Commission d'accès à l'information du Québec Dossier : 03 19 14 Date : Le 16 mai 2005 Commissaire : M e Michel Laporte X Demandeur c. LA FÉDÉRATION DES COMMISSIONS SCOLAIRES DU QUÉBEC Organisme DÉCISION L'OBJET [1] Le demandeur s’adresse à la Fédération des commissions scolaires du Québec (la « Fédération »), le 17 septembre 2003, pour obtenir gratuitement copie des chapitres I et II de la Loi sur l’instruction publique annotée 2001 et les « […] documents que vous avez publié ou qui sert dans le fonctionnement de votre organisme se rapportant à "l’éducation à domicile". » (sic).
03 19 14 Page : 2 [2] La Fédération avise le demandeur, le 29 septembre 2003, qu’elle est un organisme privé n’étant pas soumis à la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi »). Elle refuse de lui communiquer les documents demandés. [3] Insatisfait de la réponse fournie par la Fédération, le demandeur veut que la Commission d'accès à l'information (la « Commission ») intervienne pour examiner cette mésentente. [4] Une audience a lieu à Montréal le 11 avril 2005. L'AUDIENCE A) LA PREUVE i) De la Fédération M. Clermont Provencher [5] M. Provencher, secrétaire général, fait valoir que la Fédération a été créée par une loi particulière (pièce D-1) le 24 mars 1961 2 . Elle a pour mission de défendre les commissions scolaires. Elle regroupe, sur une base volontaire, les 61 commissions scolaires francophones du Québec. [6] M. Provencher explique que la Fédération est formée de trois niveaux décisionnels : l’assemblée générale, le conseil général et le bureau de direction. • L’assemblée générale compte près de 330 délégués, choisis parmi les commissaires élus des commissions scolaires membres, selon le nombre d’élèves desservis sur leur territoire. L’assemblée générale est convoquée une fois l’an, notamment pour adopter la planification stratégique de la Fédération; • Le bureau de direction est composé du président ou du vice-président de chacune des 61 commissions scolaires. Il se réunit au moins quatre fois l’an pour assurer le suivi des décisions prises à l’assemblée générale et approuver les mémoires devant être soumis aux membres de l’Assemblée nationale du Québec; 1 L.R.Q., c. A-2-1. 2 Loi concernant la Fédération des commissions scolaires du Québec, L.R.Q., c. 140 des Lois de 1960-61 et modifications.
03 19 14 Page : 3 • Le comité exécutif est constitué de neuf membres, lesquels choisissent le président et le vice-président de la Fédération. Il assure la gestion administrative de la Fédération. [7] M. Provencher fait valoir que les cotisations des commissions scolaires membres assurent 75 % du financement nécessaire au fonctionnement de la Fédération. Il spécifie que la cotisation annuelle fixée par l’assemblée générale est de 3,33 $ par élève. Les autres sources de revenus de la Fédération proviennent, dit-il, des cours de formation donnés principalement aux commissaires et gestionnaires scolaires. [8] M. Provencher affirme que les employés de la Fédération sont syndiqués, ne relevant pas de la Loi sur la fonction publique 3 ni de celle sur le vérificateur général du Québec 4 . Il certifie que la Fédération possède ses propres locaux et bureaux dans l’arrondissement Sainte-Foy en la Ville de Québec. [9] M. Provencher expose que la Fédération agit à titre de porte-parole patronal des commissions scolaires lors des négociations touchant les conventions collectives. Elle s’occupe du regroupement des achats, élabore des devis et gère des soumissions pour les commissions scolaires. Il assure que les commissions scolaires demeurent responsables de l’administration et des finances les concernant. [10] M. Provencher distingue la Fédération, créée par une loi particulière, du Conseil scolaire de l’Île de Montréal, lequel relève de la Loi sur l’instruction publique 5 . [11] Interrogé par le demandeur, M. Provencher assure que les cours de formation sont habituellement donnés par la Fédération dans les centres de congrès privés. Il réitère que l’autorité « suprême » de la Fédération est l’assemblée générale. ii) Du demandeur [12] Le demandeur fait valoir que la Fédération est une entité particulière dans le réseau de l’éducation, étant financée presque entièrement par des fonds provenant d’organismes publics, soit les commissions scolaires. Il ajoute que la Fédération doit donc être soumise aux mêmes règles de transparence que les 3 L.R.Q., c. F-3.1.1. 4 L.R.Q., c. V-5.01. 5 L.R.Q., c. I-13.3.
03 19 14 Page : 4 organismes publics, étant financée et agissant comme porte-parole des commissions scolaires. B) LES ARGUMENTS i) De la Fédération [13] Le procureur de la Fédération, M e Alain Guimont, soutient que celle-ci, créée et régie par une loi particulière, n’entre dans aucune des définitions ou catégories d’organismes publics prévus aux articles 3 à 5 et 7 de la Loi : 3. Sont des organismes publics: le gouvernement, le Conseil exécutif, le Conseil du trésor, les ministères, les organismes gouvernementaux, les organismes municipaux, les organismes scolaires et les établissements de santé ou de services sociaux. Sont assimilés à des organismes publics, aux fins de la présente loi: le lieutenant-gouverneur, l'Assemblée nationale, un organisme dont celle-ci nomme les membres et une personne qu'elle désigne pour exercer une fonction en relevant, avec le personnel qu'elle dirige. Les organismes publics ne comprennent pas les tribunaux au sens de la Loi sur les tribunaux judiciaires (chapitre T-16). 4. Les organismes gouvernementaux comprennent les organismes non visés dans les articles 5 à 7, dont le gouvernement ou un ministre nomme la majorité des membres, dont la loi ordonne que le personnel soit nommé ou rémunéré suivant la Loi sur la fonction publique (chapitre F-3.1) ou dont le fonds social fait partie du domaine public. Aux fins de la présente loi, le curateur public est assimilé à un organisme gouvernemental, dans la mesure où il détient des documents autres que ceux visés par l'article 2.2. Est assimilée à un organisme gouvernemental, aux fins de la présente loi, une personne nommée par le gouvernement ou par un ministre, avec le personnel qu'elle dirige, dans le cadre des fonctions qui lui sont attribuées par la loi, le gouvernement ou le ministre. 5. Les organismes municipaux comprennent: 1 o une municipalité, ainsi que tout organisme que la loi déclare mandataire ou agent d'une municipalité et tout organisme dont le conseil d'administration est composé majoritairement de membres du conseil d'une municipalité,
03 19 14 Page : 5 de même que tout organisme relevant autrement de l'autorité municipale; 2 o une communauté urbaine, une régie intermunicipale, une corporation intermunicipale de transport, un conseil intermunicipal de transport, l'Administration régionale Kativik et tout autre organisme dont le conseil d'administration est formé majoritairement d'élus municipaux, à l'exclusion d'un organisme privé. 7. Les établissements de santé ou de services sociaux comprennent les établissements publics visés par la Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives (1991, chapitre 42), les établissements privés visés par cette loi qui fonctionnent en ayant recours à des sommes d'argent provenant du fonds consolidé du revenu, les régies régionales instituées en vertu de cette loi ainsi que la Corporation d'hébergement du Québec visée dans l'article 471 de cette loi. Les établissements de santé ou de services sociaux comprennent également les établissements publics visés par la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris et inuit (L.R.Q., chapitre S-5), les établissements privés visés par cette loi qui fonctionnent en ayant recours à des sommes d'argent provenant du fonds consolidé du revenu et les conseils régionaux de santé et de services sociaux institués en vertu de cette loi. [14] M e Guimont est également d’avis que la Fédération n’est pas un organisme scolaire tel que défini à l’article 6 de la Loi. Elle n’est pas une commission scolaire, ni le Conseil scolaire de l’Île de Montréal, ni une institution d’enseignement faisant l’objet d’une entente internationale ou déclarée d’intérêt public ou reconnue aux fins de subventions en vertu de la Loi sur l’enseignement privé 6 , ni un collège d’enseignement général ou professionnel, ni l’Université du Québec, ni un institut de recherche, ni une école supérieure : 6. Les organismes scolaires comprennent les commissions scolaires, le Conseil scolaire de l'île de Montréal, les institutions dont le régime d'enseignement est l'objet d'une entente internationale au sens de la Loi sur le ministère des Affaires internationales (chapitre M-21.1), les collèges d'enseignement général et professionnel, l'Université du Québec ainsi que ses universités constituantes, instituts de recherche et écoles supérieures. 6 L.R.Q., c. E-9.1.
03 19 14 Page : 6 Ils comprennent également les institutions déclarées d'intérêt public ou reconnues pour fins de subvention en vertu de la Loi sur l'enseignement privé (chapitre E-9) et les établissements d'enseignement supérieur dont plus de la moitié des dépenses de fonctionnement sont payées sur les crédits apparaissant aux prévisions budgétaires déposées à l'Assemblée nationale. [15] M e Guimont fait valoir que la Fédération est financée par les commissions scolaires et non par le gouvernement provincial. ii) Du demandeur [16] Le demandeur plaide que la Fédération est financée et sous le contrôle des commissions scolaires. Elle agit au nom de celles-ci. La Fédération doit donc être transparente des actions entreprises pour ces organismes publics. [17] Le demandeur fait valoir que pour assurer une pleine participation de tous au débat qui influence le milieu de l’éducation, les documents produits et publiés par la Fédération pour le compte des commissions scolaires doivent être accessibles. En conséquence, la Commission doit déclarer la Fédération organisme public au sens de la Loi. DÉCISION [18] D’entrée de jeu, la Commission note que nous ne sommes pas dans le cadre d’une demande pour obtenir l’accès aux renseignements personnels concernant le demandeur. Il ne s’agit pas non plus d’une demande visant l’accès aux documents possédés par une commission scolaire – organisme public au sens de la Loi – mais à ceux détenus par la Fédération. [19] M. Provencher a déclaré que la Fédération regroupe les commissions scolaires, sur une base volontaire, voit à la défense des intérêts de celles-ci, reçoit les cotisations de ses membres, organise des cours de formation, possède ses propres bureaux, nomme ses membres et dirigeants, dirige son personnel sans être soumis à la Loi sur la fonction publique et gère ses avoirs et activités de façon autonome des commissions scolaires ou du gouvernement. [20] D’ailleurs, les principaux articles de la loi instituant la Fédération et de ses règlements généraux viennent corroborer les propos de M. Provencher :
03 19 14 Page : 7 3. La Fédération est par la présente constituée sous le nom de « La Fédération des commissions scolaires du Québec ». La Fédération est une personne morale au sens du Code civil du Québec (Lois de 1996, c. 97). 6. Toute commission scolaire peut faire partie de la Fédération. […] Les commissions scolaires, membres de la Fédération, conservent leur autonomie complète en ce qui concerne leur régie interne et leur administration. […] 8. La Fédération a pour but de promouvoir les intérêts de l’éducation et, à cette fin : 1° de grouper et d’unir les diverses commissions scolaires du Québec; 2° de prendre toute initiative susceptible de défendre et de protéger les intérêts de ses membres et de l’ensemble des commissions scolaires du Québec; 3° d’aider à régler les différents problèmes d’ordre éducatif, culturel, économique et social qui peuvent se poser pour ses membres. (soulignements ajoutés) Règlements généraux 3.1.1 La Fédération est constituée d’une assemblée générale, du conseil général et d’un bureau de direction. 4.2.1 L’assemblée générale est la dépositaire de l’autorité finale et suprême de la Fédération. Elle exerce tous les pouvoirs y compris celui de déléguer au conseil. Elle a le droit d’initiative le plus complet en matière de réglementation sous la réserve, cependant, qu’elle doit exercer son pouvoir de légiférer en la manière prévue par les règlements. Elle reconnaît au conseil un pouvoir d’initiative en matière de réglementation sous la réserve de
03 19 14 Page : 8 refuser, de modifier ou de reporter tout projet de réglementation ou de modification soumis par le conseil. Sous réserve de la loi et des règlements, l’assemblée générale a les pouvoirs ordinairement reconnus par la loi à toute assemblée générale. 4.2.2 L’assemblée générale détermine les politiques générales, les objectifs majeurs et les grandes lignes d’action de la Fédération. 10.4.0 POUVOIRS D’EMPRUNTS 10.5.0 ACQUISITION DE BIENS ET PLACEMENTS 10.6.0 DÉPENSES 14.0.1 La dissolution se fera selon la loi. 14.0.3 L’assemblée générale faisant la dissolution de la Fédération décidera de l’emploi des fonds de la Fédération. [21] De cette preuve, j’en arrive à la même conclusion que M e Guimont : la Fédération n’est pas une commission scolaire, ni le Conseil scolaire de l’Île de Montréal, ni une institution d’enseignement faisant l’objet d’une entente internationale ou déclarée d’intérêt public ou reconnue aux fins de subventions en vertu de la Loi sur l’enseignement privé 7 , ni un collège d’enseignement général ou professionnel, ni l’Université du Québec, ni un institut de recherche, ni une école supérieure au sens de l’article 6 de la Loi 8 . Conséquemment, la Fédération n’est pas un organisme scolaire au sens de la Loi. Elle n’est donc pas obligée de communiquer les documents demandés, n’étant pas des renseignements personnels au demandeur. 7 Collège Jean-Eudes inc. c. Ouimet, [1997] C.A.I. 279, [1999] C.A.I. 528 (C.Q.), [2000] C.A.I. 441 (C.S.) et [2000] C.A.I. 486 (C.A.). 8 Montenay service d’ascenseurs inc. c. Université de Montréal, [1997] C.A.I. 179; Mavridis c. Collège Vanier, [1984-86] 1 C.A.I. 404; Dufour c. Commission scolaire Nouvelle-Beauce, [1984-86] 1 C.A.I. 25.
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