Commission d'accès à l'information du Québec Dossier : 05 02 78 Date : 20 juillet 2005 Commissaire : M e Hélène Grenier DÉCISION OBJET DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] La demande d’accès est datée du 11 janvier 2005; elle vise l’obtention des documents suivants : • Tous les documents qui comprennent la compilation et/ou l’analyse des rapports de conformité des appareils de loterie vidéo réalisés au cours de X Demandeur c. MINISTÈRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE Organisme Et LOTO-QUÉBEC tiers
05 02 78 Page : 2 l’année 2003 par le laboratoire de certification et de vérification des appareils de jeux; • Tous les documents qui comprennent la compilation et/ou l’analyse des rapports de conformité des machines à sous (Casinos de Montréal, Hull et Charlevoix) réalisés au cours de l’année 2003 par le même laboratoire; • Les documents explicatifs concernant les codes que l’on retrouve sur les documents suivants : vérification d’appareil de loterie vidéo VLC, vérification carte logique loterie vidéo (VLC 87240), vérification de mémoires de machines à sous (E-LCV-V-004). [2] Le refus du responsable est daté du 11 février 2005; il s’appuie sur les articles 22, 23, 29 et 41 de la Loi sur l’accès (L.R.Q., c. A-2.1). Dans sa décision, le responsable indique au demandeur qu’une partie de sa demande relève de la compétence de Loto-Québec; référant à l’article 48 de cette loi, il lui fournit les coordonnées de la responsable de l’accès aux documents de cet organisme. [3] La demande de révision est datée du 18 février 2005; elle ne porte que sur le refus du responsable de communiquer les documents suivants : • Les documents qui comprennent la compilation des rapports de conformité des appareils de loterie vidéo réalisés au cours de l’année 2003 par le laboratoire de certification des appareils de jeux; • Les documents qui comprennent la compilation des rapports de conformité des machines à sous (Casinos de Montréal, Hull et Charlevoix) réalisés au cours de la même année; • Les documents explicatifs concernant les codes que l’on retrouve sur les documents suivants : (VLC 87240) et (E-LCV-V- 004). PREUVE i) du ministère de la Sécurité publique Témoignage de M. André Marois : [4] M. André Marois témoigne sous serment. Il exerce, depuis l’année 2000, la fonction de responsable de l’accès aux documents du ministère; il a
05 02 78 Page : 3 auparavant occupé le poste d’adjoint administratif du directeur régional (Est du Québec) des services correctionnels de ce ministère. [5] M. Marois a traité la demande d’accès du 11 janvier 2005. Il s’est adressé au «Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale» du ministère pour obtenir les documents en litige. Il a obtenu les documents suivants: • Un document que le service des appareils de jeu du laboratoire précité avait préparé, à partir de renseignements existants, sur la conformité des machines à sous; • Des documents détenus relativement à la conformité des appareils de loterie vidéo. [6] M. Marois spécifie que les documents explicatifs visés par le 3 e volet de la demande n’existent pas. [7] Son refus de communiquer les documents ainsi obtenus s’appuie, d’une part, sur les articles 22 et 23 de la Loi sur l’accès. À son avis, le 2 e alinéa de l’article 22 s’applique particulièrement aux renseignements qui portent sur les composantes et caractéristiques des machines parce que la divulgation de ces renseignements les rendrait vulnérables, risquant ainsi de causer une perte à Loto-Québec et au Gouvernement du Québec dans son ensemble. M. Marois a également invoqué l’article 23 de la même loi puisque des renseignements ont été fournis par des tiers au sujet de leurs activités et que ces renseignements sont traités de façon confidentielle par tous ces tiers; selon M. Marois, la divulgation des documents en litige renseignerait sur l’état de fonctionnement des appareils et la vérification de ceux-ci, ces renseignements étant traités de façon confidentielle. [8] Son refus s’appuie d’autre part sur le 2 e alinéa de l’article 29 de la Loi sur l’accès, compte tenu du processus par lequel les renseignements sont obtenus et les documents produits de même que du dispositif de sécurité mis en place pour assurer l’intégrité des appareils et des renseignements. [9] M. Marois appuie aussi son refus sur l’article 41 de la Loi sur l’accès en raison des activités de vérification dont la responsabilité incombe, en vertu de la loi, au Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale du ministère; à son avis, la divulgation des renseignements en litige serait susceptible d’entraver le déroulement d’opérations de vérification et de révéler les programmes et plans selon lesquels le laboratoire exerce sa fonction de vérification.
05 02 78 Page : 4 [10] M. Marois a par ailleurs indiqué au demandeur que des documents visés par sa demande d’accès relevaient davantage de la compétence de Loto-Québec parce que ces documents émanent des activités de cet organisme. L’article 48 de la Loi sur l’accès a été invoqué à cet égard. Contre-interrogatoire de M. Marois : [11] Un document a été préparé en ce qui a trait aux machines à sous. Des documents sont détenus en ce qui concerne les appareils de loterie vidéo. Témoignage de M. Pierre Marchand : [12] M. Pierre Marchand témoigne sous serment à titre de chef du service des appareils de jeu du Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale. Il précise que ce laboratoire fait partie du ministère de la Sécurité publique et que le service des appareils de jeu, dont il coordonne les activités depuis janvier 2001, compte une vingtaine d’employés qui sont pour la plupart ingénieurs et techniciens en électronique. [13] Le service des appareils de jeu est responsable de la certification des appareils de jeu que Loto-Québec entend exploiter dans les casinos d’État ou dans le système de loterie vidéo; ce service est également responsable de la vérification de la conformité des appareils exploités dans ces casinos et dans le système de loterie vidéo. [14] La certification établit que le fonctionnement d’un prototype repose entièrement sur le hasard et que les composantes du prototype qui déterminent les chances de gagner sont adéquates; la certification précède l’acquisition d’appareils du même type. La vérification de la conformité porte sur les appareils acquis après la certification de leur prototype; elle vise à établir que chacun des appareils exploités est identique au prototype certifié. [15] Loto-Québec doit s’adresser à la Régie des alcools, des courses et des jeux pour obtenir un certificat et une autorisation d’exploiter un appareil; pour sa part, la Régie demande au service des appareils de jeu d’exécuter les tests de conformité et de lui faire rapport à ce sujet avant que Loto-Québec soit autorisée à exploiter des appareils de jeu. [16] Une équipe de 4 techniciens du service des appareils de jeu vérifie les machines à sous des 3 casinos d’État.
05 02 78 Page : 5 [17] M. Marchand continue son témoignage ex parte; cette partie de son témoignage porte sur les renseignements qui constituent les documents détenus qui sont en litige, notamment sur la préparation ou l’obtention de ces renseignements, sur leur signification et sur l’effet de leur divulgation. ii) de Loto-Québec Témoignage de M. Roger Garceau : [18] M. Roger Garceau témoigne sous serment. Employé de Loto-Québec, il occupe, depuis le début du mois de juin 2005, le poste de directeur des opérations réseau pour la Société des loteries vidéo du Québec qui exploite, à travers le Québec, un réseau d’appareils de loterie vidéo. M. Garceau est ingénieur en électronique; il a occupé, depuis 1998, le poste d’ingénieur chef à la Société des loteries vidéo du Québec, ce, après avoir travaillé durant 26 années au Centre de recherche industrielle du Québec. [19] La substance du témoignage de M. Garceau est rendue ex parte; ce témoignage porte essentiellement sur les renseignements qui constituent les documents qui sont en litige, notamment sur la nature confidentielle de ces renseignements, sur leur traitement confidentiel, sur leur signification et sur l’effet de leur divulgation. ARGUMENTATION i) du ministère de la Sécurité publique A) L’application de l’article 41 de la Loi sur l’accès : 41. Le vérificateur général ou une personne exerçant une fonction de vérification dans un organisme public ou pour le compte de cet organisme peut refuser de confirmer l'existence ou de donner communication d'un renseignement dont la divulgation serait susceptible: 1° d'entraver le déroulement d'une opération de vérification; 2° de révéler un programme ou un plan d'activité de vérification;
05 02 78 Page : 6 3° de révéler une source confidentielle d'information relative à une vérification; ou 4° de porter sérieusement atteinte au pouvoir d'appréciation accordé au vérificateur général par les articles 38, 39, 40, 42, 43 et 45 de la Loi du vérificateur général (chapitre V-5.01). [20] La preuve démontre la fonction de vérification qu’exerce le ministère de la Sécurité publique par l’entremise du service des appareils de jeu de son Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale. [21] La preuve démontre que la divulgation des renseignements détenus et en litige serait susceptible d’entraver le déroulement des opérations de vérification et de révéler des programmes ou plans d’activité de vérification. [22] Le ministère est donc habilité à refuser de donner communication de ces renseignements. B) L’application de l’article 29 de la Loi sur l’accès : 29. Un organisme public doit refuser de communiquer un renseignement portant sur une méthode ou une arme susceptible d'être utilisée pour commettre un crime ou une infraction à une loi. Il doit aussi refuser de communiquer un renseignement dont la divulgation aurait pour effet de réduire l'efficacité d'un dispositif de sécurité destiné à la protection d'un bien ou d'une personne. [23] La preuve démontre que les renseignements qui sont en litige expriment des programmes ou un plan d’activité de vérification mis en œuvre pour assurer, de façon efficace, l’intégrité des appareils. La preuve démontre que la divulgation de ces renseignements réduirait l’efficacité de ces mesures de sécurité. C) L’application de l’article 48 de la Loi sur l’accès : 48. Lorsqu'il est saisi d'une demande qui, à son avis, relève davantage de la compétence d'un autre organisme public ou qui est relative à un document produit par un autre organisme public ou pour son compte, le responsable doit, dans le délai prévu par le
05 02 78 Page : 7 premier alinéa de l'article 47, indiquer au requérant le nom de l'organisme compétent et celui du responsable de l'accès aux documents de cet organisme, et lui donner les renseignements prévus par l'article 45 ou par le deuxième alinéa de l'article 46, selon le cas. Lorsque la demande est écrite, ces indications doivent être communiquées par écrit. [24] Le responsable était fondé d’invoquer cette disposition en ce qui concerne les renseignements demandés et détenus qui appartiennent à Loto-Québec. D) L’application de l’article 23 de la Loi sur l’accès : 23. Un organisme public ne peut communiquer le secret industriel d'un tiers ou un renseignement industriel, financier, commercial, scientifique, technique ou syndical de nature confidentielle fourni par un tiers et habituellement traité par un tiers de façon confidentielle, sans son consentement. [25] La preuve démontre que des renseignements commerciaux de nature confidentielle et traités de façon confidentielle par Loto-Québec ont été fournis au ministère par ce tiers. [26] L’avocat du ministère poursuit la présentation de son argumentation ex parte. ii) de Loto-Québec [27] Le ministère de la Sécurité publique doit appliquer l’article 23 aux renseignements commerciaux, qui, selon la preuve, sont de nature confidentielle et qui sont traités de façon confidentielle par Loto-Québec qui a dû les fournir au ministère pour l’exercice de sa fonction de vérification. [28] Loto-Québec est, en ce qui concerne les renseignements fournis au ministère pour l’exercice de sa fonction de vérification, un tiers. [29] L’article 29 de la Loi sur l’accès s’applique aux renseignements commerciaux précités parce qu’ils expriment des activités de vérification dont la mise en œuvre est destinée à protéger l’intégrité des appareils. La divulgation de
05 02 78 Page : 8 ces renseignements ou celle d’une partie de ceux-ci réduirait, durant une certaine période, l’efficacité du dispositif de sécurité. [30] L’avocat de Loto-Québec poursuit la présentation de son argumentation ex parte. DÉCISION [31] La Commission a pris connaissance des quelques documents en litige, lesquels sont constitués de renseignements qui, selon ce qui est détenu, se rapprochent le plus des renseignements que le demandeur veut obtenir. Ces documents résultent de l’exercice de la fonction de certification et de vérification qui est attribuée, en vertu de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q., c. L-6), au Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale du ministère de la Sécurité publique. Ce laboratoire certifie et vérifie les appareils de jeu et le matériel électronique directement liés aux systèmes de loterie de casino exploités dans un casino d’État pour donner l’assurance que leur fonctionnement repose uniquement sur le hasard et que les appareils sont adéquats; le Laboratoire exerce la même fonction en ce qui concerne les appareils de loterie vidéo exploités ailleurs que dans un casino d’État. Les dispositions pertinentes de la loi précitée sont les suivantes: 52.15. La Société des loteries du Québec doit, avant leur acquisition, ensuite selon la fréquence déterminée par les règles de la Régie ou sur demande de celle-ci, faire vérifier et certifier par un laboratoire relevant de la responsabilité du ministre les appareils de jeu et le matériel électronique directement liés aux systèmes de loterie de casino qu’elle exploite dans un casino d’État, pour s’assurer que leur fonctionnement repose uniquement sur le hasard et que les appareils sont adéquats. La même obligation s’impose, selon le cas, à la Société ou aux titulaires de licences pour les appareils de loterie vidéo exploités ailleurs que dans un casino d’État, avant que ceux-ci ne soient immatriculés, ensuite selon la fréquence déterminée par les
05 02 78 Page : 9 règles de la Régie ou sur demande de celle-ci. 1.a.1) «appareil de loterie vidéo» : à l’exception des appareils utilisés par la Société des loteries du Québec dans l’exploitation d’un système de loterie non soumis à la présente loi, un appareil à sous au sens du Code criminel (L.R.C. (1985) c. C-46) et tout autre appareil exploité par un ordinateur, un dispositif électronique de visualisation, un dispositif mécanique ou électromécanique ou exploité à l’aide d’un tel appareil qui offrent des jeux, moyens, systèmes, dispositifs ou autres opérations mentionnés aux alinéas 206 (1) a) à g) du Code criminel; l) «système de loterie vidéo» : un système de loterie dont les jeux sont offerts à partir d’appareils de loterie vidéo reliés à un ordinateur central de contrôle, sauf s’il est exploité dans un casino d’État; 138. Le ministre de la Sécurité publique est chargé de l’application de la présente loi. A) L’application de l’article 41 de la Loi sur l’accès : [32] La preuve démontre que les renseignements détaillés qui constituent ces documents portent sur les processus de vérification et expliquent des activités de vérification. La preuve démontre que la divulgation de ces renseignements détaillés serait susceptible de révéler un programme ou un plan d’activité de vérification. La décision du responsable, appuyée à cet égard sur l’article 41, est fondée. B) L’application de l’article 29 de la Loi sur l’accès : [33] La preuve démontre que la confidentialité du processus de vérification est intrinsèquement liée à celle des mesures de sécurité destinées à protéger l’intégrité des appareils. La preuve démontre que les activités de vérification expliquées de façon détaillée dans les documents en litige expriment des mesures de sécurité mises en œuvre pour protéger l’intégrité des appareils. La preuve démontre que la divulgation des documents en litige aurait pour effet de réduire l’efficacité de dispositifs de sécurité destinés à la protection de l’intégrité
05 02 78 Page : 10 des appareils. La décision du responsable, appuyée à cet égard sur l’article 29, est fondée. C) L’application de l’article 23 de la Loi sur l’accès : [34] La preuve démontre qu’une partie des renseignements détaillés expliquant des activités de vérification expriment par le fait même des renseignements commerciaux. [35] La preuve démontre que ces renseignements commerciaux sont fournis par Loto-Québec. [36] La preuve démontre que ces renseignements commerciaux sont de nature confidentielle et qu’ils sont traités par Loto-Québec de façon confidentielle compte tenu, notamment, de l’application des articles 29 et 41 précités. [37] La décision du responsable, appuyée à cet égard sur l’article 23, est fondée. [38] La Commission conserve tous les documents en litige de même que l’enregistrement de l’audition de tous les témoins et celui de la présentation de tous les arguments pour qu’ils puissent être utilisés, advenant la contestation de la présente, par le tribunal saisi de cette contestation. [39] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : REJETTE la demande. HÉLÈNE GRENIER Commissaire M e Sébastien Rochette Avocat du ministère M e William J. Atkinson Avocat de Loto-Québec
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