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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 06 10 91 Date : Le 11 décembre 2007 Commissaire : M e Jean Chartier X Demandeur c. VILLE DE SAINTE-MARTHE-SUR-LE-LAC Organisme DÉCISION OBJET DEMANDE DE RÉVISION en vertu de larticle 135 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 . [1] Le 16 mai 2005, le demandeur adresse à la mairesse de lorganisme une demande daccès rédigée comme suit : 1 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée « Loi sur laccès ».
06 10 91 Page : 2 « Lors de lassemblée régulière du conseil le 11 mai 2005, lors de la période des questions de la part des citoyens, je vous ai demandé des détails concernant lentente hors cours avec le Groupe Projeco experts-conseils inc. Votre réponse verbale fut : « Nous allons en discuter ». Pour officialiser cette demande et vous rappeler que je tiens à ces informations, jai cru bon de la mettre par écrit. » [2] En guise de réponse à la demande daccès, lorganisme a demandé à ses procureurs de présenter une demande afin dêtre autorisé à ne pas tenir compte de la demande daccès au motif que cette demande était répétitive et abusive. [3] Le 4 juillet 2005, le demandeur a transmis à la Commission daccès à linformation (la Commission) une demande de révision de la décision de lorganisme. [4] Le 26 avril 2006, lorganisme sest désisté de sa requête en vue de faire déclarer la demande abusive et ce désistement est déposé au dossier de la Commission. AUDIENCE [5] Une audience a eu lieu à Montréal le 27 septembre 2007 en présence des parties. A) PREUVE i) Du demandeur [6] À laudience, le demandeur se présente comme un citoyen intéressé à la gestion des finances publiques. Il fait partie du comité des citoyens marthelaquois. Il explique quen 1996, lorganisme a conclu un contrat avec le Groupe Projeco Experts Conseils inc. « Projeco » pour la fourniture de services professionnels pour le réseau dégouts sanitaires de lorganisme. [7] Lorganisme a consenti à payer à Projeco un pourcentage du total des travaux effectués. Projeco a par la suite réclamé des honoraires supplémentaires dont le paiement a été contesté par lorganisme.
06 10 91 Page : 3 [8] En 2001, Projeco a poursuivi la municipalité pour obtenir le paiement de ces honoraires supplémentaires. Une entente hors cours est intervenue entre les parties dans le but de régler le litige. Cest le document réclamé par le demandeur. [9] Lorganisme a refusé de communiquer ce document parce que cette entente contient une clause de confidentialité qui oblige chacune des parties à maintenir le caractère confidentiel de lentente. [10] Le demandeur veut connaître le véritable montant qui a été payé par la municipalité. ii) De lorganisme [11] Maître Sonia Paulus témoigne en sa qualité de mairesse de lorganisme. Elle indique quelle a été élue lors des élections de novembre 2005. Elle confirme la version du demandeur relativement aux travaux confiés à Projeco. [12] Un règlement hors cours est intervenu entre les parties. Ce règlement a été entériné par une assemblée spéciale du conseil de lorganisme le 10 décembre 2003 et a été constaté par écrit le 19 décembre 2003. [13] Une copie de cette entente a été déposée devant la Commission sous le sceau de la confidentialité. [14] Ce dépôt est possible en vertu de larticle 20 des Règles de preuve et de procédure de la Commission daccès à linformation 2 qui prévoit : 20. La Commission peut prendre connaissance, en l'absence du requérant et à huis clos, d'un document que l'organisme public ou le tiers prétend devoir être soustrait à l'accès en vertu d'une restriction prévue à la section II de la Loi. [15] Le paragraphe 6 de cette entente prévoit que « lentente est strictement confidentielle et les parties sengagent à ne pas en divulguer quelque terme que ce soit sans laccord écrit de lautre partie ». [16] Cest la raison pour laquelle lorganisme na pas remis de copie au demandeur. 2 L.R.Q., c. A-2.1, r. 2.
06 10 91 Page : 4 [17] Toutefois, le témoin ajoute quelle na fait aucune démarche dans le but de vérifier si Projeco consentait à la divulgation de lentente. [18] Madame Paulus termine son témoignage en indiquant quelle na pas dobjection formelle à la divulgation de cette entente mais elle considère que lorganisme est lié par la clause de confidentialité. Elle sen remet à la décision de la Commission. A) LA CLAUSE DE CONFIDENTIALITÉ [19] Une entente est intervenue entre lorganisme et Projeco, le 19 décembre 2003. Cette entente contenait notamment le paragraphe suivant : « 6. La présente entente est strictement confidentielle et les parties sengagent à ne pas en divulguer quelque terme que ce soit sans laccord écrit de lautre partie, lequel ne peut être refusé sans raison valable. La Ville pourra transmettre copie de la présente entente sans autorisation préalable à toute autorité gouvernementale responsable des affaires municipales si requis de le faire et dans ce dernier cas, la Ville sengage à en informer Projeco. » [20] Le 2 octobre 2007, le soussigné a transmis à M. René Bourgeois, président de Projeco, une lettre dont il convient de citer un extrait : « Suite à la demande daccès faite par le demandeur, la Ville sest objectée à la communication de cette entente en invoquant le paragraphe 6 qui contient « la clause de confidentialité ». Considérant que votre entreprise était également partie à cette entente, jai jugé nécessaire de vous donner lopportunité de me faire valoir votre position quant à la divulgation de cette entente. Je vous signale que le refus de votre entreprise devra, le cas échéant, sappuyer sur une ou plusieurs dispositions de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (L.R.Q., c. A-2.1). En conséquence, auriez-vous lobligeance de bien vouloir me faire parvenir vos commentaires ou ceux de votre procureur à ce sujet, au plus tard le 23 octobre prochain. » [21] Projeco na jamais donné suite à cette demande.
06 10 91 Page : 5 DÉCISION [22] La preuve a démontré que les parties sengageaient à tenir confidentielle lentente intervenue entre les parties. [23] Avisé de la demande daccès du demandeur, lorganisme na pas dobjection à la divulgation de cette entente. Projeco na fait valoir aucun argument devant la Commission pour sobjecter à la communication de celle-ci. [24] La preuve a démontré que lorganisme détient le document qui a fait lobjet de la demande daccès. Les articles 1 et 9 de la Loi sur laccès prévoient : 1. La présente loi s'applique aux documents détenus par un organisme public dans l'exercice de ses fonctions, que leur conservation soit assurée par l'organisme public ou par un tiers. Elle s'applique quelle que soit la forme de ces documents: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. [25] Lorganisme a répondu à la demande daccès par une requête pour demander à la Commission de déclarer la demande abusive mais lorganisme sest désisté de cette requête avant laudience. [26] Hormis la clause de confidentialité prévue au paragraphe 6 de lentente, aucun motif na été soulevé pour soutenir que laccès au document visé par la demande devrait être refusé au demandeur. [27] À de nombreuses reprises, la Commission sest demandée si une « clause de confidentialité » est opposable aux droits daccès dun demandeur.
06 10 91 Page : 6 [28] Dans laffaire S.O.S. Déchets 3 , la Commission écrit : « Par ailleurs, la Commission a examiné trois ententes soumises confidentiellement à laudience par M. Shoiry avec leurs annexes respectives. Lune delles, intitulée « Bail », contient une clause de pénalité. Le non-respect de cette entente peut entraîner, entre autres, des conséquences économiques en faveur de lorganisme. Elle contient également une clause par laquelle les parties conviennent de garder confidentiels les termes de cette entente. La Commission tient à préciser quelle nest pas liée par lintroduction dune telle clause; celle-ci ne peut déroger aux principes daccès aux documents établis par le législateur aux articles 9 et 168 de la Loi sur laccès, et ce, tel quil est mentionné notamment dans la décision Voyer c. Ville de Montréal. » [29] Dans une autre affaire, le commissaire Comeau écrit 4 : « Quant à la clause de confidentialité, inscrite au paragraphe 10 de lentente, elle ne peut, à elle seule, déterminer la confidentialité de renseignements et ainsi faire échec à une disposition impérative de la Loi sur laccès qui consacre le caractère public de ces mêmes renseignements. La Loi sur laccès est une loi dordre public, qui possède un caractère prépondérant sur toutes les autres lois, et on ne peut évidemment pas se soustraire à son application par simple entente. […] ». [30] Enfin, la juge Gouin de la Cour du Québec écarte ainsi le caractère obligatoire de ces clauses de confidentialité 5 : « Largument fondé sur une promesse de confidentialité faite aux personnes qui sont à lorigine des renseignements contenus dans un document ne peut suffire pour justifier un refus daccès, sinon les parties pourraient toujours contractuellement se soustraire à lapplication de la Loi sur laccès. » 3 S.O.S. Déchets c. Régie intermunicipale Argenteuil Deux-Montagnes, [2004] C.A.I. 493. 4 o Dionne c. Centre hospitalier régional de Rimouski, C.A.I. Rimouski, n 96 16 35, 24 juillet 1997, c. Comeau; voir au même effet : Saladzius c. Hydro-Québec, [2004] C.A.I. 398; Confédération des syndicats nationaux c. Centre de réadaptation Gabrielle Major, [2004] C.A.I. 446. 5 Tremblay c. Société générale de financement du Québec, [2004] C.A.I. 604.
06 10 91 Page : 7 [31] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [32] ACCUEILLE la demande de révision du demandeur; [33] ORDONNE à lorganisme de communiquer au demandeur dans les trente jours de la date de la réception de la présente décision, une copie de lentente intervenue à Laval le 19 décembre 2003 entre le Groupe Projeco Experts Conseils inc. et la Ville de Sainte-Marthe-sur-le-Lac; [34] ORDONNE quune copie de cette décision soit également transmise à Projeco Experts Conseils inc. JEAN CHARTIER Commissaire M e Marie Sol Charland Avocate de lorganisme
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