Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 04 07 71 Date : 14 octobre 2005 Commissaire : M e Christiane Constant X Demandeur c. Ville de Repentigny Organisme public DÉCISION L'OBJET DU LITIGE LA DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] Le 3 mars 2004, le demandeur s’adresse à la Ville de Repentigny (l'« organisme »), afin de pouvoir consulter les documents suivants se trouvant soit sur support papier, soit « au terminal d’ordinateur à partir du fichier Excel » : a) le tableau-synthèse de la ville; b) le tableau-synthèse des quartiers; c) le tableau-synthèse des unités du voisinage de son quartier (# 10); d) le tableau-synthèse de son unité de voisinage (# 501); variations totales (%); e) le tableau-synthèse de son unité de voisinage (# 501) trié par ordre de variations totales (%), trié par ordre de variations/terrains/bâtiments (%).
04 07 71 Page : 2 [2] Le 23 mars, par l’entremise de M. Jean Fafard, directeur des services administratifs, l’organisme répond au demandeur : […] Nous donnons suite à votre demande du 3 mars 2004, déposée à nos bureaux relativement à l’objet des présentes, et plus particulièrement en vue de l’obtention de données comparatives d’évaluation affectant votre quartier et votre unité de voisinage. À cet égard, nous vous réitérons, tout comme l’évaluateur monsieur Serge Locas l’a fait lors de vos visites antérieures à son bureau, que vous ne pouvez consulter aucun tableau synthèse ni faire aucune comparaison en vous servant d’un poste informatique à nos bureaux puisque ces données n’existent pas comme tel et que seule une personne familière avec les outils et moteurs de recherches peut, à la rigueur, générer certains de ces rapports. En conséquence, et pour faciliter votre tâche, le service d’évaluation a préparé à votre intention un tableau des variations des valeurs des immeubles du quartier numéro 10 ainsi qu’un rapport informatisé de la variation des valeurs pour l’unité de voisinage numéro 501, contenant à la fois les valeurs et les pourcentages des variations. […] [3] Le 14 avril 2004, M. Fafard lui transmet des documents. [4] Le 11 mai suivant, le demandeur formule une demande de révision auprès de la Commission d'accès à l'information (la « Commission ») pour que soit révisée la décision de l’organisme. L'AUDIENCE [5] L’audience de la présente cause se tient, le 7 avril 2005, à Montréal, en présence du demandeur et des témoins de l’organisme.
04 07 71 Page : 3 LA PREUVE I) DE L’ORGANISME TÉMOIGNAGE DE M. JEAN FAFARD [6] M. Jean Fafard déclare qu’il est responsable de l’accès aux documents depuis plus de vingt ans. Il occupe les mêmes fonctions depuis la fusion municipale de l’organisme. Il est également directeur des services administratifs. Il précise que le demandeur cherche à obtenir des renseignements confidentiels dans le but de constituer un dossier visant une contestation de son évaluation municipale devant le Tribunal administratif du Québec (le « TAQ »). [7] M. Fafard affirme que l’organisme a communiqué au demandeur des documents contenant des renseignements concernant sa propriété (pièce O-1). L’organisme lui a également transmis d’autres documents. Il refuse cependant de lui communiquer ceux visant les autres propriétés résidentielles, car ce sont des renseignements confidentiels concernant les propriétaires de celles-ci. [8] Selon M. Fafard, M. Serge Locas, qui travaille au sein de l’organisme, avait préparé à l’attention des membres du conseil municipal un document relatif à l’évaluation municipale. Il en a remis une copie au demandeur, et ce, par mesure de transparence. Il signale de plus que les données, telles que recherchées par le demandeur, sont inexistantes. Il ajoute que l’organisme est allé au-delà de ce que la Loi sur l’accès prévoit de transmettre au demandeur. Clarifications recherchées par le demandeur [9] Se référant à la réponse de l’organisme datée du 23 mars 2004, M. Fafard précise que le document remis par M. Locas au demandeur ne revêtait pas un caractère public. De plus, il émet des commentaires sur les documents que l’organisme a fait parvenir au demandeur relativement au rôle d’évaluation, lesquels sont produits à l’audience (pièce D-1 en liasse). Ces documents s’intitulent « liste sommaire des ventes, Ville de Repentigny - Rapport de vérification des valeurs après équilibration/indexation, Variation des valeurs pour l’ensemble des catégories imposables du rôle d’évaluation ». [10] Par ailleurs, M. Fafard affirme qu’il a traité la demande d’accès du demandeur (pièce D-2). Il a rencontré celui-ci le 31 mars 2004, et lui a prêté assistance, mais le tableau synthèse et les renseignements tels que décrits et convoités par le demandeur sont inexistants.
04 07 71 Page : 4 [11] M. Fafard indique que l’organisme a donné au demandeur accès aux seules données informatiques accessibles au public. Toutefois, les outils de travail dont se sert l’évaluateur pour la confection du rôle d’évaluation ne le sont pas, et ce, selon les termes de l’article 79 de la Loi sur la fiscalité municipale 1 , lequel réfère au deuxième alinéa de l’article 78 de cette loi. II) TÉMOIGNAGE DE M. SERGE LOCAS [12] M. Locas affirme solennellement qu’il est directeur du Service d’évaluation depuis 25 ans. Il occupe également les mêmes fonctions à partir du mois de juin 2002, soit au moment de la fusion municipale. De plus, il fournit des explications quant au système informatique utilisé par l’organisme afin de préparer le rôle d’évaluation, tout en respectant les critères établis par la Loi sur la fiscalité municipale. M. Locas ajoute qu’il a rencontré le demandeur à plusieurs reprises en rapport avec ce rôle. Il lui a permis de visionner, à partir d’un écran informatique, notamment les adresses, les données de base relatives à d’autres propriétés immobilières. [13] De plus, M. Locas émet des précisions relativement au système informatique dont se sert l’organisme pour confectionner le rôle d’évaluation des propriétés résidentielles étalé sur une période de 3 ans. Les renseignements contenus dans ce système ne se trouvent pas dans un « Fichier Excel. » À son avis, s’il fallait les inscrire dans ce fichier, « il aurait fallu créer le système Excel pour répondre à la demande ». Il souligne toutefois que ce système est utilisé pour les propriétés immobilières dans le secteur commercial et non résidentiel. Il répond aux questions du demandeur relativement à chaque point de la demande et indique que le « Quartier 10 » où réside le demandeur n’a aucun lien avec le rôle d’évaluation ni avec la confection de ce dernier. [14] Par ailleurs, M. Locas ajoute que la Loi sur la fiscalité municipale et les règlements déterminent les renseignements que doit contenir un rôle d’évaluation. Le conseil municipal établit cependant le taux d’indexation. III) TÉMOIGNAGE DU DEMANDEUR [15] Le demandeur reconnaît d’emblée qu’il s’est adressé à l’organisme afin d’obtenir des renseignements relatifs au rôle d’évaluation. Il indique que dans le secteur où il réside, il existe trois catégories de propriétés immobilières. Les renseignements recherchés lui auraient permis de savoir s’il y a eu augmentation du rôle d’évaluation de ces propriétés. 1 L.R.Q., c. F-2.1.
04 07 71 Page : 5 [16] Par ailleurs, le demandeur décrit les documents que lui a fournis l’organisme. Il prétend qu’il lui manque le « Tableau de synthèse des unités de voisinage » de son quartier. Il nie que l’organisme lui ait communiqué tous les documents qu’il cherche à obtenir. Il se dit convaincu que l’organisme, par l’entremise de M. Locas, aurait pu transposer, sur un système informatique Excel, les renseignements convoités. LA DÉCISION [17] La Commission tient à préciser qu’elle n’est pas habilitée à entendre et à statuer sur toute matière relative à l’augmentation ou non du rôle d’évaluation qu’aurait pu subir le demandeur. Ce n’est pas le forum approprié pour le faire. [18] Le demandeur souhaite avoir accès à des documents précis selon les termes de l’article 9 de la Loi sur l’accès. 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. [19] Ce sont : a) le tableau-synthèse de la ville; b) le tableau-synthèse des quartiers; c) le tableau-synthèse des unités du voisinage de son quartier (# 10); d) le tableau-synthèse de son unité de voisinage (# 501); variations totales (%); e) le tableau-synthèse de son unité de voisinage (# 501) trié par ordre de variations totales (%), trié par ordre de variations/terrains/bâtiments (%). [20] Il voudrait obtenir des renseignements confidentiels concernant non seulement sa résidence, mais également ceux visant les autres propriétés immobilières se trouvant dans son secteur à partir d’un « fichier informatique Excel », afin de pouvoir vérifier si elles ont subi ou non une augmentation du rôle d’évaluation.
04 07 71 Page : 6 [21] Sur ce point, il est opportun d’indiquer que le demandeur n’est nullement obligé de faire connaître les motifs qui le guident à vouloir obtenir les documents recherchés. Tel qu’il est mentionné dans l’affaire Directron Média c. Ville de Longueuil 2 , à partir « du moment où un document est accessible en vertu de la Loi, la Commission n’a pas à tenir compte des motivations qui amènent un requérant à obtenir un document. » [22] Par ailleurs, il est établi en preuve que les deux témoins de l’organisme ont prêté assistance au demandeur, et ce, à plusieurs reprises et ils lui ont donné des documents. Il a été autorisé à consulter un système informatique de l’organisme en rapport notamment avec les données de base relatives au rôle d’évaluation qui sont accessibles au public. [23] Le demandeur, pour sa part, reconnaît que l’organisme lui a transmis des documents. Il prétend cependant que celui-ci aurait dû lui communiquer des documents additionnels, particulièrement ceux contenant des renseignements pouvant lui donner des outils nécessaires à une éventuelle contestation de son rôle d’évaluation municipale. Il a d’ailleurs tenté de savoir, entre autres, la manière selon laquelle M. Locas procède pour confectionner le rôle d’évaluation, le système informatique utilisé, les renseignements pertinents qui s’y trouvent, etc. [24] Par ailleurs, la preuve convainc la soussignée que l’organisme n’est pas en mesure de donner au demandeur accès aux documents tels que recherchés, soit le « tableau synthèse de son unité de voisinage (# 501) trié par ordre de variations totales (%), trié par ordre de variations/terrains/bâtiments (%) ». Il aurait fallu créer un document pour satisfaire à la demande. [25] À cet effet, l’article 15 de la Loi sur l’accès prévoit que : 15. Le droit d'accès ne porte que sur les documents dont la communication ne requiert ni calcul, ni comparaison de renseignements. [26] Cette disposition législative démontre que le législateur n’oblige pas un organisme à créer un document, afin de pouvoir répondre spécifiquement aux exigences d’un demandeur. [27] La preuve démontre que la décision prise par le responsable de l’accès, M. Fafard, de ne pas communiquer au demandeur les documents préparés par l’évaluateur en vue de la confection ou de la mise à jour du rôle était fondée. En ce sens, il importe de citer le deuxième alinéa de l’article 78 de la Loi sur la 2 [1990] C.A.I. 223, 229.
04 07 71 Page : 7 fiscalité municipale. L’article 79 de la même loi, pour sa part, contient une clause dérogatoire indiquant notamment que, malgré l’article 9 de la Loi sur l’accès, nul n’a droit d’accès aux documents visés au deuxième alinéa de l’article 78 précité. 78. Le rôle est la propriété de la municipalité locale pour laquelle il est fait. Documents. Les documents rassemblés ou préparés par l'évaluateur en vue de la confection ou de la tenue à jour du rôle, qu'ils aient servi ou non à cette fin, appartiennent au propriétaire du rôle. L'organisme municipal responsable de l'évaluation a la garde de ces documents au bénéfice de leur propriétaire, et décide de l'endroit où ils doivent être conservés. Transcription de données. Aux fins du présent chapitre, le mot «document» comprend une bande, un ruban, un disque, une cassette ou un autre support d'information, ainsi que les données qu'il renferme. La propriété ou la garde d'un tel document emporte le droit pour l'organisme ou la municipalité d'obtenir sans frais de l'évaluateur et de toute autre personne qui y a consigné les données tous les renseignements nécessaires pour avoir accès à ces données et pour pouvoir les transcrire sur un document conventionnel; cependant, ce droit ne comprend pas celui d'obtenir sans frais le logiciel. 79. Malgré l'article 9 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (chapitre A-2.1), nul n'a droit d'accès aux documents visés au deuxième alinéa de l'article 78, à l'exception de la matrice graphique dont l'établissement et la tenue à jour sont prévus par le règlement pris en vertu du paragraphe 1° de l'article 263 et par le Manuel d'évaluation foncière du Québec auquel il renvoie. Consultation des documents. Toutefois, une personne peut consulter un tel document relatif à l'immeuble dont elle est le propriétaire ou l'occupant ou relatif à l'établissement d'entreprise dont elle est l'occupant, s'il a servi de base à une inscription au rôle concernant cet immeuble ou cet établissement d'entreprise et s'il a été préparé par l'évaluateur. Il en est de même
04 07 71 Page : 8 pour une personne ayant déposé une demande de révision ou pour un requérant à l'égard de l'immeuble ou de l'établissement d'entreprise qui fait l'objet de la demande de révision ou d'un recours devant le Tribunal. Ministre. Outre la municipalité locale et l'organisme municipal responsable de l'évaluation, le ministre peut consulter un tel document préparé par l'évaluateur et en obtenir copie sans frais. [28] Par ailleurs, en ce qui concerne les renseignements que le demandeur cherche à obtenir dans un fichier Excel, la preuve démontre clairement que l’organisme détient ce type de renseignement dans ce système uniquement pour les propriétés commerciales et non pour les propriétés résidentielles. À cet effet, l’article 1 de la Loi sur l’accès stipule que : 1. La présente loi s'applique aux documents détenus par un organisme public dans l'exercice de ses fonctions, que leur conservation soit assurée par l'organisme public ou par un tiers. Elle s'applique quelle que soit la forme de ces documents: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. [29] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : CONSTATE que l’organisme a communiqué au demandeur des documents; REJETTE, quant au reste, la demande de révision; FERME le présent dossier portant le n o 04 07 71. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.