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Commission d'accès à l'information du Québec Dossier : 05 10 24 Date : 25 avril 2006 Commissaire : M e Michel Laporte X Demanderesse c. AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS Organisme DÉCISION L'OBJET [1] Le 14 mars 2005, la demanderesse écrit à lAutorité des marchés financiers lAMF ») pour obtenir copie de tous les documents liés à sa plainte n o 0430-08 à lencontre de la Compagnie Trust Royal. [2] Le 25 avril 2005, lAMF accuse réception de la demande daccès. Elle signale que le Service des renseignements aux consommateurs et des plaintes na reçu cette demande que le 19 avril précédent. [3] Le 6 mai 2005, lAMF requiert un délai supplémentaire de dix jours pour pouvoir traiter la demande d'accès.
05 10 24 Page : 2 [4] Le 19 mai 2005, lAMF remet à la demanderesse une copie de son dossier. Elle invoque larticle 37 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi ») pour refuser laccès aux « […] parties 4, 5 et 6 de deux documents intitulés "Analyse pour offre de médiation" […]. » Elle invoque également le 2 e alinéa de larticle 9 pour refuser laccès « […] aux notes personnelles, préparatoires et autres documents de même nature […] » et au « […] document intitulé "Note au dossier" daté du 1 er avril 2004 ainsi que deux feuilles de travail titrées "Feuille de route Traitement des plaintes et règlement des différends". » [5] Le 24 mai 2005, la demanderesse veut que la Commission d'accès à l'information (la « Commission ») révise cette décision de lAMF. [6] Le 29 mars 2006, une audience a lieu à Joliette. L'AUDIENCE A) LA PREUVE De l'AMF [7] M e Jacques Breton, procureur de lAMF, dépose, avec le consentement de la demanderesse, les trois documents suivants : La lettre adressée par l'AMF à la Banque Royale du Canada (la « Banque »), propriétaire de la Compagnie Trust Royal, le 12 mai 2005, visant à obtenir son consentement pour communiquer à la demanderesse les informations la concernant (pièce O-1); La réponse de la Banque, le 16 mai 2005, autorisant lAMF à donner les informations la concernant à la demanderesse (pièce O-2); Les documents remis à la demanderesse le 19 mai 2005 (pièce O-3). [8] La Commission reçoit, sous pli confidentiel, les documents restant en litige. M me Séverine Le Rallec [9] M me Le Rallec, chef de service au traitement des plaintes à lAMF, raconte avoir reçu et traité une plainte de la demanderesse au sujet de la gestion de son 1 L.R.Q., c. A-2.1.
05 10 24 Page : 3 compte avec la Compagnie Trust Royal. Elle signale que celle-ci est une société de fiducie assujettie à la Loi sur les sociétés de fiducie et les sociétés dépargne 2 (la « Loi sur les fiducies »), notamment aux articles 153.4 et 153.5 au cas qui nous concerne : 153.4. Toute société avise, par écrit et sans délai, un plaignant quil peut demander que la société transmette à lAutorité une copie de son dossier sil est insatisfait de lexamen de sa plainte ou du résultat de cet examen. […] 153.5. Malgré les articles 9 et 83 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (chapitre A-2.1), l'Autorité ne peut communiquer un dossier de plainte sans l'autorisation de la société qui le lui a transmis. [10] M me Le Rallec explique que lAMF a été créée le 1 er février 2004 et que le service quelle dirige a été mis en place progressivement depuis le 1 er avril suivant. Cest dans ce contexte que lAMF reçoit le dossier de la Compagnie Trust Royal pour décider dintervenir ou non en médiation, après approbation, le cas échéant, par les deux parties. À ce moment, le professionnel responsable utilise une grille danalyse quil remplit en (pièce O-5) : 1) identifiant les parties; 2) résumant la plainte; 3) faisant la chronologie des événements; 4) inscrivant les éléments essentiels; 5) relevant les éléments à considérer; 6) concluant. [11] M me Le Rallec souligne lexistence de deux grilles danalyse dans le cas de la demanderesse. Cette situation est attribuable à la période de rodage de lAMF et aux documents supplémentaires requis de la Compagnie Trust Royal. [12] M me Le Rallec affirme que lAMF a refusé dintervenir par voie de médiation, le 28 février 2005, celle-ci nétant pas le bon processus à suivre dans le dossier de la demanderesse (pièce O-6). [13] M me Le Rallec affirme également avoir donné à M e Nathalie Leblanc, la personne responsable de l'étude de la demande daccès, le dossier complet 2 L.R.Q., c. S-29.01.
05 10 24 Page : 4 détenu par l'AMF en lien avec la demande et quil nexiste pas dautres documents. M e Nathalie Leblanc [14] M e Leblanc, notaire, directrice du secrétariat de lAMF, raconte avoir traité la présente demande daccès et soumis ses recommandations pour approbation à M e Nathalie Drouin, responsable de laccès pour l'AMF. Elle atteste avoir reçu le dossier de M me Le Rallec, soit les documents émanant de la demanderesse, de la Compagnie Trust Royal et du Service des plaintes de lAMF. Elle affirme avoir remis à la demanderesse tous les documents détenus par l'AMF la concernant, avec laccord de la Compagnie Trust Royal, incluant tous ceux énumérés aux grilles dévaluation, sauf ceux du Service des plaintes restant en litige, soit : 1) les parties 4, 5 et 6 des grilles dévaluation; 2) les notes personnelles (1 page); 3) les deux feuilles de route (2 pages). [15] Interrogée par la demanderesse, M e Leblanc confirme que lAMF ne possède pas dautres documents. B) LES ARGUMENTS i) De lAMF [16] M e Breton, invoque les articles 9 et 37 de la Loi pour refuser laccès aux documents en litige : 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. 37. Un organisme public peut refuser de communiquer un avis ou une recommandation faits depuis moins de dix ans, par un de ses membres, un membre de son personnel, un membre d'un autre organisme public ou un membre du personnel de cet autre organisme, dans l'exercice de leurs fonctions. Il peut également refuser de communiquer un avis ou une recommandation qui lui ont été faits, à sa demande, depuis
05 10 24 Page : 5 moins de dix ans, par un consultant ou par un conseiller sur une matière de sa compétence. [17] M e Breton allègue que les parties 4, 5 et 6 aux grilles dévaluation en litige ne sont pas purement factuelles, renfermant plutôt des avis, des recommandations, des opinions ainsi quun jugement de valeur aux fins de permettre à lAMF de prendre une décision. Il fait valoir que ce processus dévaluation débute dès la quatrième partie des grilles dévaluation en litige. Il en est de même, note-t-il, pour les trois derniers paragraphes des notes personnelles. [18] M e Breton soutient que les notes personnelles et les feuilles de route sont des notes personnelles et préparatoires du professionnel responsable du dossier et se trouvent protégées par le 2 e alinéa de larticle 9 de la Loi. ii) De la demanderesse [19] La demanderesse annonce quelle na pas de preuve ni darguments à faire valoir. DÉCISION [20] La demanderesse a soumis une requête à lAMF pour obtenir tous les documents la concernant en lien avec la plainte déposée à lencontre de la Compagnie Trust Royal. Il sagit donc dune demande daccès régie par larticle 83 de la Loi : 83. Toute personne a le droit d'être informée de l'existence, dans un fichier de renseignements personnels, d'un renseignement nominatif la concernant. Elle a le droit de recevoir communication de tout renseignement nominatif la concernant. Toutefois, un mineur de moins de quatorze ans n'a pas le droit d'être informé de l'existence ni de recevoir communication d'un renseignement nominatif de nature médicale ou sociale le concernant, contenu dans le dossier constitué par l'établissement de santé ou de services sociaux visé au deuxième alinéa de l'article 7. [21] Il a été admis que la demanderesse a reçu tous les documents émanant de la Compagnie Trust Royal détenus par lAMF. M me Le Rallec et M e Leblanc ont pour leur part déclaré avoir donné à la demanderesse tous les documents et renseignements en possession de lAMF, selon les termes de larticle 1 de la Loi, à lexception de ceux en litige :
05 10 24 Page : 6 1. La présente loi s'applique aux documents détenus par un organisme public dans l'exercice de ses fonctions, que leur conservation soit assurée par l'organisme public ou par un tiers. Elle s'applique quelle que soit la forme de ces documents: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. [22] Jen arrive donc à la conclusion que lAMF ne détient pas dautres documents en lien avec la demande. [23] Quen est-il des documents et renseignements en litige? [24] Dune part, il est reconnu que le droit daccès de la demanderesse est assujetti aux restrictions prévues aux articles 18 à 41 de la Loi, selon les termes de larticle 87 : 87. Sauf dans le cas prévu à l'article 86.1, un organisme public peut refuser de confirmer l'existence ou de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant, dans la mesure la communication de cette information révélerait un renseignement dont la communication doit ou peut être refusée en vertu de la section II du chapitre II. [25] Lexception de larticle 9 de la Loi devient donc inapplicable lorsquil sagit dune demande formulée comme en la présente en vertu de larticle 83 de la Loi : […] lexception concernant les notes personnelles nest pas incluse dans les restrictions opposables à une demande daccès formulée par la personne qui veut obtenir communication dun renseignements nominatif la concernant. 3 [26] Dautre part, larticle 86.1 de la Loi nous enseigne quun organisme public peut exercer sa discrétion et refuser un renseignement contenu dans un avis ou une recommandation fait par lun de ses membres, et ce, jusquau moment celui-ci na pas rendu sa décision finale : 86.1 Un organisme public peut refuser de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant, lorsque ce renseignement est contenu dans un avis ou une recommandation fait par un de ses membres ou un membre de son personnel, un membre 3 Québec (Ministère de la Justice) c. Bouchard, [1998] C.A.I. 488, 492 (C.Q.).
05 10 24 Page : 7 d'un autre organisme public ou un membre du personnel de cet autre organisme, dans l'exercice de leurs fonctions, ou fait à la demande de l'organisme par un consultant ou par un conseiller sur une matière de sa compétence et que l'organisme n'a pas rendu sa décision finale sur la matière faisant l'objet de cet avis ou de cette recommandation. (soulignement ajouté) [27] Le rôle de lAMF à la suite de la plainte de la demanderesse, selon M me Le Rallec, consistait à décider dintervenir ou non par voie de médiation. Au cas sous étude, celle-ci a déclaré que lAMF a tranché en refusant dintervenir, le 28 février 2005, soit avant le dépôt de la demande daccès. [28] La preuve a donc démontré que lAMF a rendu sa décision finale sur la matière faisant lobjet des avis ou recommandations en litige. Ainsi, larticle 37 de la Loi ne peut plus être invoqué comme motif de restriction lorsque lorganisme public a pris sa décision finale, selon les termes de larticle 86.1 de la Loi 4 . Les avis et recommandations sont donc accessibles à la demanderesse. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [29] ACCUEILLE la demande de révision de la demanderesse; [30] ORDONNE à lAMF de communiquer à la demanderesse les documents en litige. MICHEL LAPORTE Commissaire M e Jacques Breton Procureur de l'organisme 4 Drouin c. St-Georges (Ville de), [1992] C.A.I. 55, 60.
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