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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 03 05 56 Date : Le 16 juin 2005 Commissaire : M e Christiane Constant X Demanderesse c. OGILVY RENAULT Entreprise DÉCISION LOBJET DU LITIGE LA DEMANDE DEXAMEN DE MÉSENTENTE EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] Le 17 février 2003, la demanderesse requiert de M e Raymond Crevier, du cabinet davocats Ogilvy Renault, ci-après désigné l « entreprise », une copie intégrale des documents se trouvant à son dossier demployée alors quelle y travaillait à titre davocate. Considérant que les renseignements contenus à ces documents sont inexacts et incomplets, elle en requiert la rectification. [2] Sans réponse, la demanderesse sollicite, le 24 mars suivant, lintervention de la Commission d'accès à l'information (la « Commission »), afin que soit examinée une mésentente sur le refus présumé de lentreprise à lui donner laccès intégral auxdits documents et aux rectifications recherchées.
03 05 56 Page : 2 LAUDIENCE [3] Le 20 février 2004, la Commission reporte laudience, à la demande de lentreprise, pour se tenir une première fois à Montréal le 26 avril 2004, en présence de la demanderesse et de lentreprise, celle-ci étant représentée par M e Manon Savard, accompagnée de M e Mario Caron. Laudience se poursuit le 9 décembre 2004. LE CONTEXTE [4] Sestimant incapable d’« identifier la nature exacte » de la demande datée du 17 février 2003, lentreprise formule auprès de la demanderesse, le 30 mars 2004, une « demande de précisions et moyens de défense ». [5] De plus, lentreprise signale que si la lettre datée du 17 février 2003 représente une demande daccès, elle invoque, comme motif de refus, le 2 e paragraphe de larticle 39 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé 1 (la « Loi sur le privé »). Ayant été congédiée par lentreprise, la demanderesse conteste ce congédiement auprès de la Commission des normes du travail (la « CNT »). [6] Le 17 avril 2004, la demanderesse donne suite à la demande de précisions, accentuant, entre autres, sur les motifs invoqués par lentreprise pour mettre fin injustement à son emploi. LA PREUVE A) TÉMOIGNAGE DE LA DEMANDERESSE [7] M e Savard interroge la demanderesse qui admet ce qui suit : a) Elle a travaillé au sein de lentreprise, à titre davocate, du mois de novembre 1997 au 31 janvier 2003; b) Entre les années 1998 et 2002, elle a fait lobjet de huit évaluations, incluant un sommaire de lévaluation signée par M e Lise Bergeron au mois de mai 2002 (pièce E-1). Elle a fait part à celle-ci de son désaccord sur certains points. Également au cours du même mois, M e Lise Bergeron la informée que lentreprise mettait fin à son emploi. Les 1 L.R.Q., c. P-39.1.
03 05 56 Page : 3 parties ont alors convenu que la demanderesse continue dexercer ses fonctions au sein de lentreprise jusquau 31 janvier 2003. Au cours de ce mois, la Direction des ressources humaines lui a donné accès aux documents contenus à son dossier, mais il en manque dautres, tels ceux cités dans une note quelle a transmise, le 17 janvier 2003, à M. Yves Brunet travaillant pour lentreprise (pièce D-1); c) Elle souhaite obtenir une copie de toutes les évaluations la concernant. Celle datée du mois de mai 2002 (pièce E-1 précitée) est inexacte, car notamment, elle ne reflète pas les interventions judiciaires et autres quelle a effectuées dans les dossiers de clients quelle décrit à laudience, d le principal motif pour lequel elle a formulé une demande de rectification; d) Elle reconnaît avoir avisé lentreprise quen labsence de réintégration de son emploi, elle déposerait contre celle-ci une plainte auprès de la CNT (pièce E-2) pour congédiement sans cause juste et suffisante selon les termes de larticle 124 de la Loi sur les normes du travail 2 (la « LNT »), ce quelle a fait; e) Concernant cette plainte, une audience a débuté, le 22 avril 2004, devant M e Allan Turcotte, commissaire à la . Elle souhaite que ces mêmes évaluations faisant lobjet du présent litige soient produites devant ce commissaire, car elles sont en lien direct avec son congédiement. Elle sest dailleurs adressée à celui-ci pour avoir accès auxdites évaluations. LES PRÉCISIONS PAR LENTREPRISE [8] M e Savard précise que lentreprise ne détient quun dossier concernant la demanderesse. Celle-ci pourrait le consulter après laudience, à lexception des évaluations traitant de sa performance au travail. Ce point étant en litige tant devant la Commission que devant celle des relations de travail, ces documents seront produits lors de laudience qui se poursuivra devant le commissaire de ce dernier organisme. 2 L.R.Q., c. N-1.1.
03 05 56 Page : 4 PAR LA DEMANDERESSE [9] La demanderesse, pour sa part, accepte loffre de lentreprise de consulter les documents contenus à son dossier demployée. COMPLÉMENT DE PREUVE [10] Le 9 août 2004, la Commission transmet à M e Savard une lettre afin de savoir, entre autres, si la demanderesse a consulté son dossier, et ce, conformément à lengagement pris à laudience. [11] Le lendemain, la demanderesse répond à la Commission que, par lentremise de M e McRobie, de la firme davocats Fasken Martineau, lentreprise lui a donné accès à lun de ses dossiers demployée. Toutefois, elle lui refuse toujours laccès à lautre dossier détenu par le Comité de direction, lequel contiendrait les évaluations et les autres documents la concernant. [12] Le 20 août 2004, M e Savard confirme à la Commission que, le 12 mai précédent, la demanderesse a reçu une copie intégrale des documents contenus à son dossier. Elle précise cependant que lentreprise ne lui a pas transmis ses évaluations de performance, « étant les seuls documents demeurant en litige ». Selon M e Savard, lentreprise ne détient aucun autre document. [13] Le 25 août 2004, la demanderesse nie avoir reçu tous les documents. [14] La Commission a donc décidé de convoquer les parties afin dobtenir un complément de preuve dont laudience se tient le 9 décembre 2004. La Commission estime de plus nécessaire dinscrire la numérotation, sur chaque pièce que les parties déposeront, en suivant celle des pièces ayant déjà été produites à laudience tenue le 26 avril précédent. B) LE TÉMOIGNAGE DE M e LISE BERGERON [15] M e Lise Bergeron affirme solennellement quelle travaille pour lentreprise à partir de lannée 1971, dabord comme stagiaire en droit, par la suite comme avocate. Elle œuvre dans le « Groupe droit des affaires ». Elle décrit la structure de lentreprise et ajoute quà léchelle nationale, plusieurs centaines davocats travaillent dans des bureaux situés à Ottawa, Québec, Toronto, Vancouver et à Londres en Angleterre. Le champ de pratique de lentreprise se situe en « quatre groupes », à savoir :
03 05 56 Page : 5 Droit des affaires; Litige; Travail et emploi; Propriété intellectuelle. [16] M e Bergeron indique quen 2003, elle était « administratrice nationale du Groupe droit des affaires » et siégeait au Comité de direction de lentreprise. Tous les membres de ce comité reçoivent une copie de lévaluation de tous les avocats salariés. Elle ajoute quelle a vérifié auprès de ces membres, afin de savoir si ceux-ci détiennent des documents concernant la demanderesse; la réponse a été négative. M. Marc Ducharme vice-président-développement et affaires, pour sa part, la informée que lentreprise détient « des données comptables sur tous les avocats ». Ces données indiquent des renseignements, tel le nombre dheures travaillées et facturées aux clients de lentreprise. [17] M e Bergeron souligne avoir avisé la demanderesse, le 23 mai 2002, que lentreprise mettait un terme à son emploi. Cette dernière la cependant autorisée à continuer doccuper les mêmes fonctions jusquau 31 janvier 2003. Elle précise que tous les documents contenus au dossier personnel de la demanderesse ont été communiqués à celle-ci, à lexception des évaluations de performance en litige. Elle spécifie toutefois que lentreprise est prête à lui remettre dautres documents, tels son curriculum vitae, ses résultats académiques et les notes dentrevue. Elle produit confidentiellement des documents, incluant les évaluations de performance. [18] Par ailleurs, M e Bergeron signale que, le 14 juillet 2004, la Commission des relations du travail a rendu une décision en faveur de lentreprise, laquelle fait lobjet dune demande en révision judiciaire devant la Cour supérieure du Québec, par la demanderesse, dans le dossier portant le n o 500-17-021844-041 (pièce E-3). LE CONTRE-INTERROGATOIRE DE M e BERGERON PAR LA DEMANDERESSE [19] M e Bergeron réitère lessentiel de son témoignage. Elle commente les documents suivants que lui remet la demanderesse : Pièce D-2 Un document (17 novembre 2000) attaché à la demande en révision judiciaire formulée par la demanderesse à la Cour supérieure du Québec. Cette note réfère à des commentaires positifs émis par un tiers à lendroit
03 05 56 Page : 6 de la demanderesse. M e Bergeron indique quelle a tenu compte du talent de celle-ci lors de son évaluation de performance; Pièce D-3 Une note émanant dun avocat de lentreprise (1 er février 2001) adressée à la demanderesse et à des tiers traitant de leur performance dans un dossier précis. À cette note est annexée une lettre dun client (19 janvier 2001); Pièce D-4 Un document daté du 23 avril 2001 et adressé à M e Bergeron et à dautres personnes. Une copie de cette note est transmise à la demanderesse; une lettre (10 avril 2001) provenant dun client de lentreprise traite de la performance de la demanderesse lors dune transaction; Pièce D-5 Un mémo transmis par la demanderesse à M e Bergeron auquel est attachée une note; Pièce D-6 Une note, attachée à la procédure judiciaire de la demanderesse, et adressée à un employé de lentreprise. Celui-ci a informé M e Bergeron que lentreprise ne détient plus cette note; Pièce D-7 Un document préparé par la demanderesse au moment celle-ci a été avisée de la fin de son emploi, dont M e Bergeron dit ne pas en connaître le contenu; Pièce D-8 Une liste des noms de clients ayant des dossiers au cabinet de lentreprise et dans lesquels la demanderesse a travaillé; Pièce D-9 Un document dont M e Bergeron dit en avoir déjà pris connaissance;
03 05 56 Page : 7 Pièce D-10 Divers documents dont la majeure partie provient de la demanderesse; Pièce D-11 Quatre copies dune lettre provenant du Service des ressources humaines de lentreprise confirmant, entre autres, le salaire annuel de la demanderesse; Pièce D-12 Un document dont M e Bergeron indique lavoir déjà vu; Pièce D-13 Une note concernant la demanderesse émanant dune employée de lentreprise. M e SAVARD SADRESSE AU TRIBUNAL [20] M e Savard demande à la Commission que les pièces D-7, D-8, D-11 et D-13 soient examinées confidentiellement. Ces documents traitent, entre autres, de renseignements confidentiels ou privilégiés visant des clients de lentreprise qui y sont identifiés. LA DEMANDERESSE [21] La demanderesse affirme que les documents (pièces D-7 et D-8) ont été préparés par elle, après avoir été avisée par lentreprise de la fin de son emploi. C) LE TÉMOIGNAGE DE M me D. H. [22] Interrogée par la demanderesse, M me D. H. déclare quelle travaille pour lentreprise depuis lannée 1997. À partir de lannée 2001, elle occupe les fonctions dadjointe administrative de M e Bergeron. Elle signale quelle conserve tous les documents de lentreprise, incluant les modèles de lettres et les notes, etc. M me D. H. dépose, sous le sceau de la confidentialité, un modèle de lettre que cherche à obtenir la demanderesse.
03 05 56 Page : 8 LES PLAIDOIRIES i) DE LENTREPRISE [23] M e Savard rappelle lessentiel du témoignage de la demanderesse voulant que lentreprise a mis fin à son emploi au mois de mai 2002, mais quelle lui a permis de continuer dy travailler jusquau 31 janvier 2003. Elle plaide que les évaluations que cherche à obtenir la demanderesse sont au cœur du litige devant la Commission des relations du travail, en raison dune plainte pour congédiement sans cause juste et suffisante quelle a déposée contre lentreprise suivant larticle 124 de la LNT. Ces évaluations seront produites, à laudience, devant cette Commission. [24] M e Savard plaide comme motif de refus, le 2 e paragraphe de larticle 39 de la Loi sur le privé, la preuve ayant démontré que la divulgation des documents ci-dessus mentionnés risquerait davoir un impact sur la procédure judiciaire en cours devant la Commission des relations du travail. M e Savard cite en exemple laffaire X c. Prudentielle dAmérique 3 , par laquelle la Commission a statué que le demandeur « […] pourra exiger la production de cette lettre lors de laudience devant le commissaire du travail. » [25] Par ailleurs, M e Savard argue que la lettre de la demanderesse datée du 17 février 2003 ne vise pas laccès à des documents, mais plutôt une demande de rectification (pièce E-1 précitée). Lavocate indique que cette demande est prématurée, la demanderesse nayant pas démontré que les renseignements contenus à son dossier soient inexacts ou incomplets; elle ne les a pas en sa possession. Il faudrait dabord attendre la décision finale de la Commission des relations du travail qui aura à statuer sur la demande daccès aux évaluations de performance qua formulée la demanderesse auprès de celle-ci. ii) DE LA DEMANDERESSE [26] La demanderesse admet demblée que les évaluations recherchées, incluant celle du mois de mai 2002 (pièce E-1 précitée), sont directement reliées à la plainte, selon larticle 124 de la LNT, quelle a déposée contre lentreprise à la CNT. Elle reconnaît de plus que ces documents feront lobjet dun débat devant la Commission des relations du travail qui décidera de lissue de sa plainte pour congédiement sans cause juste et suffisante. De plus, elle reconnaît avoir formulé une demande pour avoir accès à ces mêmes documents devant cette Commission. La demanderesse ajoute que ceux contenus à son dossier 3 [1994] C.A.I. 257.
03 05 56 Page : 9 demployée sont incomplets, car celui-ci ne contient pas les renseignements mentionnés dans la note quelle a transmise à M. Brunet (pièce D-1 précitée). LA DÉCISION LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES Les articles 2, 11, 28 et 42 de la Loi sur le privé. 2. Est un renseignement personnel, tout renseignement qui concerne une personne physique et permet de l'identifier. 11. Toute personne qui exploite une entreprise doit veiller à ce que les dossiers qu'elle détient sur autrui soient à jour et exacts au moment elle les utilise pour prendre une décision relative à la personne concernée. 28. Outre les droits prévus au premier alinéa de l'article 40 du Code civil, la personne concernée peut faire supprimer un renseignement personnel la concernant si sa collecte n'est pas autorisée par la loi. 42. Toute personne intéressée peut soumettre à la Commission d'accès à l'information une demande d'examen de mésentente relative à l'application d'une disposition législative portant sur l'accès ou la rectification d'un renseignement personnel ou sur l'application de l'article 25. Larticle 40 du Code civil du Québec. 40. Toute personne peut faire corriger, dans un dossier qui la concerne, des renseignements inexacts, incomplets ou équivoques; elle peut aussi faire supprimer un renseignement périmé ou non justifié par l'objet du dossier, ou formuler par écrit des commentaires et les verser au dossier. La rectification est notifiée, sans délai, à toute personne qui a reçu les renseignements dans les six mois précédents et, le cas échéant, à la personne de qui elle les tient. Il en est de même de la demande de rectification, si elle est contestée.
03 05 56 Page : 10 [27] Les renseignements personnels contenus dans des documents que cherche à obtenir la demanderesse la concernent selon les termes de larticle 2 de la Loi sur le privé. Ils sont détenus par lentreprise qui, en vertu de larticle 11 de cette loi, doit veiller à ce que les dossiers sur une personne quelle détient soient à jour et exacts au moment elle les utilise pour prendre une décision concernant cette personne. [28] De plus, larticle 28 de la Loi sur le privé traitant de la suppression de renseignement personnel concernant la personne concernée, doit être lu en corrélation avec larticle 40 du Code civil du Québec précité. Cependant, la soussignée considère que cette suppression peut se faire dans la mesure la preuve le démontre. [29] Par ailleurs, la demanderesse a formulé sa demande dexamen de mésentente ou de rectification en se conformant aux dispositions législatives prévues à cette fin à larticle 42 de la Loi sur le privé. [30] Les documents déposés confidentiellement à laudience par lentreprise sont : a) Un projet de lettre daté du 28 mai 2002 et adressé à la demanderesse, avec lannotation « Confidential »; b) Une note manuscrite non datée et adressée par la demanderesse à M me L.; c) Le curriculum vitae de la demanderesse; d) Une note émanant de la demanderesse, laquelle est transmise, par courriel, le 5 février 2002 à des tiers. À cette note est attaché un « Office Memo »; e) Une note, préparée par la demanderesse et intitulée « Visit to London - June 7-13, 1999 », dans laquelle sont inscrits le nom de plusieurs personnes, les fonctions quelles occupent au sein dune entreprise, etc.; f) Un document informatisé daté du 29 mai 2002 et intitulé « Bain & Company », décrivant, entre autres, lexpertise de cette compagnie dans lindustrie; g) Un document préparé par la demanderesse, daté du 8 avril 2001 et intitulé « Business Law mandates (1997-2001) ». Celle-ci cite le nom de clients et décrit le travail quelle a effectué dans leurs dossiers; h) Une note titrée « Office memo » et adressée, le 5 août 2002, à un tiers; i) Des notes et un projet de lettre adressés à des tiers. Les dates indiquées à ces documents varient entre les 28 mai 2002 et 7 février 2003;
03 05 56 Page : 11 j) Des mémos de la demanderesse transmis, par courriel, à des personnes entre les 24 et 31 janvier 2003; k) Un document intitulé « Liste de clients de » et préparé par la demanderesse « As of January 24, 2003 »; l) Des mémos échangés entre la demanderesse et une autre personne le 22 janvier 2003; m) Des évaluations de performance concernant la demanderesse des mois doctobre 1998 à mai 2002; n) Des documents datés du 4 février 2003 et un autre non daté (page « 4 »); o) Des évaluations de performance effectuées par le « Comité de direction » au cours des années 1999 et 2000; p) Des mémos que la demanderesse communique à lun des associés de lentreprise et des notes manuscrites non datées; q) Des notes, par courriel, échangées entre la demanderesse et un tiers les 21 août et 8 septembre 2000; r) Une note (non datée) adressée à un tiers; s) Un « Office memo » daté du 7 septembre 2000 que la demanderesse transmet à M e Bergeron et à un tiers; t) Une reproduction par la demanderesse, sur support papier, dune note intitulée « Voice mail on September 1, 2000 received by » concernant un client de lentreprise; u) Des mémos adressés à plusieurs personnes incluant la demanderesse entre les 1 er septembre 2000 et 1 er février 2001; v) Deux lettres datées respectivement des 19 janvier et 10 avril 2001 transmises par un client de lentreprise à la demanderesse; w) Un courriel daté du 23 avril 2001 adressé à un tiers; x) Une note de service datée du 29 octobre 2001 et adressée à lun des associés de lentreprise; y) Un document titré « Office memo » daté du 26 janvier 1999 et provenant de la demanderesse. [31] La preuve démontre que, parmi ces documents, seules les évaluations de performance sont lobjet du présent litige. La décision portera sur laccessibilité ou non de ces documents au moment de la demande, soit le 17 février 2003. [32] La demanderesse affirme que le 17 février 2003, elle a avisé lentreprise quà défaut de recevoir les documents convoités, elle déposera contre celle-ci une plainte au sens de larticle 124 de la LNT devant la CNT. Ce qui fut fait.
03 05 56 Page : 12 [33] Lentreprise refuse la communication desdits documents, selon les termes du 2 e paragraphe de larticle 39 de la Loi sur le privé, ceux-ci étant au cœur du litige opposant les parties devant la Commission des relations du travail : 39. Une personne qui exploite une entreprise peut refuser de communiquer à une personne un renseignement personnel la concernant lorsque la divulgation du renseignement risquerait vraisemblablement: […] 2° d'avoir un effet sur une procédure judiciaire dans laquelle l'une ou l'autre de ces personnes a un intérêt. [34] Pour voir à lapplication de cet article, les tribunaux indiquent que les trois critères ci-après mentionnés doivent être retenus : a) il sagit de renseignements concernant la demanderesse; b) une procédure judiciaire doit être en cours ou il doit y avoir de sérieux indices de limminence dune telle procédure; c) la divulgation de ces renseignements risquerait davoir un effet sur ladite procédure, et ce, conformément à laffaire Pichette c. SSQ-Vie 4 . [35] La preuve démontre que les évaluations de performance en litige concernent la demanderesse selon les termes de larticle 2 de la Loi sur le privé. Elle admet quau moment de la demande, elle a avisé lentreprise quelle sadresserait à la CNT, car elle estime avoir été congédiée injustement. [36] Après avoir procédé à un examen approfondi des documents en litige, soit les évaluations de performance, la soussignée est convaincue que les trois critères indiqués au 2 e paragraphe de larticle 39 de la Loi sur le privé sont satisfaits. Dailleurs, la demanderesse reconnaît, à laudience, que lesdites évaluations font également lobjet du litige devant la Commission des relations du travail auprès de laquelle elle en requiert une copie. La soussignée est convaincue quau moment de la demande, il existait de sérieux indices dune telle procédure judiciaire et la divulgation de ces évaluations risquerait vraisemblablement davoir un impact sur cette procédure. Elles sont en lien direct avec la procédure pendante devant les autres instances judiciaires. La demanderesse ne peut donc pas y avoir accès, et ce, conformément notamment aux décisions Bérubé c. 4 [1995] C.A.I. 4.
03 05 56 Page : 13 Caisse populaire Desjardins de Baie-Comeau 5 et X c. Albany International Canada inc. 6 [37] Comme lindique la Commission dans laffaire Rioux c. Recyclage Kébec inc. et Procureur général du Québec 7 , les « conditions du deuxième alinéa de larticle 39 de la loi précitée sont réunies; elles habilitent lentreprise à refuser de communiquer » à la demanderesse lesdits documents. [38] Par ailleurs, la demanderesse remet, pour commentaires, à M e Bergeron une série de documents. La soussignée constate que la plupart de ces documents, tels ceux décrits aux points g, k, t et x, visent des clients identifiés de lentreprise. La preuve établit que la demanderesse les a représentés devant des instances judiciaires ou a travaillé dans leurs dossiers tant au Canada quà Londres, en Angleterre. La soussignée retient que lentreprise requiert la confidentialité des documents, particulièrement ceux préparés par la demanderesse, à savoir les pièces D-7 et D-8 précitées. [39] Toutefois, il est important de souligner que les personnes ainsi identifiées ont droit au respect du secret professionnel prévu à larticle 9 de la Charte des droits et libertés de la personne 8 (la « Charte »). Il nest pas démontré que ces personnes ou clients de lentreprise aient renoncé au secret professionnel ou aient consenti à ce que leurs noms apparaissent dans les documents qui sont déposés confidentiellement à laudience. [Secret professionnel.] 9. Chacun a droit au respect du secret professionnel. [Divulgation de renseignements confidentiels.] Toute personne tenue par la loi au secret professionnel et tout prêtre ou autre ministre du culte ne peuvent, même en justice, divulguer les renseignements confidentiels qui leur ont été révélés en raison de leur état ou profession, à moins quils ny soient autorisés par celui qui leur a fait ces confidences ou par une disposition expresse de la loi. 5 [1994] C.A.I. 298. 6 [1994] C.A.I. 261. 7 [2000] C.A.I. 117, 137. 8 L.R.Q., c. C-12.
03 05 56 Page : 14 [Devoir du tribunal.] Le tribunal doit, doffice, assurer le respect du secret professionnel. [40] Conséquemment, la soussignée considère que les renseignements personnels contenus aux pièces D-7, D-8 et D-13 sont frappées dune ordonnance de non-divulgation, de non-communication et de non-publication. [41] De plus, en application de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 9 (la « Loi sur laccès »), il est établi notamment dans les affaires Ministère de la Justice c. Flamand et Ministère de la Justice c. Shulze 10 que la Commission se doit doffice dassurer, en tout temps, le respect au secret professionnel des documents, même si un organisme public ne la pas soulevé. La soussignée considère que ce raisonnement sapplique également dans la présente cause. SUR LES DOCUMENTS ACCESSIBLES À LA DEMANDERESSE [42] Par ailleurs, la Commission prend acte du contenu dune lettre datée du 16 décembre 2004 que lentreprise lui a fait parvenir, linformant avoir communiqué à la demanderesse des documents additionnels. Elle devra, en outre, communiquer à celle-ci dautres documents qui nont aucun lien avec la procédure judiciaire en cours. Ce sont : La note manuscrite quelle a adressée à M me L.; La note intitulée « Visit to London June 7-13, 1999 » avec les dates seulement; Le document informatisé daté du 29 mai 2002 et intitulé « Bain & Company » dans son intégralité; Les quatre courriels datés des 22, 30 et 31 janvier 2003; Seulement la partie du courriel daté du 7 février 2003 et adressé à la demanderesse est accessible à celle-ci. 9 L.R.Q., c. A-2.1. 10 [2000] C.A.I. 413 [C.Q.].
03 05 56 Page : 15 SUR LA RECTIFICATION [43] La soussignée considère quaucune preuve na été présentée relativement à la rectification des documents recherchés par la demanderesse. [44] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : ACCUEILLE, en partie, la demande dexamen de mésentente en matière daccès de la demanderesse contre lentreprise; PREND ACTE que lentreprise a communiqué à la demanderesse des documents la concernant, dont le dernier envoi date du 16 décembre 2004; ORDONNE à lentreprise de transmettre à la demanderesse les documents énumérés au paragraphe 42; FRAPPE les pièces D-7, D-8 et D-13 dun interdit de non-publication, de non-divulgation et de non-communication; REJETTE la demande de rectification formulée par la demanderesse contre lentreprise; REJETTE, quant au reste, la présente demande; FERME le présent dossier n o 03 05 56. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire Ogilvy Renault (M e Manon Savard) Procureurs de lentreprise
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