Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 04 14 34 Date : Le 31 mars 2006 Commissaire : M e Jacques Saint-Laurent X Demanderesse c. Ville de Montréal Organisme DÉCISION L’OBJET : DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D’ACCÈS, formulée en vertu de l’article 135 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. 1 [1] Le 10 juin 2004, la demanderesse s’adresse à l’organisme pour obtenir une copie de plusieurs documents qu’elle décrit de la façon suivante : « - le rapport Traffix de 1996 - le procès-verbal de la réunion de la Commission consultative sur la sécurité publique et le stationnement présidée par Marie Cinq-Mars où le dossier des mesures d’apaisement de la circulation sur la rue 1 L.R.Q., c. A-2.1 ci-après appelée « la Loi sur l’accès ».
04 14 34 Page : 2 Hutchison a été discuté, la recommandation de cette Commission, les rues de résidence des membres de la Commission présents ce jour-là - les avis et recommandations des services professionnels de l’arrondissement Outremont - les textes fondateurs des commissions consultatives d’Outremont (définition, rôle et fonction, recrutement des membres, composition, mode de fonctionnement, etc.), la liste des commissions, le dispositif réglementaire qui les encadre (Charte de la Ville de Montréal, Avis de motion, Règlement, etc….) » [2] Le 9 juillet 2004, le responsable substitut de l’accès aux documents de l’organisme répond à la demanderesse en lui communiquant une partie des documents demandés, pièce O-1. [3] En résumé, le responsable substitut de l’accès aux documents de l’organisme précise que : « 1 o le rapport Traffix de 1996 est disponible pour consultation au bureau de l’organisme ou à la bibliothèque Robert-Bourassa. Une copie peut en être obtenue moyennant la somme de 60,04 $; 2 o les procès-verbaux des réunions de la Commission consultative sur la sécurité publique et le stationnement ne sont toujours pas disponibles; 3 o il n’existerait pas d’avis ou de recommandation des services professionnels de l’arrondissement d’Outremont; 4 o les résolutions faisant état des textes fondateurs des commissions consultatives sont communiquées à la demanderesse. » [4] Le 16 août 2004, le responsable substitut de l’accès aux documents de l’organisme informe par lettre la demanderesse que les procès-verbaux des réunions de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement sont maintenant disponibles. Ainsi, il lui fait parvenir, après avoir masqué les renseignements nominatifs qu’ils contiennent, le compte rendu de la réunion de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement du 24 mars 2004 ainsi que le projet de compte rendu de la réunion de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement du 28 avril 2004. [5] Le 15 septembre 2004, la demanderesse s’adresse à la Commission d’accès à l’information pour demander la révision de la décision du responsable substitut de l’accès aux documents de l’organisme. La demanderesse précise qu’il lui manque les documents suivants : « - le rapport Traffix de 1996 - les avis et recommandations des services professionnels de l’arrondissement Outremont - les textes fondateurs des commissions consultatives d’Outremont - la liste des commissions, le dispositif réglementaire qui les encadre »
04 14 34 Page : 3 [6] Le 15 août 2005, la Commission tient une audience à Montréal. La demanderesse est présente. L’organisme est représenté par M e Philippe Berthelet, il est accompagné de M e Mario Gerbeau, responsable substitut de l’accès aux documents pour l’organisme et de madame Marie Johnson, membre du personnel de l’arrondissement d’Outremont. PREUVE i. de l’organisme [7] Le procureur de l’organisme remet au commissaire une copie de la réponse qui fut transmise à la demanderesse le 9 juillet 2004, pièce O-1. Il s’agit de la réponse initiale de l’organisme à la demande d’accès du 10 juin 2004. Cette réponse fut complétée par une lettre du 16 août 2004. [8] Le procureur de l’organisme fait entendre monsieur Mario Gerbeau, secrétaire de l’arrondissement d’Outremont et responsable substitut de l’accès aux documents pour l’organisme. [9] La version intégrale des documents en litige est remise à titre confidentiel au commissaire. Il s’agit des comptes rendus des 24 mars et 28 avril 2004 de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement. [10] Monsieur Gerbeau explique les circonstances entourant la formation de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement. À cette fin, il produit un extrait du procès-verbal de la séance spéciale du conseil de l’arrondissement d’Outremont tenue le 27 février 2002, pièce O-2. [11] Selon le témoin, cette commission consultative s’apparente à un comité de travail. Les séances sont tenues à huis clos, il n’y a pas de rapport au conseil d’arrondissement. [12] Seuls les noms des personnes nommées membres de cette commission consultative sont publics. Ils apparaissent au procès-verbal de la séance du conseil d’arrondissement, pièce O-2. Ces personnes sont nommées pour un an. Leur mandat peut être renouvelé d’année en année. [13] Le témoin ajoute que pour l’arrondissement d’Outremont, cinq commissions consultatives ont été formées sur des sujets différents. Elles ne participent qu’aux choix politiques. [14] Sauf à l’égard de la personne qui préside, aucun élu et aucun fonctionnaire municipal ne participe aux réunions des commissions consultatives permanentes.
04 14 34 Page : 4 [15] Dans le cas de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement, une conseillère d’arrondissement agit à titre de présidente. [16] Le témoin n’est pas en mesure de préciser par qui sont préparés les ordres du jour des réunions de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement. Le greffe du conseil d’arrondissement ne participe pas à la préparation de l’ordre du jour. [17] Le responsable substitut de l’accès aux documents de l’organisme explique que ce qui est consigné dans les comptes rendus des réunions de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement ne s’inscrit pas dans un processus décisionnel du conseil d’arrondissement. [18] Ainsi, les comptes rendus qui ont été remis à la demanderesse ont été élagués des noms des personnes qui ne sont pas des élus ou des fonctionnaires municipaux, l’indication de leur présence à la réunion, et l’indication qu’ils ont proposé ou appuyé une décision, puisqu’il s’agit, selon l’organisme, de renseignements nominatifs au sens des articles 53 et 54 de la Loi sur l’accès. ii. de la demanderesse [19] La demanderesse explique le contexte dans lequel elle cherche à obtenir des informations sur les activités de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement. [20] Elle demeure dans l’arrondissement Outremont, plus spécialement sur la rue Hutchison. Elle participe aux réflexions sur l’élaboration de mesures d’apaisement de la circulation sur cette rue. Elle a constaté que la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement participe à l’exercice du pouvoir décisionnel à ce sujet. [21] Ainsi, elle se demande dans quelles circonstances les réunions de la Commission consultative ont lieu, quels sont les résidants qui sont entendus, le cas échéant, et s’il y a des citoyens qui ont des intérêts contraires qui ont participé aux travaux de la Commission. [22] La demanderesse remet au commissaire un document du 27 février 2002 intitulé « Règles de régie interne des commissions consultatives permanentes », pièce D-1. [23] Elle soumet que ces règles de régie interne démontrent le caractère officiel des activités de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement. Elle insiste plus spécialement sur l’article 14 qui se lit comme suit :
04 14 34 Page : 5 « 14. Toute étude, recommandation, rapport et avis des Commissions est soumis au Conseil sous forme de résolution. Lorsque requis par le Conseil, toute résolution d’une Commission lui est soumise, accompagnée d’un rapport écrit. » [24] La demanderesse a effectué des recherches dans Internet pour savoir si les documents dont elle demande l’accès sont autrement disponibles. Ainsi, pour l’arrondissement Villeray-Saint-Michel-Parc-Extension, elle a trouvé dans le site Internet de cet arrondissement des informations relatives au comité consultatif d’urbanisme. Dans le cadre de sa recherche, il lui a été possible d’imprimer le texte intégral du procès-verbal de la séance régulière du comité consultatif d’urbanisme du 11 février 2004. Une copie des pages Internet consultées le 12 juin 2005 et du procès-verbal a été remise au commissaire. iii. complément de preuve [25] À la demande du soussigné, le procureur de l’organisme a effectué deux vérifications après l’audience du 15 août 2005. [26] Le 20 août 2005, le responsable substitut de l’accès aux documents de l’organisme fait parvenir une lettre au soussigné, à la demanderesse et au procureur de l’organisme, par laquelle il répond aux questions posées à l’audience. Ainsi, il appert que le conseil d’arrondissement d’Outremont n’a jamais adopté les « règles de régie interne des commissions consultatives permanentes », pièce D-1. Par ailleurs, aucune résolution n’a été adoptée par les membres des commissions consultatives permanentes pour accepter que leurs noms soient rendus publics lorsqu’ils figurent dans les procès-verbaux des réunions de ces commissions permanentes. [27] Le 23 août 2005, la demanderesse transmet à la Commission une lettre par laquelle elle apporte des précisions sur le caractère officiel des « règles de régie interne des commissions consultatives permanentes ». [28] La demanderesse fait parvenir à la Commission le compte rendu de la Commission consultative permanente sur les relations intercommunautaires du 20 mars 2002 ainsi que le compte rendu de la réunion de la consultation consultative permanente sur les arts et la culture du 27 mars 2002. Les deux comptes rendus font état du fait que les membres ont pris connaissance des règles de régie interne en question.
04 14 34 Page : 6 ARGUMENTS i. de l’organisme [29] Comme l’avait affirmé le responsable substitut de l’accès aux documents de l’organisme dans son témoignage, le procureur de l’organisme soumet que les activités de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement sont de nature politique. Elles ne s’inscrivent pas formellement dans le processus décisionnel du conseil d’arrondissement d’Outremont. [30] Le procureur de l’organisme invite la Commission à prendre connaissance de la décision de la commissaire Hélène Grenier dans l’affaire 9101-4050 Québec inc. c. Ville de Lévis 2 . On peut notamment y lire à la page 197 ce qui suit : « La communication de cette recommandation doit cependant tenir compte de ce qui suit : le nom de la personne qui a proposé la recommandation en litige ainsi que les noms des personnes qui ont appuyé la proposition, qui s’y sont opposées ou qui se sont abstenues de voter sont des renseignements confidentiels en vertu de l’article 53 de la Loi sur l’accès, parce qu’il s’agit de renseignements nominatifs : … » … « Le vote ou l’abstention de vote de chacune de ces personnes en ce qui a trait à la proposition constitue un renseignement nominatif. La communication de la recommandation doit donc être effectuée après que ces renseignements nominatifs auront été masqués. » [31] Le procureur de l’organisme réfère également la Commission à une décision récente du commissaire Michel Laporte dans l’affaire Céline Forget c. Ville de Montréal du 21 juin 2005 3 . [32] Concernant l’exemple de l’arrondissement Villeray-Saint-Michel-Parc-Extension soumis par la demanderesse, le procureur de l’organisme souligne à la Commission que les règles relatives au comité consultatif d’urbanisme sont différentes puisque ces comités sont constitués en vertu de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme 4 . Ainsi, le fait que les procès-verbaux des réunions du comité consultatif d’urbanisme sont publics ne permet pas d’établir 2 [2002] C.A.I 193. 3 C.A.I. Québec, n o 03 22 10, 21 juin 2005. 4 L.R.Q., c. A-19.1.
04 14 34 Page : 7 un lien avec les réunions de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement. [33] Au cours de l’audience, le procureur de l’organisme a également soumis à la Commission que les différentes résolutions qui ont été transmises à la demanderesse le 9 juillet 2004 sont les seuls documents pertinents concernant « les textes fondateurs des commissions consultatives d’Outremont… » [34] Le procureur de l’organisme réitère qu’il n’y a aucun autre texte à l’origine de la formation de ces commissions consultatives permanentes. Il soumet que la démarche de la demanderesse pour obtenir une interprétation équivaut à demander un avis juridique au conseil d’arrondissement. ii. de la demanderesse [35] Selon la demanderesse, la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement est un organisme public au sens de l’article 57 de la Loi sur l’accès. Cette commission fait partie du pouvoir décisionnel de l’arrondissement d’Outremont. [36] Selon la demanderesse, les commissions consultatives permanentes sont plus que des comités de travail. Elle soumet que ces commissions ont un pouvoir d’influence qui n’est pas négligeable. [37] Comme citoyenne, elle dit qu’elle a trouvé anormal de recevoir des comptes rendus des réunions de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement dont certains passages avaient été masqués. Elle soumet qu’il s’agit d’une atteinte à la transparence de la démocratie. [38] Elle ajoute que les membres des commissions consultatives permanentes font partie, selon elle, d’une entité qui a une vocation publique. Ils doivent se prononcer sur des sujets d’intérêt général et d’intérêt public. DÉCISION [39] Je dois déterminer si l’organisme était justifié de masquer les renseignements nominatifs apparaissant aux comptes rendus des réunions de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement tenues les 24 mars et 28 avril 2004. [40] La demanderesse soulève des arguments sérieux. Ils pourraient être considérés par les membres des commissions consultatives permanentes. Ces derniers pourraient décider de divulguer, lorsqu’ils le jugent opportun, les renseignements nominatifs qui les concernent.
04 14 34 Page : 8 [41] À ce stade-ci, la demande de révision présentée par la demanderesse doit toutefois être considérée en fonction des dispositions pertinentes de la Loi sur l’accès. [42] La demanderesse s’appuie sur l’article 57 de la Loi sur l’accès pour affirmer que les membres de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement doivent être considérés comme des membres d’organismes publics. 57. Les renseignements suivants ont un caractère public: 1° le nom, le titre, la fonction, la classification, le traitement, l'adresse et le numéro de téléphone du lieu de travail d'un membre d'un organisme public, de son conseil d'administration ou de son personnel de direction et, dans le cas d'un ministère, d'un sous-ministre, de ses adjoints et de son personnel d'encadrement; 2° le nom, le titre, la fonction, l'adresse et le numéro de téléphone du lieu de travail et la classification, y compris l'échelle de traitement rattachée à cette classification, d'un membre du personnel d'un organisme public; 3° un renseignement concernant une personne en sa qualité de partie à un contrat de service conclu avec un organisme public, ainsi que les conditions de ce contrat; 4° le nom et l'adresse d'une personne qui bénéficie d'un avantage économique conféré par un organisme public en vertu d'un pouvoir discrétionnaire et tout renseignement sur la nature de cet avantage. 5° le nom et l'adresse d'affaires du titulaire d'un permis délivré par un organisme public et dont la détention est requise en vertu de la loi pour exercer une activité ou une profession ou pour exploiter un commerce. Toutefois, les renseignements prévus au premier alinéa n'ont pas un caractère public si leur divulgation est de nature à nuire ou à entraver le travail d'une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime.
04 14 34 Page : 9 En outre, les renseignements prévus au paragraphe 2° ne peuvent avoir pour effet de révéler le traitement d'un membre du personnel d'un organisme public. [43] Comme son nom l’indique, il ne fait pas de doute, dans mon esprit, que la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement est appelée à se prononcer sur des sujets d’intérêt général pour l’arrondissement d’Outremont. Cela n’a pas pour effet que des personnes qui en sont membres sont visées par l’article 57 de la Loi sur l’accès. [44] En effet, les citoyens faisant partie de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement, dont les noms ont été masqués, ne sont pas des membres d’un organisme public, de son conseil d’administration ou de son personnel de direction au sens de la Loi sur l’accès. [45] Dans ces circonstances, l’organisme public était justifié d’élaguer les renseignements nominatifs contenus au compte rendu de la Commission consultative permanente sur la sécurité publique et le stationnement des 24 mars et 28 avril 2004. [46] Concernant l’accès aux « textes fondateurs des commissions consultatives d’Outremont », l’organisme public a fourni les documents pertinents le 9 juillet 2004. POUR TOUS CES MOTIFS, la Commission : REJETTE la demande de révision du 15 septembre 2004. JACQUES SAINT-LAURENT Président M e Philippe Berthelet Procureur de l’organisme
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