Commission d’accès à l’information Dossier : 05 15 99 Date : 13 septembre 2006 Commissaire : M e Jean Chartier X Demanderesse c. VILLE DE QUÉBEC Organisme DÉCISION L'OBJET DEMANDE DE RÉVISION en vertu de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 . [1] Le 5 juillet 2005, la demanderesse fait une demande d’accès auprès de l’organisme dans laquelle elle réclame : « … l’état financier démontrant les revenus et les dépenses incluant les subventions, programme d’aide financière et budget accordé aux apprentis-moniteur, etc. etc. du Parc Bon Pasteur (Programme Vacances été) soit 2003, 2004 ou 2005 afin d’en comprendre le fonctionnement. » 1 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée « Loi sur l’accès ».
05 15 99 Page : 2 [2] Le 18 août 2005, après l’avoir avisé de la prolongation du délai de réponse, la responsable de l’accès de l’organisme transmet à la demanderesse les documents demandés et en réclame le coût de reproduction au montant de 46,54 $. [3] Le 6 septembre 2005, la demanderesse demande la révision de cette décision de l’organisme alléguant ne pas avoir obtenu les documents demandés et ne pas devoir payer le coût exigé par l’organisme. [4] Le 10 février 2006, l’audition de cette affaire a eu lieu devant la commissaire Diane Boissinot qui a pris l’affaire en délibéré. Suite à la terminaison des fonctions de la commissaire précitée, les parties ont accepté que le soussigné soit saisi du dossier et qu’il rende une décision en lieu et place de celle-ci. [5] Après avoir procédé à l’audition de l’enregistrement des débats du 10 février 2006 ainsi qu’à l’étude de la documentation au dossier, il apparaît nécessaire de résumer la preuve faite et la position des parties. LA PREUVE i) De l'organisme : [6] La procureure de la Ville de Québec, responsable de l’accès aux documents, M e Line Trudel, explique avoir reçu et traité la demande qui fait l’objet du litige. Le 18 août 2005, elle a transmis à la demanderesse les documents qui ont été déposés en liasse comme pièce O-6. Elle dépose également en pièce O-5, un affidavit de M. Denis Servais, directeur de la division Culture, loisirs et vie communautaire de l’Arrondissement de Charlesbourg depuis la fusion municipale de l’année 2001. [7] Cet affidavit révèle que ce dernier assume la gestion du « Programme apprentis moniteurs » et du « Programme vacances-été » à l’égard du Parc Bon- Pasteur pour les années visées par la demande. Par cet affidavit, Denis Servais affirme que les documents remis : « représentent tous les documents en possession de la Ville de Québec à cet égard et qu’il n’existe aucun autre document pouvant répondre à la demande de M me X. » [8] Monsieur Servais, qui était présent à l’audience a rendu un témoignage sur lequel nous reviendrons ultérieurement.
05 15 99 Page : 3 [9] La procureure de l’organisme explique à la Commission que l’organisme ne détient aucun document contenant les états financiers ou un bilan des activités apprentis moniteurs et vacances-été relatif au Parc Bon-Pasteur. En conséquence, la documentation remise est globale et concerne toutes les activités de loisirs pour l’Arrondissement Charlesbourg. Elle ajoute qu’elle a fait « surligner » les passages de cette documentation qui concernent spécifiquement le Parc Bon-Pasteur. [10] Monsieur Denis Servais est également entendu par la Commission. En plus de confirmer le contenu de l’affidavit pièce O-5, il explique que le Parc Bon-Pasteur est l’un des nombreux parcs de loisirs de l’Arrondissement Charlesbourg pour lequel la Ville de Québec a conclu une entente. Cette entente a pour but de confier la responsabilité de certains parcs, des loisirs et des moniteurs reliés à ces parcs à la Corporation des loisirs Notre-Dame-des-Laurentides qui reçoit pour ce faire une subvention de l’organisme. [11] Le témoin explique que la documentation remise fait état de façon globale des revenus et des dépenses du « Programme vacances-été » des quatorze parcs de l’Arrondissement Charlesbourg. Les dépenses et les revenus sont traités globalement pour tout l’arrondissement dans la documentation remise. Le système de répartition des revenus et des dépenses ne permet pas d’extraire les coûts et les dépenses du Parc Bon-Pasteur. [12] Au cours de son témoignage, le témoin indique que l’organisme détient les états financiers de la Corporation des loisirs Notre-Dame-des-Laurentides. Toutefois, ces états financiers démontrent des dépenses et des revenus globaux sans inscription particulière relative au « Programme des apprentis moniteurs ». Or, la demanderesse réclame les états financiers de la Ville en ce qui concerne ces postes de dépenses et de revenus. Comme elle veut savoir précisément comment l’organisme utilise les sommes versées par les parents pour les loisirs, les états financiers de la Corporation de loisirs ne lui donneraient pas l’information recherchée. ii) De la demanderesse : [13] La demanderesse témoigne pour indiquer à la Commission son insatisfaction par rapport à la documentation qui lui a été transmise et au coût de celle-ci. Elle explique qu’elle a fait cette demande en sa qualité de « parent et contribuable » parce qu’elle veut savoir comment la Ville utilise les sommes recueillies auprès des citoyens en guise de frais d’inscription pour des activités dans ses parcs. Elle n’a trouvé dans la documentation fournie aucune réponse à ses interrogations. Elle réitère à l’audience sa demande pour obtenir « des états
05 15 99 Page : 4 financiers démontrant clairement les revenus et les dépenses reliés au « Programme des apprentis moniteurs » du Parc Bon-Pasteur pour 2003, 2004 et 2005 ». [14] La demanderesse dépose à la Commission un document de trois pages, émanant du Registraire des entreprises et donnant des informations sur la Corporation de loisirs – secteur Notre-Dame-des-Laurentides. On y apprend que cette Corporation est constituée en vertu de la Partie III de la Loi sur les compagnies 2 , qu’elle est en conséquence une société sans but lucratif dont les activités sont l’administration et le développement des loisirs. Ce document contient le nom des administrateurs et on constate que l’organisme n’y est aucunement représenté. LA DÉCISION [15] À plusieurs reprises au cours de l’audience, la demanderesse a fait valoir son insatisfaction par rapport à la documentation qui lui a été remise et a réclamé de véritables états financiers. [16] L’organisme prétend que la documentation qu’il détient relativement à la demande a été transmise. Cette documentation est la seule disponible et la loi ne fait pas l’obligation de structurer ou traiter autrement l’information contenue afin de donner satisfaction à la demanderesse. L’organisme a donc rempli son obligation et exige le paiement des frais exigibles pour la reproduction. Les articles 1 et 9 de la Loi sur l’accès stipulent : 1. La présente loi s'applique aux documents détenus par un organisme public dans l'exercice de ses fonctions, que leur conservation soit assurée par l'organisme public ou par un tiers. Elle s'applique quelle que soit la forme de ces documents: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. 2 L.R.Q., c. C-38.
05 15 99 Page : 5 [17] La preuve révèle que l’organisme procède à la gestion financière des loisirs de façon globale par arrondissement et non de façon particularisée selon le poste de dépenses ou le parc concerné. Toute cette information est colligée sur un programme informatique de l’organisme dont la description est : « Activités financières – Arrondissement 4 – Culture, Loisir, Vie Communautaire. » [18] Des extraits de ce fichier informatique qui concernent la demande ont été remis à la demanderesse pour les années 2003, 2004 et 2005. D’autres documents contiennent des procès-verbaux de décisions prises au Conseil d’arrondissement. [19] Considérant que la demanderesse dit ne pas trouver l’information recherchée, l’organisme a-t-il l’obligation de refaire ses devoirs et de traiter l’information remise pour en produire un résultat qui serait à la satisfaction de la demanderesse ? L’article 15 de la Loi sur l’accès précise l’étendue de l’obligation de l’organisme : 15. Le droit d'accès ne porte que sur les documents dont la communication ne requiert ni calcul, ni comparaison de renseignements. [20] À plusieurs reprises, la Commission a interprété la portée de l’article 15 de la Loi sur l’accès. Dans Regroupement des citoyens de Lachine c. Cité de Lachine 3 la demande d’accès visait à obtenir les salaires des cadres intermédiaires de la Ville de même que les dépenses annuelles à la charge de la Ville au chapitre des automobiles. La responsable de l’accès a répondu que ces renseignements n’existaient pas dans la forme demandée. Elle a ajouté qu’elle devrait confectionner un document qui n’existe pas pour donner suite à la demande. La Commission écrit : « La preuve entendue lors de l’audition veut que l’information recherchée ici par le demandeur soit constituée de chiffres provenant de plusieurs sources et qu’un document compilant tous ces chiffres n’existe pas. L’information recherchée comprend des dépenses d’immobilisation, des dépenses d’utilisation et de location, des frais de déplacement remboursés, soit par chèque à l’ordre de l’employé qui les réclame, soit par la petite caisse dans les cas où une avance a été faite à même cette source. La plupart de ces informations, de dire le responsable, pourraient être retrouvées en effectuant une recherche à partir des pièces appropriées – comptes à 3 [1986], C.A.I. 75.
05 15 99 Page : 6 payer ou pièces justificatives des déboursés de petite caisse, par exemple – ou des postes appropriés dans les états financiers de l’organisme. La Loi d’accès toutefois, de soumettre le responsable, ne l’oblige pas à effectuer cette recherche. La Commission ne peut que faire droit à cette prétention. La communication d’un document qui correspondrait strictement à la demande formulée ici impliquerait nécessairement une opération de comparaison de renseignements. Or, l’article 15 est clair. Il n’oblige pas un organisme à faire un tel travail. […] ». [21] De même, dans MRC D’Acton c. Corporation municipale de St-Valérien 4 , la Commission écrit : « Citant les articles 1 et 15 de la Loi sur l’accès, il (le procureur) a soutenu que la Loi ne peut obliger un organisme à confectionner des documents. Or, a-t-il souligné, la preuve démontre clairement qu’aucun des documents demandés n’existe déjà et n’est détenu par l’organisme, dans la forme demandée. Il est possible, d’ajouter le procureur, que certains des renseignements recherchés ici doivent être transmis à la MRC en vertu des dispositions de lois sectorielles. Si tel était le cas, les recours appropriés pour forcer la Corporation municipale à agir doivent être exercés en vertu des lois sectorielles. À partir du moment toutefois où les renseignements recherchés ne se trouvent pas déjà compilés dans des documents existants, la Loi sur l’accès ne saurait être le remède approprié pour donner satisfaction à la MRC et sa demande d’accès doit être rejetée. […] Dans le présent cas, la soussignée est d’avis que les explications fournies par la représentante de l’organisme et la preuve, dans son ensemble, établissent bien que les documents recherchés par la demanderesse ne correspondent pas à des documents déjà existants au sein de l’organisme. Ces documents pourraient sans doute être confectionnés moyennant une recherche et une 4 [1984], C.A.I. 579.
05 15 99 Page : 7 compilation d’information, mais la Loi sur l’accès n’exige pas cela de l’organisme. » [22] La demanderesse maintient à l’audience qu’elle veut obtenir le montant total représenté par les inscriptions des jeunes au service des loisirs ainsi que la part de ces montants qui est versée à la Corporation pour les activités du Parc Bon-Pasteur. Bien qu’il soit permis de croire que l’organisme détient ces informations, le témoin Servais a indiqué qu’il faudrait les retrouver et les traiter à partir de plusieurs documents ou de plusieurs sources d’information. Il faudrait en conséquence créer le document demandé. Conformément à la position déjà adoptée dans les décisions précitées, la Commission considère que l’organisme n’est pas obligé de fabriquer un nouveau document pour satisfaire une demande particulière 5 . [23] Considérant la preuve faite, le soussigné ne peut faire droit à la demande de révision de la demanderesse. [24] Il reste à décider de la question des frais exigibles qui ont été réclamés par l’organisme pour la reproduction de la documentation transmise. [25] La demanderesse demande d’en être exemptée pour le motif que ces documents ne répondent pas à sa demande. De son côté, la procureure de l’organisme maintient la demande de paiement en s’appuyant sur l’article 11 de la Loi sur l’accès : 11. L'accès à un document est gratuit. Toutefois, des frais n'excédant pas le coût de sa transcription, de sa reproduction ou de sa transmission peuvent être exigés du requérant. Le montant et les modalités de paiement de ces frais sont prescrits par règlement du gouvernement; ce règlement peut prévoir les cas où une personne est exemptée du paiement. L'organisme public qui entend exiger des frais en vertu du présent article doit informer le requérant du montant approximatif qui lui sera chargé, avant de procéder à la transcription, la reproduction ou la transmission du document. 5 Leblanc c. Ville de Cabano, [2003] C.A.I. 633; Greenbaum c. Curateur public du Québec, C.A.I. Montréal, 6 mars 2003, c. Stoddart.
05 15 99 Page : 8 [26] On le constate, l’article 11 permet de réclamer les coûts de la transcription et à ce titre, un montant de 46,54 $ est exigé de la demanderesse. En effet, la lettre transmise à la demanderesse le 18 août 2005 exige le paiement de la documentation qui y est jointe. Rien n’indique toutefois que l’organisme avait d’abord avisé la demanderesse du coût qui lui serait chargé avant de procéder à la reproduction conformément au 4 e paragraphe de l’article 11. S’il l’avait fait, la demanderesse aurait pu choisir de consulter les documents sur place avant de décider d’en réclamer une copie, conformément à l’article 10 de la Loi sur l’accès : 10. Le droit d'accès à un document s'exerce par consultation sur place pendant les heures habituelles de travail ou à distance. Le requérant peut également obtenir copie du document, à moins que sa reproduction ne nuise à sa conservation ou ne soulève des difficultés pratiques sérieuses en raison de sa forme. À la demande du requérant, un document informatisé doit être communiqué sous la forme d'une transcription écrite et intelligible. [27] De toute évidence, ce choix n’a pas été offert à la demanderesse et le coût de la transcription lui a été réclamé en même temps que l’envoi, ce qui est contraire à la Loi. En conséquence, la Commission rejette la demande de paiement de l’organisme. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : REJETTE la demande de révision; STATUANT sur les frais exigibles réclamés par l’organisme; REJETTE la demande de l’organisme en paiement du montant de 46,54 $. JEAN CHARTIER Commissaire M e Line Trudel Procureure de l'organisme
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