Commission d’accès à l’information du Québec Dossiers : 05 06 55 et 05 10 85 Date : 16 mai 2006 Commissaire : M e Christiane Constant X Demanderesse c. VILLE DE MONTRÉAL Organisme DÉCISION L’OBJET DU LITIGE DEMANDES DE RÉVISION EN MATIÈRE D’ACCÈS À DES RENSEIGNEMENTS NOMINATIFS [1] Le 10 février 2005, la demanderesse formule deux demandes auprès de M e Suzanne Bousquet, responsable de l’accès à l’information à la Ville de Montréal (l’Organisme), afin d’obtenir une copie intégrale des documents en lien avec un rapport d’évènement portant le n o 24-040216-002. Ces demandes visent les mêmes documents. [2] Le 28 février 2005, M e Bousquet informe la demanderesse qu’un délai additionnel est nécessaire pour le traitement de la demande (dossier n o 05 06 55). Le 24 mars 2005, la demanderesse, sans réponse, requiert de la Commission
05 06 55 05 10 85 Page : 2 d'accès à l'information (la Commission) la révision sur le refus présumé de l’Organisme d'acquiescer à sa demande. [3] Le 28 avril 2005, M e Bousquet avise la demanderesse du refus de l’Organisme d'acquiescer à son autre demande (dossier n o 05 10 85), en se basant sur le 5 e paragraphe de l’article 28 et l’article 53 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la Loi sur l’accès). Le 24 mai suivant, la demanderesse s’adresse de nouveau à la Commission afin de faire réviser la décision de l’Organisme. L’AUDIENCE [4] Le 7 avril 2006, l’audience des deux causes se tient conjointement à Montréal en présence de la demanderesse et de M e Paul Quézel, procureur de l’Organisme. LA PREUVE A) DE L’ORGANISME TÉMOIGNAGE DE M me LINE TRUDEAU [5] Interrogée par M e Paul Quézel, M me Trudeau affirme solennellement qu’elle est policière depuis le mois de février 1988. Elle est conseillère à la responsable de l’accès aux documents et de la protection des renseignements personnels, M e Bousquet. À ce titre, elle a traité les deux demandes d’accès formulées par la demanderesse. En collaboration avec M e Bousquet, elle a préparé la réponse de l’Organisme datée du 28 avril 2005. Elle dépose sous le sceau de la confidentialité les documents en litige. PREUVE EX PARTE, EN VERTU DE L’ARTICLE 20 DES RÈGLES DE PREUVE ET DE PROCÉDURE DE LA COMMISSION 2 [6] M e Quézel dépose les documents en litige sous le sceau de la confidentialité et demande que l’interrogatoire de M me Trudeau se poursuive pendant une preuve ex parte selon les termes de l’article 20 des Règles de preuve et de procédure de la Commission. La soussignée autorise l’Organisme à 1 L.R.Q., c. A-2.1. 2 Règles de preuve et de procédure de la Commission d’accès à l’information, décret 2058-84.
05 06 55 05 10 85 Page : 3 soumettre une preuve ex parte après avoir fourni à la demanderesse les explications nécessaires. POURSUITE DE L’AUDIENCE B) DE LA DEMANDERESSE [7] La demanderesse explique, sous serment, les circonstances l’ayant amenée au Canada en 1981, après un séjour au Kenya, ayant été auparavant témoin et victime d’un génocide survenu au Burundi en Afrique. En 1981, elle commence à travailler pour l’Organisation d’aide au commerce international (l’OACI). [8] Pour les fins de l’audience, la demanderesse prétend qu’elle a été agressée sexuellement par une personne. Elle prétend avoir perdu son emploi. Elle s’est adressée à la Direction de l’Indemnisation des victimes d’actes criminels (l’IVAC) afin d’obtenir de l’aide financière. Cette dernière a communiqué à la demanderesse une copie d’un rapport préparé à son égard et celle-ci a alors constaté que son présumé agresseur aurait émis des commentaires inexacts la concernant. Elle précise avoir formulé les demandes de révision auprès de la Commission afin de pouvoir recueillir la preuve nécessaire pour entreprendre un recours de nature civile contre cette personne. [9] M e Quézel indique qu’il n’a pas de questions pour la demanderesse. DÉCISION [10] La demanderesse a formulé deux demandes d’accès auprès de l’Organisme afin d’obtenir une copie des documents en lien avec un rapport la concernant selon les termes de l’article 83 de la Loi sur l’accès : 83. Toute personne a le droit d'être informée de l'existence, dans un fichier de renseignements personnels, d'un renseignement nominatif la concernant. Elle a le droit de recevoir communication de tout renseignement nominatif la concernant. Toutefois, un mineur de moins de quatorze ans n'a pas le droit d'être informé de l'existence ni de recevoir communication d'un renseignement nominatif de nature médicale ou sociale le concernant, contenu dans le dossier
05 06 55 05 10 85 Page : 4 constitué par l'établissement de santé ou de services sociaux visé au deuxième alinéa de l'article 7. [11] Pour la première demande de révision (dossier n o 05 06 55), le responsable de l’Organisme a fait parvenir à la demanderesse un accusé de réception. Il est donc réputé avoir refusé l’accès aux documents recherchés par la demanderesse en vertu de l’article 52 de la Loi sur l’accès : 52. A défaut de donner suite à une demande d'accès dans les délais applicables, le responsable est réputé avoir refusé l'accès au document. Dans le cas d'une demande écrite, ce défaut donne ouverture au recours en révision prévu par la section I du chapitre V, comme s'il s'agissait d'un refus d'accès. [12] La demanderesse sollicite l’intervention de la Commission visant ce refus présumé. [13] Quant à la deuxième demande de révision (dossier n o 05 10 85), l’Organisme refuse de communiquer à la demanderesse les documents demandés. Il invoque à cet effet le 5 e paragraphe de l’article 28 de la Loi sur l’accès, car une enquête policière a été menée par une personne chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, conformément au 1 er alinéa de cet article et à l’affaire Belisle c. C.S.S. 3 . De plus, ces documents sont truffés de renseignements nominatifs selon les termes de l’article 53 de cette loi : 28. Un organisme public doit refuser de confirmer l'existence ou de donner communication d'un renseignement obtenu par une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, lorsque sa divulgation serait susceptible: […] 5° de causer un préjudice à une personne qui est l'auteur du renseignement ou qui en est l'objet; […] 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1° leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 3 [1986] C.A.I. 105.
05 06 55 05 10 85 Page : 5 2° ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. [14] Lorsque les critères d’un des paragraphes du 1 er alinéa de l’article 28 précité sont rencontrés, l’Organisme a l’obligation légale de refuser de communiquer une copie d’un document en litige à toute personne qui en fait la demande. C’est le cas en l’espèce. [15] Par ailleurs, la soussignée a procédé à un examen attentif de ces documents. La preuve ex parte recueillie démontre que leur divulgation risque effectivement de causer un préjudice à l’auteur des renseignements contenus à ceux-ci ou à celui qui en est l’objet. L’Organisme était donc bien fondé de refuser de communiquer à la demanderesse une copie des documents en litige, en vertu du 5 e paragraphe de l’article 28 de la Loi sur l’accès. [16] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : REJETTE les deux demandes de révision de la demanderesse contre l’Organisme; FERME les deux dossiers. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire M e Paul Quézel Procureur de l’Organisme
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