Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 05 01 43 Date : Le 2 décembre 2005 Commissaire : M e Diane Boissinot DÉCISION OBJET : DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS formulée en vertu de l’article 135 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels [1] Les 6 octobre et 8 novembre 2004, le demandeur s’adresse à l’organisme afin d’obtenir l’étude hydrogéologique déposée chez l’organisme par la carrière Giroux & Lessard ltée. 1 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée la « Loi ». X Demandeur c. MINISTÈRE DE L’ENVIRONNEMENT (maintenant MINISTÈRE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE, DE L’ENVIRONNEMENT ET DES PARCS) Organisme -et- GIROUX & LESSARD LIMITÉE Tiers 1 .
05 01 43 Page 2 [2] Les 26 octobre et 29 novembre 2004, la responsable de l’accès de l’organisme (la Responsable) invoque les articles 23 et 24 de la Loi au soutien du refus de communiquer ce document au demandeur. [3] Le 13 décembre 2004, le demandeur requiert la Commission d’accès à l’information (la Commission) de réviser cette décision de la Responsable. [4] Une audience se tient en la ville de Québec, le 19 septembre 2005. L’AUDIENCE A. LA PREUVE i) De l’organisme [5] L’organisme appelle, pour témoigner, madame Christiane Marcoux. [6] Madame Marcoux est la répondante en matière d’accès à l’information à l’emploi de l’organisme à la Direction régionale de la Capitale-Nationale et de la Chaudière-Appalaches. [7] Elle affirme que les conditions d’application de l’article 118.4 de la Loi sur la qualité de l’environnement 2 ne sont pas présentes ici : 118.4. Toute personne a droit d'obtenir du ministère de l'Environnement copie de tout renseignement disponible concernant la quantité, la qualité ou la concentration des contaminants émis, dégagés, rejetés ou déposés par une source de contamination ou, concernant la présence d'un contaminant dans l'environnement. Le présent article s'applique sous réserve des restrictions aux droits d'accès prévues à l'article 28 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (chapitre A-2.1). 2 L.R.Q., c. Q-2, ci-après appelée la « LQE ».
05 01 43 Page 3 [8] Elle déclare que le seul document pouvant répondre aux demandes d’accès et que l’organisme détient est l’étude hydrogéologique de trois pages que l’ingénieur hydrogéologue a adressée le 9 juin 2003 aux ingénieurs Simard et Associés inc., intitulée, en objet, « Opinion technique sur l’impact d’une carrière - Carrière Giroux & Lessard à St-Benjamin ». [9] Elle déclare qu’il s’agit du document en litige et elle le dépose à ce titre entre les mains de la Commission sous pli confidentiel. [10] Elle laisse au tiers le soin de présenter la preuve établissant que les articles 23 et 24 de la Loi s’appliquent en l’espèce. ii) Du tiers [11] Monsieur Michel Giroux, vice-président du tiers, témoigne. [12] Monsieur Giroux fait aussi partie d’une entreprise de génie civil qui répond à des appels d’offres pour l’exécution, dans la région de la Beauce et de ses environs, de travaux où la qualité et l’accessibilité de la pierre sont des données techniques et commerciales importantes. [13] Cette entreprise de génie civil a donc formé une entreprise, le tiers, pour exploiter la carrière en cause ici dans cette région, et ce, dans le but de détenir un avantage sur ses concurrents quant au coût des matériaux qu’il utilise. [14] Monsieur Giroux affirme que la communication de ce document par l’organisme au public, donc possiblement à ses concurrents, procurerait vraisemblablement une perte au tiers en ce que ce dernier verrait révéler à ses concurrents une bonne partie des coûts des matériaux qu’il utilise pour l’exécution des contrats visés par les appels d’offres auxquels il participe. [15] En effet, les concurrents du tiers seraient en possession de renseignements sur la qualité de la pierre, sur son lieu d’extraction, donc sur les frais de transport, et sur les quantités qu’on peut y extraire dans une période donnée, autant de données importantes pour informer ces derniers du coût des matériaux utilisés par le tiers. [16] Le témoin indique à la Commission les passages clés du document en litige et en quoi ces derniers sont révélateurs à cet égard.
05 01 43 Page 4 [17] Monsieur Giroux déclare que les renseignements contenus dans le document en litige ont été fournis par le tiers à l’organisme dans le cadre de l’obtention, de ce dernier, d’un deuxième certificat d’autorisation pour exploiter cette carrière. iii) Du demandeur [18] Le demandeur témoigne. [19] Il réitère les motifs qu’il a invoqués au soutien de sa demande de révision. [20] Il explique les préjudices qu’il subit de par l’exploitation de la carrière en cause, en particulier, il attribue aux dynamitages qui surviennent à la carrière la destruction d’un premier puits qui l’alimentait en eau potable et des dommages par l’infiltration de sable dans un deuxième puits qu’il a fait creuser en remplacement du premier. [21] Il estime également que l’exploitation de la carrière se déroule à une distance trop rapprochée de sa propriété de résidence et que, de ce fait, l’exploitation de cette carrière est illégale. Il déplore également les excès de bruit et de poussière qui proviennent de l’exploitation de cette carrière. [22] Il dépose, en liasse sous la cote D-1, le rapport de l’organisme daté du 20 novembre 2002 concernant l’inspection du 22 octobre 2002 ainsi que l’avis d’infraction daté du 20 novembre 2002. iv) Du tiers [23] En réaction aux déclarations du demandeur, monsieur Giroux souligne que ce deuxième certificat dont il est question plus haut a été émis en novembre 2003, donc postérieurement à l’avis d’infraction déposé par le demandeur (D-1), infraction qui a fait l’objet d’une correction par le tiers avant l’émission de ce deuxième certificat. [24] Il ajoute que ce deuxième certificat a pris en considération les émanations de bruit et de poussière et les a autorisées.
05 01 43 Page 5 B. LES ARGUMENTS i) De l’organisme [25] L’organisme plaide que les inconvénients subis par le demandeur ne sont pas de la nature de ceux qu’exige l’application de l’article 26 de la Loi : 26. Un organisme public ne peut refuser de communiquer un renseignement visé par les articles 22, 23 et 24 lorsque ce renseignement permet de connaître ou de confirmer l'existence d'un risque immédiat pour la santé ou la sécurité d'une personne ou d'une atteinte sérieuse ou irréparable à son droit à la qualité de l'environnement. En pareil cas, l'organisme public peut, malgré l'article 49, rendre sa décision dès qu'il a donné au tiers l'avis requis par l'article 25. [26] En conséquence, le témoignage du demandeur et les faits qu’ils établissent ne peuvent réussir à contrer en amont les exceptions à l’accès prévues aux articles 23 et 24 de la Loi qui sont invoquées ici par le tiers et l’organisme. ii) Du tiers et du demandeur [27] Le tiers et le demandeur ne font valoir aucun argument, s’en remettant à la décision de la Commission. DÉCISION L’APPLICATION DE L’ARTICLE 26 [28] Les éléments de preuve apportés par le demandeur au sujet des inconvénients que lui et sa famille subissent du fait de l’exploitation par le tiers de la carrière en cause ne sont pas de nature à soulever la possibilité d’un risque immédiat pour la santé ou la sécurité d'une personne ou d'une atteinte sérieuse ou irréparable à son droit à la qualité de l'environnement.
05 01 43 Page 6 [29] De plus, et surtout, l’examen du document en litige ne révèle pas un renseignement qui permet de connaître ou de confirmer l'existence d'un tel risque ou d’une telle atteinte sérieuse. [30] L’article 26 précité ne peut donc recevoir d’application en l’espèce. L’APPLICATION DE L’ARTICLE 24 [31] L’application de l’article 24 de la Loi dispose du litige : 24. Un organisme public ne peut communiquer un renseignement fourni par un tiers lorsque sa divulgation risquerait vraisemblablement d'entraver une négociation en vue de la conclusion d'un contrat, de causer une perte à ce tiers, de procurer un avantage appréciable à une autre personne ou de nuire de façon substantielle à la compétitivité de ce tiers, sans son consentement. [32] L’examen du document en litige me convainc qu’il contient, en substance, des renseignements sur la description physique de la carrière, son lieu exact d’exploitation et ses environs, la date du début de son exploitation, la quantité extraite depuis lors et la nature de la pierre extraite. [33] La preuve me convainc que la divulgation de ces renseignements aurait vraisemblablement pour effet de nuire de façon substantielle à la compétitivité du tiers et, par le fait même, de procurer un avantage appréciable à d’autres personnes, en l’occurrence aux compétiteurs du tiers. [34] Je suis consciente que le demandeur ne compte pas parmi les compétiteurs du tiers, ni ne désire utiliser les renseignements contenus dans le document en litige aux fins d’entrer en concurrence avec celui-ci. [35] Il faut toutefois se rappeler le principe qu’un document est accessible ou il ne l’est pas; il en découle que si la Commission le juge accessible au demandeur, il le serait bien sûr pour toute autre personne, y compris pour les compétiteurs du tiers.
05 01 43 Page 7 [36] C’est la raison pour laquelle la Commission ne peut généralement tenir compte des bonnes intentions d’un demandeur ni des raisons qui motivent sa demande d’accès dans l’appréciation qu’elle fait de l’applicabilité de la Loi en général et de ses dispositions d’exception à l’accès. [37] POUR CES MOTIFS, la Commission REJETTE la demande de révision. DIANE BOISSINOT Commissaire
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