Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 05 03 29 Date : Le 8 janvier 2007 Commissaire : M e Christiane Constant X Demanderesse c. SOCIÉTÉ DE L’ASSURANCE AUTOMOBILE DU QUÉBEC Organisme DÉCISION LE LITIGE DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS À DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS, selon les termes de l’article 135 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la Loi sur l’accès) [1] Le 10 janvier 2005, la demanderesse requiert de M e Claude Gélinas, responsable de l’accès aux documents à la Société de l’assurance automobile du Québec (l’Organisme), l’autorisation de consulter sur place, durant les heures habituelles de travail : 1 L.R.Q., c. A-2.1.
05 03 29 Page : 2 […] la jurisprudence détenue par la Société, qui fut émise en 2002, 2003 et 2004, concernant l’ensemble des jugements impliquant la Société de l’assurance automobile du Québec en matière d’indemnisation rendue par les tribunaux supérieurs à savoir la Cour Supérieur; la Cour d’appel et la Cour Suprême. [sic] [2] Le 2 février 2005, M e Guy Dussault, substitut du responsable de la Loi sur l’accès à l’information, indique à la demanderesse que l’Organisme ne peut pas l’autoriser à consulter sur place les documents recherchés, puisque ceux-ci relèvent plutôt de la Société québécoise d’information juridique (Soquij). Il l’invite donc à formuler sa demande auprès de celle-ci, en lui fournissant le nom et les coordonnées de la responsable de l’accès. [3] Le 10 février 2005, la demanderesse formule une deuxième demande auprès de M e Gélinas afin d’obtenir les décisions suivantes : Auger c. TAQ, C.S. Québec 200-05-014181-007, juge Julie Dutil Horion c. TAQ, C.S. Québec 200-05-013933-002, juge Claude Henri Gendreau [4] Elle ajoute également qu’elle souhaite consulter au bureau de l’Organisme de Longueuil ou de Montréal : […] les jurisprudences détenues par la Société, qui fut émises en 2002, 2003 et 2004, concernant l’ensemble des jugements impliquant la Société de l’assurance automobile du Québec en matière d’indemnisation rendue par les tribunaux supérieurs à savoir la Cour Supérieur; la Cour d’appel et la Cour Suprême. [sic] [5] Le 18 février 2005, M e Gélinas indique à la demanderesse que l’Organisme ne peut pas acquiescer à sa demande, puisque les documents recherchés ont été produits ou fournis par Soquij. Il l’invite à s’adresser à la responsable de l’accès de celle-ci, tel qu’il est indiqué au paragraphe 2 de la présente décision.
05 03 29 Page : 3 [6] Le 4 mars 2005, la demanderesse sollicite l’intervention de la Commission d'accès à l'information (la Commission) afin que soient révisées les deux décisions de l’Organisme. L’AUDIENCE [7] Le 19 avril 2006, l’audience de la présente cause se tient à Montréal, en présence de la demanderesse et de l’Organisme, celui-ci étant représenté par M e Annie Rousseau. LA PREUVE A) DE L’ORGANISME [8] M e Rousseau précise que l’Organisme consent à remettre à la demanderesse des documents dont il lui avait préalablement refusé l’accès. Il s’agit d’une copie de procès-verbaux d’audience de la Cour supérieure du Québec et de la Cour d’appel du Québec pour les années 2001 à 2003 relativement aux causes qui y sont mentionnées (pièce O-1 en liasse). Témoignage de M me Josée Tremblay [9] Interrogée par M e Rousseau, M me Tremblay déclare qu’elle est technicienne en droit à la Direction des affaires juridiques de l’Organisme et qu’elle a effectué une recherche pour les années visées par la demande. Le système informatique interne de l’Organisme démontre que les 18 jugements recherchés par la demanderesse ont été publiés par Soquij (pièce O-2 en liasse). Ce système contient les nom et prénom des avocats de l’Organisme responsables des dossiers impliquant ce dernier en matière d’indemnisation devant des tribunaux supérieurs. Il indique, entre autres, la date d’ouverture du dossier, sa date de fermeture et sa date d’archivage. Clarifications recherchées par la demanderesse [10] M me Tremblay réitère l’essentiel de son témoignage principal et ajoute qu’il n’existe pas de jugements écrits par la Cour supérieure du Québec, impliquant l’Organisme en matière d’indemnisation pour les années 2002 à 2004, autres que ceux qui lui ont été remis à l’audience.
05 03 29 Page : 4 [11] Elle fait remarquer que les jugements rendus par les tribunaux judiciaires sont publiés par Soquij. B) DE LA DEMANDERESSE [12] Outre les 18 jugements se trouvant dans la liste déposée en preuve par l’Organisme (pièce O-2 en liasse précitée), la demanderesse déclare qu’il en manque neuf autres. Ceux-ci n’ont pas été publiés par Soquij. [13] Elle réitère sa demande voulant que l’Organisme lui transmette l’intégralité des deux jugements portant la signature respective des juges Dutil et Gendreau, puisqu’ils ne sont publiés ni sur le site Internet de l’Institut canadien d’information juridique ni dans l’Annuaire de jurisprudence de l’Organisme. [14] Elle fait remarquer qu’elle a retrouvé huit décisions pour l’année 2002 impliquant l’Organisme en matière d’indemnisation, alors que ces dernières ne se trouvent pas dans la liste déposée par M me Tremblay à l’audience. [15] Elle dépose une série de documents à partir desquels elle émet des commentaires eu égard à une demande d’accès à la jurisprudence pour l’année 2001 qu’elle avait formulée auprès de l’Organisme dans le dossier de la Commission n o 02 13 58. Elle fournit des explications relativement à d’autres documents : Pièce D-1 Le 28 août 2002, M e Gélinas lui a répondu que l’Organisme ne pouvait pas acquiescer à sa demande. Il l’a référée à Soquij. Elle a contesté cette décision devant la Commission; Pièce D-2 Le 2 février 2004, une audience s’est tenue devant la commissaire Grenier. Celle-ci a rendu une décision intérimaire relativement à sa demande de révision. Elle réfère au témoignage de M e Gélinas qui précisait que le « […] nombre de décisions rendues annuellement par les tribunaux supérieurs et impliquant l’organisme varie de 30 à 40. […] » À son avis, l’Organisme n’a pas fourni la liste de tous les jugements dans lesquels il était impliqué et qui ont été rendus par les tribunaux supérieurs;
05 03 29 Page : 5 Pièce D-3 Le 4 mars 2004, faisant suite à l’ordonnance intérimaire ci-dessus mentionnée, l’Organisme a informé, par écrit, la Commission qu’il transmettait à la demanderesse une copie des décisions des tribunaux supérieurs pour l’année 2001; Pièce D-4 Le 11 mars 2004, la demanderesse s’est adressée à la commissaire Grenier. Elle émet des commentaires eu égard à l’ordonnance qui, à son avis, n’a pas été respectée par l’Organisme dans le dossier de la Commission n o 02 13 58; Pièce D-5 Le 29 mars 2004, la Commission a rendu une décision finale à la suite d’une audience dans le dossier de la Commission n o 02 13 58; Pièce D-6 Elle a effectué une recherche sur le site Internet de l’Institut canadien d’information juridique afin de savoir si elle peut avoir accès notamment aux jugements des juges Dutil et Gendreau. Elle n’a pas pu les obtenir puisque ce site indique que sa « […] collection contient les décisions auxquelles le public a accès, rendues depuis le […] » 1 er septembre 2001; Pièce D-7 Elle produit en preuve une copie de certaines décisions concernant l’Organisme qui proviendraient de l’Annuaire de jurisprudence pour l’année 2001. Contre-interrogatoire de la demanderesse [16] Contre-interrogée par M e Rousseau, la demanderesse indique qu’elle n’a pas contacté le personnel de Soquij afin d’obtenir une copie intégrale du jugement Auger c. Tribunal administratif du Québec 2 rendu par la juge Dutil. 2 C.S. Québec, n o 200-05-014181-007, 8 février 2001, j. Dutil.
05 03 29 Page : 6 [17] À la suite du témoignage de la demanderesse, l’Organisme s’engage à effectuer une recherche additionnelle quant au nombre de décisions l’impliquant devant les tribunaux supérieurs ou à produire un affidavit, le cas échéant. LES ARGUMENTS [18] M e Rousseau rappelle que l’Organisme a remis à la demanderesse, à l’audience, une copie des procès-verbaux et des décisions des tribunaux supérieurs dans lesquels il était impliqué en matière d’indemnisation (pièce O-1 en liasse). [19] Elle fait remarquer qu’il existe une distinction entre la décision rendue par la commissaire Grenier dans le dossier de la Commission n o 02 13 58 et la présente cause puisque l’Organisme n’avait pas référé la demanderesse à Soquij. La commissaire Grenier avait donc raison d’indiquer que l’Organisme ne pouvait pas invoquer l’article 13 de la Loi sur l’accès. Elle ajoute que, dans le présent cas, pour les décisions publiées par Soquij, il incombe à celle-ci d’invoquer le 1 er alinéa de l’article 13 de la Loi sur l’accès. Elle fait notamment la diffusion et la publication de ces décisions, conformément à l’affaire C. c. Hôpital Ste-Croix 3 . [20] Elle plaide que M e Dussault était donc fondé à inviter la demanderesse à s’adresser à Soquij en vertu de l’article 48 de la Loi sur l’accès et conformément à l’affaire [D.M.] c. Société de l’assurance automobile du Québec 4 . Soquij est un organisme public assujetti à la Loi sur l’accès. Complément de preuve [21] Faisant suite à l’engagement pris par l’Organisme à l’audience, celui-ci me transmet, le 3 mai 2006, par l’intermédiaire de M e Rousseau, un affidavit portant la signature de M me Tremblay. Cette dernière réitère l’essentiel de son témoignage principal relatif à la demande. Elle ajoute ce qui suit : […] • J’ai repéré chacun des dossiers correspondant à l’année de la demande; • J’ai vérifié lesquels jugements concernaient l’indemnisation; 3 C.A.I. Québec, n o 85 00 55, 21 juin 1985, c. Pépin. 4 C.A.I. Québec, n o 02 13 58, 2 février 2004, c. Grenier et C.A.I. Montréal, n o 02 11 43, 29 janvier 2004, c. Grenier.
05 03 29 Page : 7 • J’ai vérifié sur le système Azimut de SOQUIJ pour savoir si le jugement était publié ou diffusé par SOQUIJ; • Au moment de l’audience en raison du délai écoulé entre le traitement de la demande et l’audience, je croyais que les fiches indiquant les noms des dossiers étaient complètes; • Or, je constate que je n’ai pas imprimé la fiche pour chacun des dossiers puisque je le faisais parfois directement à partir de la liste de dossiers des avocats; • Je peux cependant affirmer que j’ai vérifié pour chacun des trois avocats mentionnés dans la présente déclaration si les décisions étaient publiées ou diffusées par SOQUIJ; • Relativement aux 5 jugements pour lesquels un suivi est exigé, voici les informations demandées : • L’affaire Brouillette concernait une opposition à une saisie et n’était donc pas directement reliée à l’indemnisation et a été publiée ou diffusée par SOQUIJ; • L’affaire Page ne concerne pas un dossier d’indemnisation mais est plutôt reliée à un recours en dommages et intérêts et a été publiée ou diffusée par SOQUIJ; • L’affaire Bonin ne concerne pas l’indemnisation mais plutôt un dossier de permis de conduire et a été publiée ou diffusée par SOQUIJ; • Les affaires Dacosta et Haghighi ne se retrouvent pas dans la pièce O-2 en liasse mais leur texte intégral a été publié ou diffusé par SOQUIJ; [22] Le 4 mai 2006, la demanderesse me transmet une lettre selon laquelle M me Tremblay a fourni, sous serment à l’audience, des renseignements inexacts, puisqu’elle prétend que l’Organisme détient 28 décisions rendues par les tribunaux supérieurs pour les années 2002 à 2004. À cette lettre est jointe une liste de décisions qui, à son avis, ont été publiées par Soquij. Certaines d’entre
05 03 29 Page : 8 elles sont accessibles sur le site Internet « Canlii ». Celles publiées par le Barreau du Québec sont accessibles aux avocats. [23] La demanderesse fait remarquer en outre qu’en 2003, dans le dossier de la Commission n o 02 13 58, M e Gélinas faisait état de 30 à 40 décisions par année impliquant l’Organisme en matière d’indemnisation. Ce nombre ne correspond pas à celui mentionné par M me Tremblay à l’audience. [24] Elle souligne de plus que, malgré les dispositions législatives de la Loi sur l’accès, l’Organisme refuse de lui permettre de consulter sur place les décisions des tribunaux supérieurs qu’il détient dans l’exercice de ses fonctions et d’en recevoir une copie. [25] Par ailleurs, le 15 mai 2006, elle me fait parvenir ses observations écrites en réponse à l’affidavit de M me Tremblay. Elle fait valoir, par exemple, qu’elle est en désaccord avec l’interprétation donnée par celle-ci relative à une cause qu’elle identifie comme : « Haghighi; Da Costa; Brouillette », impliquant l’Organisme en matière d’indemnisation. Elle précise de plus que le « […] système Azimut de Soquij […] » lui est inaccessible, d’où le motif pour lequel M e Dussault l’a invitée à soumettre sa demande auprès de cet organisme, en vertu de l’article 48 de la Loi sur l’accès. [26] Le 24 mai 2006, M e Rousseau m’informe par écrit qu’elle a reçu les commentaires écrits de la demanderesse et que l’Organisme n’a pas l’intention d’y répondre. [27] Le 30 mai 2006, la demanderesse m’indique par écrit notamment que l’Organisme n’a pas émis de commentaires relatifs à sa lettre datée du 4 mai précédent qu’elle lui avait fait parvenir, à laquelle était jointe une liste de décisions des tribunaux supérieurs. DÉCISION [28] Selon les termes de l’article 9 de la Loi sur l’accès, la demanderesse a exercé auprès de l’Organisme un droit afin d’avoir accès à la jurisprudence détenue par celui-ci pour les années 2002 à 2004. Par l’intermédiaire de sa procureure, l’Organisme lui a remis des procès-verbaux et des décisions rendues par la Cour supérieure du Québec et la Cour d’appel du Québec :
05 03 29 Page : 9 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. [29] Je constate cependant que les documents ci-dessus mentionnés (pièce O-1 en liasse précitée) émanent de tribunaux supérieurs. Ceux-ci ne sont pas des organismes publics et ne sont donc pas assujettis à la Loi sur l’accès. L’Organisme n’était pas tenu de les transmettre à la demanderesse. De plus, bien que la dernière page du procès-verbal d’audience dans la cause Lepalme c. Tribunal administratif du Québec 5 , soit manquante, il n’est pas non plus tenu de la lui transmettre. [30] Après un examen attentif de l’ensemble de la preuve, il a été établi que M e Dussault avait raison d’inviter la demanderesse à s’adresser à Soquij, tel que le prévoit l’article 48 de la Loi sur l’accès. Il incombera à celle-ci de décider, le cas échéant, dans le cadre d’une demande d’accès, si elle permettra à la demanderesse de consulter sur place les décisions des tribunaux supérieurs qu’elle détient : 48. Lorsqu'il est saisi d'une demande qui, à son avis, relève davantage de la compétence d'un autre organisme public ou qui est relative à un document produit par un autre organisme public ou pour son compte, le responsable doit, dans le délai prévu par le premier alinéa de l'article 47, indiquer au requérant le nom de l'organisme compétent et celui du responsable de l'accès aux documents de cet organisme, et lui donner les renseignements prévus par l'article 45 ou par le deuxième alinéa de l'article 46, selon le cas. Lorsque la demande est écrite, ces indications doivent être communiquées par écrit. [31] Par ailleurs, l’Organisme a fourni des précisions et des renseignements additionnels. La demanderesse, pour sa part, a émis ses derniers commentaires le 30 mai 2006 et fait ressortir les motifs pour lesquels elle est en désaccord avec l’Organisme. Cela ne change en rien l’ensemble de la preuve recueillie à l’audience, puisque Soquij est l’organisme compétent pour statuer sur sa demande d’accès, le cas échéant. 5 C.S. Iberville, n o 755-05-001850-021, 26 septembre 2002, j. Nadeau.
05 03 29 Page : 10 [32] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : CONSTATE que l’Organisme a remis à la demanderesse, à l’audience, des procès-verbaux et des décisions de la Cour supérieure du Québec et de la Cour d’appel du Québec; CONSIDÈRE par ailleurs que l’Organisme était fondé à inviter la demanderesse à formuler sa demande auprès de Soquij, celle-ci étant l’organisme compétent pour statuer, le cas échéant, sur la demande eu égard à la jurisprudence qu’elle détient; REJETTE, quant au reste, la demande de révision de la demanderesse; FERME le présent dossier. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire M e Annie Rousseau Procureure de l’Organisme
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