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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 05 19 00 Date : Le 27 octobre 2006 Commissaire : M e Christiane Constant X Demandeur c. VILLE DE SAINT-JEAN- SUR-RICHELIEU Organisme DÉCISION LE LITIGE DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE DACCÈS À DES RENSEIGNEMENTS NOMINATIFS, selon les termes de larticle 135 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la Loi sur laccès). [1] Le 20 septembre 2005, par lintermédiaire de M e Pierre Zeppettini, le demandeur requiert du Service de police de la Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu (lOrganisme) une copie dun rapport dévènement le concernant portant le n o SJE 030825017. 1 L.R.Q., c. A-2.1.
05 19 00 Page : 2 [2] Le 5 octobre 2005, M. Michel Guindon, inspecteur au sein de lOrganisme, informe M e Zeppettini du refus de celui-ci à confirmer lexistence des renseignements personnels recherchés par son client. Il invoque comme motifs de refus les articles 28 et 87 de la Loi sur laccès. [3] Le 3 novembre 2005, au nom du demandeur, M e Zeppettini sollicite lintervention de la Commission d'accès à l'information (la Commission) afin que soit révisée la décision de lOrganisme. LAUDIENCE [4] Laudience de la présente cause se tient à Montréal, le 3 octobre 2006, en présence du témoin de lOrganisme. Le demandeur, qui est absent de laudience, est représenté par M e Zeppettini. LA PREUVE A) DE LORGANISME Témoignage de M. Michel Guindon [5] M. Guindon affirme quil est inspecteur à la section « Développement et éthique » au sein du Service de police de lOrganisme. Dans le cadre de ses fonctions, il traite les demandes daccès formulées par des demandeurs, incluant celle visant la présente cause. Il a fait parvenir à M e Zeppettini la réponse de lOrganisme. [6] M. Guindon précise que le rapport dévènement recherché par le demandeur existe et contient des renseignements le concernant. Il est identifié comme « suspect », puisquil a fait lobjet dune plainte pour avoir proféré des menaces à lendroit dun individu. Les enquêteurs du Service de police de lOrganisme ont mené une enquête à son égard. [7] Il ajoute que le dossier denquête a été soumis au substitut du procureur général. Celui-ci a décidé de ne pas porter daccusations de nature criminelle ou pénale contre le demandeur. [8] Contre-interrogé par M e Zeppettini, M. Guindon décrit les documents que compose le dossier denquête :
05 19 00 Page : 3 Un rapport dévènement de 3 pages; Trois déclarations de témoins; Une « Mise en garde » visant S.B.; Les notes personnelles de lenquêteur au dossier; Une narration des faits par lenquêteur au dossier; Une preuve de voir-dire; Un récit des faits; Une demande dintenter des procédures; Un témoin à assigner; Un « contrôle de détenu »; Un document émanant du Centre de renseignements policiers du Québec (le CRPQ); Une décision du substitut du procureur général. LES ARGUMENTS [9] M e Zeppettini plaide que le principe général de la Loi est laccès aux documents détenus par un organisme. Dans le présent cas cependant, le demandeur na pas eu accès aux documents recherchés et lOrganisme ne lui a fourni aucune explication quant aux motifs de refus, se contentant dinvoquer les articles 28 et 87 de la Loi sur laccès. [10] Il résume le témoignage de M. Guindon et fait remarquer que son client na pas lintention dintenter des procédures de nature civile contre lOrganisme, le délai de trois ans pour le faire étant expiré. Son client voudrait toutefois connaître les circonstances entourant la fermeture du dossier par le Service de police de lOrganisme. [11] Il fait de plus remarquer quà laudience, M. Guindon na fourni aucune preuve démontrant que la divulgation des documents recherchés par le demandeur causerait un préjudice à un tiers au sens de lapplication de larticle 28 de la Loi sur laccès. [12] Il plaide que lOrganisme devrait à tout le moins transmettre au demandeur certains documents, tels la « narration des faits » par un policier, la « demande dintenter des procédures » et le « contrôle de détenu », conformément à laffaire Syndicat des travailleurs et travailleuses unis du Québec c. Ville de Québec 2 . 2 C.A.I. Québec, n o 05 15 37, 14 juillet 2006, c. Chartier.
05 19 00 Page : 4 [13] M. Guindon répond que le rapport dévènement ne devrait pas être communiqué au demandeur, puisque la divulgation de ce document permettrait à celui-ci didentifier un individu. DÉCISION [14] Le demandeur a formulé sa demande daccès auprès de lOrganisme afin dobtenir une copie des documents qui le concernent, selon les termes de larticle 83 de la Loi sur laccès. Une demande de révision sen est suivie auprès de la Commission au sens de larticle 135 de ladite loi : 83. Toute personne a le droit d'être informée de l'existence, dans un fichier de renseignements personnels, d'un renseignement nominatif la concernant. Elle a le droit de recevoir communication de tout renseignement nominatif la concernant. Toutefois, un mineur de moins de quatorze ans n'a pas le droit d'être informé de l'existence ni de recevoir communication d'un renseignement nominatif de nature médicale ou sociale le concernant, contenu dans le dossier constitué par l'établissement de santé ou de services sociaux visé au deuxième alinéa de l'article 7. 135. Une personne dont la demande écrite a été refusée en tout ou en partie par le responsable de l'accès aux documents ou de la protection des renseignements personnels peut demander à la Commission de réviser cette décision. Une personne qui a fait une demande en vertu de la présente loi peut demander à la Commission de réviser toute décision du responsable sur le délai de traitement de la demande, sur le mode d'accès à un document ou à un renseignement, sur l'application de l'article 9 ou sur les frais exigibles.
05 19 00 Page : 5 Ces demandes doivent être faites dans les trente jours qui suivent la date de la décision ou de l'expiration du délai accordé par la présente loi au responsable pour répondre à une demande. La Commission peut toutefois, pour un motif raisonnable, relever le requérant du défaut de respecter ce délai. [15] Demblée, il faut préciser que le 1 er alinéa de larticle 28 de la Loi sur laccès sapplique dans la présente instance. En effet, il a été établi quun enquêteur du Service de police de lOrganisme a mené une enquête policière à légard du demandeur, en raison dune plainte de nature pénale ou criminelle déposée contre celui-ci. Lenquêteur est une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois. [16] Cette disposition se lit comme suit : 28. Un organisme public doit refuser de confirmer l'existence ou de donner communication d'un renseignement obtenu par une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, lorsque sa divulgation serait susceptible: 1° d'entraver le déroulement d'une procédure devant une personne ou un organisme exerçant des fonctions judiciaires ou quasi judiciaires; 2° d'entraver le déroulement d'une enquête; 3° de révéler une méthode d'enquête, une source confidentielle d'information, un programme ou un plan d'action destiné à prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois; 4° de mettre en péril la sécurité d'une personne; 5° de causer un préjudice à une personne qui est l'auteur du renseignement ou qui en est l'objet; 6° de révéler les composantes d'un système de communication destiné à l'usage d'une personne chargée d'assurer l'observation de la loi; 7° de révéler un renseignement transmis à titre confidentiel par un corps de police ayant compétence hors du Québec; 8° de favoriser l'évasion d'un détenu; ou 9° de porter atteinte au droit d'une personne à une audition impartiale de sa cause. Il en est de même pour un organisme public, que le gouvernement peut désigner par règlement conformément aux normes qui y sont prévues, à l'égard d'un renseignement que cet organisme a obtenu par son service
05 19 00 Page : 6 de sécurité interne, dans le cadre d'une enquête faite par ce service et ayant pour objet de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, susceptibles d'être commis ou commis au sein de l'organisme par ses membres, ceux de son conseil d'administration ou son personnel, lorsque sa divulgation serait susceptible d'avoir l'un des effets mentionnés aux paragraphes 1° à 9° du premier alinéa. [17] Pour refuser de communiquer au demandeur les documents en litige, il incombe à lOrganisme de démontrer que lun ou lautre des paragraphes de larticle ci-dessus mentionné sappliquent au présent cas. M. Guindon a mentionné que la divulgation du rapport denquête permettrait didentifier une personne physique. [18] Par ailleurs, outre les documents en litige décrits par M. Guindon au paragraphe 8 de la présente décision, se trouvent également deux documents intitulés « suivi administratif » et « témoins à assigner ». [19] Les documents provenant du CRPQ doivent demeurer confidentiels. Ces derniers contiennent des renseignements concernant le demandeur et dautres individus. Ils sont visés par le 6 e paragraphe du 1 er alinéa de larticle 28 précité. [20] De plus, les trois déclarations des témoins contiennent notamment leur adresse, leur numéro de téléphone et leur numéro de téléphone cellulaire. Ce sont des renseignements nominatifs concernant ces individus au sens de larticle 53 de la Loi sur laccès. Il est évident que la divulgation de ces renseignements permettrait de les identifier selon les termes de larticle 54 de cette loi. Ils doivent donc demeurer confidentiels : 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1° leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2° ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion.
05 19 00 Page : 7 54. Dans un document, sont nominatifs les renseignements qui concernent une personne physique et permettent de l'identifier. [21] Bien que les articles ci-dessus mentionnés naient pas été invoqués par lOrganisme, ils sont impératifs et peuvent être soulevés même doffice par la Commission, conformément, entre autres, à laffaire Deslauriers c. Québec (Sous-ministre de la Santé et des Services sociaux) 3 . [22] Néanmoins, lOrganisme devra communiquer au demandeur les documents suivants : La version des faits du demandeur intégralement; La « Preuve de Voir-dire » à la section « motif », il doit lui transmettre seulement le nom et la date de naissance du demandeur; Les renseignements se trouvant dans le document ci-dessus mentionné à la section « suite voir-dire » concernant le demandeur seulement; La « promesse de comparaître » adressée au demandeur intégralement. [23] Par ailleurs, parmi les documents en litige se trouvent également deux opinions juridiques, dont lune delles concerne le demandeur. Elles portent la signature dun substitut du procureur général. Celui-ci indique les motifs pour lesquels il refuse de déposer des accusations de nature criminelle contre le demandeur, en se basant sur les renseignements recueillis par lenquêteur relativement à la plainte pour menaces formulée contre lui. Ces deux documents sont protégés par le secret professionnel, selon les termes de larticle 9 de la Charte des droits et libertés de la personne 4 (la Charte). [24] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : ACCUEILLE en partie la demande de révision du demandeur contre lOrganisme; 3 [1991] C.A.I. 311 (C.Q.). 4 L.R.Q., c. C-12.
05 19 00 Page : 8 ORDONNE à lOrganisme de communiquer au demandeur les documents ou extraits de documents tels que décrits au paragraphe 22 de la décision; REJETTE, quant au reste, la demande; FERME le présent dossier. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire M e Pierre Zeppettini Procureur du demandeur
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