Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 04 14 96 Date : 6 juin 2006 Commissaire : M e Christiane Constant X Demandeur c. MUNICIPALITÉ DE MONTPELLIER Organisme _________________________________________________________________ DÉCISION _________________________________________________________________ L’OBJET DU LITIGE [1] Le 17 septembre 2004, le demandeur requiert de la Municipalité de Montpellier (l’Organisme) une copie d’une opinion juridique ayant été rédigée par le conseiller de celui-ci relativement au « […] dossier de l’Ébénisterie Monpier a Montpellier » (sic). [2] Le 27 septembre 2004, par l’entremise de M me Henriette Dupuis, secrétaire-trésorière, l’Organisme refuse au demandeur l’accès à l’opinion juridique recherchée. Elle indique que ce document est protégé par le secret professionnel et invoque de plus l’article 32 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la Loi sur l’accès). 1 L.R.Q., c. A-2.1.
04 14 96 Page : 2 [3] Le 29 septembre 2004, le demandeur s’adresse à la Commission d’accès à l’information (la Commission) afin que soit révisée la décision de l’Organisme. L’AUDIENCE [4] L’audience de la présente cause, qui a été reportée, se tient en la Ville de Gatineau, le 3 mai 2006, en présence du demandeur et de deux témoins de l’Organisme. LA PREUVE A) DE L’ORGANISME i) Témoignage de M me Henriette Dupuis [5] M me Dupuis déclare qu’elle est secrétaire-trésorière et travaille pour l’Organisme depuis 1986. Elle a pris connaissance de la demande formulée par le demandeur auprès de l’Organisme. Celle-ci vise l’obtention d’une opinion juridique émise par les procureurs de l’Organisme relativement à l’entreprise « Monpier Ébéniste » située dans le secteur où réside le demandeur. [6] Selon M me Dupuis, seuls les conseillers municipaux de l’Organisme ainsi que le maire ont pris connaissance de l’opinion juridique en litige et individuellement dans son bureau. Chacun d’eux a dû préalablement signer un document à cet effet et personne n’en a obtenu une copie. Elle dépose, sous le sceau de la confidentialité, le document en litige. ii) Témoignage de M. Stéphane Séguin [7] M. Séguin affirme qu’il est le maire de l’Organisme depuis le mois de novembre 2005, en remplacement de M. Rhéo Faubert. Il affirme qu’en sa qualité de maire, il s’est rendu au bureau de M me Dupuis afin de prendre connaissance de l’opinion juridique recherchée par le demandeur. Il a dû préalablement signer un formulaire afin de pouvoir lire ce document. B) DU DEMANDEUR [8] Le demandeur déclare que l’entreprise Monpier Ébéniste qui embauche des employés se trouve dans son village. Les produits qu’elle utilise dégagent entre autres des « odeurs de vernis », de la poussière et du bruit. En raison des inconvénients que lui a fait subir cette entreprise, le demandeur a fait part de ses préoccupations aux élus municipaux lors des assemblées du conseil municipal.
04 14 96 Page : 3 Ceux-ci l’ont mise en demeure de se conformer aux règlements municipaux relativement aux odeurs que dégagent ces produits. L’entreprise n’a pas donné suite aux exigences de l’Organisme. Le 25 mai 2004, le conseil municipal a donc adopté une résolution pour que ce dossier soit transmis à M e Stéphane Sansfaçon du cabinet d’avocats Prévost, Auclair (pièce D-1). [9] Le demandeur prétend que, depuis quatre ans, les inconvénients occasionnés par Monpier Ébéniste perdurent. Il dit comprendre que le document en litige revêt un caractère confidentiel et désire être en mesure d’en prendre connaissance au même titre que les conseillers municipaux et le maire. Témoignage de M me C. G. [10] M me C. G. affirme qu’elle est l’épouse du demandeur. Elle confirme, pour l’essentiel, le témoignage de celui-ci. Elle prétend que l’Organisme a versé un montant substantiel au cabinet d’avocats Prévost, Auclair afin que celui-ci procède à la rédaction de l’opinion juridique. Elle ne voit pas de motif valable pour que l’Organisme refuse au demandeur l’accès à ce document. DÉCISION [11] L’article 9 de la Loi sur l’accès permet à toute personne qui en fait la demande, incluant le demandeur, d’avoir accès à un document, sous réserve de certaines restrictions législatives : 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. [12] Ces restrictions législatives au droit d’accès à un document se trouvent aux articles 18 à 41 de la Loi sur l’accès. [13] Par ailleurs, je constate que, dans sa réponse au demandeur, l’Organisme invoque comme motif de refus l’article 32 de la Loi sur l’accès. Ce dernier vise plutôt une analyse qui n’a rien à voir avec le document en litige. C’est l’article 31 de la Loi sur l’accès qui traite d’une opinion juridique. Il se trouve sous la rubrique « Renseignements ayant des incidences sur les décisions administratives ou politiques » et porte, entre autres, sur l’application du droit à un cas particulier :
04 14 96 Page : 4 31. Un organisme public peut refuser de communiquer une opinion juridique portant sur l'application du droit à un cas particulier ou sur la constitutionnalité ou la validité d'un texte législatif ou réglementaire, d'une version préliminaire ou d'un projet de texte législatif ou réglementaire. [14] Il a déjà été établi, notamment dans l’affaire Gélinas c. Centre local de services communautaires de Hull 2 , qu’un organisme n’ayant pas invoqué l’article 31 de la Loi sur l’accès lors du traitement de la demande peut toujours invoquer l’article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne 3 : 9. Chacun a droit au respect du secret professionnel. Toute personne tenue par la loi au secret professionnel et tout prêtre ou autre ministre du culte ne peuvent, même en justice, divulguer les renseignements confidentiels qui leur ont été révélés en raison de leur état ou profession, à moins qu'ils n'y soient autorisés par celui qui leur a fait ces confidences ou par une disposition expresse de la loi. Le tribunal doit, d'office, assurer le respect du secret professionnel. [15] Dans le cas sous étude, je suis d’avis que le document en litige est protégé par le secret professionnel au sens de l’article 9 précité et que les renseignements qu’il contient revêtent un caractère confidentiel. La Cour du Québec a déjà statué, dans l’affaire Québec (Ministère de la Sécurité publique) c. Joncas 4 , qu’il est du devoir de la Commission de soulever d’office la restriction prévue à l’article 31 de la Loi sur l’accès. [16] Par ailleurs, le demandeur indique, lors de son témoignage, qu’il reconnaît que l’opinion juridique est confidentielle, mais qu’il souhaite plutôt consulter ce document au même titre que les conseillers municipaux. [17] Je ne suis pas de cet avis puisque la consultation de ce document par le demandeur lui enlèverait tout l’aspect confidentiel. [18] L’examen de ce document démontre qu’il s’agit bel et bien d’une opinion juridique (de 15 pages) au sens de l’article 31 précité, provenant du cabinet d’avocats Prévost, Auclair et adressée à M me Dupuis pour l’Organisme. Celle-ci réfère à un cas particulier, soit Monpier Ébéniste, à la suite d’un mandat confié par le conseil municipal par résolution adoptée le 25 mai 2004 (pièce D-1 pré-citée) à ce même cabinet d’avocats. Les renseignements contenus dans ce 2 [2000] C.A.I. 327. 3 L.R.Q., c. C-12. 4 J.E. 99-1653 (C.Q.).
04 14 96 Page : 5 document revêtent donc un caractère confidentiel et sont également protégés par le secret professionnel. [19] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : DÉCLARE que l’Organisme est fondé à refuser de communiquer ou de donner accès au demandeur à l’opinion juridique en litige; REJETTE la demande de révision du demandeur; FERME le présent dossier. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire
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