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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 03 17 52 Date : 21 juillet 2005 Commissaire : M e Christiane Constant X Demandeur c. Hôpital général de Montréal (Centre universitaire de santé McGill) Organisme public DÉCISION LOBJET DU LITIGE LA DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS À DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS [1] Faisant suite à un entretien téléphonique tenu avec M. Barry A. Cappel, de lhôpital général de Montréal, ci-après désigné l « organisme », le demandeur réitère le 2 juillet 2003 comme suit sa demande daccès : […] I wish to consult the 19 th century Admission Registers of the Montreal General Hospital up to the year 1870 as part of my continuing research into the lives of black Montrealers of that day. My ultimate purpose is to write a social history of the black population between the last days of slavery here at the end of the 18 th century and the abolition of slavery in the United States (1865). […]
03 17 52 Page : 2 [2] Le 15 juillet, M e Cappel linforme, entre autres, de ce qui suit : […] I read with interest, your letter of July 2 nd , 2003. Unfortunately, I cannot approve your request to consult the admission registers of the Montreal General Hospital-1822/1870. As far as I was able to determine, there are no time restriction on the legislative provisions on restrictions to access. I draw to your attention, your rights of appeal if you wish to exercise them. […] [3] Le 1 er octobre suivant, le demandeur sollicite lintervention de la Commission d'accès à l'information (la « Commission ») afin que soit révisée cette décision de lorganisme. LAUDIENCE [4] Laudience se tient, le 6 août 2004, à Montréal en présence du demandeur et de M e Barry A. Cappel, témoin de lorganisme. LA PREUVE A) DE LORGANISME [5] M e Barry A. Cappel déclare quil est, entre autres, responsable de laccès aux documents. Il indique avoir pris connaissance de la demande daccès du demandeur aux dossiers dadmission des usagers de lorganisme ayant vécu au 19 e siècle, et ce, jusquà lannée 1870. Les renseignements contenus dans ces dossiers sont confidentiels et ne peuvent être accessibles au demandeur, selon les termes de larticle 53 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 la Loi sur laccès »). B) DU DEMANDEUR [6] Le demandeur, pour sa part, affirme solennellement quil est « historien par vocation, mais » quil est « journaliste de profession. » Il précise quil souhaite avoir accès « aux registres dadmission » des personnes de race noire ayant été 1 L.R.Q., c. A-2.1.
03 17 52 Page : 3 admises au sein de lorganisme. Ces documents sont conservés aux archives de lUniversité McGill. Le demandeur prétend que les renseignements confidentiels convoités font partie de sa recherche continue, dont le but ultime est décrire une biographie relative aux derniers jours desclavage des personnes noires vivant dans la région de Montréal à la fin du 18 e siècle, soit jusquen 1870. Il vise également celles ayant vécu jusquà labolition de lesclavage aux États-Unis dAmérique en 1865. [7] Le demandeur spécifie que la Loi sur laccès accorde à tout chercheur le droit davoir accès aux documents détenus par un organisme. La Loi sur les archives 2 , pour sa part, prévoit que les dossiers inactifs depuis plus de cent ans sont accessibles à une personne qui en fait la demande. Il souligne quil a déjà écrit une biographie sur une femme noire, mais pour la période de 1870 à 1880. RÉPLIQUE DE LORGANISME [8] M e Cappel réplique que la Loi sur laccès ne fait pas de distinction entre des dossiers actifs et ceux qui sont inactifs. À son avis, la Loi sur laccès est claire. Les renseignements recherchés par le demandeur, contenus dans des dossiers de lorganisme, sont confidentiels et inaccessibles à celui-ci. M e Cappel ajoute que les droits daccès au dossier médical dune personne décédée demeure confidentiels même après son décès. LA DÉCISION [9] Le demandeur désire avoir accès aux renseignements nominatifs contenus dans des documents concernant des Montréalais de race noire ayant été admis au sein de lorganisme à la fin du 18 e siècle, soit dans les derniers jours desclavage, et ce, jusquen 1870. Il prétend que la Loi sur laccès donne à un chercheur laccès aux documents convoités. [10] La soussignée tient à souligner cependant que le demandeur a plutôt indiqué au cours de son témoignage quil est « historien par vocation », mais quil exerce la profession de journaliste. [11] Par ailleurs, le demandeur signale que, selon larticle 19 de la Loi sur les archives, les dossiers inactifs depuis plus de cent ans sont accessibles à une personne qui en fait la demande. 2 L.R.Q., c. A-21.1.
03 17 52 Page : 4 19. Les documents inactifs qui sont destinés à être conservés de manière permanente et auxquels s'appliquent des restrictions au droit d'accès en vertu de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (chapitre A-2.1) sont communicables, malgré cette loi, au plus tard 100 ans après leur date ou 30 ans après la date du décès de la personne concernée. Sauf si la personne concernée y consent, aucun renseignement relatif à la santé d'une personne ne peut cependant être communiqué avant l'expiration d'un délai de 100 ans de la date du document. [12] Lorganisme, pour sa part, soumet que les renseignements nominatifs contenus dans des dossiers des usagers sont confidentiels au sens de larticle 53 de la Loi sur laccès. [13] Toutefois, il importe de préciser que lorganisme est un établissement visé par la L.s.s.s.s. Larticle 28 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux 3 L.s.s.s.s. ») prévoit que les articles 17 à 27 de cette loi sappliquent, sans égard à la Loi sur laccès. Ces articles se retrouvent au chapitre II de ladite loi traitant, entre autres, de laccès au dossier dun usager, de la confidentialité entourant ce dossier et des restrictions qui sy rattachent. [14] Larticle 28 de cette loi prévoit que : 28. Les articles 17 à 27 s'appliquent malgré la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels ( chapitre A-2.1). [15] De plus, le législateur exige dun organisme de tenir un dossier sur chaque usager qui y obtient des services. Ce dossier contient des renseignements personnels le concernant et il est confidentiel au sens de larticle 19 de la L.s.s.s.s. qui stipule que : 19. Le dossier d'un usager est confidentiel et nul ne peut y avoir accès, si ce n'est avec le consentement de l'usager ou de la personne pouvant donner un consentement en son nom, sur l'ordre d'un tribunal ou d'un coroner dans l'exercice de ses fonctions, dans le cas la présente loi prévoit que la communication de renseignements contenus dans le dossier peut être requise d'un établissement ou dans le cas un renseignement est communiqué pour 3 L.R.Q., c. S-4.2.
03 17 52 Page : 5 l'application de la Loi sur la santé publique (chapitre S-2.2). [16] Dans le cas sous étude, les registres dadmissions des usagers de lorganisme convoités par le demandeur font partie intégrante de leurs dossiers. Le demandeur ne peut donc pas y avoir accès. [17] Comme le mentionnent les auteurs Doray & Charette 4 , cette loi prévoit également les conditions devant être respectées par une personne qui souhaite avoir accès à ce dossier. Il doit : a) Obtenir le consentement de lusager ou de la personne pouvant consentir à la communication; b) obtenir une ordonnance dun tribunal ou; c) obtenir une ordonnance dun coroner dans lexercice de ses fonctions. [18] Dans le cas présent, il est évident que le demandeur ne rencontre ni lun ni lautre des critères ci-dessus mentionnés. Il est considéré comme étant une tierce personne par rapport aux usagers à légard de qui les renseignements confidentiels sont recherchés. [19] Les auteurs ajoutent que le régime de confidentialité prévu à la L.s.s.s.s.: […] est plus strict que celui que prévoit la Loi sur laccès. Ainsi, les nombreuses exceptions à la règle de confidentialité des renseignements nominatifs qui se retrouvent à larticle 59 de la Loi sur laccès ne sappliquent pas au dossier de lusager. Laccès des tiers à ce dossier fait lobjet dun régime particulier prévu dans la L.S.S.S.S. ainsi que dans les règlements adoptés en vertu de cette loi. Ce régime sapplique malgré la Loi sur laccès comme lindique spécifiquement larticle 28 L.S.S.S.S. […] [20] Par ailleurs, larticle 50 du Règlement sur lorganisation et ladministration des établissements 5 indique que : 4 Raymond DORAY et François CHARETTE, Accès à linformation. Loi annotée, Editions Yvon Blais, 2004, volume 1, p. VIII/168-15. 5 Règlement sur lorganisation et ladministration des établissements, R.Q., c. S-5, r.3.01.
03 17 52 Page : 6 50. Un établissement doit tenir un dossier sur chacun des bénéficiaires qui en obtient des services, sauf ceux visés aux articles 45 et 51. Les renseignements exigés du bénéficiaire en vertu de larticle 23 sont conservés au dossier. Rien dans le présent règlement ne doit être interprété comme excluant lutilisation de linformatique ou de toute autre technique pour la constitution et la tenue des dossiers des bénéficiaires dun établissement. [21] Par ailleurs, une note de léditeur indique que : Les dispositions portant sur la conservation des dossiers des bénéficiaires dans les établissements sont réputées adoptées en vertu de la Loi sur les archives (L.R.Q., c. A-21.1) et demeurent en vigueur jusquà ce quelles soient remplacées ou abrogées en vertu de cette loi. (L.Q., 1984, c. 47, a. 211). [22] De plus, le législateur prévoit, dune part, quun centre hospitalier, tel le présent organisme, doit tenir à son service des archives un index des bénéficiaires et, dautre part, quun dossier ou partie de dossier ne peut être éliminé que conformément à la Loi sur les archives. Les articles 57 et 64 du Règlement sur lorganisation et ladministration des établissements stipulent que : 57. Un centre hospitalier doit tenir à son service des archives un index des bénéficiaires et coder les maladies et les interventions chirurgicales selon la classification internationale des maladies (CIM). Dans un centre hospitalier de soins de courte durée, des index distincts doivent être tenus : 1 o pour les maladies; 2 o pour les interventions chirurgicales; 3 o Pour chacun des médecins et des dentistes qui exercent dans le centre hospitalier. 64. Un dossier ou une partie de dossier ne peut être éliminé que conformément à la Loi sur les archives. Dans le cas dun centre hospitalier, lorsque le dossier dune personne non décédée devient inactif et est
03 17 52 Page : 7 éliminé conformément à la Loi sur les archives, un résumé comprenant les éléments suivants doit en être conservé : 1 o la feuille sommaire; 2 o le protocole opératoire; 3 o le protocole danatomopathologie. Le résumé peut être constitué de reproductions photographiques des éléments énumérés au deuxième alinéa. [23] Faut-il rappeler que le demandeur dit quil souhaite consulter les registres dadmissions des personnes de race noire ayant été admises au sein de lorganisme lors de leurs derniers moments desclavage à Montréal, afin de pouvoir écrire une biographie à leur égard. [24] Comme le souligne la Commission dans laffaire Côté c. Centre hospitalier de lUniversité de Montréal 6 , il sagit de déterminer « si ces documents, parce que inactifs et conservés depuis plusieurs décennies, sont accessibles à lexpiration du délai prévu par larticle 19 de la Loi sur les archives » déjà mentionnés. [25] À cet effet, tel que la souligné le ministre de la Justice de lépoque, M. Paul Bégin, lors de la Commission parlementaire sur le Projet de loi n o 122 7 , larticle 19 de cette loi est modifié : […] 1 o par le remplacement à la fin, de ce qui suit : « 150 ans après leur date » par ce qui suit : « 100 ans après leur date ou 30 ans après la date du décès de la personne concernée. Sauf si la personne concernée y consent, aucun renseignement relatif à la santé dune personne ne peut cependant être communiqué avant lexpiration dun délai de 100 ans de la date du document. […] […] Alors, la modification qui est proposée au paragraphe 1 o a pour objet de prévoir un délai daccessibilité aux documents après 100 ans de leur date ou 30 ans après le décès de la personne concernée. Sil sagit de 6 [2003] C.A.I. 628, 632. 7 Loi modifiant la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels , la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le Code des professions et dautres dispositions législatives, Projet de loi 122, 1 ère session, 36 e législature (Québec).
03 17 52 Page : 8 renseignements relatifs à la santé, le délai sera de 100 ans de la date du document. […] [26] Malgré un intérêt marqué du demandeur à vouloir obtenir les renseignements recherchés et pour les raisons invoquées, force est de constater que celui-ci ne rencontre pas les critères législatifs prévus à larticle 19 de la Loi sur les archives ou la L.s.s.s.s. La décision prise par le responsable de laccès de lorganisme de lui refuser laccès aux documents en litige est bien fondée en droit. Sa demande de révision auprès de la Commission doit être rejetée. [27] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : REJETTE la demande de révision du demandeur contre lhôpital général de Montréal; FERME le présent dossier n o 03 17 52. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire
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