Commission d'accès à l'information du Québec Dossier : 05 10 17 Date : 21 décembre 2005 Commissaire : M e Hélène Grenier X Demandeur c. CENTRE UNIVERSITAIRE DE SANTÉ MCGILL Organisme DÉCISION OBJET DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] Le demandeur s’adresse à l’organisme le 7 avril 2005 pour « recevoir les documents suivants se rapportant aux travaux de décontamination et de rénovation réalisés à l’Hôpital Royal Victoria en 2000 et 2001, en particulier dans les blocs opératoires » : • « Le coût et la durée des travaux de décontamination et de rénovation des blocs opératoires en 2000 et en 2001 (système de ventilation et autres équipements et installations). • Tous les contrats avec les professionnels et les entrepreneurs ainsi que la liste des avenants, incluant les montants pour ces travaux en 2000 et en 2001.
05 10 17 Page : 2 • Le ou les rapports qui ont porté sur cette opération de décontamination et rénovation, une fois les travaux terminés. • Les études qui ont été réalisées depuis que ces travaux de décontamination et de rénovation sont terminés et qui portent sur la contamination possible ou non de patients opérés dans ces blocs opératoires avant et depuis 2001. • Avez-vous entrepris d’autres travaux semblables à ceux de 2000 et 2001 depuis? Si oui, puis-je avoir des détails sur ces chantiers? • J’aimerais consulter la ou les études qui portent sur les patients morts ou possiblement morts en raison d’une infection au champignon aspergillus à l’hôpital Royal Victoria.». [2] Le 20 avril 2005, le secrétaire général et responsable de l’accès aux documents de l’organisme lui donne avis de la réception de sa demande le 7 avril 2005 et il lui indique que : « nous répondrons à votre lettre dans les 20 jours suivant la réception de celle-ci. ». [3] Le 10 mai 2005, le demandeur soumet une demande de révision à la Commission. Il précise que sa demande d’accès est demeurée sans réponse. [4] Le 28 juin 2005, le secrétaire général et responsable de l’accès aux documents de l’organisme lui répond ce qui suit : « Conformément aux articles 21, et suite à la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 , nous vous informons que votre demande a été rejetée. Veuillez noter que notre lettre du 20 avril dernier vous avisait que vous aviez le droit de demander une révision de cette décision. ». [5] Par avis posté le 26 septembre 2005, la Commission convoque les parties à une audience dont la tenue est fixée au 23 novembre 2005, à 9 heures, au bureau de la Commission situé à Montréal; la Commission indique qu’elle réserve une période de 3 heures à l’instruction de la demande de révision. Dans cet avis, la Commission précise notamment que toute demande de remise ou de suspension doit être dûment motivée, accompagnée des pièces justificatives, et présentée par écrit, avec copie à toutes les parties, au président de la Commission; aucune demande de cette nature n’a été présentée au président de la Commission. [6] Le 23 novembre 2005, l’avocat dont les services ont été retenus par l’organisme se présente, au lieu et à l’heure déterminés, avec ses 2 témoins et il se déclare prêt à procéder. La Commission réussit à rejoindre le demandeur, involontairement absent, qui explique être dans une autre ville pour son travail et 1 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après la «Loi sur l’accès».
05 10 17 Page : 3 ne pas avoir « fait le suivi de son agenda. ». Le demandeur accepte néanmoins de participer à l’instruction de sa demande de révision par voie téléphonique, la remise alors demandée ne lui étant pas accordée pour les raisons suivantes : l’avocat de l’organisme précise que le litige ne vise que 4 documents et le demandeur reconnaît disposer du temps qui lui permet de participer à l’instruction de sa demande de révision. PREUVE i) de l’organisme [7] L’avocat de l’organisme indique que les documents suivants seront intégralement transmis au demandeur qui accepte de communiquer avec lui pour en déterminer les modalités de prise de possession : • « Le coût et la durée des travaux de décontamination et de rénovation des blocs opératoires en 2000 et en 2001 (système de ventilation et autres équipements et installations). • Tous les contrats avec les professionnels et les entrepreneurs ainsi que la liste des avenants, incluant les montants pour ces travaux en 2000 et en 2001. ». [8] Il précise que les 4 documents détenus auxquels l’accès demeure refusé sont : « les rapports qui ont porté sur cette opération de décontamination et rénovation, une fois les travaux terminés. », le refus de les communiquer s’appuyant entièrement sur le 2 e alinéa de l’article 37 de la Loi sur l’accès. Témoignage de M. Antonin Bouchard : [9] L’avocat de l’organisme fait entendre M. Antonin Bouchard qui témoigne sous serment. Monsieur Bouchard est coordonnateur des services techniques de 3 des sites de l’organisme (l’hôpital Royal Victoria, l’hôpital neurologique et l’hôpital thoracique) et il assure l’entretien et le maintien des actifs de ces sites. Il connaît la demande d’accès du 7 avril 2005 puisque le responsable de l’accès de l’organisme la lui a communiquée. [10] Monsieur Bouchard est entré en fonction en 2001, alors que le nettoyage du système de ventilation du bloc opératoire (12 salles et autres locaux) de l’hôpital Royal Victoria était déjà entamé. Ce bloc opératoire était fermé pour permettre le nettoyage complet du système de ventilation et pour y apporter des correctifs. Une fois ces travaux terminés, 1 rapport a été produit; d’autres
05 10 17 Page : 4 rapports périodiques avaient été produits pour confirmer à l’organisme que les travaux entrepris étaient adéquats et conformes aux règles de l’art. [11] Le rapport en litige intitulé « Final Report / McGill University Health Centre Operating Rooms » est daté du 4 juillet 2001; il a été demandé par le supérieur de M. Bouchard, M. Denis Labbé, qui était alors directeur associé aux infrastructures (sites) de l’organisme. Ce rapport est constitué d’une évaluation de tous les travaux de nettoyage du système de ventilation et de tous les correctifs qui y ont été apportés; cette évaluation indique que ces travaux et correctifs sont adéquats. Ce rapport a été utilisé pour établir de nouvelles normes de suivi régulier du système de ventilation; il confirme que toutes les mesures prises (nettoyage et correctifs) étaient adéquates, excellentes. [12] Un autre rapport, daté du 19 juillet 2001, a été préparé, à l’instar des autres rapports, à la demande de M. Denis Labbé. Ce rapport confirme, à la suite des travaux qui ont été effectués, de la mise en marche du système de ventilation et de l’ouverture du bloc opératoire, que tout ce qui avait été mis en place était correctement respecté; il comprend des avis et des recommandations. [13] Un rapport périodique, daté du 11 juin 2001 et préparé au cours des travaux, traite d’une problématique spécifique au système de ventilation et confirme que les correctifs décidés par l’organisme sont adéquats; ce rapport fait partie du rapport final. [14] Un autre rapport périodique, daté du 26 juin 2001 et intégré au rapport final, constitue un avis sur les travaux réalisés à cette date. Témoignage de M. Barry A. Cappel : [15] Monsieur Barry A. Cappel témoigne sous serment en qualité de secrétaire général et de responsable de l’accès aux documents de l’organisme. Il connaît la demande d’accès du 7 avril 2005 et il fait état des démarches effectuées pour y donner suite. [16] Monsieur Cappel s’est adressé par écrit à M me Jeannette Hébert pour trouver les documents que le demandeur a ainsi désignés : « Les études qui ont été réalisées depuis que ces travaux de décontamination et de rénovation sont terminés et qui portent sur la contamination possible ou non de patients opérés dans ces blocs opératoires avant et depuis 2001 ». M me Hébert, qui est responsable de l’« infection control service » de l’organisme, lui a répondu que l’organisme ne détient pas ces documents.
05 10 17 Page : 5 [17] Monsieur Cappel a procédé de même auprès de M me Hébert pour trouver les documents que le demandeur a ainsi désignés : « Avez-vous entrepris d’autres travaux semblables à ceux de 2000 et 2001 depuis ? Si oui, puis-je avoir des détails sur ces chantiers ? ». Madame Hébert lui a répondu que l’organisme ne détient pas ces documents. Monsieur Cappel précise qu’il n’a pas d’information concernant ces « autres travaux semblables ». [18] Monsieur Cappel a procédé de même auprès de M me Hébert pour trouver les documents que le demandeur a ainsi désignés : « J’aimerais consulter la ou les études qui portent sur les patients morts ou possiblement morts en raison d’une infection au champignon aspergillus à l’hôpital Royal Victoria. ». Madame Hébert lui a répondu que l’organisme ne détient pas ces documents et qu’il n’y a pas eu de décès causés par cette infection. L’avocat de l’organisme spécifie que l’un des rapports en litige, à savoir le « Final Report / McGill University Health Centre Operating Rooms », aborde la question. ARGUMENTATION i) de l’organisme [19] L’article 37 de la Loi sur l’accès permet à l’organisme de ne pas communiquer les rapports en litige qui sont substantiellement constitués d’avis et de recommandations auxquels sont intimement liés des passages factuels qui ne peuvent en être dissociés. Ces avis et recommandations sont des jugements de valeur ou opinions conditionnant l’exercice d’un choix entre différentes alternatives et destinés à agir sur la prise de décisions. ii) du demandeur [20] Le refus de l’organisme de communiquer les rapports en litige surprend; l’Hôpital Sainte-Justine a, pour sa part, accepté de divulguer un rapport dont la nature serait semblable à celle des rapports en litige et qui aurait été préparé par les mêmes experts. Le contenu de ces rapports est d’intérêt public. [21] Monsieur Cappel n’a pas donné suite à la demande d’accès dans le délai prescrit par la Loi sur l’accès; il a tardivement refusé de donner accès à tous les documents demandés. Monsieur Cappel a particulièrement omis d’indiquer au demandeur que certains documents étaient intégralement accessibles; le demandeur est également surpris de la « modulation » existant entre la décision du responsable et la preuve présentée à l’audience.
05 10 17 Page : 6 DÉCISION A) Le traitement de la demande d’accès : [22] Il faut donner raison au demandeur lorsqu’il commente le traitement de la demande d’accès. Le responsable devait, contrairement à ce qu’il a fait, donner suite à la demande du 7 avril 2005 selon les prescriptions de l’article 47 de la Loi sur l’accès : 47. Le responsable doit, avec diligence et au plus tard dans les vingt jours qui suivent la date de la réception d'une demande: 1° donner accès au document, lequel peut alors être accompagné d'informations sur les circonstances dans lesquelles il a été produit; 2° informer le requérant des conditions particulières auxquelles l'accès est soumis, le cas échéant; 3° informer le requérant que l'organisme ne détient pas le document demandé ou que l'accès ne peut lui y être donné en tout ou en partie; 4° informer le requérant que sa demande relève davantage de la compétence d'un autre organisme ou est relative à un document produit par un autre organisme ou pour son compte; 5° informer le requérant que l'existence des renseignements demandés ne peut être confirmée; ou 6° informer le requérant qu'il s'agit d'un document auquel le chapitre II de la présente loi ne s'applique pas en vertu du deuxième alinéa de l'article 9. Si le traitement de la demande dans le délai prévu par le premier alinéa ne lui paraît pas possible sans nuire au déroulement normal des activités de l'organisme public, le responsable peut, avant l'expiration de ce délai, le prolonger d'une période n'excédant pas dix jours. Il doit alors en donner avis au requérant par courrier dans le délai prévu par le premier alinéa.
05 10 17 Page : 7 [23] La preuve démontre que les paragraphes 1° et 3° de l’article 47 devaient, en l’occurrence, recevoir application. B) Le rapport du 4 juillet 2001 : [24] Le rapport du 4 juillet 2001, intitulé « Final Report / McGill University Health Centre Operating Rooms », comprend 27 pages. Les 10 premières pages de ce rapport présentent sommairement des faits qui se sont produits en 2000, décrivent les lieux au sujet desquels des analyses particulières ont été effectuées et illustrent, à l’aide de tableaux, les résultats des analyses qui ont été effectuées avant une date déterminée; ces 10 pages ne comprennent ni avis ni recommandation; elles sont dissociables des pages qui suivent et accessibles en vertu du 1 er alinéa de l’article 9 de la Loi sur l’accès : 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. [25] Les 2 premiers paragraphes de la section 4.2, en page 11 du rapport, ne constituent pas, non plus, un avis ou une recommandation; ils sont dissociables des paragraphes et pages qui suivent et ils sont accessibles en vertu du 1 er alinéa de l’article 9 de la Loi sur l’accès. [26] Le 3 e paragraphe de la section 4.2 de même que le reste de la page 11 ainsi que les pages 12 à 18 inclusivement constituent l’avis détaillé et motivé de l’expert, avis qui, à partir des faits qui ont été analysés et de la littérature scientifique pertinente, évalue une situation donnée. La preuve démontre que les conditions du 2 e alinéa de l’article 37 de la Loi sur l’accès sont réunies; cet alinéa habilite l’organisme à refuser de communiquer un avis qui lui a été fait, à sa demande, depuis moins de 10 ans, par un consultant sur une matière de sa compétence : 37. Un organisme public peut refuser de communiquer un avis ou une recommandation fait depuis moins de dix ans, par un de ses membres, un membre de son personnel, un membre d'un autre organisme public ou un membre du
05 10 17 Page : 8 personnel de cet autre organisme, dans l'exercice de leurs fonctions. Il peut également refuser de communiquer un avis ou une recommandation qui lui ont été faits, à sa demande, depuis moins de dix ans, par un consultant ou par un conseiller sur une matière de sa compétence. [27] Les pages 19 à 22 inclusivement résument des mesures qui ont été prises concernant une situation donnée; ces pages, qui ne constituent ni un avis ni une recommandation, sont accessibles en vertu du 1 er alinéa de l’article 9 de la Loi sur l’accès; elles peuvent être dissociées de l’avis que l’expert a exprimé dans les pages qui précèdent et des recommandations qu’il formule dans les pages qui suivent. [28] Les pages 23 et 24 sont constituées des recommandations que formule l’expert à l’intention de l’organisme. La preuve démontrant que les conditions d’application du 2 e alinéa de l’article 37 de la Loi sur l’accès sont réunies, l’organisme est habilité à refuser de communiquer ces recommandations au demandeur. [29] La conclusion de la page 25 est accessible, à l’exception du 2 e paragraphe qui reprend certains éléments de l’avis de l’expert et que l’organisme peut refuser de communiquer en vertu du 2 e alinéa de l’article 37 de la Loi sur l’accès. [30] Les pages 26 et 27 sont accessibles, leur contenu ne comprenant ni avis ni recommandation. C) Le rapport du 19 juillet 2001 : [31] Le rapport du 19 juillet 2001 comprend 13 pages; il résulte d’une opération d’analyse de 2 éléments, les résultats de cette analyse devant permettre d’évaluer la qualité et le rendement d’un service particulier. La substance de ce rapport est constituée des renseignements suivants : brèves explications concernant ces 2 éléments et la méthodologie utilisée pour les analyser, tableaux illustrant les résultats des analyses effectuées par une technicienne, constats ou comparaisons que la technicienne exprime et qui découlent de son observation des résultats d’analyse et qui lui permettent de conclure son analyse. Ce rapport ne comprend ni avis ni recommandation et il est totalement accessible en vertu du 1 er alinéa de l’article 9 de la Loi sur l’accès.
05 10 17 Page : 9 D) Le rapport du 11 juin 2001 : [32] Le rapport du 11 juin 2001 comprend 4 pages et il résulte d’une opération de vérification. À l’aide d’un appareil, un technicien a procédé à l’examen de 2 situations bien précises de manière à établir leur conformité. Ce rapport est d’abord constitué d’un résumé de la procédure à laquelle le technicien a eu recours, des observations que le technicien a échelonnées sur 6 jours (du 24 au 31 mai 2001) et qu’il a complétées par 2 photographies et 1 croquis; ces renseignements ne constituent ni des avis ni des recommandations visés par l’article 37 de la Loi sur l’accès et ils sont accessibles au demandeur. Les 2 derniers paragraphes du rapport, inscrits sous une rubrique intitulée « Recommandation » sont par ailleurs substantiellement constitués d’un avis motivé (1 er paragraphe) et d’une recommandation (2 e paragraphe) que l’organisme peut refuser de communiquer en vertu du 2 e alinéa de l’article 37 de la Loi précitée, vu la preuve. E) Le rapport du 26 juin 2001 : [33] Le rapport du 26 juin 2001 comprend 8 pages et il résulte d’une opération de mesure; à l’aide d’un appareil qui effectue le calcul requis et qui en donne la lecture, le technicien a pu déterminer l’état d’une situation précise. La substance du rapport est constituée d’explications sur la méthodologie utilisée pour chaque jour de l’opération, de tableaux détaillant les résultats des lectures données par l’appareil pour chacun de ces jours et de quelques commentaires factuels relatifs à l’opération; ces renseignements ne constituent ni des avis ni des recommandations visés par l’article 37 de la Loi sur l’accès et ils sont accessibles au demandeur, ce, à l’exception de deux solutions recommandées à l’organisme et inscrites dans une seule phrase dans les 5 e , 7 e et 8 e pages que l’organisme peut refuser de communiquer en vertu du 2 e alinéa de cet article. F) Les autres documents : [34] La preuve démontre que les autres documents demandés ne sont pas détenus, exception faite de ceux que l’organisme s’est engagé à transmettre au demandeur.
05 10 17 Page : 10 [35] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : ACCUEILLE partiellement la demande; ORDONNE à l’organisme de communiquer au demandeur les rapports qui sont en litige dans la seule mesure déterminée plus haut. HÉLÈNE GRENIER Commissaire M e Yves A. Dubois Avocat de l’organisme
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