Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 06 00 05 Date : Le 8 décembre 2006 Commissaire : M e Christiane Constant DÉCISION LE LITIGE DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D’ACCÈS À DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS, selon les termes de l’article 135 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la Loi sur l’accès). [1] Le 8 octobre 2005, la demanderesse requiert de M Service des ressources humaines du Centre de santé et de services sociaux d’Antoine-Labelle (l’Organisme), une explication afin de connaître les motifs pour 1 L.R.Q., c. A-2.1. X Demanderesse c. CENTRE DE SANTÉ ET DE SERVICES SOCIAUX D’ANTOINE-LABELLE Organisme me Solange Dubé, du
06 00 05 Page : 2 lesquels sa candidature pour le poste de préposée aux bénéficiaires n’a pas été retenue. […] J’ai reçu votre lette fin octobre m’annonçant que ma candidature pour le poste de préposée aux bénéficiaires n’était pas retenue. J’ai été surprise de cette lettre puisque vous aviez pris un rendez-vous médicale dans le but de poursuivre la démarche d’embauche. Je n’ai pas eu le temps d’aller à ce rendez-vous que vous refusé ma candidature. Puis-je avoir la raison de se changement d’avis ce qui pourrais m’aider à m’améliorer pour la prochaine entrevue. (sic) […] [2] Le 16 décembre 2005, M me Francine Bisson, responsable de l’accès aux documents au sein de l’Organisme, transmet à la demanderesse la réponse de celui-ci. Elle invoque comme motifs de refus l’article 40 de la Loi sur l’accès. [3] Insatisfaite, la demanderesse sollicite, le 30 décembre 2005, l’intervention de la Commission d'accès à l'information (la Commission) afin que soit révisée la décision de l’Organisme. L'AUDIENCE [4] L’audience de la présente cause se tient à Montréal, le 2 novembre 2006, en présence des témoins de l’Organisme et de M e Geneviève Laurin, procureure de celui-ci. La demanderesse y participe par lien téléphonique. LA PREUVE A) DE L’ORGANISME i) Témoignage de M me Solange Dubé [5] Interrogée par M e Laurin, M me Dubé affirme qu’elle est « conseillère en dotation, développement des ressources humaines ». Elle s’occupe notamment du recrutement, de l’embauche du personnel et de la formation de celui-ci. La direction des ressources humaines vérifie, entre autres, les références soumises par les candidats à l’Organisme.
06 00 05 Page : 3 [6] M me Dubé indique que 1 600 employés, dont 44 cadres, travaillent au sein de l’Organisme. Elle explique le processus d’embauche mis en place par celui-ci. Elle ajoute qu’un comité de sélection composé de deux membres, à savoir elle-même et un autre membre de l’administration, rencontre annuellement 300 candidats postulant pour toutes les catégories d’emplois. Lors des entrevues, ces candidats répondent aux questions posées par les membres de ce comité. Ces derniers inscrivent les réponses dans le questionnaire. Après avoir évalué la performance de chaque candidat, une cote lui est attribuée. [7] Elle dépose, sous le sceau de la confidentialité, les documents en litige. [8] M me Dubé souligne que le comité de sélection inscrit également dans le questionnaire les réponses fournies par un candidat relatives à son état de santé. Ces renseignements sont confidentiels et sont conservés au « bureau de santé » de l’Organisme. Elle n’y a pas accès. [9] Elle explique que, dans le cas sous étude, la demanderesse a complété un formulaire d’emploi afin d’être embauchée à un poste de préposée aux bénéficiaires. Lors d’une entrevue de pré-embauche, elle a rencontré les membres du comité de sélection de l’Organisme. Le 21 octobre 2005, elle lui a fait parvenir une lettre l’avisant que sa candidature n’avait pas été retenue. M me Bisson, qui est responsable de l’accès, l’a informée par la suite qu’elle a reçu une lettre de la demanderesse requérant les motifs pour lesquels sa candidature n’a pas été retenue pour le poste en question. [10] Elle précise que le questionnaire recherché par la demanderesse existe depuis trois ans au sein de l’Organisme. Il contient des questions de base utilisées par les membres du comité ayant la responsabilité de passer toutes les entrevues. Quelquefois, ils ajoutent une ou deux questions en fonction du poste à combler. [11] Elle signale que l’Organisme ne peut pas transmettre à la demanderesse copie des documents en litige, puisqu’il continue de les utiliser auprès des candidats à l’emploi. [12] Elle ajoute par ailleurs qu’elle n’a pas donné suite aux diverses lettres de la demanderesse, puisqu’elle l’avait déjà informée, par écrit, que sa candidature n’avait pas été retenue par le comité de sélection de l’Organisme. ii) Témoignage de M me Francine Bisson [13] M me Bisson déclare qu’elle est directrice générale adjointe, commissaire aux plaintes et responsable de l’accès aux documents au sein de l’Organisme
06 00 05 Page : 4 depuis 1997. Elle traite les demandes d’accès adressées à ce dernier et transmet aux demandeurs les réponses de celui-ci. [14] Elle affirme qu’elle a reçu la demande d’accès formulée par la demanderesse le 21 novembre 2005. Elle en reçoit moins de dix par année. Elle a contacté M me Dubé afin de connaître notamment la façon selon laquelle cette dernière a effectué les vérifications de référence qui lui ont été fournies par la demanderesse. Elle a fait parvenir à celle-ci, le 16 décembre suivant, la réponse de l’Organisme et fait remarquer que la candidature d’une autre personne n’a pas été retenue non plus par le comité de sélection. B) DE LA DEMANDERESSE [15] La demanderesse considère que sa candidature a été retenue par les membres du comité de sélection, puisqu’un représentant de l’Organisme a laissé un message dans sa boîte vocale l’informant qu’elle devait subir un examen médical. À son avis, le processus d’embauche se poursuivait. [16] Elle prétend que l’Organisme a décidé de ne plus retenir sa candidature en raison des renseignements médicaux qu’elle lui a dévoilés. Elle voudrait donc connaître les renseignements inscrits par les membres du comité de sélection qui ont conduit au rejet de sa candidature. Elle demande à qui elle pourrait s’adresser afin de faire part de ses prétentions quant aux motifs de rejet de sa candidature par l’Organisme. [17] J’interviens pour informer la demanderesse que la Commission n’est pas le forum approprié pour traiter de ce point. Ce dernier relèverait plutôt de la Commission des droits de la personne. LES ARGUMENTS [18] M e Laurin résume le témoignage des témoins de l’Organisme et fait remarquer que, selon la preuve, les questions inscrites dans le questionnaire en litige sont réutilisées par le comité de sélection lors des entrevues de pré-embauche de l’Organisme. Celui-ci s’est servi de son pouvoir discrétionnaire de ne pas transmettre à la demanderesse ce document. Il satisfait donc aux exigences législatives de l’article 40 de la Loi sur l’accès, conformément à l’Office des ressources humaines c. Matakias 2 , lorsque la Cour du Québec indique notamment : 2 C.Q., n o 200-02-004442-887, 26 juin 1990, jj. Verge, Langevin et Gobeil.
06 00 05 Page : 5 […] L’appelant n’avait qu’à démontrer que les pièces demandées font partie intégrante de l’épreuve et que l’épreuve était encore utilisée. […] [19] Elle argue par ailleurs que l’article 40 de la Loi sur l’accès permet de plus à un organisme de garder secret une épreuve afin d’éviter qu’un candidat puisse connaître au préalable les questions qui seront posées, alors que les autres candidats n’y ont pas accès. DÉCISION [20] La demanderesse a fait parvenir une lettre à M me Dubé afin de connaître les motifs pour lesquels l’Organisme a rejeté sa candidature au poste de préposée aux bénéficiaires. Cette demande s’apparente plutôt à une demande de renseignements. [21] Cependant, M me Dubé considère que les renseignements recherchés par la demanderesse constituent une demande pour avoir accès aux documents utilisés par le comité de sélection de l’Organisme dans le cadre d’un examen de pré-embauche. Cette évaluation a permis à M me Bisson, responsable de l’accès aux documents, de traiter la demande comme une demande d’accès aux documents. [22] Essentiellement, les témoins de l’Organisme ont démontré que l’accès au questionnaire en litige ne devrait pas être accessible à la demanderesse, selon les termes de l’article 40 de la Loi sur l’accès, puisque l’Organisme continue d’utiliser ce document lors des entrevues de pré-embauche des candidats : 40. Un organisme public peut refuser de communiquer une épreuve destinée à l'évaluation comparative des connaissances, des aptitudes ou de l'expérience d'une personne, jusqu'au terme de l'utilisation de cette épreuve. [23] Le questionnaire en litige contient 19 questions relatives, entre autres, à la formation d’un candidat et à son expérience de travail. À chacune d’elles, l’on y trouve les « réponses attendues » ainsi que les commentaires émis par ce candidat. [24] Il s’agit de déterminer si le document ci-dessus mentionné constitue une épreuve destinée à l’évaluation comparative des connaissances, des aptitudes ou de l’expérience d’une personne et s’il est toujours utilisé par l’Organisme.
06 00 05 Page : 6 [25] Dans l’affaire l’Office des ressources humaines c. Matakias précitée 3 , la Cour du Québec a notamment statué que : […] La Loi ne distingue pas entre des documents qui pourraient permettre de reconstituer l’épreuve et ceux qui constituent l’épreuve. Il n’y a pas lieu d’ajouter à la loi et de distinguer lorsque la loi ne le fait pas. Ce que la loi dit c’est que l’organisme a une discrétion quant à la communication de l’épreuve destinée à évaluer un candidat. Le mot épreuve comprend ici tous les documents qui ont pour utilité première l’évaluation comparative des connaissances, des aptitudes ou de l’expérience d’une personne. […] [26] Après avoir analysé l’ensemble de la preuve et examiné le document en litige, j’en arrive à la conclusion que la responsable de l’accès aux documents de l’Organisme était fondée de refuser de le transmettre à la demanderesse. Il continue toujours de l’utiliser dans le cadre d’examens des candidats souhaitant être embauchés, conformément, entre autres, aux décisions Deslauriers c. Ministère de la Sécurité publique 4 et Jodoin c. Société de transport de la communauté urbaine de Montréal 5 . [27] L’Organisme a donc établi que les conditions d’application de l’article 40 de la Loi sur l’accès ont été satisfaites. [28] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : DÉCLARE que la responsable de l’accès aux documents au sein de l’Organisme était fondée de refuser de communiquer à la demanderesse le document en litige; 3 Id., 2. 4 C.A.I. Montréal, n o 01 04 35, 3 octobre 2001, c. Laporte. 5 C.A.I. Montréal, n o 00 18 11, 5 avril 2002, c. Constant.
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