Commission d'accès à l'information du Québec Dossier : 04 15 09 Date : 28 juillet 2005 Commissaire : M e Hélène Grenier X Demandeur c. MINISTÈRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE Organisme DÉCISION OBJET DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS À DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS CONCERNANT DES TIERS. [1] Le demandeur s’est adressé à la Sûreté du Québec le 14 juin 2004 pour obtenir toutes les déclarations et rapports concernant un accident de la route dans lequel il a été impliqué. Il explique contester, devant le Tribunal administratif du Québec, une décision de la Société d’assurance automobile du Québec relativement à cet accident et devoir prouver que c’est dans le but d’éviter une collision qu’il s’est retrouvé dans un fossé. Il précise qu’une personne, qu’il nomme, a fait une déposition le 11 octobre 2002 et qu’un conducteur de l’entreprise Purolator, dont il ignore le nom, a fait de même. [2] Le 20 septembre 2004, le responsable de l’accès aux documents du ministère de la Sécurité publique donne suite à cette demande reçue le
04 15 09 Page : 2 1 er septembre 2004; il transmet certains renseignements compris dans le rapport d’enquête de la Sûreté du Québec et il applique, quant aux autres renseignements, les articles 28 (3 e et 5 e ), 32, 53, 54, 59 et 88 de la Loi sur l’accès. [3] Le demandeur soumet une demande de révision le 23 septembre 2004; il dit contester la décision du responsable et réitère vouloir établir les circonstances de l’accident dans lequel il a été impliqué. À son avis, plusieurs éléments essentiels sont manquants; il demande à connaître l’identité d’un témoin dont le nom a été masqué de même que la déposition de ce témoin. PREUVE i) de l’organisme [4] L’avocate de l’organisme remet sous pli confidentiel à la Commission une copie du rapport d’enquête de la Sûreté du Québec qui comprend et identifie les renseignements auxquels l’accès demeure refusé. [5] Elle dépose copie de deux pages de ce rapport (O-1, en liasse) que l’organisme rend presque intégralement accessibles en début d’audience; l’une de ces pages avait partiellement été communiquée alors que l’accès à l’autre avait été refusé. Témoignage de M. Jean Boulé : [6] M. Jean Boulé témoigne sous serment. Il a traité la demande d’accès à titre de responsable de l’accès et décidé d’y acquiescer partiellement. [7] Il a communiqué l’identité d’un ami du demandeur qui était présent lors de l’accident ainsi que celle du propriétaire (commerçant) qui avait prêté le véhicule de l’accident au demandeur. Il a également communiqué les renseignements qui constituent la narration du policier concernant cet accident. [8] Il avait masqué certains renseignements (O-1, en liasse) qu’il rend presque totalement accessibles en début d’audience; il maintient cependant son refus de communiquer les renseignements identifiant deux témoins de l’événement qui ont fait des déclarations au policier.
04 15 09 Page : 3 [9] M. Boulé a également masqué, en vertu du 3 e paragraphe de l’article 28 de la Loi sur l’accès, des renseignements obtenus lors de l’enquête policière et qui concernent d’autres personnes. [10] M. Boulé a examiné l’intégralité du rapport d’enquête de la Sûreté du Québec qui a été préparé à la suite de l’accident visé par la demande d’accès. Il refuse toujours de communiquer les renseignements suivants : • L’identité et la déclaration statutaire d’un témoin qui conduisait un camion de l’entreprise Purolator, ce, en vertu des articles 59 (9 e ) et 88 de la Loi sur l’accès; • La déclaration d’un autre témoin dont le demandeur a l’identité, en vertu des articles 59 (9 e ) et 88 de la Loi sur l’accès; • La déclaration du propriétaire (commerçant) précité, dont le demandeur a l’identité, en vertu des articles 59 (9 e ) et 88 de la Loi sur l’accès; • D’autres renseignements personnels obtenus par le policier enquêteur concernant un témoin et le propriétaire (commerçant) de même que des renseignements obtenus du Centre de renseignements policiers du Québec dans le cadre de cette enquête. ARGUMENTATION i) de l’organisme [11] L’identité du chauffeur d’un camion de l’entreprise Purolator de même que sa déclaration sont confidentielles. L’article 59 (9 e ) de la Loi sur l’accès n’habilite pas l’organisme à communiquer ces renseignements nominatifs sans le consentement de cette personne qui est un témoin de faits interrogé par un policier de la Sûreté du Québec. La loi est claire à cet égard; la jurisprudence aussi 1 . L’article 59 (9 e ) impose spécifiquement au responsable de refuser de communiquer la déclaration d’un témoin ou un renseignement sur son identité sans le consentement de ce témoin 2 . [12] Le rapport d’enquête comprend aussi des renseignements qui ne peuvent être communiqués en vertu du 3 e paragraphe de l’article 28 de la Loi sur l’accès. 1 Procureur général du Québec c. Jean Allaire, Luc Grenier [2002] CAI 443. 2 Chicoine c. Ministère de la Sécurité publique dossier CAI 04 15 51, 31 mai 2005.
04 15 09 Page : 4 DÉCISION [13] Les renseignements qui sont en litige sont inscrits dans un rapport d’enquête policière de 34 pages qui m’a été remis et dont j’ai pris connaissance. [14] Le demandeur n’a produit aucune preuve. Aucun élément ne démontre que des témoins ou d’autres tiers visés par ce rapport d’enquête policière aient consenti à la communication des renseignements qui les concernent et qui permettent de les identifier. A) Les renseignements sur l’identité d’un témoin : [15] Le responsable a, d’une part, refusé de communiquer des renseignements sur l’identité d’un témoin; il ne pouvait décider autrement en vertu du 1 er alinéa et du 9 e paragraphe du 2 e alinéa de l’article 59 de la Loi sur l’accès : 59. Un organisme public ne peut communiquer un renseignement nominatif sans le consentement de la personne concernée. Toutefois, il peut communiquer un tel renseignement sans le consentement de cette personne, dans les cas et aux strictes conditions qui suivent: 1° au procureur de cet organisme si le renseignement est requis aux fins d'une poursuite pour infraction à une loi que cet organisme est chargé d'appliquer, ou au Procureur général si le renseignement est requis aux fins d'une poursuite pour infraction à une loi applicable au Québec; 2° au procureur de cet organisme, ou au Procureur général lorsqu'il agit comme procureur de cet organisme, si le renseignement est requis aux fins d'une procédure judiciaire autre qu'une procédure visée dans le paragraphe 1 o ; 3° à une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, si le renseignement est requis aux fins d'une poursuite pour infraction à une loi applicable au Québec;
04 15 09 Page : 5 4° à une personne à qui cette communication doit être faite en raison d'une situation d'urgence mettant en danger la vie, la santé ou la sécurité de la personne concernée; 5° à une personne qui est autorisée par la Commission d'accès à l'information, conformément à l'article 125, à utiliser ce renseignement à des fins d'étude, de recherche ou de statistique; 6° (paragraphe abrogé); 7° (paragraphe abrogé); 8° à une personne ou à un organisme, conformément aux articles 61, 67, 67.1, 67.2, 68 et 68.1; 9° à une personne impliquée dans un événement ayant fait l'objet d'un rapport par un corps de police, lorsqu'il s'agit d'un renseignement sur l'identité de toute autre personne qui a été impliquée dans cet événement, sauf s'il s'agit d'un témoin, d'un dénonciateur ou d'une personne dont la santé ou la sécurité serait susceptible d'être mise en péril par la communication d'un tel renseignement. [16] La Commission comprend que le Tribunal administratif du Québec pourra, puisqu’il est saisi de l’appel déposé par le demandeur, juger s’il y a lieu d’ordonner la communication des renseignements sur l’identité du témoin. L’organisme n’est pas, en vertu de la loi, habilité à communiquer ces renseignements en réponse à la demande d’accès du demandeur. B) Les autres renseignements nominatifs : [17] La Loi sur l’accès définit les renseignements nominatifs : 54. Dans un document, sont nominatifs les renseignements qui concernent une personne physique et permettent de l'identifier. 56. Le nom d'une personne physique n'est pas un renseignement nominatif, sauf lorsqu'il est mentionné avec un autre renseignement la concernant ou lorsque sa
04 15 09 Page : 6 seule mention révélerait un renseignement nominatif concernant cette personne. [18] Le responsable a refusé de communiquer des renseignements nominatifs concernant des témoins ainsi que des renseignements nominatifs concernant d’autres personnes physiques. Il ne pouvait décider autrement en vertu du 1 er alinéa et du 9 e paragraphe de l’article 59 précité puisque ces renseignements, des déclarations entre autres, permettent d’identifier ces personnes et que ces personnes n’ont pas consenti à leur communication. Le responsable ne pouvait, non plus, décider autrement en vertu de l’article 88 de la Loi sur l’accès parce que la divulgation de ces renseignements, qui, en bonne partie concernent aussi le demandeur, aurait révélé des renseignements nominatifs concernant ces témoins et autres tiers ou encore l’existence de ces renseignements nominatifs les concernant : 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 4 o de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement nominatif concernant une autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement, à moins que cette dernière n'y consente par écrit. C) Les autres renseignements : [19] Le responsable a enfin refusé de communiquer d’autres renseignements obtenus dans le cadre de l’enquête policière. La Commission comprend que la divulgation d’une partie de ces renseignements serait susceptible de révéler des sources confidentielles d’information et que la divulgation des renseignements restants, qui témoignent d’une analyse, risquerait vraisemblablement d’avoir un effet sur l’appel entrepris par le demandeur devant le Tribunal administratif du Québec : 28. Un organisme public doit refuser de confirmer l'existence ou de donner communication d'un renseignement obtenu par une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, lorsque sa divulgation serait susceptible:
04 15 09 Page : 7 1° …; 2° …; 3° de révéler une méthode d'enquête, une source confidentielle d'information, un programme ou un plan d'action destiné à prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois; 4° … 32. Un organisme public peut refuser de communiquer une analyse lorsque sa divulgation risquerait vraisemblablement d'avoir un effet sur une procédure judiciaire. [20] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : REJETTE la demande. HÉLÈNE GRENIER Commissaire M e Chantal Boivin Avocate de l’organisme
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