Commission d’accès à l’information du Québec Dossiers : 06 11 71 / 06 11 24 Date : Le 16 novembre 2006 Commissaire : M e Jean Chartier X Demandeur c. SÉCURITÉ PUBLIQUE Organisme DÉCISION L'OBJET DEMANDE DE RÉVISION en vertu de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 . [1] Le 18 avril 2006, le procureur du demandeur transmet à l’organisme une lettre dans laquelle il demande : « [...] Par la présente, notre client exige de connaître par écrit les motifs de cette décision de ne plus requérir ses services à titre occasionnel. Au surplus, notre client exige une copie complète de son dossier. [...] » 1 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée « Loi sur l’accès ».
06 11 71 / 06 11 24 Page : 2 [2] Ce n’est qu’en date du 22 juin 2006, que le responsable de l’accès aux documents de l’organisme transmet une réponse au procureur du demandeur. Dans sa réponse, le responsable de l’accès consent à transmettre intégralement une copie du rapport produit dans le cadre du « Programme civil du filtrage de sécurité » lors du processus d’embauche du demandeur ainsi que son dossier personnel détenu par la Direction des ressources humaines, de l’organisme. [3] Il refuse toutefois la transmission d’un document de deux pages en invoquant le paragraphe 3 du premier alinéa de l’article 28 de la Loi sur l’accès puisque ce document pourrait révéler une méthode d’enquête, une source confidentielle d’information, un programme ou un plan d’action destiné à prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois. [4] Le 4 juillet 2006, le procureur du demandeur faisait une demande de révision à la Commission d’accès à l’information (la Commission). Une audience a été tenue à Québec en présence des deux parties. A. LE CONTEXTE [5] Le demandeur a été policier au sein du Service de police de la Ville de Québec de 1965 à 1998. En 1998, il est à la retraite et il soumet sa candidature auprès de l’organisme afin d’occuper un poste de « constable spécial dans les édifices gouvernementaux ». Il a participé au processus d’enquête et de sélection nécessaire et a occupé cette fonction à titre « d’employé occasionnel », du 24 mai 2005 au 3 juin 2005, date à laquelle l’organisme a mis fin à son contrat. B. LA PREUVE i) De l’organisme [6] La procureure de l’organisme fait entendre André Marois, responsable de l’accès aux documents, au sein de l’organisme. Ce dernier explique qu’il a lui-même procédé au traitement de la demande sous étude. Il a ainsi communiqué avec les différents services de l’organisme susceptibles de détenir des documents concernant le demandeur. Il a ainsi obtenu le dossier d’emploi du demandeur auprès de la Direction des ressources humaines et il l’a communiqué au demandeur dans sa version intégrale. [7] Il a également requis de la Direction des services de sécurité et de protection de l’organisme les documents relatifs à l’enquête de sécurité qui est effectuée par l’organisme avant de procéder à l’engagement de tout constable spécial dans les édifices gouvernementaux.
06 11 71 / 06 11 24 Page : 3 [8] Il explique qu’après avoir reçu la documentation demandée, il a refusé l’accès à deux pages parmi les documents qui lui avaient été transmis. Il appuie sa décision sur le paragraphe 3 du premier alinéa de l’article 28 de la Loi sur l’accès. [9] Contre-interrogé par le procureur du demandeur, le responsable de l’accès ne peut donner aucun détail sur le contenu du document dont la communication est retenue puisque cela aurait pour effet d’éluder l’application de l’article 28 précité. [10] L’organisme demande par la suite à faire une preuve « ex parte », ce qui lui est accordé en vertu de l’article 20 des Règles de preuve et de procédure de la Commission d’accès qui prévoit 2 : 20. La Commission peut prendre connaissance, en l'absence du requérant et à huis clos, d'un document que l'organisme public ou le tiers prétend devoir être soustrait à l'accès en vertu d'une restriction prévue à la section II de la Loi. [11] L’organisme fait témoigner M me Nathalie Gagné, coordonnatrice du « Programme civil de filtrage de sécurité » à la Direction des services de sécurité et de protection de l’organisme. Elle explique qu’en vertu de la Loi sur la police 3 , la candidature des constables spéciaux doit respecter les conditions minimales d’admissibilité prévues à cette Loi. C’est la raison pour laquelle son service effectue des enquêtes de sécurité pour tous les constables spéciaux qui posent leur candidature. [12] Bien qu’admettant que le demandeur avait fait l’objet d’un premier « filtrage de sécurité » qui avait mené à son embauche, le témoin réfère la Commission à l’article 15.07 de la Convention collective des constables spéciaux à la sécurité dans les édifices gouvernementaux qui précise : 15.07 Pour être maintenu en emploi, un employé doit satisfaire, en tout temps et en cours d’emploi aux conditions minimales prévues à l’article 115 de la Loi sur la police. [13] Le témoin explique qu’en vertu de cette disposition, l’organisme peut à tout moment requérir ou obtenir de nouvelles informations sur les individus qui occupent les emplois de constables spéciaux. 2 L.R.Q., c. A-2.1, r. 2. 3 L.R.Q., c. P-13.1.
06 11 71 / 06 11 24 Page : 4 [14] Sans révéler la teneur du témoignage qu’elle a rendu par la suite, mentionnons que ce dernier visait à convaincre le soussigné de l’application du paragraphe 3 du premier alinéa de l’article 28 de la Loi sur l’accès. ii) Du demandeur [15] À la suite de la preuve « ex parte », le demandeur indique qu’il a été policier pour la Ville de Québec, de 1965 à 1998, carrière au cours de laquelle il a suivi plusieurs formations en vue de se perfectionner. Après avoir pris sa retraite en 1998, il a soumis sa candidature auprès de l’organisme en vue d’occuper un poste de constable spécial à la sécurité dans les édifices gouvernementaux. [16] Il s’est plié de bonne foi aux enquêtes et aux vérifications qui ont été faites avant son engagement et il a été engagé par l’organisme qui a retenu ses services, du 24 mai au 3 juin 2005. Il ne fut jamais rappelé par la suite. LA DÉCISION [17] Après une période d’emploi qu’il juge trop brève au sein de l’organisme à titre de constable spécial à la sécurité des édifices gouvernementaux, le demandeur réclame de l’organisme copie de son dossier et les motifs pour lesquels on a mis un terme à son emploi, le 3 juin 2005. L’organisme lui a transmis son dossier d’employé, ainsi que le rapport d’enquête qui a été effectué le 26 avril 2005 avant son engagement, mais refuse de communiquer un document de deux pages en soutenant qu’il doit refuser la communication des renseignements qui y sont contenus en vertu du paragraphe 3 de l’article 28 de la Loi sur l’accès. [18] La preuve a démontré que le demandeur avait toutes les raisons de croire qu’il avait les qualités requises pour occuper le poste de constable spécial puisqu’il a effectivement été engagé par l’organisme après avoir fait l’objet des vérifications habituelles pour ce genre d’emploi. [19] Toutefois, les qualités requises pour occuper un tel emploi doivent être maintenues et l’organisme se soucie du maintien de ces conditions minimales d’admissibilité pour occuper ce genre d’emploi. La preuve « ex parte » faite devant la Commission a convaincu le soussigné que les renseignements contenus dans le document de deux pages, refusé au demandeur, remplissent les conditions prévues au paragraphe 3 du premier alinéa de l’article 28 de la Loi sur l’accès qui se lisait ainsi en avril 2006 :
06 11 71 / 06 11 24 Page : 5 28. Un organisme public doit refuser de confirmer l'existence ou de donner communication d'un renseignement obtenu par une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, lorsque sa divulgation serait susceptible : 1° d'entraver le déroulement d'une procédure devant une personne ou un organisme exerçant des fonctions judiciaires ou quasi judiciaires; 2° d'entraver le déroulement d'une enquête; 3° de révéler une méthode d'enquête, une source confidentielle d'information, un programme ou un plan d'action destiné à prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois; […] [20] Bien que certains renseignements contenus dans ce document soient des renseignements qui concernent le demandeur lui-même, l’organisme peut refuser de donner communication de tels renseignements, conformément à l’article 87 de la Loi sur l’accès qui stipulait en avril 2006 : 87. Sauf dans le cas prévu à l'article 86.1, un organisme public peut refuser de confirmer l'existence ou de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant, dans la mesure où la communication de cette information révélerait un renseignement dont la communication doit ou peut être refusée en vertu de la section II du chapitre II. [21] Enfin, la lecture du document dont on refuse la communication nous convainc également de l’application de l’article 88 de la Loi sur l’accès, tel qu’il se lisait en avril 2006 en ce qu’il contient des renseignements nominatifs concernant d’autres personnes que le demandeur. 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 4 o de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement nominatif concernant une autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement, à moins que cette dernière n'y consente par écrit.
06 11 71 / 06 11 24 Page : 6 [22] Le procureur du demandeur a soutenu que si le document dont on retient la communication a été élaboré dans le but de vérifier les compétences du demandeur pour occuper l’emploi sollicité, il aurait alors fait l’objet d’une enquête administrative à laquelle le demandeur devrait avoir accès. Il soumet une décision rendue par la Commission dans L’Archevêque c. Ville de Laval 4 . Dans cette affaire, il s’agissait de la demande d’un aspirant policier qui voulait obtenir le résultat des enquêtes effectuées par l’organisme, en vue de vérifier ses antécédents. La Commission avait ordonné la remise des documents pour le motif suivant : « D’entrée de jeu, la Commission rejette le motif [de] restriction de l’article 28 de la loi, la preuve ayant démontré que l’enquête en était une de moeurs, qui ne visait pas spécifiquement la détection d’un crime ou d’infractions aux lois. » [23] Or, la preuve « ex parte » faite par l’organisme démontre que les renseignements obtenus l’ont été par « une personne qui en vertu de la loi est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois. » De plus, l’information n’a pas été obtenue dans le cadre de la vérification de sécurité préalable à l’embauche. [24] Compte tenu de ce qui précède, la Commission considère que l’organisme devait refuser de communiquer le document de deux pages faisant partie du dossier du demandeur, auprès de l’organisme, pour les motifs déjà exprimés maintes fois 5 . « La divulgation de ces renseignements révélerait une méthode d’enquête, des sources confidentielles d’information ainsi que des renseignements personnels confidentiels concernant des personnes physiques autres que le demandeur. » 4 [1999] C.A.I. 164. 5 Alain Hatto c. Ville de Laval, [1999] C.A.I. 111.
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