Montréal 4 . [14] La procureure de l’organisme conclut que les exigences prescrites par la Loi sur l’accès et le Règlement ont été respectées de sorte que le requérant ne peut être exempté du paiement des frais. [15] Concernant les ordonnances de huis clos prononcées par la Commission de police du Québec au moment de l’enquête publique, la procureure de l’organisme soumet que la Commission d’accès à l’information n’a pas le pouvoir de modifier les décisions rendues par un organisme dans le cadre de l’exercice d’une fonction juridictionnelle. [16] Elle souligne que la Loi sur l’accès ne contient aucune disposition habilitant la Commission d’accès à l’information à modifier ces ordonnances. [17] La procureure réfère également au deuxième paragraphe de l’article 53 de la Loi sur l’accès qui prévoit qu’un renseignement obtenu par un organisme public dans l’exercice d’une fonction juridictionnelle doit demeurer confidentiel, s’il a été obtenu alors que l’organisme siégeait à huis clos : 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants : 1° leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2° ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. (Tel qu’il se lisait au moment de la demande d’accès.) ii) Du demandeur [18] Concernant le paiement des frais demandés par le Commissaire à la déontologie policière, le demandeur réfère aux pièces D-1, D-2 et D-3 du mois de février 2003, en rappelant qu’il a accepté de payer des frais de 100 $ mentionnés à la pièce D-1. 4 [1997] C.A.I. 132.
03 22 42 et 05 01 77 Page : 5 [19] Par ailleurs, le demandeur reprend l’argument énoncé dans la lettre qu’il adressait à l’organisme, le 29 décembre 2004 (D-4), par lequel il demande d’être exempté du paiement des frais, considérant qu’il s’agit d’une enquête publique qui avait été demandée par le ministre de la Justice. [20] Concernant les ordonnances de huis clos prononcées par la Commission de police du Québec, le demandeur a analysé plusieurs pages du procès-verbal de l’enquête publique de la Commission de police du Québec. Il réfère aux documents transmis à la Commission, le 1 er janvier 2006. Une copie de ces mêmes documents a été communiquée à l’organisme, le 8 mars 2006. [21] Selon le demandeur, le rapport d’enquête de la Sûreté du Québec a été déposé pendant l’enquête publique de la Commission de police du Québec (pièce CC-99). Ce rapport serait en conséquence devenu un document public. [22] Enfin, le demandeur soumet que l’organisme n’a pas donné de motif pour refuser de lui communiquer, en entier, la pièce C-21, déposée en preuve lors de la quatrième séance de la Commission de police, le 18 juin 1985. DÉCISION [23] Depuis 1999, le demandeur s’est adressé à différents intervenants concernant les circonstances tragiques de 1983, afin de reconstituer les faits à partir des documents faisant partie des dossiers de l’époque. [24] En pratique, les mêmes documents ou renseignements peuvent se trouver dans plusieurs dossiers. Par exemple, des éléments recueillis par les policiers ont été subséquemment utilisés dans le cadre de l’enquête du coroner, des poursuites criminelles et au moment de l’enquête publique de la Commission de police du Québec. [25] Une partie importante des documents recherchés par le demandeur lui a déjà été rendu accessible. [26] Le demandeur poursuit ses recherches en s’adressant au Commissaire à la déontologie policière, afin d’obtenir une copie du dossier d’enquête de la Commission de police du Québec. Après analyse, l’organisme en est venu à la conclusion que le demandeur pouvait recevoir une copie de l’ensemble du dossier d’enquête numéro P-83-2799, sous réserve du paiement des frais et d’extraire les parties confidentielles. (Voir la lettre du 24 octobre 2003 de la responsable de l’accès aux documents de l’organisme).
03 22 42 et 05 01 77 Page : 6 [27] Considérant la preuve documentaire et les témoignages entendus lors de la conférence préparatoire du 30 mai 2006 et de l’audition sur le fond du 11 mai 2007, il appert que le demandeur maintient sa demande d’accès à l’ensemble du dossier d’enquête de la Commission de police du Québec, sans frais. [28] D’abord, le demandeur peut-il être exempté du paiement des frais pour la photocopie des pages constituant le dossier d’enquête de la Commission de police du Québec ? [29] À la lecture de la lettre du 13 février 2003 (D-1), précisant que les frais pour les photocopies demandées sont évalués à plus de 100 $, il appert clairement que le demandeur n’avait demandé que la copie du rapport d’enquête de la Commission de police du Québec ainsi que certains témoignages. [30] Il est clair que l’évaluation de 100 $ ne se rapporte pas au coût de la photocopie de l’ensemble du dossier d’enquête de la Commission de police comme le prétend le demandeur dans sa lettre du 14 février 2003 (D-3). [31] En fait, le montant des frais que le demandeur peut être appelé à payer pour obtenir les photocopies des documents demandés doit être calculé à partir du nombre de pages, conformément au règlement applicable. [32] Il n’est pas contesté que le dossier d’enquête de la Commission de police du Québec et ses annexes comprend près de 14 000 pages. À l’évidence, la somme de 100 $ ne couvre pas les frais de photocopies d’un dossier aussi volumineux. [33] Par ailleurs, la Commission d’accès à l’information n’a pas le pouvoir de modifier la décision prise par l’organisme dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, lorsque les conditions prescrites par la Loi et le Règlement permettent d’exiger des frais. [34] D’ailleurs, le Règlement ne prévoit aucun cas où une personne est exemptée du paiement des frais, à l’exception de la franchise prévue à son article 3. [35] J’en viens à la conclusion que l’organisme a validement exercé sa discrétion dans les circonstances. [36] Le commentaire de la commissaire Carole Wallace dans l’affaire Thériault c. Ville de Terrebonne 5 doit être repris : « Par contre, je ne crois pas que la Loi sur l’accès oblige la Ville de fournir des copies à M. Thériault gratuitement. L’article 11 de la loi permet à l’organisme public de réclamer les frais de reproduction prévus par règlement pour tout document auquel l’accès est accordé. » 5 [1993] C.A.I. p. 52.
03 22 42 et 05 01 77 Page : 7 [37] Par ailleurs, les ordonnances de huis clos qui ont été prononcées par la Commission de police du Québec peuvent-elles être modifiées par la Commission d’accès à l’information ? [38] Le demandeur rappelle que la Commission de police du Québec a tenu une enquête publique. Dans la mesure où l’enquête est publique, le demandeur soutient que les documents et les témoignages recueillis à cette occasion deviennent automatiquement des documents publics. [39] Par contre, la preuve ne confirme pas ce raisonnement. Au contraire, en prenant connaissance des extraits du procès-verbal de l’enquête publique en question, on constate que des documents ont été produits à titre confidentiel et que des témoignages ont été entendus à huis clos. [40] Les ordonnances de confidentialité ou de huis clos qui ont été rendues par la Commission de police du Québec, en 1983, l’ont été à partir des considérations factuelles et juridiques du moment. [41] La Loi sur l’accès n’accorde aucune compétence à la Commission d’accès à l’information pour réviser la décision rendue à ce sujet par un autre Tribunal administratif dans l’exercice de sa fonction juridictionnelle. [42] La Commission d’accès à l’information ne peut pas se substituer à la Commission de police du Québec. [43] La commissaire Thérèse Giroux s’est exprimée de la façon suivante concernant les pouvoirs de la Commission d’accès à l’information, dans l’affaire Morel c. Office du crédit agricole du Québec 6 : « Il n’appartient pas à la Commission de réviser les décisions de l’Office prises dans son domaine de compétence. En effet, la Commission n’a aucune juridiction à cet égard et ne peut que réviser les décisions d’un organisme prises en vertu de la Loi sur l’accès. » [44] Se basant sur le paragraphe (2) de l’article 53 de la Loi sur l’accès, les renseignements obtenus par la Commission de police du Québec dans l’exercice de sa fonction juridictionnelle doivent, selon moi, demeurer confidentiels lorsqu’ils ont été obtenus à ce titre, ou alors qu’elle siégeait à huis clos. [45] Enfin, le demandeur soumet à la Commission que l’organisme aurait dû lui communiquer la pièce C-21, suite à la demande qu’il a fait parvenir le 1 er juin 2006 (D-6). 6 [1986] C.A.I. 17, p 19.
03 22 42 et 05 01 77 Page : 8 [46] Aucune demande n’a été adressée à la Commission d’accès à l’information concernant cette démarche du 1 er juin 2006. La Commission ne peut intervenir sur cette question. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : REJETTE les demandes de révision présentées par le demandeur dans les dossiers 03 22 42 et 05 01 77. JACQUES SAINT-LAURENT Président M e Isabelle St-Jean Procureure de l'organisme
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