Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 05 00 12 Date : Le 11 décembre 2007 Commissaire : M e Christiane Constant JTI MacDONALD CORPORATION Demanderesse c. MINISTÈRE DU REVENU DU QUÉBEC Organisme DÉCISION LE LITIGE DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS À DES RENSEIGNEMENTS, selon les termes de l’article 135 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 [1] Le 19 novembre 2004, par l’intermédiaire de M e François Morin du cabinet d’avocats Borden Ladner Gervais, JTI MacDonald Corporation (la demanderesse) réfère M me Lyne Bergeron et M. Marcel Carbonneau du ministère du Revenu du Québec (l’Organisme) à une lettre datée du 22 septembre précédent que lui avait transmise M e Morin. 1 L.R.Q., c. A-2.1, la Loi sur l’accès.
05 00 12 [2] Cette lettre comporte la demande d’accès datée du 19 novembre 2004 laquelle vise « tous les renseignements et tout document contenus dans les dossiers » de l’Organisme relativement à une modification effectuée « à l’alinéa 4 de l’article 17.4 de la Loi concernant l’impôt sur le tabac de loi 135 3 présenté le 30 avril 1991 et adopté le 6 juin 1991 ». [3] La demanderesse souhaite, de plus, obtenir tout renseignement ou document, quelle que soit sa forme, en lien avec cette modification, notamment : 1. Copie de toute personnelle, manuscrite fonctionnaire ou employé du MRQ et se rapportant à cette modification; 2. Copie de toute directive, note de service, ou tout autre document émanant de tout fonctionnaire ou employé du MRQ, se rapportant à cette modification et ayant pour objet d’assister, de guider ou d’autrement aider tout fonctionnaire ou employé vérifications ou des enquêtes d’imposition pertinente. [4] La demanderesse cherche également provenant de l’Agence du revenu du Canada, de tout ministère ou organisme gouvernemental et l’ensemble de fonctionnaires ou employés de l’Organisme concernant cette modification. [5] Le 10 décembre 2004, M. Carbonneau, responsable adjoint de l’accès aux documents au sein de l’Organisme, refuse à M documents. Ce refus est basé sur l’article 34 de la Loi sur l’accès. Quant aux autres documents, M. Carbonneau indique que ceux-ci ont fait l’objet de publication ou de diffusion par l’Éditeur demanderesse à s’y adresser pour se les procurer. [6] Le 7 janvier 2005, M e Morin sollicite l’intervention de la Commission d’accès à l’information (la Commission) afin que soit révisée la décision de l’Organisme. L’AUDIENCE [7] Ayant été reportée à deux reprises par la Commission à la demande de l’une et l’autre des parties, l’audience de la présente cause se tient à Montréal, le 28 mai 2007. M e Jean Lepage du bureau d’avocats Veillette, Larivière, procureurs 2 L.R.Q., c. I-2, la Loi sur le tabac. 3 L.Q., [1991] c. 16.Page : 2 2 , par l’article 20 du Projet lettre, avis juridique, note ou non, émanant de tout du MRQ affecté à des pour toute année à recevoir la documentation la correspondance échangée entre les e Morin l’accès à certains officiel du Québec. Il invite la
05 00 12 Page : 3 de l’Organisme et M e Marie-Claude Sarrazin du cabinet d’avocats Borden Ladner Gervais, procureurs de la demanderesse, sont présents. PRÉCISIONS [8] M e Lepage réfère la Commission à une décision qu’elle a rendue dans l’affaire Public History c. Ministère du Revenu du Québec 4 concernant les mêmes renseignements et documents recherchés par la demanderesse dans la présente cause. [9] Il fait remarquer que la preuve va démontrer que les documents recherchés par la demanderesse sont : soit inexistants, soit que le ministre de l’Organisme n’a pas jugé opportun de rendre accessibles ceux qui ont été préparés pour son compte, selon les termes de l’article 34 de la Loi sur l’accès, ou soit que ces documents ont fait l’objet de diffusion ou de publication par l’Éditeur officiel du Québec. [10] M e Sarrazin répond que la Commission devrait s’inspirer de l’arrêt de la Cour suprême du Canada dans Babcock c. Canada (Procureur général) 5 qui, se fondant notamment sur l’article 39 de la Loi sur la preuve au Canada 6 , avait ordonné au Procureur général du Canada de faire parvenir au demandeur une liste de documents dont l’accès avait été refusé. LA PREUVE DE L’ORGANISME Témoignage de M. Marcel Carbonneau [11] Interrogé par M e Lepage, M. Carbonneau déclare qu’il travaille au sein de l’Organisme; il est coordonnateur ministériel et responsable adjoint de l’accès aux documents. Il a pris connaissance de la demande et s’est adressé à la Direction générale de la législation afin de recevoir l’intégralité du Projet de loi 135 en 1991, modifiant la Loi sur le tabac, auquel réfère la demanderesse dans sa demande. Il a par la suite procédé au traitement de cette demande. [12] M e Lepage dépose, sous le sceau de la confidentialité, des documents et remet à M e Sarrazin une copie de l’historique des modifications apportées à l’article 17 (4) de la Loi sur le tabac. 4 os C.A.I., n 051375 et 051735, 17 avril 2007, c. Constant. 5 [2002] 3 R.C.S. 6 L.R.C. [1985] ch. C-5, la LPC.
05 00 12 Page : 4 [13] Poursuivant son témoignage, M. Carbonneau ajoute qu’il n’a pu trouver les documents pouvant contenir les renseignements tels que ceux décrits au paragraphe 3 de la présente décision. Ils sont donc inexistants. [14] M. Carbonneau spécifie cependant que les documents en lien avec la demande sont : Une première directive (de 6 pages) concernant l’article 17 (4) de la Loi sur le tabac qui a fait l’objet de publication et diffusion auprès de l’Éditeur officiel du Québec; Une deuxième directive (de 3 pages) concernant les agents percepteurs datée du 30 septembre 1991 qui a fait l’objet de modifications « par le Projet de loi, à la suite d’une directive émise au mois de janvier 1988 par un régime antérieur à la modification » de cet article. Il signale que les modifications apportées à cet article sont d’ordre technique seulement. [15] Il indique que les autres documents confidentiels sont composés : Des notes techniques préparées par la Direction générale de la législation pour le compte du ministre de l’Organisme pour la Commission parlementaire relative au Projet de loi 135. Ces notes expliquent les modifications apportées à l’article 17 (4) de la Loi sur le tabac, de manière à ce que le ministre puisse répondre aux questions qui lui seront posées en commission parlementaire ou à l’Assemblée nationale; D’une note adressée au sous-ministre de l’Organisme; D’une note de transmission; D’une lettre de présentation. [16] Toutefois, il signale qu’en consultant le Journal des débats, il a constaté que les notes ci-dessus mentionnées différaient de celles ayant été préparées pour le ministre, puisque ces dernières ne contiennent pas les exemples qu’il a fournis en commission parlementaire. [17] Il ajoute qu’il a traité d’autres demandes d’accès relatives à l’article 17 (4) de la Loi sur le tabac. Il s’était alors adressé au cabinet du ministre de l’Organisme afin de savoir si celui-ci acceptait de rendre accessibles les documents en lien avec ces demandes. La réponse a été négative. [18] M e Lepage dépose la réponse du ministre de l’Organisme.
05 00 12 Page : 5 [19] M. Carbonneau explique par ailleurs qu’il a fait préparer un historique de l’évolution des modifications apportées à l’article 17 (4) de la Loi sur le tabac à partir de l’année 1986 jusqu’à l’an 2000. Ces renseignements ne correspondent pas directement à ceux visés par la demande et aucune analyse fondamentale concernant cet article n’a été effectuée par l’Organisme. Contre-interrogatoire de M. Carbonneau [20] Contre-interrogé par M e Sarrazin, M. Carbonneau déclare que la Direction générale à la législation procède notamment à la rédaction de projets de loi. Elle ne s’occupe ni de la vérification de dossiers ni des enquêtes que pourrait enclencher l’Organisme à l’égard d’un contribuable. Cette direction est l’organe pouvant détenir les documents visés par la demande, d’où le motif principal pour lequel il lui a fait parvenir la demande d’accès de la demanderesse afin que les recherches soient effectuées pour trouver ces documents. [21] Il réitère l’essentiel de son témoignage et ajoute que la première directive à laquelle il s’est référé au cours de son témoignage initial date du 29 janvier 1988. Il n’y a pas eu d’autres modifications apportées à cet article. Il n’existe pas d’autres documents ni de mémos en lien avec la demande. Il s’en est tenu au libellé de cette dernière afin que la recherche soit effectuée par la Direction générale de la législation. [22] Il spécifie cependant qu’il existe, entre autres, des directives d’application de vérification et d’enquêtes, mais qu’elles n’ont rien à voir avec la présente demande. Il existe également des opinions juridiques relativement à l’article 17 (4) de la Loi sur le tabac concernant certains contribuables, mais elles ne sont pas en lien avec la présente demande. [23] En ce qui a trait aux autres documents et renseignements, tel le « Bulletin d’interprétation », daté du 30 septembre 1991, concernant les « taxes à la consommation », M. Carbonneau indique que ceux-ci ont fait l’objet de publication ou de diffusion en 1991 par l’Éditeur officiel du Québec. La demanderesse pourrait se les procurer conformément à l’article 13 de la Loi sur l’accès. Il a fourni à celle-ci les coordonnées de l’Éditeur officiel du Québec à cet effet. [24] Il précise que l’Organisme ne détient pas d’autres documents liés à ce dossier. Si les spécialistes de la Direction générale de la législation en avaient trouvé d’autres, il les aurait obtenus. Il ajoute que ceux décrits aux points 1 et 2 de la demande précitée au paragraphe 3 de la présente décision sont inexistants, à l’exception de ceux déposés sous pli confidentiel à l’audience.
05 00 12 Page : 6 LES ARGUMENTS RECUEILLIS À L’AUDIENCE TENUE LE 28 MAI 2007 DE L’ORGANISME [25] M e Lepage résume l’essentiel de la demande d’accès formulée par la demanderesse auprès de l’Organisme en indiquant qu’il s’agit de documents contenant des renseignements relatifs à l’article 17 (4) de la Loi sur le tabac. [26] Faisant référence aux documents déposés, sous pli confidentiel, à l’audience, il plaide que l’Organisme n’est pas le décideur, par exemple, du cadre législatif, de l’interprétation ou de la définition à donner aux articles de la Loi sur le ministère du Revenu 7 . Ce rôle incombe au ministre de cet organisme. [27] M e Lepage rappelle les motifs pour lesquels l’article 13 de la Loi sur l’accès est invoqué par l’Organisme. Il argue que, selon la preuve, la Commission ne peut exiger de celui-ci qu’il crée un document pour satisfaire la demande au sens de l’article 15 de la Loi sur l’accès. [28] Quant aux documents provenant du cabinet du ministre de l’Organisme, il plaide que la confidentialité de ces derniers est protégée par l’article 34 de la Loi sur l’accès, en ce qu’ils ont été préparés pour le ministre, en sa qualité de parlementaire, au sens de l’affaire MacDonell c. Québec (Assemblée nationale) 8 . [29] Il rappelle de plus que les documents visés par la présente demande sont similaires à ceux qui étaient recherchés dans la cause de Public History précitée et sur lesquels la Commission a statué, le 17 avril 2007. M. Carbonneau a fourni les mêmes explications eu égard à l’application des articles 13 et 34 de la Loi sur l’accès et pour les motifs qui y sont indiqués. Dans l’affaire Public History précitée, la Commission a, entre autres, décidé : [89] Quant aux 2 e , 3 e et 7 e points de la demande, il s’agit de notes émanant de M e François T. Tremblay, sous-ministre adjoint du Ministre de l’Organisme (2 e point), auxquels sont jointes des notes de celui-ci dans le cadre de sa présentation en commission parlementaire. Copie du Projet de loi 135 visant la Loi modifiant la Loi concernant l’impôt sur le tabac y est également jointe. Cette dernière porte l’en-tête de l’Assemblée nationale et provient de l’Éditeur officiel du Québec (3 e et 7 e points). 7 L.R.Q., C. M-31, la LMR. 8 [2002] R.C.S. par. 19 et 23.
05 00 12 Page : 7 [90] La preuve démontre que le Ministre de l’Organisme refuse de transmettre à la demanderesse les documents produits pour son compte au sens de l’article 34 de la Loi sur l’accès. À cet effet, dans une décision majoritaire, la Cour suprême du Canada (Macdonell c. Québec (Commission d’accès à l’information), [2002] 3 R.C.S. 661) indique, notamment : « […] La seule question que le Commissaire avait à se poser était de déterminer si le document visé avait été produit « pour le compte » d’un député. Même si la Direction de la gestion des ressources financières de l’Assemblée nationale s’assure aussi, à l’aide de documents faisant l’objet du litige, que le député ne dépasse pas sa masse salariale, il était raisonnable pour le Commissaire de conclure que ces documents sont produits pour le compte du député. Le document, remis directement au député, est produit pour son compte afin qu’il puisse tenir sa comptabilité et connaître sa marge de manœuvre financière. Il importe peu que ce document serve aussi aux services de l’Assemblée nationale ou même lui appartienne. Puisque les conditions de l’article 34 sont remplies, le document est inaccessible, sauf si le député y consent. » DE LA DEMANDERESSE [30] M e Sarrazin réfère à l’ensemble de la demande voulant que celle-ci vise entre autres « des documents se rapportant ou concernant l’article 17 (4) » de la Loi sur le tabac. À son avis, il ne suffit pas pour M. Carbonneau d’indiquer que le ministre de l’Organisme refuse de transmettre à la demanderesse les documents de son cabinet au sens de l’article 34 de la Loi sur l’accès. Les critères d’application qui y sont mentionnés doivent être établis par l’Organisme, conformément à l’affaire Ruest c. Québec (ministère des Transports) 9 . La Commission doit s’assurer que les documents pour lesquels l’article 34 de la Loi sur l’accès est invoqué n’ont pas fait l’objet de diffusion au sein de l’Organisme et qu’ils ne constituent pas des documents administratifs. 9 [1997] C.A.I. 203.
05 00 12 Page : 8 [31] M e Sarrazin prétend par ailleurs qu’elle ne peut se satisfaire de la vérification faite par M. Carbonneau qui, dans son témoignage, a indiqué qu’il s’est adressé uniquement à la Direction générale de la législation. Il a interprété restrictivement la demande, tout en précisant qu’il est probable que d’autres directions aient pu détenir d’autres documents relativement aux modifications législatives concernant l’article 17 (4) de la Loi sur le tabac, et que la demande d’accès ne leur a pas été soumise. Le témoin ignore donc s’il existe d’autres documents en lien avec la présente demande. ARTICLE 39 (1) DE LA LOI SUR LA PREUVE AU CANADA [32] M e Sarrazin prétend qu’une liste de documents détenus par l’Organisme pourrait être établie par l’Organisme, conformément à l’arrêt Babcock précité. Dans cette affaire, il est mentionné que « le Cabinet » possède un pouvoir discrétionnaire de ne pas divulguer un document. Il peut cependant demander au greffier d’émettre une attestation eu égard à la confidentialité, tel qu’indiqué par la Cour suprême du Canada dans cet arrêt où elle souligne notamment : La confidentialité des délibérations du Cabinet est essentielle au bon gouvernement. Le droit d’obtenir justice en s’adressant aux tribunaux revêt aussi une importance capitale dans notre société, à l’instar de la primauté du droit, de l’obligation du pouvoir exécutif de rendre compte de ses actes et du principe exigeant que les actes officiels relèvent d’un pouvoir clairement conféré par la loi et exercé de façon régulière. Pourtant, ces principes fondamentaux entrent parfois en conflit. Comment résoudre ce conflit? Voilà la question que notre Cour est appelée à trancher dans le présent pourvoi. [33] Afin de déterminer s’il existe d’autres documents en lien avec la demande et afin de permettre à l’Organisme de soumettre ses arguments quant à l’arrêt Babcock, la Commission accorde à celui-ci un délai de trente jours, selon les modalités établies à l’audience. Un délai équivalent est accordé à la demanderesse de manière à ce qu’elle puisse émettre ses commentaires, le cas échéant. [34] En ce qui a trait aux arguments soulevés par l’Organisme relatifs à l’article 34 de la Loi sur l’accès dans l’arrêt MacDonell, M e Sarrazin plaide que ce dernier est inapplicable dans la présente cause. Dans cette affaire, la Cour suprême du Canada signale que le législateur n’a pas fait de distinction entre les documents législatifs et ceux des députés, alors que la présente cause vise « des documents se rapportant à la fonction d’un élu à l’Assemblée nationale ». Il ne s’agit pas ici de documents financiers.
05 00 12 Page : 9 COMPLÉMENT DE PREUVE [35] Faisant suite aux engagements pris par l’Organisme à l’audience tenue le 28 mai 2007, M e Lepage transmet à la Commission, le 22 juin suivant, un affidavit portant la signature de M. Marcel Carbonneau. Celui-ci affirme notamment : […] 3. Plus précisément, j’ai effectué ces recherches auprès des directions et des personnes suivantes à qui j’ai transmis une copie de la demande d’accès à l’information de la demanderesse : - la Direction des enquêtes (DPE), monsieur Pierre J. Bouchard, directeur (monsieur Roger Frigon, directeur des enquêtes et des inspections – Québec); - la Direction générale des entreprises (DGE), madame Diane Mayrand, directrice de l’administration et du soutien à la gestion (madame Odette Courchesne, chef du service de l’administration à la Direction du soutien à la gestion); - la Direction générale des particuliers (DGP), monsieur Serge Cormier, chef du Service de formation et de soutien aux opérations; - la Direction générale du centre de perception fiscale et biens non réclamés (DGCPFBNR), monsieur Richard Demers, directeur des services administratifs et techniques (monsieur C. R., service de l’expertise, développement des compétences et gestion de l’information); 4. Le 5 juin 2007, j’ai reçu, par voie électronique, la réponse de la DGE (mesdames Diane Mayrand et Odette Courchesne) à l’effet que cette direction ne détient aucune copie de toute directive, note de service ou tout autre document émanant de tout fonctionnaire ou employé se rapportant à cette modification à l’article 17.4 de la Loi concernant l’impôt sur le tabac, L.R.Q. c. I-2, et que cette information est détenue par le secteur des taxes de la Direction générale de la législation et des enquêtes (DGLE); 5. Le 5 juin 2007, j’ai reçu, par voie électronique, la réponse de la DGP (monsieur Serge Cormier) à l’effet que cette demande ne concerne pas la DGP;
05 00 12 Page : 10 6. Le 15 juin 2007, j’ai reçu, par voie électronique, la réponse de la DPE (messieurs Pierre J. Bouchard et Roger Frigon) à l’effet que cette direction ne détient rien de la nature des documents recherchés; 7. Le 19 juin 2004, j’ai reçu une note provenant de la DGCPFBNR (monsieur C. R.) indiquant que cette direction ne détient aucun document qui pourrait répondre à cette demande; 8. Outre les documents qui ont été déposés confidentiellement lors de l’audition du 28 mai dernier et qui sont détenus par la Direction des lois sur les taxes et l’administration fiscale de la Direction générale de la législation et des enquêtes, l’organisme ne détient donc aucun autre document visé par la demande d’accès à l’information datée du 19 novembre 2004; […] RÉPLIQUE DE L’ORGANISME [36] Le 28 juin 2007, M e Lepage soumet à la Commission la réplique de l’Organisme relativement aux arguments soulevés par M e Sarrazin eu égard à l’application de l’arrêt Babcock dans la présente cause. [37] M e Lepage fait remarquer notamment que cet arrêt diffère de la présente cause, en ce qu’« […] il s’agissait justement d’une poursuite civile des avocats du ministère fédéral de la Justice à Vancouver contre la Couronne fédérale et c’est dans le cadre de cette poursuite qu’un affidavit en vertu de l’article 39 L.P.C. a été émis. » [38] M e Lepage ajoute que dans le cas présent, le traitement de la demande d’accès et la réponse de M. Carbonneau ne s’inscrivent pas dans le cadre d’un processus judiciaire ou quasi judiciaire. À cet effet, il fournit, entre autres, des comparaisons entre le processus conduisant à la contestation d’une cotisation en matière fiscale et celui prévu à la Loi sur l’accès. Il ajoute que dans l’affaire Ferraille et métal H.S. inc. c. Québec (Ministère du Revenu) 10 : […], madame la commissaire Diane Boissinot a analysé les mécanismes de cotisation et d’opposition, en matière fiscale, aux fins de déterminer si ces démarches s’inscrivent dans le cadre d’un processus judiciaire ou quasi judiciaire ou s’il s’agit plutôt de démarches strictement administratives. 10 [1998] C.A.I. 390.
05 00 12 Page : 11 [39] Il fait remarquer qu’une décision relative à l’opposition d’une cotisation est portée devant la Cour du Québec, selon les dispositions de la LMR. Le processus judiciaire commence à ce stade-ci et le jugement final est appelable devant la Cour d’appel du Québec. Une décision de la Commission concernant une question de droit ou de compétence est portée devant cette même cour en vertu des dispositions de la Loi sur l’accès. [40] M e Lepage indique par ailleurs que dans l’arrêt Babcock, la Cour suprême précise notamment qu’en vertu de l’article 39 de la LPC, le tribunal ne peut ni examiner ni tenir d’audience relative aux renseignements confidentiels qu’un citoyen souhaite obtenir. Donc, l’attestation du greffier fournit une description suffisante des renseignements confidentiels qui sont refusés à ce citoyen. [41] Il argue qu’à la suite d’une demande d’accès aux documents, la décision de l’Organisme ne relève pas d’un pouvoir discrétionnaire, elle doit être motivée 11 . De plus, la Loi sur l’accès prévoit un appel d’une décision de l’Organisme devant la Commission d’accès qui tient une audience relativement aux documents en litige. À cet égard, le procureur ajoute : […] elle [la Commission] entend, à l’exclusion de tout autre tribunal, les demandes de révision faites en vertu de la Loi et elle a, à cet égard, tous les pouvoirs nécessaires à l’exercice de sa compétence. Comme il a déjà été mentionné, les documents en litige ont été, en l’instance, déposés confidentiellement en preuve de façon à ce que la Commission puisse les examiner de façon complète et rendre une décision à leur sujet. En conséquence, je vous soumets que l’énoncé de la Cour suprême relatif à une liste et une description « suffisante » des documents en litige ne s’applique pas, non plus, dans le cadre d’une demande de révision en vertu de la L.A.I. [42] De plus dans sa plaidoirie écrite, M e Lepage indique néanmoins que si les principes établis par la Cour suprême dans l’arrêt Babcock étaient applicables dans la présente cause, ils ont été respectés lors du témoignage de M. Carbonneau. Également, lorsque la Commission rend sa décision, elle fournit souvent une description « suffisante des documents en litige », conformément à l’affaire Public History précitée. 11 e Droit administratif, 5 éd, Cowansville, Les Éditions Yvon Blais inc., [2004], pages 203 et 204.
05 00 12 Page : 12 COMMENTAIRES DE M E MARIE-CLAUDE SARAZZIN [43] Par ailleurs, faisant suite à l’affidavit de M. Carbonneau transmis au mois de juin 2007 à M e Sarrazin, celle-ci informe la Commission le 13 août 2007 qu’elle prend acte de son contenu à l’effet qu’aucun autre document visé par la demande n’existe. Elle ajoute qu’elle n’entend pas répondre aux arguments de M e Lepage concernant l’arrêt Babcock, puisque leur demande devient sans objet. DÉCISION [44] La demanderesse souhaite obtenir auprès de l’Organisme les renseignements contenus dans les documents décrits au paragraphe 3 de la présente décision, selon les termes de l’article 9 de la Loi sur l’accès : 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. ARTICLE 13 DE LA LOI SUR L’ACCÈS [45] Lors de l’interrogatoire initial du responsable de l’accès de l’Organisme, ce dernier a identifié les documents en lien avec la présente demande. Ceux-ci ont fait l’objet de diffusion auprès de l’Éditeur officiel du Québec et sont donc accessibles à la demanderesse dans la mesure où elle désire se les procurer. L’article 13 de la Loi sur l’accès s’applique à l’égard de ces documents. 13. Le droit d'accès à un document produit par un organisme public ou pour son compte et ayant fait l'objet d'une publication ou d'une diffusion s'exerce par consultation sur place pendant les heures habituelles de travail ou à distance ou par l'obtention d'informations suffisantes pour permettre au requérant de le consulter ou de se le procurer là où il est disponible. De même, le droit d'accès à un document produit par un organisme public ou pour son compte et devant faire l'objet d'une publication ou d'une diffusion dans un délai n'excédant pas six mois de la demande d'accès, s'exerce par l'un ou plusieurs des moyens suivants: 1° la consultation sur place pendant les heures habituelles de travail ou à distance;
05 00 12 Page : 13 2° l'obtention d'informations suffisantes pour permettre au requérant de le consulter là où il est disponible ou de se le procurer lors de sa publication ou de sa diffusion; 3° le prêt du document, à moins que cela ne compromette sa publication ou sa diffusion. Le présent article ne restreint pas le droit d'accès à un document diffusé conformément à l'article 16.1. ARTICLE 34 DE LA LOI SUR L’ACCÈS [46] Les documents relatifs à l’article 34 de la Loi sur l’accès sont composés d’une note émanant de M e André Brochu, sous-ministre adjoint de l’Organisme, auxquels sont jointes des notes concernant le Projet de loi 135, dans le cadre de sa présentation en commission parlementaire. On y trouve également des « notes techniques détaillées », toujours en lien avec le Projet de loi 135 eu égard à la Loi sur le tabac. Il y est indiqué que ces notes ont été préparées par la Direction générale de la législation. De plus, M e François T. Tremblay, sous-ministre adjoint – DGLE, précise que le ministre de l’Organisme ne consent pas à la communication des documents ministériels, ceux-ci étant protégés par l’article 34 de la Loi sur l’accès. [47] Il a été établi que le ministre de l’Organisme ne juge pas opportun de communiquer les notes en question. Ces dernières ont été préparées pour son compte, en sa qualité de parlementaire. L’article 34 de la Loi sur l’accès trouve donc application. [48] Par ailleurs, je prends note des arguments de la demanderesse qui précise que l’arrêt MacDonell ne s’applique pas dans la présente cause, puisque le demandeur voulait obtenir notamment des informations concernant les ressources financières d’un parlementaire. [49] Néanmoins, il faut souligner que, dans cette décision majoritaire visant l’application de l’article 34 de la Loi sur l’accès, la Cour suprême du Canada 12 détermine les conditions d’application de l’article 34 de la Loi sur l’accès. [50] L’Organisme était fondé à refuser de transmettre les documents en litige émanant du cabinet du ministre de l’Organisme et ceux émanant de l’Éditeur officiel du Québec, conformément aux articles 34 et 13 de la Loi sur l’accès : 34. Un document du bureau d'un membre de l'Assemblée nationale ou un document produit pour le compte de ce membre par les services de l'Assemblée 12 Macdonell c. Québec (Commission d’accès à l’information), [2002] 3 R.C.S. 661.
05 00 12 Page : 14 n'est pas accessible à moins que le membre ne le juge opportun. Il en est de même d'un document du cabinet du président de l'Assemblée, d'un membre de celle-ci visé dans le premier alinéa de l'article 124.1 de la Loi sur l'Assemblée nationale (chapitre A-23.1) ou d'un ministre visé dans l'article 11.5 de la Loi sur l'exécutif (chapitre E-18), ainsi que d'un document du cabinet ou du bureau d'un membre d'un organisme municipal ou scolaire. [51] Par ailleurs, à la suite du contre-interrogatoire de M. Carbonneau, la Commission a jugé nécessaire que celui-ci effectue une recherche additionnelle concernant les autres directions au sein de l’Organisme. Cette recherche additionnelle visait également à déterminer si ces directions détiennent des documents en lien avec la demande. La réponse a été négative, tel qu’en fait foi l’essentiel du contenu de l’affidavit de M. Carbonneau rapporté au paragraphe 35 de la présente décision. ARTICLES 1 ET 15 DE LA LOI SUR L’ACCÈS [52] La preuve démontre que l’Organisme ne détient pas d’autres documents selon les termes de l’article 1 de la Loi sur l’accès. De plus, la Commission ne peut exiger de l’Organisme qu’il crée un document pour satisfaire la demande, conformément, entre autres, à l’affaire Regroupement des citoyens de Lachine c. Ville de Lachine 13 . La Commission considère que l’article 15 s’applique ici : 1. La présente loi s'applique aux documents détenus par un organisme public dans l'exercice de ses fonctions, que leur conservation soit assurée par l'organisme public ou par un tiers. Elle s'applique quelle que soit la forme de ces documents: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. 15. Le droit d'accès ne porte que sur les documents dont la communication ne requiert ni calcul, ni comparaison de renseignements. [53] Quant à l’arrêt Babcock précité, le contexte visant la création d’une liste de documents confidentiels et les motifs invoqués par le Procureur général du Canada ayant produit une attestation du greffier du Conseil privé et procédé au dépôt de cette liste dans le cadre d’une procédure judiciaire sont inapplicables dans la présente cause. 13 (1984-86) I C.A.I. 51.
05 00 12 Page : 15 [54] De plus, le traitement d’une demande d’accès aux documents au sens de la Loi sur l’accès par un responsable de l’accès et la réponse de celui-ci refusant de communiquer à un demandeur un renseignement contenu dans un document n’est pas un processus judiciaire ou quasi judiciaire. Toutefois, ce refus d’accès doit être motivé selon les termes de l’article 50 de la Loi sur l’accès : 50. Le responsable doit motiver tout refus de donner communication d'un renseignement et indiquer la disposition de la loi sur laquelle ce refus s'appuie. [55] Le processus quasi judiciaire est enclenché par un demandeur, lorsque celui-ci soumet à la Commission sa demande de révision. À cet effet, les articles 51 et 135 de la Loi sur l’accès stipulent : 51. Lorsque la demande est écrite, le responsable rend sa décision par écrit et en transmet copie au requérant et, le cas échéant, au tiers qui a présenté des observations conformément à l'article 49. La décision doit être accompagnée du texte de la disposition sur laquelle le refus s'appuie, le cas échéant, et d'un avis les informant du recours en révision prévu par la section III du chapitre IV et indiquant notamment le délai pendant lequel il peut être exercé. 135. Une personne dont la demande écrite a été refusée en tout ou en partie par le responsable de l'accès aux documents ou de la protection des renseignements personnels peut demander à la Commission de réviser cette décision. Une personne qui a fait une demande en vertu de la présente loi peut demander à la Commission de réviser toute décision du responsable sur le délai de traitement de la demande, sur le mode d'accès à un document ou à un renseignement, sur l'application de l'article 9 ou sur les frais exigibles. Ces demandes doivent être faites dans les trente jours qui suivent la date de la décision ou de l'expiration du délai accordé par la présente loi au responsable pour répondre à une demande. La Commission peut toutefois, pour un motif raisonnable, relever le requérant du défaut de respecter ce délai. [56] Il est opportun par ailleurs de souligner qu’il n’existe aucune disposition législative à la Loi sur l’accès visant l’obligation pour le responsable d’accès d’un organisme public de créer une liste des documents confidentiels qu’il refuse de communiquer à un demandeur, tel le cas sous étude.
05 00 12 Page : 16 [57] Dans le cas présent, une preuve a été obtenue concernant les documents confidentiels et ceux-ci ont fait l’objet d’examen par la Commission ce qui n’a pas été le cas dans l’arrêt Babcock. [58] La Commission note que M e Sarrazin, procureure de la demanderesse, indique qu’elle ne met pas en doute le témoignage de M. Carbonneau. Son questionnement porte particulièrement sur le fait que celui-ci n’avait pas effectué les recherches nécessaires auprès d’autres directions de l’Organisme relativement à la demande. [59] L’examen de la preuve et les résultats de la recherche additionnelle effectuée par M. Carbonneau après l’audience démontrent qu’il n’existe pas de documents autres que ceux déposés sous pli confidentiel à l’audience. La preuve démontre également que la décision de ne pas les transmettre à la demanderesse était fondée. [60] Par ailleurs, aucune preuve n’a été soumise en regard de la documentation émanant de l’Agence du revenu du Canada. [61] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : CONSTATE que l’Organisme a remis à la demanderesse à l’audience un historique des modifications apportées à l’article 17(4) de la Loi sur le tabac; CONSTATE également que le responsable adjoint de l’Organisme était fondé à prendre la décision qu’il a prise concernant la demande; REJETTE la demande de révision à l’égard de l’Organisme; FERME le dossier. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire Borden Ladner Gervais (M e Marie-Claude Sarrazin) Procureurs de la demanderesse Veillette, Larivière (M e Jean Lepage) Procureurs de l’Organisme
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