Dossier : 02 15 08 Date : 20040219 Commissaire : M e Christiane Constant M. X Demandeur c. CHSLD-CLSC Nord de l’Île (Hôpital Notre-Dame-de-la-Merci) Organisme public DÉCISION L'OBJET DU LITIGE LA DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] Le 10 septembre 2002, le demandeur accuse réception d’une lettre datée du 14 août précédent que l’organisme lui avait fait parvenir et il réitère sa demande pour obtenir une copie complète du dossier médical de sa mère décédée, feue M me X. [2] Le 17 septembre 2002, l’organisme le réfère à la réponse du 14 août précédent qu’il lui avait transmise et lui refuse l’accès pour les motifs déjà invoqués.
02 15 08 Page : 2 [3] Insatisfait, le demandeur formule, le 1 er octobre suivant, auprès de la Commission d'accès à l'information (la « Commission ») une demande pour que soit révisée la décision de l’organisme. L’AUDIENCE [4] Après avoir été remise une fois à la demande de l’organisme, la présente cause est entendue en audience à Montréal, le 20 janvier 2004, en présence du demandeur et d’un témoin de l’organisme qui est représenté par M e Lise Boily-Monfette du cabinet d’avocats DEVEAU, LAVOIE, BOURGEOIS, LALANDE & ASSOCIÉS. LA PREUVE A) DE L’ORGANISME [5] M e Boily-Monfette fait témoigner, sous serment, M me Isabelle Gagné qui déclare posséder une formation à titre d’archiviste médicale. Elle est chef du Service archives-accueil, pour l’organisme, et voit à l’application de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi sur l’accès »). Elle reconnaît avoir pris connaissance de la demande d’accès du demandeur qui souhaite obtenir une copie intégrale du dossier médical de feue M me X. [6] Elle précise que, le 16 janvier 2002, le demandeur souhaitait tout d’abord connaître la cause du décès de sa mère. Ayant préalablement établi, au moyen de son certificat de naissance, une preuve de filiation, l’organisme lui a communiqué le Bulletin de décès de feue M me X. [7] Le 23 juillet suivant, il formule à nouveau cette même demande à l’organisme qui lui refuse l’accès, le lendemain, à d’autres documents selon les termes de l’article 23 de la Loi sur les services de santé et sur les services sociaux 2 (la « L.s.s.s.s. »); ce motif de refus invoqué est confirmé dans une lettre datée du 14 août 2002 (pièce O-1). L’organisme lui a cependant communiqué un accès partiel audit dossier. M me Gagné signale que le demandeur, ayant accusé réception de ladite lettre, réitère la même demande (pièce O-2). [8] M me Gagné souligne qu’elle a donné suite à cette nouvelle demande le 17 septembre 2002, tout en rappelant au demandeur qu’elle lui avait déjà fourni des explications eu égard aux conditions requises pour avoir accès au dossier 1 L.R.Q., c. A-2.1. 2 L.R.Q., c. S-4.2.
02 15 08 Page : 3 d’une personne décédée, au sens de l’article 23 L.s.s.s.s. Elle l’informe de plus que puisque l’objectif recherché est toujours l’accès au dossier médical de feue M me X, l’organisme n’a d’autre choix que de maintenir sa décision de lui refuser l’accès intégral aux documents contenus audit dossier (pièce O-3). [9] Par ailleurs, préalablement à la communication d’un extrait de renseignements se trouvant au dossier médical de M me X, M me Gagné indique qu’elle a contacté le D r Marc-André Lemire afin d’être en mesure d’identifier les documents à lui transmettre, le cas échéant. [10] Ainsi, selon M me Gagné, outre le Bulletin de décès déjà transmis au demandeur, l’organisme a communiqué à celui-ci d’autres « extraits du dossier confirmant l’existence de maladie génétique ou à caractère familial. Par ailleurs, les renseignements relatifs à la cause du décès vous avaient été transmis en date du 14 août 2002. » (pièce O-4) B) DÉPOSITION DE D R MARC-ANDRÉ LEMIRE [11] D r Lemire déclare sous serment qu’il a obtenu un doctorat en médecine en 1971 et qu’il pratique cette profession depuis 1972; il est président de l’Ordre des médecins, dentistes et pharmaciens chez l’organisme. [12] Il explique qu’il a suivi M me X durant sa maladie et qu’il « connaissait intimement le dossier » de celle-ci qui a été hospitalisée chez l’organisme en 1999, et ce, jusqu’à son décès en 2001. [13] Il ajoute qu’il a examiné le dossier médical de feue M me X; à son avis, tous renseignements à caractère médical relatifs aux maladies génétiques ou à caractère héréditaire ont été communiqués au demandeur. Preuve ex parte et par huis clos [14] À la demande de l’organisme, une preuve ex parte et par huis clos est entendue selon les termes de l’article 20 des Règles de preuve et de procédure 3 de la Commission, à l’exclusion du demandeur et des membres du public qui assistent à l’audience. Reprise de l’audience CLARIFICATION RECHERCHÉE PAR LE DEMANDEUR 3 L.R.Q., [A-2.1, r.2].
02 15 08 Page : 4 [15] S’adressant au D r Lemire, celui-ci précise que tous les renseignements élagués sur plusieurs pages « n’ont pas de lien avec la cause du décès ou confirmant l’existence de maladie à caractère génétique ou à caractère familial » de feue M me X. C) DÉPOSITION DU DEMANDEUR [16] Le demandeur reconnaît, sous serment, que l’organisme lui a déjà transmis une série de documents provenant du dossier médical de sa mère, mais il maintient son désir de vouloir en obtenir une copie intégrale. LES ARGUMENTS [17] M e Boily-Monfette plaide que, le demandeur, ayant établi à la satisfaction de l’organisme, sa preuve de filiation avec feue M me X, ce dernier lui a communiqué copie du Bulletin de décès. [18] De plus, l’avocate plaide qu’en application du troisième alinéa de l’article 23 L.s.s.s.s., et après avoir communiqué avec le D r Lemire, la preuve a démontré que M me Gagné a pu transmettre au demandeur les documents détenant des renseignements ayant permis d’établir le diagnostic de maladie génétique ou à caractère familial se trouvant au dossier médical de feue M me X. L’avocate ajoute que cette demande est faite selon les dispositions législatives indiquées à l’article 28 L.s.s.s.s., lesquelles régissent les dossiers d’un usager, sans égard à la Loi sur l’accès. [19] À titre d’argument, l’avocate réfère à la décision Grignet c. Hôpital Saint-Charles-Borromée 4 qui conclut que : Le troisième alinéa de l’article 23 prévoit que les renseignements à communiquer doivent permettre de « vérifier l’existence » d’une telle maladie. […] L’Hôpital doit donc communiquer au demandeur tous les renseignements contenus au dossier de sa sœur qui ont permis d’établir le diagnostic de la maladie génétique ou à caractère familial. Par contre, le demandeur ne peut avoir accès aux autres renseignements contenus dans ce dossier. En effet, il n’a établi aucun droit d’héritier qu’il entendait exercer et qui rendait nécessaire la communication de ces renseignements. [20] De ce qui précède et considérant la preuve obtenue à l’audience de la présente cause, l’avocate argue que les conditions établies par le législateur au troisième alinéa de l’article 23 L.s.s.s.s. ont été rencontrées. 4 [1996] C.A.I. 233, résumé 234.
02 15 08 Page : 5 LA DÉCISION [21] Il importe de préciser que l’article 19 L.s.s.s.s. prévoit, entre autres, que le dossier médical d’un usager est confidentiel, incluant celui faisant l’objet du présent litige. Ce principe de la confidentialité d’un dossier médical est également commenté par les auteurs Doray et Charette 5 . 19. Le dossier d'un usager est confidentiel et nul ne peut y avoir accès, si ce n'est avec le consentement de l'usager ou de la personne pouvant donner un consentement en son nom, sur l'ordre d'un tribunal ou d'un coroner dans l'exercice de ses fonctions, dans le cas où la présente loi prévoit que la communication de renseignements contenus dans le dossier peut être requise d'un établissement ou dans le cas où un renseignement est communiqué pour l'application de la Loi sur la santé publique (chapitre S-2.2). [22] Dans la présente cause, la preuve non contredite a démontré, entre autres, que le demandeur désire obtenir une copie intégrale du dossier de sa mère décédée, feue M me X. L’organisme a acquiescé en partie à cette demande, en lui fournissant tout d’abord copie du Bulletin de décès de celle-ci ainsi que tous documents pouvant avoir un lien avec une maladie génétique ou à caractère familial, et ce, conformément au troisième alinéa de l’article 23 L.s.s.s.s. Cet article stipule que : 23. Les héritiers, les légataires particuliers et les représentants légaux d'un usager décédé ont le droit de recevoir communication de renseignements contenus dans son dossier dans la mesure où cette communication est nécessaire à l'exercice de leurs droits à ce titre. Il en est de même de la personne ayant droit au paiement d'une prestation en vertu d'une police d'assurance sur la vie de l'usager ou d'un régime de retraite de l'usager. Le conjoint, les ascendants ou les descendants directs d'un usager décédé ont le droit de recevoir communication des renseignements relatifs à la cause de son décès, à moins que l'usager décédé n'ait consigné par écrit à son dossier son refus d'accorder ce droit d'accès. Malgré le deuxième alinéa, les personnes liées par le sang à un usager décédé ont le droit de recevoir communication de renseignements contenus dans son dossier dans la mesure où cette communication est nécessaire pour vérifier l'existence d'une maladie génétique ou d'une maladie à caractère familial. 5 Raymond DORAY et François CHARETTE, Accès à l'information. Loi annotée. Volume 1, Éditions Yvon Blais, 2002.
02 15 08 Page : 6 [23] Toutefois, le législateur a cru nécessaire d’indiquer que les dispositions qui se trouvent à cet article, doivent être interprétées de façon restrictive, et ce, tel qu'il est indiqué aux décisions Rodrigue c. Centre local des services communautaires des Etchemins et al. 6 , Hôpital St-Charles-Borromée c. Rumak et al. 7 et St-Cyr c. Centre hospitalier Malartic 8 . [24] Dans le cas sous étude, la preuve a clairement démontré que l’organisme a communiqué au demandeur les renseignements qu’il devrait recevoir eu égard notamment à une maladie génétique ou à caractère familial, en respect de la L.s.s.s.s. [25] Considérant la preuve à l’audience, la soussignée est d’avis que l’organisme a répondu de façon satisfaisante au demandeur. [26] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : PREND ACTE que l’organisme a remis au demandeur copie du Bulletin de décès de sa mère, feue M me X, ainsi que les documents relatifs au troisième alinéa de l’article 23 L.s.s.s.s; REJETTE, quant au reste, la demande de révision du demandeur contre le CHSLD-CLSC Nord-de-l’Île; FERME le présent dossier n o 02 15 08. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire Montréal, le 19 février 2004 M e Lise Boily-Monfette DEVEAU, LAVOIE, BOURGEOIS, LALANDE & ASSOCIÉS Procureurs du CHSLD-CLSC Nord-de-l’Île 6 [1999] C.A.I. 381. 7 [1997] C.A.I. 405 (C.Q.). 8 [2000] C.A.I. 22.
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