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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 06 12 73 Date : Le 15 janvier 2007 Commissaire : M e Jean Chartier X Demandeur c. CONSEIL DU TRÉSOR Organisme DÉCISION LOBJET DEMANDE DE RÉVISION en vertu de larticle 135 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 . [1] Le ou vers le 11 juillet 2006, le demandeur transmet une demande au secrétariat de lorganisme réclamant des informations et des données diverses relatives au dossier de « léquité salariale » dont la responsabilité incombe à lorganisme. 1 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée « Loi sur laccès ».
06 12 73 Page : 2 [2] Plus particulièrement, le demandeur sexprime ainsi : « Essentiellement jaimerais connaître : - pour chacun des trois secteurs, Fonction publique, Santé et services sociaux, Éducation - le nom des catégories à prédominance féminine et à prédominance masculine en 1990, 1998, 2001 et 2006 - leffectif total et le nombre de femmes et dhommes inclus dans ces catégories (sauf la catégorie mixte) - le pointage de chacune des catégories - le rangement de chacune delle dans léchelle globale de traitement - le nombre total de ces catégories et de la catégorie mixte - le relèvement salarial dont les catégories féminines ont bénéficié en $ et en % Je crois que les années mentionnées sont pertinentes et coïncident avec des changements importants mais si le secrétariat juge quil y en a de plus pertinentes je les accepterai volontiers; cela dit il, plusieurs années sont requises pour observer une évolution. Vous trouverez, ci-joint, des grilles qui pourraient être utilisées pour agréger les informations mais toute autre présentation contenant les mêmes informations sera bien reçue. » [sic]. [3] Le 26 juillet 2006, le responsable de laccès aux documents de lorganisme transmet une réponse dans laquelle il informe le demandeur de linexistence de certaines données réclamées relatives aux catégories demplois « à prédominance féminine » avant 1996. Il informe également le demandeur du refus de lorganisme de fournir les renseignements visés par la procédure daffichage prévue à la Loi sur léquité salariale 2 , puisque le processus nétait pas terminé à la date de la demande daccès. [4] De plus, le responsable de laccès de lorganisme transmet au demandeur les tableaux « A », « B » et « C » contenant les données réclamées pour des périodes différentes avec les explications relatives à chacun des tableaux. Lorganisme réfère finalement le demandeur à son site Internet pour y obtenir laccès aux données de lannée 2006 et lui réclame le paiement de la documentation transmise. [5] Insatisfait de la réponse obtenue, le demandeur transmet une demande de révision à la Commission daccès à linformation, « la Commission », le 1 er août 2006. 2 L.R.Q., c. E-12.001.
06 12 73 Page : 3 [6] Dans cette demande de révision, le demandeur reconnaît la réception des documents de lorganisme mais indique quils lui sont inutiles dans la forme sous laquelle ils lui ont été présentés. En conséquence, il réitère sa demande et il refuse dacquitter les coûts de la documentation transmise. [7] Une audience est tenue à Québec, le 3 novembre 2006. LA PREUVE [8] Madame Céline Charest, conseillère en accès à linformation auprès de lorganisme, témoigne avoir traité la demande du demandeur, de concert avec le responsable de laccès. [9] Selon cette dernière, linformation transmise au demandeur lui permet dobtenir les réponses à ses interrogations dans la mesure il effectue les recoupements nécessaires entre les diverses informations consignées sur les tableaux « A », « B » et « C » qui lui ont été transmis. Selon le témoin, ces tableaux nont été ni altérés, ni masqués, ni modifiés. Ils ont été transmis sous la même forme que celle détenue par lorganisme. [10] Elle indique ne pas avoir donné suite à la suggestion du demandeur qui transmettait, à lappui de sa demande, des grilles qui pouvaient être utilisées par lorganisme afin dy consigner les informations. Selon le témoin, lorganisme navait pas à faire un tel exercice. [11] Elle ajoute que certains documents ont été retenus sur la base de larticle 39 de la Loi sur laccès parce quils comportaient des renseignements relatifs à un processus décisionnel en cours. Enfin, elle réitère, tel que précisé dans la lettre du responsable de laccès, que les renseignements demandés pour lannée 2006 peuvent être obtenus sur le site Internet de lorganisme. [12] La procureure de lorganisme fait également entendre M me Dominique Gauthier, responsable des politiques de rémunération et des conditions de travail auprès de lorganisme. Cette dernière collabore aux travaux relatifs au dossier de léquité salariale depuis près de vingt ans. [13] Elle a exposé au soussigné le cheminement complexe qui a mené à lélaboration des tableaux tout en expliquant la réponse transmise au demandeur.
06 12 73 Page : 4 [14] Le témoin précise dabord que, bien avant ladoption de la Loi sur léquité salariale en 1996, le gouvernement menait des travaux et des études sur ce sujet. Ainsi, de 1990 à 1995, le vocabulaire de lépoque utilisait lexpression « relativité salariale » et lorganisme ne dispose pas de tableaux statistiques réclamés pour ces années. [15] Elle dépose à laudience le tableau « A » intitulé « Correctifs apportés au maximum des échelles de traitement » qui couvre la période de 1990 à 2001. Ce tableau se limite toutefois à lanalyse des effectifs dénombrés en 1995 et 1996. Madame Gauthier est consciente que ce tableau ne répond pas nécessairement au désir du demandeur quant aux informations quil recherche et quant à la disposition et à la compréhension de ces informations. Elle souligne toutefois que pour la période en cause, lorganisme ne détient pas dautres informations. [16] Elle dépose également le tableau « B » 2001 à 2005, intitulé « Résultats du programme gouvernemental de relativité salariale ». Ce document représente le résultat des travaux effectués par lorganisme pour la période mentionnée. Les données sont représentées de façon différente par rapport au tableau « A ». Ce tableau ne comprend pas nécessairement les mêmes catégories dinformation mais le témoin indique de nouveau quil sagit du document élaboré par lorganisme pour donner suite à ses travaux. [17] Elle dépose enfin le tableau « C » 2001 à 2005, intitulé « Programme gouvernemental de relativité salariale ajustement salarial et modalités de versement suite au calcul des écarts salariaux au 21 novembre 2001 ». [18] Ce tableau vient compléter le tableau « B » en ce quil donne comme information additionnelle « lajustement salarial » conféré à chaque classe demploi énumérée pour les années 2001 à 2005. [19] Par la suite, la procureure de lorganisme a requis de la Commission quelle entende, à huis clos, une partie de la preuve de lorganisme dont elle considère que le contenu ne devrait pas être communiqué au demandeur. [20] Conformément à larticle 20 des Règles de preuve et de procédure de la Commission daccès à linformation 3 , le soussigné a accepté cette demande. 20. La Commission peut prendre connaissance, en l'absence du requérant et à huis clos, d'un document que l'organisme public ou le tiers prétend devoir être soustrait à 3 L.R.Q., c. A-2.1, r. 2.
06 12 73 Page : 5 l'accès en vertu d'une restriction prévue à la section II de la Loi. [21] Le témoignage de M me Gauthier sest poursuivi à huis clos. Sans révéler le contenu de ce témoignage ou des documents quelle a déposés, il importe tout de même que la Commission fasse état des remarques suivantes. [22] Le témoin explique dabord que sur les tableaux « A » et « B » précités (remis au demandeur) on retrouve une colonne portant la mention « pointage » pour chacune des catégories demploi et pour les périodes de 1990 à 2001 et de 2001 à 2005. Selon la compréhension de la Commission, ce « pointage » est une information fondamentale dans le processus de correction des écarts salariaux dus à la discrimination fondée sur le sexe à légard des personnes qui occupent des catégories demplois à prédominance féminine. Cette correction des écarts salariaux devrait être laboutissement des travaux entrepris par lorganisme en vertu de la Loi sur léquité salariale, tel que cela est prévu à larticle 1 de cette loi qui stipule : 1. La présente loi a pour objet de corriger les écarts salariaux dus à la discrimination systémique fondée sur le sexe à légard des personnes qui occupent des emplois dans des catégories demplois à prédominance féminine. Ces écarts sapprécient au sein dune même entreprise, sauf sil ny existe aucune catégorie demplois à prédominance masculine. [23] Cette vaste opération a été menée par lorganisme pour toutes les catégories demploi dont la rémunération est versée par le gouvernement du Québec, conformément à larticle 3 de la Loi sur léquité salariale : 3. La présente loi lie le gouvernement, ses ministères, ses organismes et les mandataires de lÉtat. Pour lapplication de la présente loi : 1 o le Conseil du trésor est réputé lemployeur dans lentreprise de la fonction publique et celle du secteur parapublic; 2 o lentreprise de la fonction publique est constituée des ministères du gouvernement ainsi que des organismes et des personnes dont le personnel est nommé suivant la Loi sur la fonction publique (chapitre F-3.1.1.1), à lexception de lAssemblée nationale;
06 12 73 Page : 6 3 o lentreprise du secteur parapublic est constituée des collèges, des commissions scolaires et des établissements visés par la Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic (chapitre R-8.2). [24] On aura noté que le demandeur réclame expressément à lorganisme « le pointage de chacune des catégories à prédominance féminine et à prédominance masculine en 1990, 1998, 2001 et 2006 ». (Voir le paragraphe 2 de la présente décision). [25] Le témoin explique que les pointages sont connus et ont été divulgués pour les années 1990 et 2001. En ce qui concerne 1998, lexercice de « pointage » na pas eu lieu et en conséquence cette information nexiste pas. [26] Enfin, en ce qui concerne lexercice de détermination du « pointage » pour 2006, la divulgation de cette information est retenue par lorganisme qui prétend que ces informations sont contenues dans une analyse produite à loccasion dune recommandation faite dans le cadre dun processus décisionnel. Si cette information devait être considérée comme telle, larticle 39 de la Loi sur laccès prévoit que lorganisme public peut refuser de la communiquer pour une période de cinq (5) ans. [27] Elle explique que le « pointage » des catégories demplois pour 2006 nétait pas terminé à la date de la demande daccès puisque la Loi sur léquité salariale prévoit laffichage des résultats de lévaluation des catégories demplois et des ajustements salariaux pour chacune de ces catégories. Après le premier affichage, il est permis à tout salarié de demander des renseignements additionnels ou de présenter ses observations auxquelles lemployeur pourra éventuellement répondre en apportant les modifications demandées ou en refusant de telles modifications. [28] Le demandeur étant de nouveau présent à laudience, il a été précisé que suite à laffichage effectué en 2006, lorganisme a reçu environ 5 000 lettres contenant des représentations des divers salariés touchés. LA DÉCISION [29] Le demandeur veut connaître pour les années 1990, 1998, 2001 et 2006 leffectif total et le nombre dhommes et de femmes, le pointage, le rang, le nombre total des catégories demploi et le relèvement salarial dont elles ont bénéficié. Non satisfait des données quil a déjà obtenues de lorganisme, il
06 12 73 Page : 7 soumet à lappui de sa demande des tableaux non remplis quil a agencés en fonction de ses propres besoins et quil demande à lorganisme de remplir pour donner suite à sa demande. [30] Lorganisme, qui a transmis au demandeur les tableaux « A », « B » et « C » pour chacune des périodes pertinentes dévaluation, rétorque que le demandeur trouvera toute linformation réclamée dans les tableaux remis mais sous une forme et une présentation propre à lorganisme. [31] Dans une réplique que le demandeur a fait parvenir à la Commission à la suite de laudience, ce dernier indique quil a fait sa demande daccès dans le but de mettre à jour un livre quil a publié en 2002. Il y explique les motifs pour lesquels il veut obtenir les informations demandées dans lordre il les a demandées et il explique les difficultés quil éprouve à travailler avec les tableaux qui lui ont été transmis par lorganisme. Il élabore longuement sur ses difficultés et sur la façon dont lorganisme a produit les différentes données qui lui ont été transmises. Le demandeur écrit : « Dans ces circonstances, je crois que jétais justifié dêtre insatisfait de ce tableau. Je suis daccord avec la règle qui veut que ladministration nait pas à produire tous les documents et analyses que souhaiteraient avoir les citoyens. […], je considère que les tableaux que je suggérais seraient dune grande utilité pour le Trésor lui-même. […]. » [32] Après avoir repris dans ses notes un très grand nombre dinterrogations pour lesquelles il na pu obtenir de réponse, le demandeur conclut : « Raison de plus, il me semble, pour que le CT [conseil du trésor] en facilite la compréhension en ajoutant des explications à ses tableaux et mieux encore en traitant (par informatique) les données de manière à faciliter les recoupements (au lieu de compliquer) et de manière à pouvoir dégager des séries cohérentes dune période à lautre. Il me semble que cela va dans le sens de son intérêt et de celui des citoyens qui veulent comprendre. Or, il est manifeste que le CT na pas voulu consacrer les efforts nécessaires à latteinte de ces objectifs. » [33] Sauf pour ce qui concerne lexercice de 2006, le demandeur admet donc avoir reçu les résultats des travaux de lorganisme et admet y retrouver une grande partie des informations quil réclame mais dans un ordre et une séquence
06 12 73 Page : 8 quil dit ne pas comprendre. Bien quayant tenté de travailler avec ces tableaux et avec leur contenu, ce dernier soulève un grand nombre dinterrogations qui ne trouvent pas de réponse. [34] Les auteurs Doray et Charette 4 résument la position adoptée par la Commission dans des demandes de même nature : « Il ressort dune analyse de la jurisprudence que larticle 15 vise les situations lorganisme ne détient pas le document demandé mais seulement un ensemble de renseignements contenus dans divers documents ou sur un support informatique et quil faudrait retracer, extraire, compiler, coupler ou agglomérer ces renseignements afin de créer un nouveau document qui répondrait à la demande. Larticle 15 fait en sorte que lorganisme na pas lobligation de procéder à une telle tâche, ni de créer un nouveau programme informatique pour confectionner le document demandé. Par contre, lorganisme doit fournir au demandeur les documents existants qui lui permettent de procéder lui-même à la compilation quil recherche. […]. » [35] Larticle 15 de la Loi sur laccès stipule : 15. Le droit d'accès ne porte que sur les documents dont la communication ne requiert ni calcul, ni comparaison de renseignements. [36] Cette disposition na pas pour effet de forcer un organisme à produire un document, elle na pas non plus pour effet de prescrire à un organisme le contenu des documents quil produit 5 . [37] Cette jurisprudence constante de la Commission est tout à fait cohérente avec la volonté du législateur exprimée à larticle 1 de la Loi sur laccès : 1. La présente loi s'applique aux documents détenus par un organisme public dans l'exercice de ses fonctions, que leur conservation soit assurée par l'organisme public ou par un tiers. 4 Doray, Raymond et Charette, François. Accès à linformation : loi annotée, jurisprudence, analyse et commentaires. Volume 1. Cowansville Y. Blais, p. II/15-1, 15-2. 5 X. c. Commission scolaire de la Pointe-de-lÎle, C.A.I. Montréal, n o 04 10 59, 6 juillet 2005, c. Constant; Leblanc c. Commission de la Santé et de la Sécurité du travail, [2003] C.A.I. p.1.
06 12 73 Page : 9 Elle s'applique quelle que soit la forme de ces documents: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. (Les caractères gras sont du soussigné). [38] Conformément à la loi, lorganisme a transmis au demandeur les tableaux « A », « B » et « C » tels quils ont été conçus. Lorganisme sest en conséquence acquitté de ses obligations légales quant à cet aspect. Il a fourni les documents quil détenait et le demandeur devrait en acquitter le coût. Dans sa demande de révision, il refuse toutefois de payer les coûts réclamés en mentionnant que ces documents ne lui ont servi à rien. Cela nest pas un motif suffisant. Toutefois, il y a lieu de se demander si le demandeur peut sobjecter à ce paiement. Larticle 11 de la Loi sur laccès stipule : 11. L'accès à un document est gratuit. Toutefois, des frais n'excédant pas le coût de sa transcription, de sa reproduction ou de sa transmission peuvent être exigés du requérant. Le montant et les modalités de paiement de ces frais sont prescrits par règlement du gouvernement; ce règlement peut prévoir les cas une personne est exemptée du paiement et il tient compte de la politique établie en vertu de larticle 26.5 de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées en vue de leur intégration scolaire, professionnelle et sociale. L'organisme public qui entend exiger des frais en vertu du présent article doit informer le requérant du montant approximatif qui lui sera chargé, avant de procéder à la transcription, la reproduction ou la transmission du document. Dans un cas daccès à plus dun document, linformation doit distinguer les frais de transcription ou de reproduction pour chacun des documents identifiés. [39] On le constate, larticle 11 permet de réclamer les coûts de la transcription et à ce titre, un montant de 16,43 $ est exigé du demandeur. En effet, la lettre transmise exige le paiement de la documentation qui y est jointe. Rien nindique toutefois que lorganisme avait dabord avisé le demandeur du coût qui lui serait chargé avant de procéder à la reproduction conformément au 4 e paragraphe de larticle 11. Sil lavait fait, le demandeur aurait pu choisir de consulter les documents sur place avant de décider den réclamer une copie, conformément à larticle 10 de la Loi sur laccès :
06 12 73 Page : 10 10. Le droit d'accès à un document s'exerce par consultation sur place pendant les heures habituelles de travail ou à distance. Le requérant peut également obtenir copie du document, à moins que sa reproduction ne nuise à sa conservation ou ne soulève des difficultés pratiques sérieuses en raison de sa forme. A la demande du requérant, un document informatisé doit être communiqué sous la forme d'une transcription écrite et intelligible. Lorsque le requérant est une personne handicapée, des mesures daccommodement raisonnables doivent être prises, sur demande, pour lui permettre d'exercer le droit d'accès prévu par la présente section. À cette fin, lorganisme public tient compte de la politique établie en vertu de larticle 26.5 de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées en vue de leur intégration scolaire, professionnelle et sociale (chapitre E-20.1). [40] De toute évidence, ce choix na pas été offert au demandeur et le coût de la transcription lui a été réclamé en même temps que lenvoi, ce qui est contraire à la Loi. En conséquence, le demandeur naura pas à payer ce montant. [41] On se souviendra que le résultat de lévaluation des catégories demplois pour 2006 na pas été remis au demandeur, puisque lorganisme prétend que le résultat de cette évaluation fait partie intégrante dun « processus décisionnel » qui était encore en cours et qui navait pas connu son dénouement au moment de la demande daccès présentée par le demandeur. [42] En conséquence, lorganisme sappuie sur larticle 39 de la Loi sur laccès pour en refuser la communication. Cet article stipule : 39. Un organisme public peut refuser de communiquer une analyse produite à l'occasion d'une recommandation faite dans le cadre d'un processus décisionnel en cours, jusqu'à ce que la recommandation ait fait l'objet d'une décision ou, en l'absence de décision, qu'une période de cinq ans se soit écoulée depuis la date l'analyse a été faite. [43] Selon la procureure de lorganisme, la preuve faite à huis clos devant la Commission devrait convaincre le soussigné que le processus dévaluation de lorganisme est assujetti à la Loi sur léquité salariale et constitue « une analyse »
06 12 73 Page : 11 produite à loccasion dune recommandation faite dans le cadre dun processus décisionnel en cours. [44] Elle sappuie en outre sur larticle 50 de la Loi sur léquité salariale qui décrit les trois premières étapes du programme déquité salariale qui doit être instauré dans une entreprise : 50. Un programme déquité salariale comprend : 1. lidentification des catégories demplois à prédominance féminine et des catégories demplois à prédominance masculine, au sein de lentreprise; 2. la description de la méthode et des outils dévaluation de ces catégories demplois et lélaboration dune démarche dévaluation; 3. lévaluation de ces catégories demplois, leur comparaison, lestimation des écarts salariaux et le calcul des ajustements salariaux; […]. [45] Le législateur décrit la façon dont doivent se faire lidentification des catégories demplois à prédominance féminine, la description de la méthode et des outils dévaluation et lévaluation de ces catégories demplois et des écarts salariaux. Larticle 57 de la Loi sur léquité salariale prévoit : 57. La méthode dévaluation doit tenir compte, pour chaque catégorie demplois, des facteurs suivants : 1. les qualifications requises; 2. les responsabilités assumées; 3. les efforts requis; 4. les conditions dans lesquelles le travail est effectué. [46] Par la suite, le comité déquité salariale doit procéder à la comparaison des catégories demplois : 60. Le comité déquité salariale ou, à défaut, lemployeur doit comparer les catégories demplois à prédominance féminine et les catégories demplois à prédominance masculine, aux fins destimer les écarts salariaux entre elles. [47] Finalement, le comité déquité salariale ou lemployeur doit procéder à laffichage des résultats au bénéfice des salariés (article 75 de la Loi sur léquité salariale). Les salariés pourront réagir à cet affichage (article 76 de la Loi sur
06 12 73 Page : 12 léquité salariale). Suite à ces réactions, un deuxième affichage aura lieu pour rendre publique la décision finale. [48] De lavis du soussigné, le processus établi par le législateur aux paragraphes 1, 2 et 3 de larticle 50 précité constitue un processus danalyse qui mène à lestimation des écarts et au calcul des ajustements salariaux à apporter. Le résultat est rendu public aux salariés par la procédure de laffichage qui présente une première recommandation. Or, les résultats de cet affichage pourront éventuellement être modifiés. On passe ainsi dun processus danalyse à un processus décisionnel. [49] Le demandeur le reconnaît dailleurs dans sa demande lorsquil écrit : « […] Il est vrai que le processus de règlement na pas encore été complété totalement puisque les employées peuvent inscrire leur contestation à la suite de laffichage. Toutefois, comme ces contestations devraient normalement ne concerner que quelques individus nous pensons que les informations recueillies ne devraient pas être modifiées substantiellement et que rien ne fait obstacle à leur diffusion sous cette réserve […] ». [50] Plus de 5 000 demandes ont été acheminées à lorganisme pour contester les classifications et les regroupements demplois suite à laffichage de 2006. [51] Dans laffaire Le Procureur général du Québec c. Bernier 6 , le juge Michel Simard, de la Cour du Québec, fait siens les propos de la Commission daccès et écrit : « La Commission a explicité, à plusieurs reprises, le sens quelle croit devoir donner au mot analyse. Quil nous suffise de rappeler ici que, se fondant sur le sens courant et usuel du terme, elle a retenu généralement que le mot analyse vise une opération intellectuelle consistant à décomposer un tout en ses différents éléments ou à tirer une proposition dune autre par une série de raisonnements successifs pour arriver à une conclusion. Cest le sens du mot analyse que nous retiendrons ici et nous étudierons les différents éléments du document à la lumière de cette définition. » 6 C.Q. Québec (Chambre civile), n o 200-02-007342-894, 9 septembre 1991, j. Simard.
06 12 73 Page : 13 [52] Les documents déposés à la Commission, qui font état des travaux du comité déquité salariale ayant procédé à lévaluation des catégories demplois et à leur classification, sont le résultat dune analyse qui a mené à une recommandation. Cette recommandation a pris la forme dun affichage. [53] Reste à décider si cet affichage a été fait dans le cadre dun processus décisionnel en cours. Nous lavons déjà précisé, larticle 76 de la Loi sur léquité salariale prévoit que tout salarié peut, dans les soixante (60) jours qui suivent laffichage obligatoire des résultats des travaux du comité déquité salariale, réagir à cet affichage en demandant des renseignements ou en présentant ses observations. Par la suite, le comité déquité salariale ou lemployeur doit, dans les trente (30) jours, procéder à un nouvel affichage en précisant les modifications apportées ou en publiant un avis à leffet quaucune modification nest nécessaire. [54] Cest tout le processus de lajustement salarial prévu par la Loi sur léquité salariale qui prend fin par la publication des décisions faisant lobjet de laffichage. La preuve a démontré que ce processus décisionnel pour lannée 2006 nétait pas terminé à la date le demandeur a transmis sa demande daccès. [55] En conséquence, lorganisme pouvait refuser de communiquer les données réclamées par le demandeur pour lannée 2006 et qui ont été retenues sur la base de larticle 39 de la Loi sur laccès. [56] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [57] REJETTE la demande de révision du demandeur; [58] ACCUEILLE la demande du demandeur relative aux coûts de reproduction des documents obtenus et exempte le demandeur du paiement réclamé au montant de 16,43 $. JEAN CHARTIER Commissaire M e Isabelle Demers Chamberland, Gagnon (Justice-Québec) Procureure de l'organisme
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