Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 04 06 52 Date : 12 mai 2005 Commissaire : M e Christiane Constant X Demandeur c. HB Gestion d’assurance collective ltée Entreprise DÉCISION L’OBJET DU LITIGE LA DEMANDE D’EXAMEN DE MÉSENTENTE EN MATIÈRE DE RECTIFICATION [1] Le demandeur requiert, le 2 mars 2004, de M me Denise Trudeau, de HB Gestion d’assurance collective ltée, ci-après désignée « l’entreprise », la rectification ou la destruction de plusieurs renseignements et documents répartis en neuf points contenus à son dossier : a) La destruction de tous documents précédant le 1 er mars 1999; b) L’extraction de tous commentaires de nature comportementale; c) L’extraction du numéro de téléphone inscrit au dossier;
04 06 52 Page : 2 d) À la 3 e partie de la réclamation datée du « 1998-05-18 », l’identité du conducteur est « fausse », celui-ci aurait été reconnu coupable devant les tribunaux; e) Pour les autres années « 1997-05-01, 1999-05-01, 2000-05-01, 2001-05-01, 2002-05-01, 2003-05-01, 2004-05-01 », son véhicule automobile de marque Buick possédait un dispositif antivol qui aurait été installé chez « Blouin Auto Électric ». De plus, il souhaite obtenir des explications sur la mention « N »; f) En ce qui concerne un évènement en date du « 12-09-2000 », Purolator aurait été contacté afin « de corriger la situation ». Le demandeur souhaite que l’entreprise en fasse autant; g) Le 16 janvier 2004, l’entreprise lui aurait transmis des documents contenant des renseignements inexacts qui sont tous datés du 30 avril 2002, concernant un devis pour Jeep Cherokee 94, Volvo 850 et un Plymouth Breeze 1996; [sic] h) La destruction d’une lettre portant la mention « Retour à l’expéditeur »; i) En ce qui concerne les notes évolutives, il cherche, d’une part, la rectification de la totalité des faits erronés se trouvant entre les lignes 242 et 1430, et d’autre part, la destruction de tous renseignements le concernant avant le 1 er mars 1999; j) L’interdiction « de divulguer toutes informations pertinentes » contenues dans son dossier. [2] Le 26 mars 2004, M me Trudeau, Directrice Régionale des Opérations, avise le demandeur du refus de l’entreprise de rectifier ou de détruire les renseignements et documents. [3] Le 31 mars, le demandeur informe la Commission d'accès à l'information (la « Commission »), qu’il est en désaccord avec la décision de l’entreprise et requiert l’examen de cette mésentente.
04 06 52 Page : 3 L’AUDIENCE [4] L’audience de la présente cause est entendue, le 25 février 2005 à Montréal en présence du demandeur. M e Pierre Bazinet, du cabinet d’avocats Robinson, Sheppard, Shapiro, est l’avocat de l’entreprise. MODIFICATIONS DE LA DEMANDE EN RECTIFICATION [5] Le demandeur indique, à l’audience, qu’il renonce à invoquer la rectification des points b, e et i lesquels correspondent aux n os 2, 5 et 9 de sa demande. LA PREUVE [6] M e Pierre Bazinet fait témoigner, sous serment, M me Denise Trudeau. Celle-ci déclare qu’elle est « Directrice Régionale des Opérations » depuis 10 ans. Elle procède, entre autres, à la formation et au perfectionnement des employés. [7] M me Trudeau précise que des employés, connus sous l’appellation d’ « agents », interviennent dans le dossier d’un assuré. Lors d’un entretien téléphonique avec celui-ci, l’agent vérifie son identité en lui posant des questions préliminaires confidentielles relatives à son adresse, son n o de téléphone, etc. Ces renseignements se trouvent déjà au dossier. Cet agent y inscrit ses initiales et fait un résumé de la conversation qu’il a eue avec cet assuré. a) La destruction de tous documents précédant le 1 er mars 1999. [8] M me Trudeau déclare que l’entreprise refuse de détruire tous les documents existant avant le 1 er mars 1999, car leur délai de conservation est d’une durée de sept ans, et ce, suivant les directives du Bureau d’assurances du Canada (le « BAC ») prévues à cette fin. c) L’extraction du numéro de téléphone inscrit au dossier. [9] M me Trudeau indique qu’au mois de mai 1997, le demandeur a fourni à l’entreprise un numéro de téléphone pour le rejoindre. Elle ajoute toutefois que le demandeur interdit à l’entreprise de le faire, préférant plutôt communiquer avec cette dernière « en utilisant un téléphone public ». Elle refuse de biffer ce n o de téléphone.
04 06 52 Page : 4 d) À la 3 e partie de la réclamation datée du « 1998-05-18 », l’identité du conducteur est « fausse », celui-ci aurait été reconnu coupable devant les tribunaux. [10] M me Trudeau précise que l’identité de l’individu auquel réfère le demandeur dans son dossier est inexistante. Ce dernier indique plutôt la mention « sans tiers » qui est utilisée par l’entreprise dans les cas où il n’y a pas d’accident impliquant des véhicules automobiles. M me Trudeau souligne que le demandeur lui avait soumis une réclamation concernant un véhicule assuré par l’entreprise à l’égard duquel il y aurait eu une tentative de vol. Considérant le refus du demandeur à permettre à l’entreprise de faire examiner ledit véhicule, elle a alors décidé de ne pas l’indemniser. f) En ce qui concerne un évènement en date du « 12-09-2000 », Purolator aurait été contacté afin de « corriger la situation ». [11] Selon M me Trudeau, l’agent inscrit au dossier tous renseignements émanant du demandeur ou de quelqu’un d’autre. Elle précise que ces renseignements sont nécessaires afin de permettre à un agent de voir au système informatique les interventions ayant préalablement été effectuées ainsi que les commentaires qui y sont indiqués. De plus, l’expression « il y a un témoin » a été fournie par un tiers. L’entreprise refuse de l’extraire du dossier. g) Le 16 janvier 2004, l’entreprise lui aurait transmis des documents contenant des renseignements inexacts qui sont tous datés du 30 avril 2002, concernant un devis pour Jeep Cherokee 94, Volvo 850 et un Plymouth Breeze 1996. [sic] [12] M me Trudeau précise que, lorsqu’un client communique avec l’entreprise, l’agent vérifie d’abord son identité et certaines informations confidentielles contenues dans le système informatique. Dans le cas du demandeur, celui-ci a fait part, le 30 avril 2002, de son intention d’obtenir « un devis d’assurance automobile pour fins de comparaison » en rapport avec les véhicules automobiles ci-dessus mentionnés. C’est le motif pour lequel l’entreprise lui a fait parvenir une lettre. h) La destruction d’une lettre portant la mention « Retour à l’expéditeur ». [13] M me Trudeau réfère à la lettre ci-dessus mentionnée selon laquelle, le 30 avril 2002, le demandeur a pris connaissance de son contenu. Il y a apporté des corrections, et il l’a retournée à l’entreprise avec la mention de Postes Canada « Demenage/Renvoi ». Le requérant, pour sa part, a marqué «Retour» sur l’enveloppe.
04 06 52 Page : 5 [14] M me Trudeau indique que l’entreprise refuse de retirer ou de détruire des renseignements contenus dans le dossier du demandeur, car elle risque de s’en servir pour pouvoir se défendre devant l’Autorité des marchés financiers dans un litige opposant les parties. j) L’interdiction « de divulguer toutes informations pertinentes » contenues dans son dossier. [15] M me Trudeau signale que le dossier du demandeur est confidentiel. Personne ne peut y avoir accès, à l’exception des agents travaillant pour l’entreprise ou si le demandeur l’autorise, par écrit, à le transmettre à un tiers. DU DEMANDEUR [16] Le demandeur déclare que le n o de téléphone contenu au dossier que détient l’entreprise à son égard est inexact, car il a « toujours dit » qu’il n’en a pas. D’où le motif pour lequel il souhaite faire retirer ce renseignement dudit dossier. Par ailleurs, il nie avoir contacté l’entreprise relativement aux différents véhicules automobiles identifiés au point g de la demande. [17] De plus, le demandeur affirme que, durant son absence, il a communiqué avec un tiers et a demandé à celui-ci de prendre connaissance de la lettre datée du 30 avril 2002, que lui a fait parvenir l’entreprise. Il affirme également avoir donné des instructions à ce tiers de modifier et de masquer certains renseignements qui s’y trouvent, pour ensuite retourner ladite lettre à l’entreprise avec la mention de Postes Canada « Demenage/Renvoi ». LES ARGUMENTS [18] M e Bazinet rappelle le témoignage de M me Trudeau ayant indiqué, entre autres, les motifs pour lesquels l’entreprise refuse d’extraire les renseignements contenus au dossier du demandeur. Il rappelle de plus le témoignage de M me Trudeau selon lequel le demandeur a donné instructions à un tiers pour prendre connaissance d’une lettre datée du 30 avril 2002, que lui a transmise l’entreprise. Il en a fait apporter des modifications et l’a retournée à celle-ci. [19] M e Bazinet plaide que le demandeur n’a pas démontré que les renseignements faisant l’objet de la rectification sont inexacts ou incomplets. Cette demande est donc frivole et devrait être rejetée.
04 06 52 Page : 6 [20] Le demandeur, pour sa part, réplique que sa demande n’est pas frivole. Les renseignements non pertinents ne devraient pas se trouver dans son dossier. LA DÉCISION Les dispositions législatives pertinentes Articles 1, 2,11, 27, 30 et 36 de la Loi sur le privé 1. La présente loi a pour objet d'établir, pour l'exercice des droits conférés par les articles 35 à 40 du Code civil du Québec en matière de protection des renseignements personnels, des règles particulières à l'égard des renseignements personnels sur autrui qu'une personne recueille, détient, utilise ou communique à des tiers à l'occasion de l'exploitation d'une entreprise au sens de l'article 1525 du Code civil du Québec. Elle s'applique à ces renseignements quelle que soit la nature de leur support et quelle que soit la forme sous laquelle ils sont accessibles: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. La présente loi ne s'applique pas à la collecte, la détention, l'utilisation ou la communication de matériel journalistique, historique ou généalogique à une fin d'information légitime du public. 2. Est un renseignement personnel, tout renseignement qui concerne une personne physique et permet de l'identifier. 11. Toute personne qui exploite une entreprise doit veiller à ce que les dossiers qu'elle détient sur autrui soient à jour et exacts au moment où elle les utilise pour prendre une décision relative à la personne concernée. 27. Toute personne qui exploite une entreprise et détient un dossier sur autrui doit, à la demande de la personne concernée, lui en confirmer l'existence et lui donner communication des renseignements personnels la concernant.
04 06 52 Page : 7 30. Une demande d'accès ou de rectification ne peut être considérée que si elle est faite par écrit par une personne justifiant de son identité à titre de personne concernée, à titre de représentant, d'héritier, de successeur de cette dernière, d'administrateur de la succession, de bénéficiaire d'une assurance-vie ou comme titulaire de l'autorité parentale. 36. Celui qui détient un renseignement faisant l'objet d'une demande d'accès ou de rectification doit, s'il n'acquiesce pas à cette demande, le conserver le temps requis pour permettre à la personne concernée d'épuiser les recours prévus par la loi. Article 40 du Code civil du Québec 40. Toute personne peut faire corriger, dans un dossier qui la concerne, des renseignements inexacts, incomplets ou équivoques; elle peut aussi faire supprimer un renseignement périmé ou non justifié par l'objet du dossier, ou formuler par écrit des commentaires et les verser au dossier. La rectification est notifiée, sans délai, à toute personne qui a reçu les renseignements dans les six mois précédents et, le cas échéant, à la personne de qui elle les tient. Il en est de même de la demande de rectification, si elle est contestée. [21] Il est admis par les parties que l’entreprise détient, dans un dossier, des renseignements personnels concernant le demandeur au sens de l’article 2 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé 1 (la « Loi sur le privé »). [22] De plus, le législateur exige d’une entreprise, à l’article 11 de la Loi sur le privé, de veiller à ce que les dossiers qu’elle détient sur autrui soient à jour et exacts au moment où elle s’en sert pour prendre une décision relative à la personne concernée, et ce, tel qu’il est mentionné dans l’affaire Fugère c. Equifax Canada 2 . 1 L.R.Q., c. P-39.1 2 [1996] C.A.I. 148, 151.
04 06 52 Page : 8 [23] Il est démontré que l’entreprise détient un dossier concernant le demandeur en vertu de l’article 27 de la Loi sur le privé et que celui-ci lui a fait parvenir une demande, selon les termes de l’article 30 de la Loi sur le privé, afin d’y faire rectifier des renseignements personnels qui, à son avis, sont inexacts, incomplets ou équivoques. Cet article doit être lu en corrélation avec l’article 40 du Code civil du Québec 3 . [24] De plus, l’article 36 de la Loi sur le privé impose une obligation à une personne détenant un renseignement qui fait notamment l’objet d’une rectification de le conserver le temps requis afin de permettre à la personne concernée d’épuiser les recours prévus par la loi. [25] Dans le cas présent, la preuve permet à la soussignée de conclure que les renseignements personnels contenus au dossier que détient l’entreprise à l’égard du demandeur ne sont ni inexacts ni incomplets ou équivoques. [26] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : REJETTE la demande d’examen de mésentente en matière de rectification du demandeur contre l’entreprise; FERME le présent dossier portant le n o 04 06 52. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire M e Pierre Bazinet ROBINSON SHEPPARD SHAPIRO Procureurs de l’entreprise 3 L.Q. 1991, c. 64.
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