Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 05 04 74 Date : 16 mai 2006 Commissaire : M e Christiane Constant X Demandeur c. VILLE DE MONTRÉAL Organisme DÉCISION L’OBJET DU LITIGE DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE DE RECTIFICATION DE RENSEIGNEMENTS NOMINATIFS [1] Le 24 janvier 2005, le demandeur requiert de M e Suzanne Bousquet, responsable de l’accès à l’information à la Ville de Montréal (l’Organisme), une copie intégrale d’un rapport d’évènement ainsi que les déclarations de témoins se trouvant dans un dossier le concernant. [2] Le 28 janvier 2005, M e Bousquet transmet au demandeur un accusé de réception et, le 11 février suivant, l’avise qu’un délai additionnel de dix jours est nécessaire à sa demande.
05 04 74 Page : 2 [3] Le 21 mars 2005, le demandeur informe la Commission d’accès à l’information (la Commission) que les documents transmis par le Service de police de l’Organisme sont incompréhensibles et illisibles. Il demande donc la révision de cette décision. L’AUDIENCE [4] L’audience de la présente cause se tient à Montréal, le 20 avril 2006, en présence du demandeur et de l’Organisme, représenté par M e Paul Quézel. LA PREUVE DU DEMANDEUR [5] Le demandeur reconnaît qu’à la suite de sa demande de révision devant la Commission, l’Organisme lui a communiqué le nom et les coordonnées du suspect lui ayant causé des dommages. Il désire intenter contre celui-ci un recours devant la Cour du Québec (Division des petites créances). Il ajoute que les coordonnées des témoins inscrits dans le rapport d’évènement du Service de police de l’Organisme lui sont nécessaires afin que ceux-ci puissent témoigner dans sa cause. Il estime avoir le droit d’obtenir les renseignements contenus dans ces documents, en vertu de la Charte des droits et libertés de la personne 1 (la Charte). LES ARGUMENTS DE L’ORGANISME [6] M e Quézel fait valoir qu’à la suite de la demande de révision du demandeur devant la Commission, l’Organisme a communiqué à celui-ci le même document contenant le nom et les coordonnées du suspect ayant causé des dommages au demandeur. [7] Quant aux coordonnées des témoins inscrits dans le rapport d’évènement qu’il dépose sous le sceau de la confidentialité, M e Quézel plaide que même si l’Organisme avait voulu transmettre au demandeur ces renseignements, il ne peut pas le faire, ceux-ci étant confidentiels en vertu de l’article 53 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements 1 L.R.Q., c. C-12.
05 04 74 Page : 3 personnels 2 (la Loi sur l’accès). De plus, l’Organisme n’a pas obtenu le consentement de ces personnes afin que leurs coordonnées respectives soient communiquées au demandeur. Également, l’Organisme ne peut pas transmettre au demandeur ces coordonnées, ces personnes identifiées étant des témoins au sens du 2 e alinéa du 9 e paragraphe de l’article 59 de la Loi sur l’accès. DÉCISION [8] Les renseignements nominatifs contenus dans le rapport d’évènement en litige concernent le demandeur au sens de l’article 83 de la Loi sur l’accès. Celui-ci a été impliqué dans un incident et cherche à obtenir les coordonnées respectives des témoins qui sont identifiés dans le rapport d’évènement en litige et les déclarations de témoins : 83. Toute personne a le droit d'être informée de l'existence, dans un fichier de renseignements personnels, d'un renseignement nominatif la concernant. Elle a le droit de recevoir communication de tout renseignement nominatif la concernant. Toutefois, un mineur de moins de quatorze ans n'a pas le droit d'être informé de l'existence ni de recevoir communication d'un renseignement nominatif de nature médicale ou sociale le concernant, contenu dans le dossier constitué par l'établissement de santé ou de services sociaux visé au deuxième alinéa de l'article 7. [9] Le demandeur prétend que la présence des témoins est nécessaire à la Cour du Québec afin que ceux-ci puissent témoigner pour un recours en dommages qu’il désire entreprendre contre le présumé suspect. [10] Le demandeur a le droit d’obtenir ces renseignements dans la mesure où les personnes physiques ainsi identifiées acceptent que leurs coordonnées respectives lui soient communiquées, selon les termes de l’article 88 de la Loi sur l’accès. Leur consentement est donc nécessaire à la divulgation des renseignements nominatifs les concernant : 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 4 o de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement nominatif concernant 2 L.R.Q., c. A-2.1.
05 04 74 Page : 4 une autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement, à moins que cette dernière n'y consente par écrit. [11] Par ailleurs, la soussignée est en accord avec le procureur de l’Organisme lorsqu’il plaide que les renseignements contenus dans le document en litige concernant les témoins sont nominatifs selon les termes de l’article 53 de la Loi sur l’accès. Ces renseignements doivent demeurer confidentiels, l’Organisme n’ayant pas obtenu leur consentement à la divulgation au sens de l’article 88 précité : 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1° leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2° ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. [12] De plus, l’article 53 de la Loi sur l’accès ci-dessus mentionné est une disposition impérative, conformément à l’affaire Deslauriers c. Québec (Sous-ministre de la Santé et des Services sociaux) 3 . En outre, il est important de préciser que les témoins identifiés dans le document en litige ont droit au respect de leur vie privée, en vertu de l’article 5 de la Charte. L’Organisme ne peut passer outre les diverses dispositions législatives qui y sont indiquées : 5. Toute personne a droit au respect de sa vie privée. [13] Par ailleurs, il est admis à l’audience que les personnes dont les coordonnées sont inscrites dans le document en litige sont des témoins au sens du 2 e alinéa du 9 e paragraphe de l’article 59 de la Loi sur l’accès, conformément à la décision Québec (Procureur général) c. Allaire 4 . Le demandeur ne peut donc pas avoir accès à ces renseignements : 59. Un organisme public ne peut communiquer un renseignement nominatif sans le consentement de la personne concernée. 3 [1991] C.A.I. 311 (C.Q.). 4 [2002] C.A.I. 443 (C.Q.).
05 04 74 Page : 5 Toutefois, il peut communiquer un tel renseignement sans le consentement de cette personne, dans les cas et aux strictes conditions qui suivent: […] 9° à une personne impliquée dans un événement ayant fait l'objet d'un rapport par un corps de police, lorsqu'il s'agit d'un renseignement sur l'identité de toute autre personne qui a été impliquée dans cet événement, sauf s'il s'agit d'un témoin, d'un dénonciateur ou d'une personne dont la santé ou la sécurité serait susceptible d'être mise en péril par la communication d'un tel renseignement. [14] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : PREND ACTE que l’Organisme a communiqué au demandeur certains renseignements contenus dans le rapport d’évènement; REJETTE, quant au reste, la demande de révision du demandeur; FERME le présent dossier. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire M e Paul Quézel Procureur de l’Organisme
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