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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 05 00 49 Date : 15 mars 2006 Commissaire : M e Christiane Constant X Demanderesse c. RÉGIE DES RENTES DU QUÉBEC Organisme DÉCISION OBJET DU LITIGE DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS À DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS [1] Le 16 octobre 2004, la demanderesse requiert de la Régie des rentes du Québec (lOrganisme) le « Relevé de participation au Régime de rentes du Québec » de sa défunte mère, feue M.L. Celle-ci a contribué à ce régime lorsquelle travaillait à Postes Canada.
05 00 49 Page : 2 [2] Le 18 novembre 2004, M e Renée Madore, secrétaire et directrice des Affaires juridiques au sein de lOrganisme, fait savoir à la demanderesse quelle ne peut acquiescer à sa demande, le consentement de la personne concernée étant requis. LOrganisme invoque à cet effet les articles 53 et 59 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la Loi sur laccès). En cas de décès de la personne concernée, elle ajoute que : […] larticle 88.1 de la loi ne permet la communication de renseignements au liquidateur de la succession, au bénéficiaire dune assurance-vie ou à lhéritier de la personne concernée que dans la mesure cette communication met en cause leurs intérêts ou droits à ce titre. [3] Le 8 décembre 2004, la demanderesse sadresse à la Commission daccès à linformation (la Commission), afin que celle-ci révise la décision de lOrganisme. Elle lui communique de plus une copie du testament de sa défunte mère, lequel justifie que sa sœur et elle-même sont « ses héritières et légatrices universelles ». LAUDIENCE [4] Le 4 novembre 2005, laudience se tient à Montréal en présence de la demanderesse et de sa sœur, L.D. Pour sa part, lOrganisme, est représenté par M e Daniel Gignac du cabinet davocats Madore, Dufour & Robillard. LA PREUVE [5] M e Gignac soumet une preuve documentaire quil dépose sous le sceau de la confidentialité, soit un relevé de participation au Régime de rentes du Québec concernant la défunte mère de la demanderesse. Dans la mesure le document refusé affecterait les droits de la demanderesse au titre dhéritière ou de successeur, il indique que lOrganisme considère celle-ci comme successeur. De plus, il dépose à laudience les quatre pièces supplémentaires suivantes : a) Pièce O-1 : Demande de prestations dinvalidité. Cette demande a été signée par la demanderesse le 8 octobre 2004 et a été reçue par lOrganisme le 25 octobre 2004; 1 L.R.Q., c. A-2.1.
05 00 49 Page : 3 b) Pièce O-2 : Réponse de lOrganisme à la demande de prestations dinvalidité. Dans cette réponse, datée du 17 novembre 2004, lOrganisme communique à la demanderesse sa décision, à savoir son refus daccorder la rente dinvalidité. Celui-ci indique notamment que « la rente dinvalidité nest pas payable à un cotisant pour un mois postérieur à celui de son 65 e anniversaire de naissance » en vertu de la Loi sur le régime de rentes du Québec 2 (la LRRQ); c) Pièce O-3 : Demande de révision de la décision. Ce formulaire de demande de révision, signé par la demanderesse le 3 décembre 2004, a été adressé à lOrganisme. Dans ce formulaire, la demanderesse fournit des arguments et des documents pour appuyer sa demande; d) Pièce O-4 : Révision de la décision du 17 novembre 2004. Dans cette communication datée du 13 décembre 2004, lOrganisme communique à la demanderesse le maintien de la décision en première instance. Il souligne notamment que : Comme la demande de rente dinvalidité a été faite le 25 octobre 2004, la cotisante naurait pu être reconnue invalide avant le mois doctobre 2003 et la rente dinvalidité naurait pu être versée aux héritiers quà partir de février 2004, soit le quatrième mois qui suit celui la cotisante serait devenue invalide et ce, tel que la loi le prévoit. Comme la cotisante eu [sic] 65 ans au sens de la loi en septembre 2003, elle nest donc pas admissible à une rente dinvalidité puisque cette rente ne pourrait être versée avant son 65 e anniversaire. TÉMOIGNAGE DE LA DEMANDERESSE [6] La demanderesse déclare quelle veut connaître le montant dargent que sa défunte mère a cotisé au régime de rentes du Québec. En raison de son état de santé, sa mère a perdu son emploi. Elle ajoute, entre autres, que lOrganisme lui a réclamé un trop-perçu de 10 000 $. Sa mère a effectuer des remboursements de ce montant auprès du Curateur public du Québec à raison de 100 $ par mois. La demanderesse prétend que sa mère naurait pas été tenue de rembourser ce montant à lOrganisme si elle avait été prestataire dune rente dinvalidité. Elle affirme vouloir exercer un recours contre celui-ci en tant quhéritière à la succession de sa mère, tel quil est consigné dans son testament. 2 L.R.Q., c. R-9.
05 00 49 Page : 4 [7] La demanderesse ajoute quelle avait le droit de réclamer le 8 octobre 2004 des prestations dinvalidité pour sa mère, même si cette dernière est décédée au mois de septembre précédent. Elle précise quelle agit à titre de « légataire et héritière » pour la succession de sa mère. TÉMOIGNAGE DE L.D. [8] L.D. abonde dans le même sens que la demanderesse, sa sœur. Elle ajoute que sa défunte mère était sous la protection du Curateur public pendant plusieurs années. [9] Sur ce point, la demanderesse intervient pour mentionner quelle sest adressée au Curateur public afin davoir accès à des documents concernant sa défunte mère. Laccès lui a été refusé. LES ARGUMENTS [10] M e Gignac plaide quune personne atteignant lâge de 65 ans na plus droit à la rente dinvalidité, comme cest le cas de la défunte mère de la demanderesse. À partir de ce moment, elle reçoit une pension de vieillesse, et ce, conformément à larticle 166 de la LRRQ qui prévoit que : 166. La rente dinvalidité cesse à la fin du mois le bénéficiaire cesse dêtre invalide ou décède ou à la fin du mois précédant celui il atteint 65 ans. Elle cesse aussi à la fin du mois précédant celui au cours duquel une rente de retraite devient payable au bénéficiaire en vertu de la présente loi ou dun régime équivalent de même quà la fin du mois qui précède celui au cours duquel une indemnité de remplacement lui devient payable. [11] De plus, selon M e Gignac, peu importe les renseignements contenus dans le dossier de la défunte mère de la demanderesse, le versement de la rente dinvalidité ne peut avoir un effet rétroactif. Elle a reçu cette rente alors quelle était sous curatelle publique, et ce, jusquà lâge de 65 ans. Par la suite, les versements de sa pension de vieillesse ont débuté. [12] M e Gignac plaide que le document recherché devrait être inaccessible à la demanderesse en vertu de larticle 88.1 de la Loi sur laccès. Sachant que la demanderesse souhaite exercer un droit, il se demande toutefois si ce document pourrait lui devenir accessible.
05 00 49 Page : 5 DÉCISION [13] Les exigences décrites par le législateur pour lapplication de larticle 88.1 de la Loi sur laccès sont les suivantes : 88.1 Un organisme public doit refuser de donner communication d'un renseignement nominatif à l'administrateur de la succession, au bénéficiaire d'une assurance-vie, à l'héritier ou au successeur de la personne concernée par ce renseignement, à moins que cette communication ne mette en cause ses intérêts ou ses droits à titre d'administrateur, de bénéficiaire, d'héritier ou de successeur. [14] Il doit donc sagir dun organisme : a) à qui la demande daccès à un renseignement nominatif est adressée; b) qui refuse de communiquer ce renseignement à ladministrateur de la succession; c) qui est tenu de refuser de le communiquer au bénéficiaire dune assurance-vie; ou d) qui est obligé de refuser de le communiquer à lhéritier ou au successeur de la personne concernée par ce renseignement; e) qui serait toutefois forcé de le faire si cette communication met en cause ses intérêts ou ses droits à titre dadministrateur, de bénéficiaire, dhéritier ou de successeur. [15] Larticle 88.1 étant une exception à laccès, il doit être interprété de façon restrictive. Dans la cause sous étude, la demanderesse avait le fardeau de démontrer à lOrganisme quelle agit à titre dhéritière ou de successeur de sa défunte mère. Dailleurs, si lOrganisme navait pas obtenu une preuve tangible à cet effet, il naurait pas mentionné à laudience quil considérait la demanderesse comme « successeur ». De plus, les critères prévus à larticle 88.1 de la Loi sur laccès précité sont donc satisfaits par la demanderesse. En effet, celle-ci a démontré quelle possède les intérêts nécessaires pour obtenir le document en litige. [16] Pour lessentiel, la demanderesse désire obtenir une copie du relevé de la participation de sa mère au Régime des rentes du Québec afin de pouvoir exercer éventuellement un droit ou un recours en tant quhéritière ou successeur selon larticle 88.1 de la Loi sur laccès précité. La condition dhéritière est satisfaite par
05 00 49 Page : 6 cette dernière conformément, entre autres, à laffaire Tanguay c. Université Laval 3 . [17] Par ailleurs, il importe de préciser que la première page de ce document est une lettre que M me Monique Maheu, directrice des Cotisations et des Prestations à lOrganisme, a adressée le 3 novembre 2005 aux « Héritiers » de la défunte mère de la demanderesse. Or, ladresse apparaissant sur la lettre est celle de la demanderesse. Rappelons que celle-ci fait partie des héritiers. La date de naissance de sa défunte mère est notamment inscrite sur cette lettre. Les trois autres pages contiennent les renseignements en litige. [18] Comme le document contenant les renseignements en litige a déjà été communiqué aux héritiers de la défunte mère de la demanderesse, je considère que lOrganisme ne peut plus refuser de le transmettre à celle-ci. Il devra donc lui communiquer une copie intégrale dudit document. [19] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : ACCUEILLE la demande de révision de la demanderesse contre lOrganisme; ORDONNE à lOrganisme de communiquer à la demanderesse une copie intégrale du document en litige; FERME le présent dossier. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire Madore, Dufour & Robillard (M e Daniel Gignac) Procureurs de lOrganisme 3 [1990] C.A.I. 364.
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