Commission d'accès à l'information du Québec Dossier : 04 10 85 Date : 17 mars 2005 Commissaire : M e Hélène Grenier X Demandeur c. CLICHE, LAFLAMME, LOUBIER Entreprise DÉCISION OBJET DEMANDE D’EXAMEN DE MÉSENTENTE EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] Le 11 juin 2004, M. X soumet une demande d’examen de mésentente résultant du refus d’une société d’avocats de lui donner accès à tous les documents et renseignements visés dans sa lettre du 17 mai 2004. Il écrit : « Le refus et l’obstruction à me donner accès à mes documents briment mes droits à avoir une défense pleine et entière, en vertu de l’article 35 et l’article 50 de la Charte des droits et libertés. Je me représente dans ma cause et je dois avoir accès à tous les documents et renseignements qui sont à mon dossier pour me donner la chance de me défendre ». [2] La demande d’accès du 17 mai 2004, dont copie est jointe à la demande d’examen de mésentente, révèle que M. X s’est adressé à une société d’avocats pour obtenir tous les « documents, pièces, notes, etc. » le concernant et
04 10 85 Page : 2 concernant sa propre entreprise et qu’il a ajouté « S’il existe des informations verbales, je désire en être informé aussi ». [3] Le refus d’acquiescer à cette demande d’accès, dont M. X a également fourni copie à la Commission, est daté du 18 mai 2004 et il est signé par M e Charles Laflamme. M e Laflamme explique alors à M. X que la société d’avocats Cliche Laflamme Loubier est tenue au secret professionnel et qu’elle représente la partie adverse « dans le dossier », ce qui rend impossible la communication des renseignements demandés. M e Laflamme précise enfin que c’est à titre de fiduciaire de ses clients que la société d’avocats détient des documents. [4] Le 27 janvier 2005, la Commission transmet un avis de convocation aux parties; la tenue d’une audience est alors fixée au 1 er avril 2005. PREUVE [5] Le 31 janvier 2005, M e Charles Laflamme s’adresse à la Commission pour expliquer que la société d’avocats précitée représente un client « qui a un litige relativement à une mise en demeure de borner contre M. X » et que ce « litige a été porté jusqu’à audition devant M. Jean Bisson, arpenteur géomètre ». M e Laflamme écrit : • « Tous les éléments pouvant concerner M. X que nous détenons le sont à titre de procureur de M. Y qui est bien sûr le voisin de M. X; • Nous n’avons jamais représenté M. X et nous n’avons jamais été les procureurs de M. X; • Il nous est impossible de lui remettre copie des documents que nous avons au dossier de M. Y car nous représentons la partie adverse; • Nous n’avons pas le droit de briser la confidentialité client-avocat; • Nous vous rappelons que notre client est Y ». [6] M e Charles Laflamme transmet au demandeur une copie conforme de sa lettre du 31 janvier 2005. [7] Par décision préliminaire du 7 février 2005, la Commission ordonne au demandeur d’expliquer en quoi l’intervention de celle-ci sera utile. [8] Le demandeur produit ses observations auprès de la Commission le 4 mars 2005, observations que la Commission examine et qui, essentiellement, se résument à ce qui suit :
04 10 85 Page : 3 • Le demandeur convient que la société d’avocats Cliche Laflamme Loubier représente M. Y. • Le demandeur soutient que cette société d’avocats l’a représenté à plus d’une reprise et il produit une lettre (D-1, en liasse), datée du 3 septembre 1992, qui démontrerait que M e Paul Laflamme, de cette société d’avocats, l’a alors représenté. • Pour le reste, les observations ainsi que les documents produits par le demandeur (D-1, en liasse) confirment que cette société d’avocats a représenté ou représente des personnes, notamment M. Y, qui se sont opposées ou qui s’opposent au demandeur. [9] À la demande de la Commission, M e Charles Laflamme a produit une déclaration faite sous serment le 15 mars 2005 (D-2); la Commission comprend de cette déclaration que : • La société d’avocats Cliche Laflamme Loubier, par l’entremise de M e Paul Laflamme, a représenté le demandeur dans le dossier auquel réfère la lettre du 3 septembre 1992 (D-1, en liasse), dossier réglé hors cour en octobre 1992. • Les documents détenus à cet égard par cette société d’avocats ont été détruits en 1998 et cette société d’avocats ne détient plus aucun document relativement à ce dossier. • À la connaissance de M e Charles Laflamme, la société d’avocats Cliche Laflamme Loubier n’a jamais représenté le demandeur ou son entreprise depuis. DÉCISION [10] Les demandes d’accès et d’examen de mésentente adressées par le demandeur sont régies par la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé (L.R.Q., c. P-39.1); les articles 1 et 2 de cette loi en définissent l’objet et l’application : 1. La présente loi a pour objet d'établir, pour l'exercice des droits conférés par les articles 35 à 40 du Code civil du Québec en matière de protection des renseignements personnels, des règles particulières à l'égard des renseignements personnels sur autrui qu'une personne recueille, détient, utilise ou communique à des tiers à l'occasion de
04 10 85 Page : 4 l'exploitation d'une entreprise au sens de l'article 1525 du Code civil du Québec. Elle s'applique à ces renseignements quelle que soit la nature de leur support et quelle que soit la forme sous laquelle ils sont accessibles: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. La présente loi ne s'applique pas à la collecte, la détention, l'utilisation ou la communication de matériel journalistique, historique ou généalogique à une fin d'information légitime du public. 2. Est un renseignement personnel, tout renseignement qui concerne une personne physique et permet de l'identifier. [11] La demande d’accès du 17 mai 2004 vise, d’une part, l’obtention d’informations verbales. La loi précitée ne s’appliquant pas aux informations verbales, la Commission n’est pas compétente pour entendre la demande d’examen de mésentente du 11 juin 2004 résultant du refus de les communiquer. [12] La demande d’accès du 17 mai 2004 vise, d’autre part, l’obtention de tous les renseignements qui concernent le demandeur ainsi que l’entreprise qu’il exploite personnellement. La preuve présentée à cet égard démontre que les renseignements qui sont encore détenus par la société d’avocats Cliche Laflamme Loubier ont été obtenus par des personnes tenues par la loi au secret professionnel et mandatées par M. Y qui est la partie adverse dans un litige qui l’oppose au demandeur; aucune preuve ne démontre par ailleurs que M. Y ait autorisé la communication de ces renseignements au demandeur. [13] ATTENDU le Code de déontologie des avocats (R.R.Q., 1981, c. B-1, r.1) qui notamment régit le secret professionnel ainsi que les autres obligations des avocats envers leurs clients; [14] ATTENDU l’article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne (L.R.Q., c. C-12) qui attribue spécifiquement à chacun le droit fondamental au respect du secret professionnel et qui oblige le tribunal à assurer, d’office, le respect du secret professionnel; 9. Chacun a droit au respect du secret professionnel.
04 10 85 Page : 5 Toute personne tenue par la loi au respect du secret professionnel et tout prêtre ou autre ministre du culte ne peuvent, même en justice, divulguer les renseignements confidentiels qui leur ont été révélés en raison de leur état ou profession, à moins qu’ils n’y soient autorisés par celui qui leur a fait ces confidences ou par une disposition expresse de la loi. Le tribunal doit, d’office, assurer le respect du secret professionnel. [15] ATTENDU que la Commission exerce sa fonction de tribunal lorsqu’elle entend une demande d’examen de mésentente; [16] ATTENDU l’article 40 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé qui, compte tenu de ce qui précède, justifie le refus de la société d’avocats: 40. Toute personne qui exploite une entreprise et détient un dossier sur autrui doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement personnel la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement personnel sur un tiers ou l'existence d'un tel renseignement et que cette divulgation serait susceptible de nuire sérieusement à ce tiers, à moins que ce dernier ne consente à sa communication ou qu'il ne s'agisse d'un cas d'urgence mettant en danger la vie, la santé ou la sécurité de la personne concernée. [17] ATTENDU l’article 52 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé : 52. La Commission peut refuser ou cesser d'examiner une affaire si elle a des motifs raisonnables de croire que la demande est frivole ou faite de mauvaise foi ou que son intervention n'est manifestement pas utile.
04 10 85 Page : 6 [18] ATTENDU que la preuve convainc la Commission que son intervention n’est manifestement pas utile dans cette affaire; [19] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : CESSE d’examiner la présente affaire; ANNULE en conséquence l’audience du 1 er avril 2005 dans le dossier CAI 04 10 85. HÉLÈNE GRENIER Commissaire M e Charles Laflamme Avocat de l’entreprise
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