Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 04 12 14 Date : Le 28 février 2006 Commissaire : M e Jacques Saint-Laurent X Demandeur c. Hôpital Sainte-Justine Organisme DÉCISION L’OBJET DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D’ACCÈS formulée en vertu de l’article 135 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. 1 [1] Le 6 avril 2004, le demandeur s’adresse à l’organisme, en l’occurrence un établissement de santé, afin d’obtenir une copie de son « dossier intégral ». [2] Conformément aux mécanismes en place pour cet organisme, cette demande d’accès est d’abord traitée par le service des archives médicales. [3] Les vérifications d’usage permettent de constater que l’organisme détient 1 L.R.Q., c. A-2.1 ci-après appelée « la Loi sur l’accès ».
04 12 14 Page : 2 un dossier médical pour le demandeur, ainsi qu’un dossier dit « satellite » constitué par un service spécialisé de l’institution. [4] Le 21 avril 2004, la chef du service des archives médicales de l’organisme transmet au demandeur une copie intégrale de son dossier médical. La lettre de transmission indique au demandeur que sa demande a également été soumise à une unité spécialisée de l’organisme. [5] La responsable de l’accès à l’information de l’organisme doit alors vérifier certaines parties du dossier de cette unité spécialisée. Pour certains renseignements, l’organisme pourrait devoir refuser l’accès. [6] Le 11 juin 2004, la responsable de l’accès à l’information informe le demandeur des résultats de son analyse. Elle lui fait parvenir les documents accessibles, parfois élagués de certains passages. [7] L’organisme a appliqué l’article 18 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux 2 . Ainsi, on ne peut pas communiquer au demandeur certains passages concernant des tiers. [8] Le 28 juin 2004, le demandeur effectue une nouvelle tentative. Cette fois, il se limite à demander la consultation sur place. Elle a lieu le 26 juillet 2004. Préalablement, l’organisme a pris soin de retirer du dossier les éléments confidentiels. [9] En pratique, cette démarche du demandeur n’a rien donné de plus. Pour les mêmes raisons, l’accès a été refusé aux mêmes documents. [10] Le 28 juillet 2004, le demandeur demande la révision de la décision de la responsable de l’accès, en soulignant que selon lui, « il manque des éléments d’information ». [11] Le 30 juillet 2004, M e Anne de Ravinel informe la Commission d'accès à l'information des circonstances entourant les démarches du demandeur. [12] Le 30 juin 2005, l’audience est tenue à Montréal. Le demandeur est présent. L’hôpital Sainte-Justine est représenté par M e Anne de Ravinel qui est accompagnée de la responsable de l’accès aux documents de l’organisme, Mme Martine Dubé. 2 L.R.Q., c. S-4.2 ci-après appelée la « L.S.S.S.S. ».
04 12 14 Page : 3 PREUVE i. de l’organisme [13] À l’occasion de son témoignage, la responsable de l’accès rappelle que la demande d’accès du demandeur à son dossier médical a conduit à une première réponse le 21 avril 2004. Une copie est produite, pièce O-1. [14] Constatant que le dossier contient des informations relatives à des tiers, on fait appel à la responsable de l’accès à l’information pour voir à l’application de la législation pertinente. C’est ainsi que la réponse du 11 juin 2004 est adressée au demandeur. [15] En réponse à la demande du commissaire, la responsable de l’accès a expliqué que l’organisme n’a pas fait de démarche auprès de tiers pour l’obtention d’un consentement écrit à la communication de renseignements personnels les concernant. [16] La responsable de l’accès ajoute qu’au moment de la consultation sur place, par le demandeur, le dossier fut élagué des mêmes éléments confidentiels identifiés dans sa lettre du 11 juin 2004. [17] Enfin, la procureure de l’organisme remet les documents en litige au commissaire, à titre confidentiel. Des annotations permettent d’identifier les documents confidentiels ainsi que les parties de documents qui ont été masquées. ii. du demandeur [18] Le demandeur veut savoir si les documents qu’on lui a fait parvenir en juin 2004 comprennent toutes les pages de son dossier. Au cours de l’audience, la responsable de l’accès compare les documents qu’elle a en main avec ceux du demandeur. En plus des parties de documents ayant fait l’objet d’un élagage, elle identifie deux (2) documents qui n’ont pas été communiqués, une note d’évolution du 19 novembre 1969 ainsi qu’une demande de consultation du 28 avril 1969.
04 12 14 Page : 4 ARGUMENTS i. de l’organisme [19] La procureure de l’organisme précise que la décision de la responsable de l’accès s’appuie sur l’article 18 de la L.S.S.S.S. Elle se réfère également à l’article 88 de la Loi sur l’accès. M e de Ravinel ajoute que l’organisme a l’obligation de protéger les renseignements personnels relatifs à des tiers. [20] Selon la procureure de l’organisme, ce dernier n’a pas à prendre l’initiative de solliciter le consentement des tiers concernés par les passages dont on refuse l’accès. ii. du demandeur [21] Le demandeur constate que deux documents totalisant trois pages ne lui ont pas été communiqués. Même s’ils doivent être masqués en entier, il veut tout de même obtenir une copie des pages masquées. L’organisme s’engage à lui faire parvenir les copies en question. Le contenu sera entièrement élagué conformément à la décision de la responsable de l’accès de juin 2004. [22] Le demandeur prie également la Commission de réviser la décision de l’organisme prise conformément à l’article 18 de la L.S.S.S.S. Il souhaite que la Commission s’assure que les documents relatifs à des tiers, dont on refuse l’accès, ne concernent pas les membres du personnel ou les médecins de l’organisme. [23] Subsidiairement, le demandeur soumet qu’à l’examen des documents qu’il a reçus jusqu’à maintenant, il peut déduire que le tiers concerné serait sa mère. Il prétend que dans la mesure où il connaît l’identité du tiers, il n’y a plus de raison de maintenir confidentielles les informations relatives à ce tiers. [24] L’organisme répond qu’il ne s’agit pas simplement de garder l’identité du tiers confidentielle mais également de respecter la confidentialité du contenu des renseignements relatifs aux tiers. DÉCISION [25] La demande de révision présentée par le demandeur concerne l’application de l’article 18 de la L.S.S.S.S. qui se lit comme suit :
04 12 14 Page : 5 18. Un usager n'a pas le droit d'être informé de l'existence ni de recevoir communication d'un renseignement le concernant et contenu dans son dossier qui a été fourni à son sujet par un tiers et dont l'information de l'existence ou la communication permettrait d'identifier le tiers, à moins que ce dernier n'ait consenti par écrit à ce que ce renseignement et sa provenance soient révélés à l'usager. Le premier alinéa ne s'applique pas lorsque le renseignement a été fourni par un professionnel de la santé ou des services sociaux ou par un employé d'un établissement dans l'exercice de leurs fonctions. Aux fins du présent alinéa, un stagiaire, y compris un résident en médecine, est assimilé à un professionnel de la santé ou des services sociaux. [26] J’ai procédé à l’analyse des documents faisant partie du dossier médical du demandeur, pour lesquels l’accès a été refusé en vertu de l’article 18 de la L.S.S.S.S. [27] Tenant compte de la preuve, la responsable de l’accès aux documents de l’organisme a correctement identifié les passages qui devaient être masqués, vu le premier alinéa de l’article 18 de la L.S.S.S.S. [28] J’ai de plus constaté que les passages relatifs à des tiers, qui ont été élagués, ne contiennent aucun renseignement provenant d’un professionnel de la santé ou d’un employé de l’établissement. [29] Dans le cadre de son obligation de protéger la confidentialité des renseignements relatifs à des tiers, l’organisme doit-il prendre l’initiative de solliciter le consentement du ou des tiers concernés? [30] Cette question a déjà fait l’objet d’une étude par la Cour du Québec 3 qui en est venue à la conclusion qu’il appartient au demandeur de solliciter et, le cas échéant, de faire la preuve du consentement du tiers à la communication des renseignements personnels. L’organisme public n’a pas à effectuer une démarche auprès du tiers dont le consentement est requis. [31] Croyant connaître l’identité du tiers, le demandeur prétend que l’organisme n’a plus de raison de lui refuser l’accès aux renseignements nominatifs concernant ce tiers. 3 Paquet c. Ministère de la Justice du Québec, [2002] CAI 449 (CQ).
04 12 14 Page : 6 [32] L’article 18 de la L.S.S.S.S. ne protège pas uniquement l’identité du tiers mais aussi les renseignements que le tiers a fournis au sujet de l’usager. De plus, le consentement à la communication doit être donné par le tiers lui-même. [33] En pratique, si le demandeur connaît l’identité du tiers, il a la possibilité de solliciter lui-même son consentement, comme l’exige l’article 18 de la L.S.S.S.S. [34] Aucun consentement n’a été produit par le demandeur. POUR TOUS CES MOTIFS, la Commission : REJETTE la demande de révision du demandeur du 28 juillet 2004. __________________________ M e JACQUES SAINT-LAURENT Président M e Anne de Ravinel Procureure de l’organisme (Hôpital Sainte-Justine)
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