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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 05 03 20 Date : Le 11 septembre 2007 Commissaire : M e Guylaine Henri X Demandeur c. COMMISSAIRE À LA DÉONTOLOGIE POLICIÈRE Organisme DÉCISION OBJET DEMANDE DE RÉVISION en matière daccès à des renseignements personnels en vertu de larticle 135 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 [1] Le 2 février 2005, le demandeur requiert de lorganisme quil lui transmette copie dune plainte déposée contre lui par M. [R. T.], de la demande de révision de ce dernier ainsi que de tout autre document produit à lappui de la plainte. 1 L.R.Q., c. A-2.1, la Loi sur laccès.
05 03 20 Page : 2 [2] Le 9 février 2005, lorganisme refuse cette demande daccès. Il informe le demandeur que ces documents sont confidentiels en vertu de larticle 139 de la Loi sur la police 2 . Il ajoute que les documents demandés contiennent également des renseignements nominatifs 3 qui ne peuvent être divulgués en vertu des articles 53, 54 et 59 de la Loi sur laccès et que les articles 28 et 32 de cette loi en empêchent également la communication. [3] Le 23 février 2005, le demandeur formule une demande de révision à la Commission daccès à linformation (la Commission) concernant cette décision de lorganisme. AUDIENCE [4] Une audience est convoquée le 28 mars 2006 à Sherbrooke. Cependant, à la suite dune requête de lorganisme, cette audience est remise au 15 février 2007. Le dossier ne peut non plus procéder à ce moment puisque, en raison de circonstances climatiques exceptionnelles, lavocate de lorganisme est dans limpossibilité de se rendre à Sherbrooke. [5] Une audience est finalement tenue dans ce dossier, le 6 juin 2007. PREUVE [6] Lorganisme dépose, sous pli confidentiel, copie des documents en litige, en vertu de larticle 20 des Règles de preuve et de procédure de la Commission daccès à linformation 4 qui prévoit ce qui suit : 20. La Commission peut prendre connaissance, en l'absence du requérant et à huis clos, d'un document que l'organisme public ou le tiers prétend devoir être soustrait à l'accès en vertu d'une restriction prévue à la section II de la Loi. 2 L.R.Q., c. P-13.1. 3 Depuis lentrée en vigueur, le 14 juin 2006, de plusieurs dispositions de la Loi modifiant la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels et dautres dispositions législatives, L.Q. 2006, c. 22, la Loi sur laccès fait maintenant référence aux « renseignements personnels » en lieu et place des termes « renseignements nominatifs » jusqualors utilisés dans cette loi. 4 R.R.Q., c. A-2.1, r. 2, D. 2058-84.
05 03 20 Page : 3 [7] Lorganisme dépose également les documents suivants (O-1 en liasse) : Une lettre du 28 avril 2004 informant le demandeur que M. [R. T.] a déposé une plainte le concernant et que lorganisme refuse dy donner suite pour les motifs quil énonce; Une lettre du 7 juin 2004 informant le demandeur que le plaignant, à la suite de la décision mentionnée ci-dessus, sest prévalu de son droit de révision et que lorganisme maintient sa décision, le plaignant nayant fait valoir aucun fait ou élément nouveau permettant de la réviser. Il informe le demandeur que cette décision est finale et sans appel. [8] Le demandeur témoigne que le 4 septembre 2003, à la suite dune plainte de sa part contre M. [R. T], ce dernier a souscrit un engagement (D-1) à ne pas troubler lordre public (art. 810 et 810.1 du Code criminel (C.cr.)) assorti des conditions suivantes : […] A) Ne pas communiquer de quelque façon que ce soit avec [le demandeur] et les membres de sa famille directement ou indirectement, sauf par lintermédiaire de notaires et avocats B) Laisser circuler librement [le demandeur] et les membres de sa famille sur la voie daccès menant de la Route 161 à ses terrains ainsi que sur ces terrains désignés sur la cote R2, soit partis du lot […] C) Interdiction de photographier [le demandeur] et les membres de sa familles (sic) […] [9] Le demandeur considère que M. [R. T.] a violé cet engagement en formulant des plaintes contre lui au Commissaire à la déontologie policière. Il estime en effet que lun des mandats du Commissaire à la déontologie policière est de préserver lordre public. Il suppose de plus que, parmi les documents produits au soutien de la plainte de M. [R. T.], ce dernier a joint des photographies de lui et fait des allégations mensongères ce qui, de lavis du demandeur, constitue également une violation des engagements pris par M. [R. T.]. [10] Les parties reconnaissent que M. [R. T.] a fait plus dune plainte contre le demandeur au Commissaire à la déontologie policière. La plus récente a été déposée le 19 mars 2007.
05 03 20 Page : 4 ARGUMENTATION [11] Lorganisme rappelle les fonctions et les pouvoirs qui lui sont dévolus par la Loi sur la police, notamment : Il a pour fonction de recevoir et dexaminer une plainte formulée contre un policier (art. 128 de la Loi sur la police); Il procède à une analyse préliminaire de la plainte afin de décider sil la rejette ou sil procède à une enquête (art. 149 de la Loi sur la police). Sil décide de procéder à une enquête, il peut déposer une citation devant le Comité de déontologie policière. Une fois déposée, la citation devient publique et le Commissaire devient alors le procureur poursuivant. Lorganisme nexerce pas de fonction juridictionnelle puisquil agit dans le cadre dun processus administratif lors de la réception dune plainte 5 . [12] Dans le présent dossier, lorganisme a rejeté la plainte de M. [R. T.] à létape de lanalyse préliminaire, tel quil appert de la lettre du 28 avril 2004 (O-1 en liasse). [13] M. [R. T.] a ensuite demandé la révision de la décision de lorganisme, le 16 avril 2004, en vertu de larticle 169 de la Loi sur la police. Cette demande de révision a été rejetée par lorganisme, tel quil appert de la lettre transmise au demandeur le 7 juin 2004. [14] Lorganisme informe la Commission quil ne présente pas dargumentation concernant lapplication de larticle 139 de la Loi sur la police, puisque la Commission daccès à linformation a décidé à plusieurs reprises que cette disposition énonçait une règle de preuve qui nempêchait pas lapplication de la Loi sur laccès. [15] Lorganisme invoque les paragraphes 3 et 4 du 1 er alinéa de larticle 28, larticle 32 ainsi que les articles 53 et suivants de la Loi sur laccès pour refuser de communiquer les documents demandés par le demandeur. DU DEMANDEUR [16] Le demandeur sinquiète quune personne puisse à tout moment porter plainte contre un policier, plainte qui peut avoir comme but ultime de causer du tort à celui-ci qui ne peut en connaître le contenu, même si un tribunal a déjà déclaré quun plaignant harcelait ce policier. 5 Monty c. Bélanger Longtin, C.Q., n o 500-80-003951-044, 11 novembre 2005, j. Locas, par. 4.
05 03 20 Page : 5 [17] Le demandeur soutient quen lempêchant davoir accès à la plainte portée contre lui et aux documents qui accompagnaient cette dernière, on protège une personne qui viole un engagement pris devant les tribunaux. DÉCISION [18] Je dois préciser, dentrée de jeu, que je nai pas compétence pour déterminer si M. [R. T.], la personne qui a porté plainte contre le demandeur, a, de ce fait, violé lengagement de ne pas troubler lordre public quil a souscrit devant un autre tribunal. Cest à cet autre tribunal que le demandeur doit sadresser sil est davis que M. [R. T.] a contrevenu aux obligations qui résultent de cet engagement. [19] Je suis saisie dune demande faite en vertu de larticle 83 de Loi sur laccès qui prévoit ce qui suit : 83. Toute personne a le droit d'être informée de l'existence, dans un fichier de renseignements personnels, d'un renseignement nominatif la concernant. Elle a le droit de recevoir communication de tout renseignement nominatif la concernant. Toutefois, un mineur de moins de quatorze ans n'a pas le droit d'être informé de l'existence ni de recevoir communication d'un renseignement nominatif de nature médicale ou sociale le concernant, contenu dans le dossier constitué par l'établissement de santé ou de services sociaux visé au deuxième alinéa de l'article 7. [20] Jai pris connaissance des documents déposés sous le sceau de la confidentialité. Il sagit de deux types de documents, soit : Les documents provenant du plaignant concernant sa plainte contre le demandeur et, Les documents de lorganisme concernant le traitement de cette plainte. [21] Je suis davis que les documents en litige ne sont pas accessibles au demandeur en raison des articles 53 et suivants de la Loi sur laccès, puisquil sagit de renseignements nominatifs concernant la personne qui a porté plainte contre le demandeur. En effet, ces renseignements permettent de connaître la nature de la plainte que cette personne a portée contre le demandeur et ils sont,
05 03 20 Page : 6 pour ce motif, confidentiels en vertu des articles 53 et suivants de la Loi sur laccès. [22] Les dispositions pertinentes de la Loi sur laccès se lisent comme suit : 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1° leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2° ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. 54. Dans un document, sont nominatifs les renseignements qui concernent une personne physique et permettent de l'identifier. 56. Le nom d'une personne physique n'est pas un renseignement nominatif, sauf lorsqu'il est mentionné avec un autre renseignement la concernant ou lorsque sa seule mention révélerait un renseignement nominatif concernant cette personne. 59. Un organisme public ne peut communiquer un renseignement nominatif sans le consentement de la personne concernée. […] [23] Aucun consentement à la divulgation des renseignements par le plaignant à lorganisme na été produit au dossier de la Commission. De plus, lorganisme, lorsquil analyse la plainte formulée contre un policier, exerce des fonctions administratives de telle sorte que le 2 e paragraphe de larticle 53, qui prévoit une exception à la confidentialité de certains renseignements nominatifs, ne trouve pas application en lespèce 6 . [24] Je suis davis que tous les documents concernant la plainte portée contre le demandeur à lorganisme, que ce soit la plainte elle-même ou les documents qui laccompagnaient, ne sont pas accessibles au demandeur puisquils 6 Monty c. Bélanger Longtin, précitée, note 5.
05 03 20 Page : 7 permettraient à ce dernier de connaître des renseignements nominatifs concernant le plaignant, à savoir la nature et le contenu de la plainte portée contre lui. [25] Par ailleurs, quant aux documents contenus dans le dossier de lorganisme concernant cette plainte, je suis davis quils ne sont pas accessibles non plus au demandeur, puisque leur divulgation lui permettrait également de connaître la nature de la plainte portée contre lui par M. [R. T.]. [26] Larticle 88 de la Loi sur laccès prévoyait, à toute époque pertinente au litige, ce qui suit : 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 4 o de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement nominatif concernant une autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement, à moins que cette dernière n'y consente par écrit. [27] Même si la plainte portée contre le demandeur à lorganisme le concerne, puisquelle le vise personnellement, je suis davis que ces renseignements ne lui sont pas accessibles puisquils révéleraient des renseignements nominatifs concernant la personne qui a porté plainte contre lui. [28] Vu les conclusions auxquelles jen arrive concernant lapplication des articles 53 et suivants, ainsi que 88, de la Loi sur laccès, il ne savère pas nécessaire de statuer sur les autres arguments invoqués par lorganisme. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [29] REJETTE la demande de révision du demandeur. GUYLAINE HENRI Commissaire MAURICE, MATHIEU & ASSOCIÉS (M e Isabelle St-Jean) Avocats de lorganisme
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