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Commission d'accès à l'information du Québec Dossier : 03 20 76 Date : Le 7 juin 2005 Commissaire : M e Michel Laporte X ET AL. Partie demanderesse c. CÉGEP DU VIEUX MONTRÉAL Organisme DÉCISION L'OBJET DEMANDE DE RÉVISION [1] La partie demanderesse conteste la décision du Cégep du Vieux Montréal (le « Cégep ») lui refusant laccès, selon les termes des articles 14, 32, 37, 39, 53 et 54 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi »), aux « […] rapports des spécialistes embauchés par le collège, dans le cadre de la tutelle du département de psychologie. » 1 L.R.Q., c. A-2.1.
03 20 76 Page : 2 [2] Le 27 avril 2005, une audience a lieu à Montréal. L'AUDIENCE A) LE LITIGE [3] La demande d'accès est produite par neuf personnes (la « partie demanderesse ») signataires de celle-ci. Ces personnes reconnaissent avoir reçu du Cégep, le 22 février 2005, une copie des quatre rapports visés par la demande (pièces O-1 et O-2 en liasse). [4] Le Cégep et la partie demanderesse admettent que le litige ne porte que sur les passages masqués à ces rapports, lesquels sont refusés en vertu du 2 e alinéa de larticle 37 et des articles 53 et 54 de la Loi. [5] La procureure du Cégep, M e Isabelle Chvatal, avise la Commission d'accès à l'information (la « Commission ») que les motifs de restrictions des articles 32 et 39 de la Loi sont abandonnés. B) LA PREUVE i) Du Cégep [6] M me Mylène Boisclair, directrice des communications et affaires corporatives et responsable de laccès, mentionne que le personnel enseignant au Département de psychologie (le « Département ») compte onze membres, incluant les neuf personnes signataires de la demande daccès. Un différend de nature professionnelle et personnelle oppose deux groupes au sein du Département. Elle soumet quen raison du conflit, la Direction des études du Cégep a commandé quatre rapports à des consultants. [7] M me Boisclair fait valoir que les parties des rapports qui nont pas été remises à la partie demanderesse sont principalement des avis et des recommandations pouvant avoir un impact sur une prise de décisions par les autorités du Cégep. Les autres renseignements nayant pas été donnés sont, soutient-elle, ceux permettant didentifier une autre personne physique que la partie demanderesse. Il sagit, note-t-elle, des opinions et des comptes rendus dentrevues individuelles.
03 20 76 Page : 3 [8] M me Boisclair passe en revue chaque rapport de la façon suivante : 1) Rapport de la firme Réseau D.O.F. inc. remis le 1 er février 1999 (7 pages) [9] Les renseignements masqués en vertu des articles 37 et 53 de la Loi sont : Les commentaires à la page 5; Les recommandations à la page 6; Le nom dune personne à la page 7. 2) Rapport de M. Serge Picher daté du 5 avril 2000 (5 pages) [10] Les renseignements masqués en vertu des articles 37 et 53 de la Loi sont : Les 3 dernières phrases du 2 e paragraphe de la page 1; La partie intitulée « phase 1 » à la page 2; La partie intitulée « phase 3 » et les trois premiers paragraphes sous le titre « Le diagnostic » de la page 3; Les recommandations et la conclusion aux pages 4 et 5. 3) Rapport de M me Johanne Bourbonnais et M. Serge Picher daté du mois de novembre 2000 (21 pages) [11] Les renseignements masqués en vertu des articles 37 et 53 de la Loi sont : Les 4 dernières phrases de la citation à la page 2; Les citations ainsi que les 4 e et 5 e paragraphes de la page 4; La liste des personnes rencontrées identifiant dautres personnes physiques que la partie demanderesse ainsi que le paragraphe qui suit immédiatement à la page 6; Les citations ainsi que le 6 e paragraphe de la page 7;
03 20 76 Page : 4 La dernière phrase du 2 e paragraphe et le compte rendu des recommandations à la page 8; Les 1 er , 3 e , 4 e , 5 e et deux derniers paragraphes de la page 9; Les renseignements nominatifs aux pages 10 à 12; La dernière phrase du 5 e paragraphe de la page 13; Les deux dernières phrases du 2 e paragraphe et la dernière phrase du 4 e paragraphe de la page 14; Le compte rendu des rencontres individuelles aux pages 15 et 16; Les 2 e et 3 e paragraphes ainsi que les recommandations à la fin de la page 17; La dernière phrase du 2 e paragraphe, les 2 dernières phrases du 4 e paragraphe et toute la partie à la suite du 4 e paragraphe des pages 18 et 19; Les recommandations aux pages 20 et 21. 4) Rapport de M. Gilles Vachon daté du 2 juin 2003 (27 pages) [12] Les renseignements masqués en vertu des articles 37 et 53 de la Loi sont : Les 3 paragraphes sous le titre « 2,1 Lintervenant » de la page 5; Le dernier paragraphe de la page 10; La citation à la page 11; Les renseignements nominatifs à la page 14; Les avis et recommandations aux pages 16 à 27. ii) De la demanderesse [13] La partie demanderesse signale navoir reçu les quatre rapports quaprès sa demande de révision à la Commission. Elle mentionne quelle a été obligée par lemployeur de raconter sa vie aux consultants ayant rédigé les rapports. Elle a
03 20 76 Page : 5 donc divulgué, de bonne foi, de nombreuses informations sur sa vie privée, notamment celles touchant sa réputation. Dans les circonstances, elle comprend difficilement pourquoi elle ne peut obtenir une copie intégrale des rapports, lesquels ont eu des conséquences importantes sur lemploi de plusieurs personnes. Elle souligne quelle na jamais autorisé le Cégep à la communication de renseignements à son sujet. [14] La partie demanderesse est préoccupée de laccès et de la circulation des rapports auprès de plusieurs personnes au Cégep, notamment le personnel de direction. En raison de la situation vécue au Département, elle signale un taux de roulement du personnel cadre très élevé. Elle se questionne sur les objectifs et mandats donnés aux consultants et de lutilisation que lon peut faire des rapports. C) LES ARGUMENTS i) Du Cégep [15] M e Chvatal soumet que la majorité des parties refusées à la partie demanderesse ont été réalisées pour aider le Cégep à prendre une décision, et ce, dans le cadre dune situation organisationnelle conflictuelle au Département. Les rapports, de moins de dix ans, visaient donc à placer le Cégep, selon les termes de larticle 37 de la Loi, devant une position dagir ou non 2 : 37. Un organisme public peut refuser de communiquer un avis ou une recommandation faits depuis moins de dix ans, par un de ses membres, un membre de son personnel, un membre d'un autre organisme public ou un membre du personnel de cet autre organisme, dans l'exercice de leurs fonctions. Il peut également refuser de communiquer un avis ou une recommandation qui lui ont été faits, à sa demande, depuis moins de dix ans, par un consultant ou par un conseiller sur une matière de sa compétence. [16] M e Chvatal allègue également que le Cégep ne peut communiquer à la demanderesse, en labsence de consentement, selon les articles 53, 54 et 88 de la Loi, les renseignements nominatifs se trouvant aux rapports 3 : 2 Deslauriers c. Sous-ministre de la Santé et des Services sociaux, [1991] C.A.I. 311; Rimouski (Ville de) c. Syndicat national des employés municipaux (manuels) de Rimouski, [1998] C.A.I. 525. 3 Sweeney c. Gatineau (Ville de), [2002] C.A.I. 44.
03 20 76 Page : 6 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1 o leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2 o ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. 54. Dans un document, sont nominatifs les renseignements qui concernent une personne physique et permettent de l'identifier. 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 4 o de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement nominatif concernant une autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement, à moins que cette dernière n'y consente par écrit. ii) De la demanderesse [17] La partie demanderesse réitère son droit dobtenir les informations la concernant, dautant plus, note-t-elle, que les rapports renferment des évaluations qui ne sont pas que professionnelles, mais aussi de nature personnelle parce que psychologiques. DÉCISION [18] La Loi permet au Cégep, à sa discrétion, selon le 2 e alinéa de larticle 37 de la Loi, de refuser laccès aux avis et recommandations formulés par les consultants dont elle a requis les services pour étudier le fonctionnement du Département. Les avis et recommandations sont définis depuis la décision phare Deslauriers c. Sous-ministre de la Santé et des Services sociaux 4 comme suit : 4 Précitée, note 2.
03 20 76 Page : 7 Le sens du mot «recommandation» de l'article 37 de la Loi d'accès «ne semble poser aucune difficulté puisqu'il a été défini dans de nombreuses décisions comme étant un énoncé proposant une ligne de conduite». […] […] Dans cette optique, il importe non pas de se référer précisément à une notion ou définition du dictionnaire, ni de tenter d'enchâsser le concept «avis» dans une définition quelconque, mais de qualifier ce concept dans le contexte qui est le sien en rapport avec les principes générateurs qui ont façonné la Loi d'accès. Il faut rechercher le sens contextuel. À cet égard, au risque de se répéter, il ne faut pas perdre de vue que l'article 37 est une restriction au droit général d'accès à des documents d'organismes publics et que la section à laquelle il appartient en témoigne indubitablement. Par surcroît, la sous-section d' il provient en dit long quant à l'objet de cette exception: […]. Voilà le véritable contexte de nature à qualifier le sens du mot «avis». […] À partir du moment lorganisme, ou quelquun pour lui, procède à une évaluation des faits, ou porte sur ceux-ci un jugement de valeur, en fonction de ce qui devrait être fait par le décideur, la loi permet à lorganisme de garder le secret. […] Dans ce contexte, les mots «avis» et «recommandation» expriment à des degrés divers une même chose, c'est-à-dire l'énoncé d'un jugement de valeur conditionnant l'exercice d'un choix entre diverses alternatives. […] Par contre, pour déterminer sil sagit dun avis, létude du document convoité nécessite un exercice intellectuel plus rigoureux, pour percevoir si certaines parties sont articulées de façon à avoir «des incidences sur les décisions administratives ou politiques». (soulignements ajoutés)
03 20 76 Page : 8 [19] Après avoir examiné les renseignements restant en litige, j'en arrive à la conclusion, vu la preuve et le contexte, que ceux se trouvant aux pages ci-après identifiées correspondent aux conditions de larticle 37 de la Loi : Les pages 5 et 6 du premier rapport; Les extraits masqués aux pages 1 et 3 et aux pages 4 et 5 du deuxième rapport; Les extraits masqués aux pages 2, 4, 8, 9, 13 et 17 à 19 et les pages 20 et 21 du troisième rapport; Les extraits masqués aux pages 10, 11 et 17 et les pages 16 et 18 à 27 du quatrième rapport. [20] Quant aux renseignements en litige ci-après identifiées, il sagit, à lévidence, d'informations qui permettraient vraisemblablement de reconnaître une autre personne physique que la partie demanderesse au sens de larticle 88 de la Loi : Le nom d'une personne à la page 7 du premier rapport; Lopinion émise par des personnes aux pages 2 et 3 du deuxième rapport; Les renseignements et noms masqués aux pages 4, 6 à 12 et 14 à 19 du troisième rapport; Les renseignements retirés aux pages 5 et 14 du quatrième rapport. [21] La partie demanderesse ne pourra donc obtenir les renseignements étant en litige. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [22] ACCUEILLE, en partie, la demande de révision de la partie demanderesse; [23] CONSTATE que la partie demanderesse a reçu du Cégep, après sa demande de révision, copie des documents demandés, à lexception des renseignements en litige;
03 20 76 Page : 9 [24] REJETTE, quant au reste, la demande de révision pour obtenir une copie intégrale des quatre rapports. MICHEL LAPORTE Commissaire Berger, D'amours, Ellefsen (M e Isabelle Chvatal) Procureurs de l'organisme
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