Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 03 05 45 Date : 22 juin 2006 Commissaire : M e Christiane Constant X Demanderesse c. VILLE DE GATINEAU Organisme DÉCISION L’OBJET DU LITIGE [1] Le 9 février 2003, la demanderesse requiert de la Ville de Gatineau (l’Organisme) une copie d’un rapport d’accident ainsi que la déclaration de chacune des trois personnes impliquées, incluant elle-même. [2] Le 18 mars 2003, M e Benoit Ducharme, responsable de l’accès aux documents au Service de police de l’Organisme, transmet à la demanderesse une copie intégrale de sa déclaration et lui achemine, par la même occasion, une copie élaguée des déclarations des autres personnes.
03 05 45 Page : 2 [3] Insatisfaite, la demanderesse sollicite, le 24 mars 2003, l’intervention de la Commission d'accès à l'information (la Commission) pour que celle-ci révise la décision de l’Organisme. L’AUDIENCE [4] Ayant été reportée à la requête de la demanderesse, la présente audience se tient, le 19 mai 2006, à Gatineau, l’Organisme étant représenté par M e Sébastien Gagnon. LA PREUVE A) DE L’ORGANISME Témoignage de M me Danielle Dumoulin [5] Interrogée par M e Gagnon, M me Dumoulin affirme qu’elle est policière depuis plus de 20 ans. Elle est responsable de l’accès aux documents en remplacement de M e Ducharme. Elle déclare que le Service de police a communiqué à la demanderesse la majeure partie des documents. Les renseignements nominatifs, tels la date de naissance des personnes rencontrées par le policier et les commentaires personnels émis par ces dernières en rapport avec l’évènement en question, y sont inscrits. [6] M me Dumoulin précise que le rapport d’évènement a été rédigé par un policier, le 8 février 2003, à la suite d’une plainte portée par un tiers contre la demanderesse. En fait, deux témoins ont été rencontrés par un policier. Elle constate cependant que, par mégarde, l’identité de ce tiers n’a pas été masquée par l’Organisme. [7] M me Dumoulin ajoute qu’une consultation a été effectuée par un policier au Centre des renseignements policiers du Québec (le C.R.P.Q.) eu égard à l’évènement impliquant la demanderesse et d’autres personnes. À son avis, les renseignements obtenus par ce policier au C.R.P.Q. devraient demeurer confidentiels afin de ne pas révéler une méthode d’enquête utilisée par le policier ayant procédé à cette vérification. B) DE LA DEMANDERESSE [8] La demanderesse reconnaît que l’Organisme lui a communiqué des documents et qu’elle a agi de façon inappropriée à l’égard d’une personne, soit sa
03 05 45 Page : 3 fille, pour laquelle l’intervention des policiers était devenue nécessaire. Elle ajoute que son conjoint a été également impliqué dans l’évènement ayant mené à la rédaction d’un rapport. Elle indique qu’elle trouve inacceptable que l’Organisme refuse de lui communiquer l’intégralité des documents demeurant en litige, puisque cela concerne sa fille et son conjoint, qui est le père de celle-ci. [9] Par ailleurs, la demanderesse prétend qu’à partir des évènements en question, elle a entrepris une démarche personnelle et thérapeutique afin de pouvoir mener une vie sereine. LA PLAIDOIRIE [10] M e Gagnon plaide que le témoignage non contredit de M me Dumoulin démontre que l’Organisme a communiqué à la demanderesse la plupart des documents et que les renseignements demeurant en litige sont nominatifs au sens de l’article 53 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la Loi sur l’accès). Ils doivent demeurer confidentiels, la preuve n’ayant pas démontré que les deux témoins mentionnés dans le rapport d’événement aient consenti à la divulgation des commentaires et des renseignements personnels les concernant, selon les termes de l’article 88 de la Loi sur l’accès. DÉCISION [11] La demanderesse désire avoir accès à l’intégralité des renseignements contenus dans un rapport d’évènement, selon les termes du 1 er alinéa de l’article 9 de la Loi sur l’accès : 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. [12] La demanderesse reconnaît à l’audience que l’Organisme lui a communiqué des documents. Elle souhaite toutefois avoir accès à leur intégralité, d’autant plus qu’elle prétend connaître les deux témoins identifiés dans le rapport d’évènement. Il s’agirait de sa fille et de son conjoint, qui est le père de celle-ci. 1 L.R.Q., c. A-2.1.
03 05 45 Page : 4 [13] L’examen du rapport d’évènement démontre que les renseignements nominatifs concernant des personnes autres que la demanderesse ont été biffés par l’Organisme. Leurs commentaires personnels ont également été masqués par l’Organisme. Il est évident que la divulgation de ces renseignements permettrait d’identifier ces personnes au sens des articles 53 et 54 de la Loi sur l’accès : 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1° leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2° ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. 54. Dans un document, sont nominatifs les renseignements qui concernent une personne physique et permettent de l'identifier. [14] Par ailleurs, le fait pour la demanderesse de connaître vraisemblablement l’identité des deux témoins ne lui donne pas automatiquement un droit d’accès aux renseignements confidentiels concernant ces derniers. En l’absence de consentement à la divulgation selon les termes de l’article 88, tous les renseignements nominatifs concernant ces témoins doivent demeurer confidentiels, conformément, à l’affaire Deveau, Lavoie, Bourgeois, Lalande & Associés c. Directeur général des élections 2 : 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 4 o de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement nominatif concernant une autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement, à moins que cette dernière n'y consente par écrit. 2 [2004] C.A.I. 73; appel rejeté, [2005] C.A.I. 495 (C.Q.).
03 05 45 Page : 5 [15] En ce qui a trait aux renseignements obtenus par le C.R.P.Q. qui sont inscrits dans le rapport d’évènement, la preuve démontre que leur divulgation révélerait effectivement une méthode d’enquête dont s’est servi un policier, selon les termes du 3 e paragraphe de l’article 28 de la Loi sur l’accès. [16] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : PREND ACTE que l’Organisme a communiqué à la demanderesse des documents; CONSTATE que l’Organisme était fondé de ne pas communiquer à la demanderesse les extraits de documents demeurant en litige; REJETTE, quant au reste, la demande de révision de la demanderesse contre l’Organisme; FERME le présent dossier. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire M e Sébastien Gagnon Procureur de l’Organisme
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