Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 04 07 46 Date : 17 janvier 2006 Commissaire : M e Christiane Constant X Demanderesse c. MUNICIPALITÉ DE LA PÊCHE Organisme public DÉCISION L’OBJET DU LITIGE DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] Le 18 mars 2004, la demanderesse présente une demande d’accès à des documents à la Municipalité de La Pêche (l’ « Organisme ») en ces termes : We would appreciate a copy of the all communication dealing with Island Lake since 1980: including 1. All correspondence with the Municipal lawyer re Island lake and Timberlake Construction
04 07 46 Page : 2 2. Notes of conversations between the Municipal lawyer and Municipal employees, council members and Timberlake Construction. 3. Notes of conversations with SPEE and the Municipal lawyer. 4. Any information concerning the legal involvement of the Municipal lawyer in the Island Lake File. [2] Le 3 mai 2004, la demanderesse sollicite l’intervention de la Commission d'accès à l'information (la « Commission ») pour que soit révisé le refus présumé de l’Organisme. L’AUDIENCE [3] Le 5 octobre 2005, l’audience de la présente cause se tient à Gatineau. La demanderesse y participe alors que l’Organisme est représenté par M e Jonathan Coulombe de la firme d’avocats Legault Roy. LA PREUVE A) DE L’ORGANISME i) Témoignage de M. Charles Ricard [4] M e Coulombe fait témoigner sous serment M. Charles Ricard. Celui-ci déclare être le secrétaire-trésorier de l’Organisme depuis 1990. Ce dernier compte environ 7 000 habitants, à l’exception de la période estivale qui permet d’en dénombrer près de 12 000. M. Ricard indique qu’il est également responsable de l’accès aux documents. Il reconnaît avoir reçu la demande d’accès formulée par la demanderesse. Il l’a transmise, pour étude, à M. Marcel Marchildon, « Directeur Urbanisme et Environnement » de l’Organisme. La plupart des documents recherchés concernent ce Service. [5] M. Ricard affirme que, le 21 juin 2004, il a fait parvenir à la demanderesse la réponse de l’Organisme (pièce O-1). Il précise que la demanderesse a déjà formulé plusieurs demandes d’accès en regard desquelles il lui a communiqué beaucoup de documents. Il souligne que, parmi les quatre séries de documents convoités, se trouvent deux opinions juridiques (points 1 et 4 de la demande) déposées sous le sceau de la confidentialité. L’Organisme refuse de les lui communiquer, celles-ci étant confidentielles.
04 07 46 Page : 3 [6] Quant aux autres documents recherchés (points 2 et 3), M. Ricard indique qu’ils sont inexistants. ii) Clarifications recherchées par la demanderesse auprès de M. Charles Ricard [7] M. Ricard réitère que l’Organisme ne détient, parmi les documents demandés, que deux opinions juridiques et qu'il n’y en a pas d’autres. iii) Témoignage de M. Marcel Marchildon [8] M. Marchildon affirme qu’il est le directeur de l’Urbanisme et de l’Environnement de l’Organisme. Il signale, entre autres, que celui-ci a déjà communiqué à la demanderesse toute la documentation disponible, tel qu’il appert de la copie d’une lettre qu’il lui a transmise le 13 août 2003 (pièce O-2). [9] En ce qui concerne les opinions juridiques, il n’y en a que deux. Ces dernières n’ont pas été déposées lors de réunions du conseil municipal de l’Organisme et n’y ont pas fait l’objet de débats. Il ajoute que ce dernier peut, à l’occasion, demander une opinion juridique à ses procureurs relativement à un sujet précis. Il peut recevoir telle opinion verbalement. iv) Clarifications recherchées par la demanderesse auprès de M. Marcel Marchildon [10] S’adressant à la demanderesse, M. Marchildon réitère l’essentiel de son témoignage principal. Relativement à une entreprise dénommée « SPEE », il précise que celle-ci est une firme spécialisée en aménagement paysager. Cette dernière a communiqué à l’Organisme un plan de réaménagement, lequel a été approuvé par celui-ci. B) DE LA DEMANDERESSE [11] La demanderesse déclare qu’elle est propriétaire ou copropriétaire de divers lots de terrains qu’elle décrit se trouvant sur le territoire de l’Organisme. Elle précise qu’au cours des années 1980, un promoteur immobilier a procédé à la construction d’un projet domiciliaire non loin de sa propriété. Celle-ci aurait subi des dommages. [12] Par ailleurs, la demanderesse soumet en preuve une lettre du 22 octobre 2002 (pièce D-1) que lui a transmise M. James Simpson, conseiller aux opérations régionales au ministère des Affaires municipales et de la Métropole, relative à une
04 07 46 Page : 4 plainte qu’elle a logée contre l’Organisme. Elle dépose également en preuve un échange de correspondance, par courriel, entre elle-même et M. Simpson (pièce D-2). De plus, elle commente une lettre du 13 avril 1989 (pièce D-3) qu’un avocat, M e Hamilton Quain, a fait parvenir à l’Organisme relativement à l’accès temporaire à une route pour le passage d’équipements de construction. [13] La demanderesse reconnaît que l’Organisme lui a communiqué des documents. Elle précise cependant qu’il lui manque les opinions juridiques mentionnées dans les résolutions datées du 1 er mai 1989, des 29 juin, 26 juillet et 13 décembre 1990 et du 22 juillet 2002. Elle cherche de plus à avoir tout autre document portant le nom de M e Lafrenière, celui-ci ayant été le procureur de l’Organisme au cours de ces années. C) PRÉCISIONS DE L’ORGANISME [14] M. Ricard réplique que le procureur de l’Organisme ne transmet pas toujours à celui-ci des opinions juridiques écrites. Il lui arrive de les obtenir verbalement. Il affirme de plus qu’il a vérifié auprès du Service des archives et a constaté qu’il n’existe pas d’opinions juridiques autres que les deux déposées sous le sceau de la confidentialité à l’audience. [15] Quant aux résolutions mentionnées par la demanderesse, M. Ricard précise que pour la résolution du 1 er mai 1989, l’Organisme avait mandaté M e Lafrenière afin d’entreprendre des procédures judiciaires contre un tiers. Quant à la résolution du 29 juin 1990, une lettre fut adressée à la demanderesse par l’ancien directeur du Service de l’urbanisme. Aucune opinion juridique n’en a découlé. Pour ce qui est de la résolution du 26 juillet 1990, une lettre fut adressée à la demanderesse relativement à une rencontre tenue entre celle-ci et deux autres personnes physiques. Une opinion juridique avait été demandée par l’Organisme à M e Lafrenière, parce que la demanderesse avait formulé plusieurs demandes d’accès durant cette période. Quant à la résolution du mois de décembre 1990, un « Certificat de conformité » fut transmis par la compagnie SPEE à M e Lafrenière. Il n’y a pas eu d’opinion juridique. Finalement, la résolution du 22 juillet 2002 vise un accusé de réception transmis à la demanderesse relativement à un projet de restauration de berges sur le territoire de l’Organisme. LA PLAIDOIRIE [16] M e Coulombe résume les témoignages respectifs de MM. Ricard et Marchildon, lesquels ont fait ressortir que l’Organisme a communiqué à la demanderesse les documents qu’il détient, à l’exception des opinions juridiques.
04 07 46 Page : 5 La preuve non contredite démontre qu’il n’en existe que deux et que celles-ci ont été déposées à l’audience sous le sceau de la confidentialité. Cependant, l’avocat dit comprendre le questionnement de la demanderesse lorsque celle-ci réfère aux résolutions de l’Organisme qui font mention d’opinions juridiques. [17] Par ailleurs, outre l’opinion juridique visée au point 4 de la demande, la demanderesse cherche également à obtenir des renseignements. M e Coulombe plaide que la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi sur l’accès ») porte sur des documents détenus par un organisme public et non sur des renseignements. DÉCISION [18] La demanderesse désire avoir accès à divers documents selon les termes du 1 er alinéa de l’article 9 de la Loi sur l’accès, qui prévoit que : 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. [19] La demanderesse reconnaît que, dans le cadre de demandes d’accès antérieures, l’Organisme lui a communiqué des documents, à l’exception des opinions juridiques. Toutefois, il est clairement établi à l’audience qu’il n’en existe que deux, lesquelles ont été déposées sous le sceau de la confidentialité. [20] La soussignée constate que ces dernières datent des 22 juillet 2003 (2 pages) et 9 septembre 2005 (1 page) et qu’elles sont adressées respectivement à MM. Ricard et Marchildon par M e Michel Lafrenière. Ces opinions concernent la demanderesse. Elles sont inaccessibles à celle-ci, étant confidentielles et protégées par le droit au respect du secret professionnel en vertu de l’article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne 2 : 9. Chacun a droit au respect du secret professionnel. Toute personne tenue par la loi au secret professionnel et tout prêtre ou autre ministre du culte ne peuvent, même en justice, divulguer les renseignements confidentiels qui leur ont été révélés en raison de leur état ou profession, à moins 1 L.R.Q., c. A-2.1. 2 L.R.Q., c. C-12.
04 07 46 Page : 6 qu'ils n'y soient autorisés par celui qui leur a fait ces confidences ou par une disposition expresse de la loi. Le tribunal doit, d'office, assurer le respect du secret professionnel. [21] De plus, l’article 31 de la Loi sur l’accès confère le même droit au respect du secret professionnel : 31. Un organisme public peut refuser de communiquer une opinion juridique portant sur l'application du droit à un cas particulier ou sur la constitutionnalité ou la validité d'un texte législatif ou réglementaire, d'une version préliminaire ou d'un projet de texte législatif ou réglementaire. [22] Commentant cet article, les auteurs Doray et Charette indiquent, entre autres, que, dans la décision Ministère de la Sécurité publique c. Joncas 3 : La Cour du Québec a franchi un pas de plus […], en affirmant que la Commission devrait même soulever d’office la restriction prévue à l’article 31 lorsqu’il est mis en preuve qu’une opinion juridique est considérée par l’organisme comme étant à caractère confidentiel puisque l’article 31 reconnaît un droit consacré par l’article 9 de la Charte 4 . [23] Par ailleurs, la soussignée tient à préciser que l’article 1 de la Loi sur l’accès ne vise pas des renseignements, mais plutôt des documents détenus par un organisme public dans l’exercice de ses fonctions : 1. La présente loi s'applique aux documents détenus par un organisme public dans l'exercice de ses fonctions, que leur conservation soit assurée par l'organisme public ou par un tiers. Elle s'applique quelle que soit la forme de ces documents: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. [24] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : PREND ACTE que l’Organisme a déjà communiqué à la demanderesse des documents; 3 J.E. 99-1653 (C.Q.). 4 Raymond DORAY et François CHARETTE, Accès à l’information, Loi annotée – Jurisprudence – Analyse et commentaires, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2001, p. II / 31-2.
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