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Commission d'accès à l'information du Québec Dossiers : 04 02 81 et 04 05 25 Date : Le 17 juin 2005 Commissaire : M e Michel Laporte DÉCISION L'OBJET DEMANDES DE RECTIFICATION [1] Les 12 janvier et 3 mars 2004, la demanderesse veut obtenir une copie de son dossier médical détenu par le Centre médical Westmount (le « Centre médical »). Elle veut également supprimer deux phrases inscrites par le D J. Goldsmith à ses dossiers médicaux (son « dossier ») détenus par le Centre médical et le Centre universitaire de santé de McGill (le « Centre universitaire »). X Demanderesse c. CENTRE MÉDICAL WESTMOUNT Entreprise -et- CENTRE UNIVERSITAIRE DE SANTÉ DE MCGILL Organisme r William
04 02 81 Page : 2 04 05 25 [2] Sans réponse du Centre médical et du Centre universitaire (les « Centres »), la demanderesse sollicite lintervention de la Commission d'accès à l'information (la « Commission ») devant le refus présumé de ceux-ci daccéder à ses demandes de rectification. [3] Le 2 mai 2005, le procureur du D r William J. Goldsmith fait parvenir à la Commission la lettre suivante adressée à la demanderesse : Suite à notre entretien téléphonique du 20 avril dernier, relativement à votre demande de rectification, la présente vous est soumise dans le but den arriver à une entente. Tel que discuté, Dr Goldsmith serait prêt à ajouter des explications concernant les mentions « psych » et « psych DX », à leffet que ces mentions font partie de lhistoire et de lexamen physique pour le « hysteroscopy and factunal curettage », chirurgie effectuée le 7 avril 1997. Il est entendu que ces mentions ont été inscrites au dossier afin den informer lanesthésiste et non dans le but dinsulter ou minimiser la patiente. Dr Goldsmith a écrit ces informations étant donné quil ne savait pas et ne sait toujours pas de quels types de problèmes psychiatriques il était question. Toutefois, il était important quil fasse la mention étant donné leur pertinence du côté de lanesthésie. Concernant la mention de Dr Masse, Dr Goldsmith serait prêt à ajouter que, suite à votre explication, Dr Masse a été le psychiatre de votre enfant. Quant à Dr Barza, il est également prêt à inscrire que, suite à votre explication, D r Barza était le médecin de votre ex-époux. Dans un autre ordre didées, veuillez prendre note que D r Goldsmith ne peut aucunement enlever quelque mention que ce soit au dossier étant donné que ce sont des observations quil a constatées suite à sa rencontre avec vous. [4] Le 13 mai 2005, une audience a lieu à Montréal.
04 02 81 Page : 3 04 05 25 L'AUDIENCE A) LE LITIGE [5] La demanderesse exige le retrait des renseignements suivants se trouvant au dossier des Centres parce quils ne devraient pas sy trouver, étant, selon elle, inexacts (pièces D-3 et E-1) : Dr Massée St.Justin and Dr Barza JGH and (psych??) Mellaril, restoril, ventolin - puffer asthma [6] Le procureur du Centre universitaire, M e Barry A. Cappel, la procureure du D r Goldsmith, M e Dara Lithwick, et la demanderesse reconnaissent que les renseignements en litige sont des notes prises en 1997 par le D r Goldsmith se trouvant au dossier détenu par les Centres. Il est donc convenu de réunir les deux dossiers pour ne rendre quune seule décision. [7] En raison du contenu médical, les documents déposés à la Commission sont frappés dun interdit de communication, publication et diffusion. B) LA PREUVE i) De la demanderesse [8] La demanderesse prétend que le D r Goldsmith, gynécologue, ne la pas « écoutée » correctement en 1997 et, conséquemment, a inscrit de fausses informations, notamment au sujet des médicaments. [9] La demanderesse affirme quelle ne prenait aucun médicament à lépoque, sauf de lœstrogène à cause de bouffées de chaleur. Elle ne sait pas à quel endroit le Dr Goldsmith a pris ses informations. Elle soutient navoir jamais eu de prescription médicale ni consommé du Mellaril ou du Restoril. Elle dépose le formulaire rempli par linfirmière le 18 mars 1997, avant son opération, confirmant quelle ne consommait pas de médicaments, à lexception de lœstrogène (pièce D-1). [10] La demanderesse certifie que cest son fils et non elle qui a eu des problèmes dasthme. Elle ne comprend pas pourquoi lon retrouve cette information à son dossier. Elle raconte avoir pris une fois du Ventolin, mais cétait un an et demi après la consultation en 1997 avec le D r Goldsmith.
04 02 81 Page : 4 04 05 25 [11] La fille de la demanderesse témoigne quà sa connaissance, sa mère ne prenait pas de médicaments. [12] La demanderesse affirme quelle na pas de dossier de nature psychiatrique. Elle ne comprend pas pourquoi le D r Goldsmith, un gynécologue, a inscrit la note « psych?? » à son dossier. Elle considère cette information injustifiée, pouvant induire en erreur un autre médecin consultant son dossier. Elle précise que son garçon a suivi une thérapie pendant huit mois avec le D r André Masse. [13] La demanderesse certifie que les D rs Masse et Barza ne sont pas ses médecins. Elle na jamais rencontré ou consulté le D r Barza. Le relevé de la Régie de lassurance-maladie du Québec confirme, dit-elle, quelle na eu comme médecin, en 1997, que le D r Goldsmith (pièce D-2). La demanderesse spécifie que le D r Masse est le médecin de son fils et le D r Barza celui de son ex-conjoint. [14] Interrogée par M e Lithwick, la demanderesse indique quelle a suivre des traitements « forcés » à la suite dévénements de nature abusive vécus avec son ex-mari. Elle atteste avoir régulièrement rencontré le D r Goldsmith de 1997 jusquau mois daoût 2001. [15] La demanderesse réitère navoir jamais rencontré le D r Masse, sauf lorsquelle y conduisait son fils pour la thérapie. [16] La demanderesse mentionne dabord quelle na pas rencontré le D r Goldsmith avant 1997, puis se ravise pour dire quil y a possiblement eu une rencontre au mois doctobre 1995. ii) Des Centres Le D r William J. Goldsmith [17] Le D r Goldsmith, obstétricien-gynécologue, soutient avoir rencontré pour la première fois la demanderesse le 13 octobre 1995. Il a alors dressé un historique de sa situation médicale. Il na constaté aucune allergie. [18] Le D r Goldsmith a vu de nouveau la demanderesse en 1997 pour un problème de cycle menstruel irrégulier. Il a observé une situation de stress et dirritation et un problème de concentration.
04 02 81 Page : 5 04 05 25 [19] Le D r Goldsmith raconte que la demanderesse a subir une chirurgie (curetage) pour des polypes. Il fait valoir que toutes les informations pertinentes pouvant influencer létat de santé de la demanderesse doivent être inscrites au dossier pour renseigner les personnes devant intervenir dans le cadre de cette intervention chirurgicale. Il attire lattention de la Commission à la page 12 du dossier médical, sous la rubrique « système nerveux central / C.N.S. », référant à lutilisation par la demanderesse, le 4 mars 1997, des médicaments Mellaril et Restoril et à leur dosage (pièce E-1). Il assure que ces informations lui ont été communiquées par la demanderesse. [20] Le D r Goldsmith affirme que la référence à labréviation « psych?? » révèle le stress préopératoire vécu par la demanderesse. Il réitère que lindication au sujet des médicaments est une information provenant de la demanderesse elle-même. [21] Le D r Goldsmith soutient quil na pu discuter avec la demanderesse de sa demande de rectification, nayant pas sa nouvelle adresse ni son numéro de téléphone. Il signale quune plainte de la demanderesse a dailleurs déjà été traitée par le Centre universitaire sur le même sujet. [22] Le D r Goldsmith fait valoir quil ne peut retirer les renseignements en litige. Il maintient sa proposition, du 2 mai 2005, dinclure les commentaires de la demanderesse au dossier. La demanderesse [23] La demanderesse affirme navoir jamais rencontré le D r Masse. Elle fait valoir que cest son ex-mari, avec lintervention du D r Masse, qui lui a fait prendre une fois du Mellaril. Elle soutient avoir refusé den consommer davantage parce quelle a eu une réaction physique très négative. C) LES ARGUMENTS i) Des Centres [24] M e Lithwick prétend que la demanderesse na pu justifier le bien-fondé de sa demande de rectification. Elle soumet que le D r Goldsmith a inscrit les renseignements étant nécessaires à létablissement du niveau de risque dans le cadre dune intervention chirurgicale. Elle soutient que les renseignements en litige ne peuvent donc être supprimés parce quinexacts, incomplets ou équivoques, selon les termes des articles 28, 42 et 53 de la Loi sur la protection
04 02 81 Page : 6 04 05 25 des renseignements personnels dans le secteur privé 1 (la « Loi ») et du 1 er alinéa de larticle 40 du Code civil du Québec : 28. Outre les droits prévus au premier alinéa de l'article 40 du Code civil, la personne concernée peut faire supprimer un renseignement personnel la concernant si sa collecte n'est pas autorisée par la loi. 42. Toute personne intéressée peut soumettre à la Commission d'accès à l'information une demande d'examen de mésentente relative à l'application d'une disposition législative portant sur l'accès ou la rectification d'un renseignement personnel ou sur l'application de l'article 25. 53. En cas de mésentente relative à une demande de rectification, la personne qui détient le dossier doit prouver qu'il n'a pas à être rectifié, à moins que le renseignement en cause ne lui ait été communiqué par la personne concernée ou avec l'accord de celle-ci. 40. Toute personne peut faire corriger, dans un dossier qui la concerne, des renseignements inexacts, incomplets ou équivoques; elle peut aussi faire supprimer un renseignement périmé ou non justifié par l'objet du dossier, ou formuler par écrit des commentaires et les verser au dossier. La rectification est notifiée, sans délai, à toute personne qui a reçu les renseignements dans les six mois précédents et, le cas échéant, à la personne de qui elle les tient. Il en est de même de la demande de rectification, si elle est contestée. 1 L.R.Q., c. P-39.1.
04 02 81 Page : 7 04 05 25 [25] M e Lithwick allègue que les observations et lexercice dun choix des faits pertinents retenus par un médecin constituent son opinion médicale et son évaluation, ne pouvant être rectifiées sans son autorisation 2 . ii) De la demanderesse [26] La demanderesse fait valoir que les conversations tenues dans un bureau de médecins ne sont pas enregistrées. Il faut donc trancher entre sa parole et celle du médecin. Elle invite la Commission à comparer le dossier du Centre universitaire et celui du Centre médical pour y vérifier les différences. Elle observe une contradiction entre la pièce D-1 et linformation inscrite par le médecin à son dossier médical. DÉCISION [27] Larticle 40 du Code civil du Québec, au même effet que larticle 89 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 3 , donne à la demanderesse la possibilité de soumettre une demande de rectification pour des informations quelle croit inexactes, incomplètes ou équivoques : 89. Toute personne qui reçoit confirmation de l'existence dans un fichier d'un renseignement nominatif la concernant peut, s'il est inexact, incomplet ou équivoque, ou si sa collecte, sa communication ou sa conservation ne sont pas autorisées par la loi, exiger que le fichier soit rectifié. [28] Il est reconnu que le droit à la rectification ne peut avoir pour effet de modifier ou supprimer des propos à caractère subjectif contre la volonté de son auteur. La mention de nature subjective, telle que « psych?? », écrite par le D r Goldsmith correspond à cette catégorie de renseignement. Celui-ci ne peut être rectifié devant le refus manifesté par le D r Goldsmith. 2 X c. Goulet, C.A.I. Montréal, n o 03 14 69, 5 juillet 2004, c. Laporte, X c. Hôpital dArgenteuil, C.A.I. Montréal, n o 03 13 65, 7 juin 2004, c. Constant; A. c. Centre hospitalier de lUniversité de Montréal, AZ-50225375, A.I.E. 2004AC-44; C. c. Centre hospitalier de Granby, [2001] C.A.I. 280; Ðupuis c. Hôtel-Dieu de Saint-Jérôme, C.A.I. Québec, n o 98 19 77, 9 septembre 1999, c. Boissinot; Zincoski c. Centre hospitalier de St. Mary, C.A.I. Montréal, n o 92 00 34, 28 mai 1993, c. Comeau; M.L.B. c. Communauté urbaine de Montréal, C.A.I. Montréal, n o 90 05 22, 12 août 1991, c. Comeau; Dufour c. Ministère de la Justice, [1987] C.A.I. 20; F c. Hôpital général du Lakeshore, [1986] C.A.I. 490; J. c. Clinique Roy-Rousseau, [1986] C.A.I. 129; M c. C.L.S.C. Normandie, [1986] C.A.I. 87. 3 L.R.Q., c. A-2.1.
04 02 81 Page : 8 04 05 25 [29] En ce qui concerne les observations plus factuelles (noms des médecins et des médicaments) notées par le D r Goldsmith, il y a, dune part, laffirmation du D r Goldsmith qu'il a recueilli ces informations de la demanderesse et, dautre part, celle de la demanderesse qui est davis contraire. [30] Comment ces informations ont-elles pu alors sy retrouver? [31] La demanderesse a soutenu quelle connaît les D rs Masse et Barza. Il importe de noter que le dossier médical ne mentionne pas quil sagisse de médecins ayant traité la demanderesse, comme lavance celle-ci. [32] La demanderesse a également reconnu avoir déjà utilisé du Ventolin, une fois, et pris du Mellaril suivant l'intervention de son ex-mari et la recommandation du D r Masse. Dailleurs, je comprends que « puffer asthma » doit se lire dans cette conjoncture de lutilisation du Ventolin. [33] En outre, la D r Goldsmith soutient que le dossier contient lindication des médicaments Mellaril et Restoril et de leur dosage, étant des informations nécessaires dans le contexte dune opération chirurgicale. [34] Jen arrive à la conclusion que le D r Goldsmith a satisfait les exigences de la preuve et que les renseignements en litige, vu le contexte et la preuve, ne peuvent être supprimés, nétant pas inexacts, incomplets ou équivoques. [35] Je rappelle que la demanderesse est autorisée à faire enregistrer ses commentaires au dossier constitué par les Centres aux fins de permettre au lecteur autorisé voulant consulter légalement le dossier médical de connaître son point de vue. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [36] FRAPPE dun interdit de communication, diffusion et publication les pièces D-1, D-2, D-3 et E-1;
04 02 81 Page : 9 04 05 25 [37] REJETTE les demandes de rectification de la demanderesse. MICHEL LAPORTE Commissaire Mc Carthy Tétrault (M e Dara Lithwick) Procureurs du D r William J. Goldsmith M e Barry A. Cappel Procureur de l'organisme
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