Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 05 17 48 Date : Le 10 avril 2007 Commissaire : M e Jean Chartier CENTRE DE SANTÉ ET DE SERVICES SOCIAUX LES ESKERS DE L’ABITIBI Requérante c. X Intimé DÉCISION L’OBJET DÉCISION SUR UNE REQUÊTE en vertu de l’article 126 1 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 2 . [1] Le 29 septembre 2005, la requérante transmet à la Commission d’accès à l’information (la Commission) une demande en vertu de l’article 126 de la Loi sur l’accès afin d’être autorisée à ne pas tenir compte des demandes de consultation et de reproduction de dossiers médicaux formulées par l’intimé. 1 Tel qu’il se lisait à la date de la demande le 29 septembre 2005, (article 137.1 depuis juin 2006). 2 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée « Loi sur l’accès ».
05 17 48 Page : 2 [2] Un affidavit de M me Nicole Godin, archiviste au service du requérant, était joint à cette requête qui a été transmise à l’intimé. L’AUDIENCE [3] Une audience a été fixée à Amos, le 25 septembre 2006, mais une demande de remise de la requérante a repoussé l’audition de cette affaire au 22 mars 2007. Malgré l’envoi d’un avis de convocation aux deux parties, l’intimé n’était pas présent à l’audience. Lors de l’audience du 25 septembre 2006, il avait avisé la Commission qu’il n’avait pas l’intention d’être présent. A) LA PREUVE i) De l’organisme [4] Maître Chantal Boyer représente l’organisme et demande au soussigné d’accepter le dépôt d’un affidavit de M me Nicole Godin pour faire la preuve des allégations de sa requête. [5] Madame Godin n’a pu se présenter à l’audience ayant pris sa retraite. La Commission est habilitée à accepter cet affidavit pour valoir comme preuve et ce en vertu de l’article 22 des Règles de preuve et de procédure de la Commission d’accès à l’information 3 qui stipule : 22. La Commission peut accepter tout mode de preuve qu’elle croit le mieux servir les fins de la justice. Elle peut requérir la production de tout document qu’elle estime nécessaire. [6] Cette déclaration assermentée de M me Godin, dûment acceptée par la Commission, comporte le témoignage qui suit : 1. Je suis la responsable des archives au Centre de santé et de services sociaux Les Eskers de l’Abitibi; 2. En date du 26 septembre 2005, à 14 heures 23, monsieur […] a fait une demande verbale afin de consulter l’ensemble de son dossier médical; 3. Le dossier médical de monsieur […] est constitué d’un dossier médical général et d’un dossier médical psychiatrique; 3 L.R.Q., c. A-2.1, r. 2.
05 17 48 Page : 3 4. Le 30 avril 2004, monsieur […] s’est présenté à la réception des archives et a demandé à consulter son dossier médical et son dossier psychiatrique; 5. À ce moment, l’accès à son dossier lui est refusé en partie, le médecin suggérant une rencontre avec un thérapeute pour la consultation du dossier; 6. Le 28 mai 2004, un mandat est donné à un thérapeute afin de rencontrer monsieur […] pour la consultation de son dossier; 7. Le 17 juin, une rencontre est tenue et monsieur […] effectue la consultation de son dossier; 8. Le 27 juin, ainsi que le 5 août 2004, monsieur […] a accès à ses dossiers médicaux; 9. Le 28 août 2004, monsieur […] redemande à consulter son dossier médical et psychiatrique. Bien que ce dernier avait déjà consulté ses dossiers, un autre rendez-vous lui est fixé. 10. Le 11 août 2004, monsieur […] se présente à son rendezvous et consulte ses dossiers médicaux; 11. Le 13 octobre 2004, monsieur […] redemande à nouveau à consulter son dossier médical et son dossier psychiatrique et un rendez-vous lui est fixé; 12. Le 20 octobre 2004, monsieur […] consulte son dossier médical et son dossier psychiatrique; 13. Le 18 janvier 2005, monsieur […] reconsulte son dossier médical et psychiatrique et une intervention policière est nécessaire afin que monsieur […] quitte le local dans lequel il consulte ses dossiers; 14. Le 27 janvier 2005, une photocopie du dossier médical et du dossier psychiatrique de monsieur […] est effectuée; 15. Le 28 janvier 2005, monsieur […] passe chercher copie des documents; 16. La reproduction des dossiers médicaux qui a été effectuée l’ont été gracieusement; 17. Le 25 mai 2005, monsieur […], en présence de monsieur […] du RAIDDAT consulte pendant une heure ses dossiers médicaux; 18. Le 26 août 2005, Me Michel Laporte, commissaire, rendait une décision dans laquelle il rejetait une demande de révision de monsieur […] concernant la confection d’un nouveau dossier ou une demande d’accès à son dossier; [sic].
05 17 48 Page : 4 ii) De l’intimé [7] Tel que mentionné précédemment, l’intimé n’était pas présent à l’audience. L’article 16 des Règles de preuve et de procédure de la Commission d’accès à l’information 4 stipule : 16. Si à l'ouverture de l'audition, l'une des parties fait défaut de comparaître, la Commission peut disposer de la demande de révision de la façon qu'elle croit la mieux appropriée. [8] Considérant les circonstances, la Commission a accepté que la preuve de l’organisme soit administrée par défaut, puisque l’intimé avait déjà reçu l’avis de convocation de la Commission, pour l’audience du 22 mars 2007, ainsi qu’une copie de la requête et de l’affidavit souscrit au soutien de celle-ci. L’intimé n’a aucunement réagi à la réception de ces documents. B) LES REPRÉSENTATIONS i) De la requérante [9] La procureure de la requérante rappelle que la déclaration assermentée démontre que l’intimé a consulté son dossier médical et de santé mentale à de nombreuses reprises, et ce, dans les locaux et avec l’assistance des employés de l’organisme. [10] Elle indique de plus que l’intimé a obtenu une copie de son dossier le 28 janvier 2005 et une autre copie (du même dossier) lui a été remise lors d’une audience tenue par cette Commission le 18 août 2005, à la suite de laquelle une décision a été rendue par le commissaire Michel Laporte dans le dossier CAI 04 15 38. [11] En fait, la preuve a démontré que l’intimé a demandé et/ou procédé à la consultation de son dossier à 11 reprises entre le 30 avril 2004 et le 18 août 2005. Le 26 septembre 2005, il faisait une autre demande afin de consulter son dossier. La demande de la requérante qui fait l’objet de la présente décision a été transmise à la Commission le 29 septembre 2005. 4 L.R.Q., c. A-2.1, r. 2.
05 17 48 Page : 5 [12] Respectueuse du droit de l’intimé de connaître le contenu d’un dossier médical le concernant, la procureure de la requérante ne demande pas que ce droit lui soit retiré pour l’avenir, elle requiert plutôt que la Commission permette à l’organisme de ne pas donner suite à toute autre demande de l’intimé en vue d’obtenir la reproduction papier de son dossier qu’il a déjà obtenue à quelques reprises. [13] De plus, la requérante ne s’objecte pas à remettre à l’intimé, sur demande, une copie de tout document déposé à son dossier depuis la décision du commissaire Laporte dans le dossier CAI 04 15 38. Elle demande toutefois d’être autorisée à ne remettre à l’intimé que la documentation déposée à son dossier après le 26 août 2005. [14] La procureure ajoute que l’intimé a obtenu le contenu de son dossier sans frais et sans qu’aucune restriction ne soit appliquée par la requérante en vertu de la Loi sur l’accès ou en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux 5 (LSSSS). LA DÉCISION [15] La preuve a démontré que l’intimé a consulté et/ou demandé son dossier à 11 reprises entre le 30 avril 2004 et le 18 août 2005. Il a fait une demande additionnelle de consultation le 26 septembre 2005. [16] La requérante a toujours collaboré et facilité le droit d’accès de l’intimé en l’assistant lors de quelques-unes de ses consultations et lui a remis copie du dossier complet à deux reprises. La dernière copie lui a été remise en août 2005. [17] Les demandes formulées par l’intimé sont-elles « manifestement abusives » par leur nombre, leur caractère répétitif ou leur caractère systématique ? L’article 126 de la Loi sur l’accès stipule : 126. La Commission peut, sur demande, autoriser un organisme public à ne pas tenir compte de demandes manifestement abusives par leur nombre, leur caractère répétitif ou leur caractère systématique. Il en est de même lorsque, de l'avis de la Commission, ces demandes ne sont pas conformes à l'objet des dispositions de la présente loi sur la protection des renseignements personnels. 5 L.R.Q., c. S-4.2.
05 17 48 Page : 6 Un membre de la Commission peut, au nom de celle-ci, exercer seul les pouvoirs que le présent article confère à la Commission. [18] L’intimé a le droit d’obtenir copie de renseignements le concernant et a également le droit de consulter son propre dossier. Les articles 83 et 84 de la Loi sur l’accès prévoient : 83. Toute personne a le droit d'être informée de l'existence, dans un fichier de renseignements personnels, d'un renseignement nominatif la concernant. Elle a le droit de recevoir communication de tout renseignement nominatif la concernant. Toutefois, un mineur de moins de quatorze ans n'a pas le droit d'être informé de l'existence ni de recevoir communication d'un renseignement nominatif de nature médicale ou sociale le concernant, contenu dans le dossier constitué par l'établissement de santé ou de services sociaux visé au deuxième alinéa de l'article 7. 84. L'organisme public donne communication d'un renseignement nominatif à la personne qui a le droit de le recevoir en lui permettant, de prendre connaissance du renseignement sur place pendant les heures habituelles de travail ou à distance et d'en obtenir une copie. A la demande du requérant, un renseignement nominatif informatisé doit être communiqué sous la forme d'une transcription écrite et intelligible. [19] Dans le cas d’un dossier médical, le droit de l’intimé est également consacré aux articles 25 et 26 de la LSSSS qui stipulent : 25. L'établissement qui fournit à l'usager un renseignement de nature médicale ou sociale le concernant et contenu dans son dossier doit, à la demande de cet usager, lui procurer l'assistance d'un professionnel qualifié pour l'aider à comprendre ce renseignement. Il en est de même pour le titulaire de l'autorité parentale, le tuteur, le curateur, le mandataire ou toute personne qui peut consentir aux soins d'un usager.
05 17 48 Page : 7 26. L'établissement doit donner à l'usager accès à son dossier dans les plus brefs délais. Il en est de même pour les personnes visées aux articles 21 à 23. [20] Il faut toutefois reconnaître que le demandeur a usé de ce droit de façon répétée. Ces consultations ont été rapprochées dans le temps et rien ne permet de croire que l’intimé usait alors de son droit afin de prendre connaissance de nouveaux éléments à son dossier. Pour le soussigné, les demandes d’accès et de consultation de l’intimé apparaissent abusives, compte tenu de leur nombre et de leur caractère répétitif. Précisons que le demandeur requiert à chaque fois le même dossier et les mêmes documents. [21] Il ne saurait toutefois être question de limiter pour l’avenir le droit de l’intimé à consulter son dossier médical et de santé mentale détenu par la requérante. Ce faisant, une telle ordonnance aurait pour effet de nier à l’intimé tout droit à la consultation de son dossier et le priverait du recours prévu à l’article 27 de la LSSSS. Cet article stipule : 27. L'usager à qui l'établissement refuse l'accès à son dossier ou à un renseignement qui y est contenu peut, par requête, s'adresser à un juge de la Cour supérieure, de la Cour du Québec ou à la Commission d'accès à l'information pour que soit révisée la décision de cet établissement. Il peut également, dans les 60 jours qui suivent la date à laquelle elle lui a été notifiée, la contester devant le Tribunal administratif du Québec. Il en est de même pour les personnes visées aux articles 21 à 23.
05 17 48 Page : 8 [22] Malgré cela, le législateur a prévu à l’article 126 de la Loi sur l’accès qu’un organisme peut être autorisé par la Commission à ne pas tenir compte de demandes abusives. Dans le cas sous étude, il apparaît justifié et nécessaire de permettre à la requérante de ne pas donner suite aux demandes de l’intimé. Il n’est pas possible pour le soussigné de restreindre les droits du demandeur pour l’avenir puisque la Loi sur l’accès n’accorde aucun pouvoir de cette nature à la Commission. [23] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [24] ACCUEILLE partiellement la demande de la requérante; [25] DÉCLARE que les demandes d’accès formulées par l’intimé ont un caractère abusif et répétitif; [26] AUTORISE la requérante à ne pas tenir compte de la demande de l’intimé en date du 26 septembre 2005; [27] REJETTE la demande de la requérante pour le reste. JEAN CHARTIER Commissaire M e Chantal Boyer Procureure de la requérante
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