Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 05 07 14 Date : Le 27 mars 2006 Commissaire : M e Diane Boissinot X Demanderesse c. MINISTÈRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE Organisme DÉCISION OBJET : DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS formulée en vertu de l’article 135 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 . [1] Le 7 mars 2005, la demanderesse s’adresse au responsable de l’accès de l’organisme (le Responsable) pour obtenir copie intégrale du dossier de police qu’elle identifie. [2] Le 9 mars suivant, le Responsable avise la demanderesse qu’il a reçu sa demande le même jour et qu’il se prévaut du délai supplémentaire de 10 jours prévu par la Loi pour lui répondre. [3] Le 8 avril 2005, le Responsable refuse de communiquer une partie du dossier demandé au motif que les parties retenues sont visées par les 1 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée la « Loi ».
05 07 14 Page 2 dispositions suivantes de la Loi, savoir : les paragraphes 3° et 5° du premier alinéa de l’article 28, les articles 53, 54 et le paragraphe 9° du deuxième alinéa de l’article 59. [4] Le 22 avril 2005, la demanderesse requiert la Commission de réviser cette décision. [5] Une audience se tient en la ville de Montréal, le 22 mars 2006. L’AUDIENCE A. LA PREUVE Témoignage de monsieur André Marois [6] Monsieur Marois occupe le poste de responsable de l’accès de l’organisme depuis plusieurs années. [7] Il a traité la demande d’accès en cause ici. Pour ce faire, il a requis la Sûreté du Québec, corps de police agissant sous l’autorité de l’organisme, de lui faire tenir l’intégralité du dossier demandé. [8] Après examen de celui-ci, il lui est apparu que la demanderesse y est identifiée comme plaignante et qu’elle était donc concernée personnellement par ce dossier. [9] Il lui a donc remis les parties du dossier qui la concernaient elle seule, comme, par exemple, sa propre déclaration aux policiers. [10] Il a toutefois retenu les parties où il estimait que s’appliquaient les dispositions dont il est question dans la réponse sous examen. [11] Le témoin remet sous pli confidentiel à la Commission le dossier complet de l’enquête numéro 086-041221-012. Ce dossier comporte 9 pages qu’il numérote de 1 à 9 pour les fins de la présente audition. Il indique à la Commission que les parties surlignées de jaune sont les parties qui n’ont pas été divulguées à la demanderesse. Il affirme que la demanderesse a reçu copie des autres parties de ce dossier.
05 07 14 Page 3 [12] Ne sont donc en litige que les parties suivantes du rapport : page 4 Les quatre dernières lignes de l’avant-dernier paragraphe, à la suite des mots « fuite, je »; page 5 Les quatre dernières lignes de l’encadré; page 6 Tout le texte au-dessus du titre « Conclusion » et les quatre premiers paragraphes sous le titre « Conclusion »; page 7 Toute la page intitulée « Déclaration »; page 8 Toute la page intitulée « Déclaration » (suite de la page 7). [13] Le témoin déclare qu’il n’y a pas d’autres documents qui sont détenus par l’organisme et qui seraient susceptibles de répondre à la demande d’accès. [14] Une courte partie du témoignage de monsieur Marois est livrée ex parte et à huis clos, du consentement de la demanderesse, au cours de laquelle le texte soustrait de l’accès est abordé directement afin de compléter la preuve de l’organisme. Témoignage de la demanderesse [15] La demanderesse confirme avoir reçu les parties du rapport qui ne sont pas en litige et que sa contestation se limite bien aux extraits décrits plus haut (paragraphe [12]). [16] La demanderesse croit vraisemblable qu’une policière soit impliquée dans les événements à titre personnel, et, de ce fait, elle a de bonnes raisons de croire que l’enquête sur sa plainte n’ait pas été effectuée selon les règles de l’art. B. ARGUMENTS i) De l’organisme [17] L’avocate de l’organisme plaide que la preuve et la lecture des parties retenues du rapport démontrent que la divulgation risquerait vraisemblablement
05 07 14 Page 4 de causer un préjudice à l’auteur du renseignement et de dévoiler une méthode d’enquête ou une source confidentielle d’information 2 . [18] Elle estime aussi que les mêmes extraits sont visés par les articles 53 et 54 et le premier alinéa de l’article 59. En effet, il s’agit de renseignements concernant des tierces personnes physiques 3 . [19] Elle ajoute que les conditions d’application du paragraphe 9° du deuxième alinéa de l’article 59 qui donneraient ouverture à la discrétion de l’organisme de communiquer les renseignements concernant des tierces personnes physiques ne sont pas satisfaites ici 4 . ii) De la demanderesse [20] La demanderesse plaide que l’organisme doit faire preuve de transparence et lui remettre tous les détails relatifs à cette enquête menée sur la plainte qu’elle a formulée. [21] Elle estime que l’organisme devrait exercer en sa faveur la discrétion qui lui appartient aux termes du paragraphe 9° du deuxième alinéa de l’article 59 de la Loi et lui remettre les parties retenues du rapport de police, le tout, dans un esprit de transparence. DÉCISION [22] Pour faire écho à une partie du témoignage de la demanderesse, il convient de rappeler qu’il ne relève pas de la compétence de la Commission d’examiner la façon dont les corps de police mènent leurs enquêtes. Ces questions doivent être considérées par d’autres instances. [23] La seule question que la Commission doit décider, en l’espèce, est de savoir si la décision du Responsable est bien fondée. [24] J’ai examiné les extraits du rapport de police de la Sûreté du Québec numéro 086-041221-012 qui restent en litige. [25] Sauf pour ce qui est des extraits ci-après mentionnés aux deux paragraphes qui suivent, je suis d’avis, qu’en substance, les extraits restant en 2 Cajuste c.Québec (Ministère de la sécurité publique), [2001]CAI 347, 352. 3 Segal c. Centre de services sociaux de Québec, [1988] CAI 315, 320. 4 Audet c. St-Adolphe-d’Howard (Municipalité de), [2000] CAI 167, 169.
05 07 14 Page 5 litige sont composés de renseignements nominatifs concernant des tierces personnes physiques, renseignements qui sont visés par les articles 53, 54 et par le premier alinéa de l’article 59, sans toutefois être de ceux visés par l’un ou l’autre des paragraphes 1° à 9° du deuxième alinéa de cet article 59 : 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1° leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2° ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. 54. Dans un document, sont nominatifs les renseignements qui concernent une personne physique et permettent de l'identifier. 59. Un organisme public ne peut communiquer un renseignement nominatif sans le consentement de la personne concernée. Toutefois, il peut communiquer un tel renseignement sans le consentement de cette personne, dans les cas et aux strictes conditions qui suivent: 1° au procureur de cet organisme si le renseignement est requis aux fins d'une poursuite pour infraction à une loi que cet organisme est chargé d'appliquer, ou au Procureur général si le renseignement est requis aux fins d'une poursuite pour infraction à une loi applicable au Québec; 2° au procureur de cet organisme, ou au Procureur général lorsqu'il agit comme procureur de cet organisme, si le renseignement est requis aux fins d'une
05 07 14 Page 6 procédure judiciaire autre qu'une procédure visée dans le paragraphe 1 o ; 3° à une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, si le renseignement est requis aux fins d'une poursuite pour infraction à une loi applicable au Québec; 4° à une personne à qui cette communication doit être faite en raison d'une situation d'urgence mettant en danger la vie, la santé ou la sécurité de la personne concernée; 5° à une personne qui est autorisée par la Commission d'accès à l'information, conformément à l'article 125, à utiliser ce renseignement à des fins d'étude, de recherche ou de statistique; 6° (paragraphe abrogé); 7° (paragraphe abrogé); 8° à une personne ou à un organisme, conformément aux articles 61, 67, 67.1, 67.2, 68 et 68.1; 9° à une personne impliquée dans un événement ayant fait l'objet d'un rapport par un corps de police, lorsqu'il s'agit d'un renseignement sur l'identité de toute autre personne qui a été impliquée dans cet événement, sauf s'il s'agit d'un témoin, d'un dénonciateur ou d'une personne dont la santé ou la sécurité serait susceptible d'être mise en péril par la communication d'un tel renseignement. [26] Toutefois, considérant la preuve et à l’examen de leur contenu, les deux premiers paragraphes du titre « Conclusion », à la page 6, ne renferment aucun renseignement visé par ces dernières dispositions, ni par les paragraphes 3° et 5° du premier alinéa de l’article 28 de la Loi, à l'exception des onze mots de la troisième ligne du deuxième paragraphe de ce titre se trouvant entre les mots « initiale » et « l’agent », lesquels onze mots sont visés par toutes ces dispositions et doivent rester confidentiels : 28. Un organisme public doit refuser de confirmer l'existence ou de donner communication d'un renseignement obtenu par une personne qui, en vertu de la loi, est
05 07 14 Page 7 chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, lorsque sa divulgation serait susceptible: […] 3° de révéler une méthode d'enquête, une source confidentielle d'information, un programme ou un plan d'action destiné à prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois; […] 5° de causer un préjudice à une personne qui est l'auteur du renseignement ou qui en est l'objet; […] [27] Devraient être remis à la demanderesse les parties des pages 7 et 8 qui ne concernent pas les tierces personnes physiques ni ne sont visés par les paragraphes 3° et 5° (précités) du premier alinéa de l’article 28, savoir le titre du formulaire et le numéro de dossier apparaissant tout en haut de ces deux pages ainsi que le nom et la signature de l’agent de police et la date de sa signature sis tout en bas de ces deux pages. [28] La décision du Responsable n’est donc bien fondée qu’en partie. [29] POUR CES MOTIFS, la Commission ACCUEILLE en partie la demande de révision; ORDONNE à l’organisme de communiquer a) les deux premiers paragraphes de la page 6 sous le titre « Conclusion » à l’exception des 11 mots ci-haut identifiés au paragraphe [26]; et b) les parties supérieures et inférieures des pages 7 et 8 indiquées au paragraphe [27]; et REJETTE quant au reste la demande de révision. DIANE BOISSINOT commissaire Avocate de l’organisme : M e Marie-Josée Bourgeault Bernard, Roy, avocats (Justice-Québec)
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