Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 06 12 97 Date : 31 octobre 2006 Commissaire : M e Jean Chartier DÉCISION L'OBJET DEMANDE DE RÉVISION en vertu de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels [1] Le 14 juillet 2006, le demandeur fait une demande auprès du responsable de l’accès aux documents de l’organisme. 1 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée « Loi sur l’accès ». X Demandeur c. AGENCE DE LA SANTÉ ET DES SERVICES SOCIAUX DE LA CÔTE-NORD Organisme 1 .
06 12 97 Page : 2 [2] La demande d’accès du demandeur mentionne : « […], je désire recevoir le ou les documents fesants parties du rapport d’enquête de Mme Nadine Lachance et du mandat qu’elle a reçu de Mme Demers dans ce dossier. » [sic] [3] Le demandeur indique dans cette lettre avoir eu une rencontre avec des représentants de l’organisme le 22 février 2006, au cours de laquelle il les informait de certaines situations « inacceptables » dont il a été témoin à la résidence Iberville, foyer de groupe sous la supervision de l’organisme. Suite à cette rencontre, l’organisme a confié à M me Nadine Lachance, commissaire locale aux plaintes, le mandat de faire un rapport à l’organisme sur cette situation. [4] Le 27 juillet 2006, l’organisme refusait la communication de ces documents en s’appuyant sur les articles 53, 54 et 88 de la Loi sur l’accès. [5] Le 8 août 2006, le demandeur transmettait une demande de révision à la Commission d’accès à l’information (la Commission). [6] Une audience a été tenue à Baie-Comeau, le 19 octobre 2006. L’AUDIENCE A) LA PREUVE i) Du demandeur [7] Il est éducateur spécialisé à l’emploi de l’organisme depuis de nombreuses années. Il a travaillé pendant quelques années à la résidence Iberville, située à Baie-Comeau, un établissement hébergeant un petit groupe de quatre à sept bénéficiaires – déficients intellectuels. Le demandeur témoigne à l’effet qu’il a assumé la gestion « par intérim » de cette résidence de 2002 à 2003. [8] À la suite de certains événements, le demandeur décide d’alerter les autorités de l’organisme afin de les sensibiliser aux diverses façons de faire au sein de cet établissement, en vue d’y apporter des correctifs qu’il juge nécessaires. C’est la raison pour laquelle il sollicitera et obtiendra une rencontre en février 2006, avec certains gestionnaires de l’organisme. Suite à cette rencontre, M me Nadine Lachance, commissaire locale aux plaintes, est chargée
06 12 97 Page : 3 de faire une évaluation de la qualité des services dispensés dans la résidence Iberville. [9] Le demandeur, qui offrait de collaborer au suivi de cette démarche, n’a jamais par la suite été rencontré par les représentants de l’organisme ou par M me Lachance. [10] En date du 6 juin 2006, le demandeur recevait une lettre de la présidente-directrice générale de l’organisme, M me Nicole Demers, l’avisant que le mandat de M me Nadine Lachance avait été complété et qu’un rapport complet sur l’examen des services offerts dans la résidence Iberville avait été déposé. [11] Le demandeur qui ne travaille plus dans cette résidence, dit avoir eu l’opportunité d’en connaître les bénéficiaires, les employés, les façons de faire et motive sa demande d’accès par l’intérêt qu’il porte à ses bénéficiaires et parce qu’il veut connaître les constatations faites par M me Nadine Lachance et les suites qui ont été données, le cas échéant. ii) De l’organisme [12] L’organisme dépose à la Commission une copie de la présentation « Power Point » faite par le demandeur, en septembre 2003 et qui contient une description des situations problématiques vécues à l’intérieur de la résidence Iberville. Ce document, il va de soi, est déjà en possession du demandeur. [13] Le procureur de l’organisme dépose, également sous pli confidentiel, le document constatant le mandat confié à M me Nadine Lachance ainsi que le rapport présenté par cette dernière à l’organisme. Ce dépôt est permis par l’article 20 des Règles de preuve et de procédure 2 de la Commission : 20. La Commission peut prendre connaissance, en l'absence du requérant et à huis clos, d'un document que l'organisme public ou le tiers prétend devoir être soustrait à l'accès en vertu d'une restriction prévue à la section II de la Loi. [14] Selon le procureur de l’organisme, ces documents ne peuvent être communiqués au demandeur compte tenu de la très grande quantité de renseignements personnels qui y sont contenus et dont l’organisme doit assurer la confidentialité en vertu des articles 53 et 54 de la Loi sur l’accès. 2 L.R.Q., c. A-2.1, r. 2.
06 12 97 Page : 4 [15] Selon ce dernier, il n’est pas possible d’en retirer les renseignements personnels puisque l’ensemble de ces renseignements forme la substance du document. [16] Enfin, le procureur de l’organisme mentionne que la position particulière du demandeur (il a travaillé à la résidence Iberville à titre d’éducateur et de gestionnaire auprès d’une clientèle limitée en nombre) fait en sorte qu’il lui serait possible, à la lecture du rapport, de reconnaître les individus concernés, qu’ils soient employés ou pensionnaires de la résidence. LA DÉCISION [17] Le 14 juillet 2006, le demandeur fait une demande d’accès à l’organisme en vue d’obtenir le rapport de M me Nadine Lachance, commissaire locale à la qualité des services relativement aux services offerts à la résidence Iberville. [18] L’article 9 de la Loi sur l’accès consacre le droit de toute personne à l’obtention des documents d’un organisme public. 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. [19] Ce droit d’accès n’est toutefois pas absolu. Dans la présente affaire, l’organisme invoque les articles 53 et 54 de la Loi sur l’accès à l’appui de son refus de communiquer le rapport demandé. Ces dispositions se lisent comme suit : 53. Les renseignements personnels sont confidentiels sauf dans les cas suivants : 1° la personne concernée par ces renseignements consent à leur divulgation; si cette personne est mineure, le consentement peut également être donné par le titulaire de l'autorité parentale; 2° ils portent sur un renseignement obtenu par un organisme public dans l’exercice d’une fonction juridictionelle; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion.
06 12 97 Page : 5 54. Dans un document, sont personnels les renseignements qui concernent une personne physique et permettent de l'identifier. [20] Il est vrai qu’aucune preuve n’a été faite à l’effet que les personnes concernées aient pu accorder leur consentement à la divulgation des renseignements les concernant. [21] En conséquence, la Commission doit protéger le caractère confidentiel des renseignements personnels qui apparaissent dans les documents déposés par l’organisme. Par contre, pour en avoir fait la lecture attentive, le soussigné ne croit pas que l’ensemble de ce rapport doive faire l’objet d’une restriction au droit d’accès du demandeur. [22] Il s’agit là d’un document qui, dans la majeure partie de son contenu, établit le mandat reçu, le détail des constatations faites par son auteur, les rencontres effectuées, le suivi des dossiers cliniques des bénéficiaires, l’appréciation de l’entourage de certains clients, l’appréciation du délégué du Curateur public, de même que les résultats et les recommandations pour l’avenir. Ce rapport contient également deux annexes dont l’une fait le bilan des soins requis pour chaque client et pour chaque activité quotidienne alors que la deuxième annexe est une évaluation des indicateurs de qualité de vie préparée par le délégué du Curateur public. [23] La Commission considère que les pages un à sept doivent être communiquées au demandeur, sauf pour certains passages que le soussigné a caviardés et qui pourraient avoir pour effet de divulguer des renseignements personnels sur certains individus. [24] Les pages sept à onze doivent être masquées et ne peuvent être communiquées au demandeur puisqu’elles constituent une appréciation des bénéficiaires et de leur famille. À ce titre, ces extraits contiennent des renseignements personnels et confidentiels que la Commission doit protéger. Il n’est pas possible d’extraire uniquement certains passages de ces pages puisque ces renseignements forment la substance de cette partie du rapport. L’article 14 de la Loi sur l’accès prévoit : 14. Un organisme public ne peut refuser l'accès à un document pour le seul motif que ce document comporte certains renseignements qu'il doit ou peut refuser de communiquer en vertu de la présente loi. Si une demande porte sur un document comportant de tels renseignements, l'organisme
06 12 97 Page : 6 public peut en refuser l'accès si ces renseignements en forment la substance. Dans les autres cas, l'organisme public doit donner accès au document demandé après en avoir extrait uniquement les renseignements auxquels l'accès n'est pas autorisé. [25] Quant aux pages douze et treize, elles font état du rapport du délégué du Curateur public de même que des éléments qu’il a évalués et la Commission ne voit pas pourquoi cette partie du rapport, qui ne contient aucun renseignement personnel, devrait être refusée au demandeur. Les pages treize à dix-neuf du rapport contiennent le plan d’action, les résultats, les actions entreprises depuis 2004 et la conclusion de l’auteure. Malgré quelques renseignements personnels masqués à l’intérieur des pages précitées, le rapport demeure tout à fait compréhensible pour un lecteur intéressé. [26] En ce qui concerne les annexes du document, elles doivent être refusées au demandeur puisqu’elles contiennent un grand nombre de renseignements qui permettraient d’identifier des personnes hébergées dans la résidence. Ces renseignements doivent demeurer confidentiels. [27] Un dernier document a également été déposé sous pli confidentiel à la Commission, il s’agit d’une lettre transmise par la présidente-directrice générale de l’organisme, M me Nicole Demers, à M me Nadine Lachance, commissaire locale à la qualité des services, décrivant le mandat qui lui était donné. Cette lettre ne contient aucune information particulière à caractère confidentiel et elle doit être communiquée au demandeur. [28] Procédant à statuer sur la communication de ces extraits du rapport de M me Lachance, le soussigné s’appuie en outre sur une décision soumise par le procureur de l’organisme dans laquelle la demanderesse exigeait également la communication d’un rapport d’enquête. L’organisme n’en avait communiqué que des extraits factuels et en avait retiré tous les renseignements personnels. La Commissaire écrit 3 : « Ainsi, après examen du document intégral et de sa copie élaguée, la soussignée considère que l’organisme était justifié de communiquer à la demanderesse une copie comme il l’a fait, en prenant soin d’extraire au préalable les renseignements nominatifs, et ce, dans le respect des articles 53, 54 et 88 de la Loi sur l’accès. » 3 Mme X c. Centre de réadaptation en déficience intellectuelle Normand-Laramée, C.A.I. Montréal, n o 03 03 72, 31 mars 2004, c. Constant.
06 12 97 Page : 7 POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : ACCUEILLE en partie la demande de révision; ORDONNE à l’organisme de communiquer au demandeur dans les trente (30) jours de la réception de la présente décision, le rapport réalisé par M me Nadine Lachance en mai 2006, dans lequel on aura caviardé les extraits suivants : Au 1 er paragraphe de la page 4, les mots compris après le mot « développement » jusqu’à la fin de ce paragraphe; Au dernier paragraphe de la page 4, les mots compris entre le mot « entretenue » et le mot « L’objectif »; Au 1 er paragraphe de la page 5, à la 2 e ligne, les mots compris entre le mot « par » et « concordent »; Dans le 2 e paragraphe de la page 5, les mots qui suivent « progrès important » dans cette ligne; À la page 6, dans les 6 e et 7 e ligne du 2 e paragraphe, les mots compris entre les mots « 4 en 5 ans » et les mots « sont les motifs »; Au 2 e paragraphe de la page 7, les mots compris entre le mot « utilisés » et le mot « médecin »; À la page 7, le dernier paragraphe de cette page comptant 5 lignes; Tout le contenu des pages 8, 9, 10 et 11; Les 2 premières lignes de la page 12; Dans le dernier paragraphe de la page 12, à la dernière ligne, les mots compris entre « le fait que » et « la même chambre »; À la page 15, les 3 dernières lignes du 3 e paragraphe après les mots « le 25 mars 2004 »; À la page 16, à la fin du 4 e paragraphe, les mots qui suivent « l’amélioration des services ». ORDONNE également à l’organisme de transmettre au demandeur une copie de la lettre du 24 février 2006 adressée à M me Nadine Lachance par M me Nicole Demers, et ce, dans les trente (30) jours de la réception de la présente décision;
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